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La cuisine anglaise, 1894

A Foods of England online text. For more see Cookbooks

TITLE: La cuisine anglaise (English Food)
AUTHOR: Alfred Suzanne
PUBLISHER: l’Art Culinaire, Paris
DATE: 1894
THIS VERSION: This transcript is based on the online version at archive.org, digitized from an edition in the collections at Harvard University. This is an Optical Character Recognition scan, it has been partly edited, but still contains very significant errors.

A French guide to classical English cooking, written at the height of France’s Belle Époque.


LA
CUISINE ANGLAISE
ET LA
PATISSERIE
A LA CUISINE

ALFRED SUZANNE



TRAITÉ DE L’ALIMENTATION EN ANGLETERRE AU POINT DE TDE PRATIQUE, THÉORIQUE, ANECDOTIQUE ET DESCRIPTIF
ILLUSTRÉ DE NOMBREUX DESSINS PAR GÉRARD TANTET & FROIENT

Cooking in England, when well done is superior to that of any other country in the world.
Eustache Ude

EN VENTE A PARIS

A L’ART CULINAIRE, 42, rue de l’Abbaye,

DUPONT, 1, RUE COQUILLÈRE

CHEZ L’AUTEUR, 2, place Parmentier, Nkuilly (Seine)

LONDRES

Librairie française, Wardour street IIay Market 1894

PREFACE

Le vent est aujourd’hui à rauglomanie. On a adopte les sports anglais : le croquet, le foot-ball, la crosse, le rally-paper et le lawn-tennis. Comme les Anglais on s’habille et Tulster, le pantalon collant, la jaquette ecourtee et Thabit rouge sont portes par ceux qui,. dans le monde elegant, donnent le ton et la mode.

Le garden-party, lelnncheonet le five o’clock tea sont depuis longtemps naturalises chez nous, et la cuisine anglaise, ellemême, semble vouloir s’introniser en France; ce que Ton peut constater en parcourant les menus des bonnes tables et les cartes des grands restaurants.

Pour ma part, je n’y trouve rien à redire, car, n’en deplaise à certains chauvins gastronomes, il y a dans la cuisine anglaise nombre d’excellents mets qui ne sont pas à dedaigner.

Fiers de notre superiorite culinaire, incontestable du reste, nous avons de tout temps trop neglige les mets d’origine etrangère et, domines par d’absurdes prejuges, nous nous sommes

1

2 PRÉFACE

toujours refuses à admeltre qu’une autre nation que la nôtre pût produire d^ la bonne cuisine. C*est un tort, car, même en ne consultant que la liste des specialites culinaires de nos voisins d’outre-Maiiche, nous sommes forces de reconnaître le merite de certaines d’entre elles.

Est-il, par exempL^, un potage plus onctueux que la soupe à la tortue? Connatt-on une friture plus delicate et plus friande que celle du white-bail, un rôti comparable au cochon de lait farci de sauge et d’oignon, et rien de plus delectable qu’un pudding de beefsteaks ou d’alouettes?

Le jambon d’York jouit d’une reputation universelle et, quant au lard fume du Wiltshire, il n’en est pas au monde qui egale son arôme et sa saveur.

Faut-il citer encore le curry de poulet à l’indienne, le faisan grille à la diable, le lapin braise au”^ câpres et tant d’autres mets savoureux dont la seule nomenclature fait perler une larme au coin des lèvres?

La cuisine a fait un pas immense en Angleterre depuis une trentaine d’annees, et aujourd’hui nous avons à Londres des cuisiniers anglais qui peuvent rivaliser de talent avec nos meilleurs chefs français.

Je ne viens pas de parti pris vanter les beautes ni les bontes de la cuisine an^^laise, ni même etablir une comparaison avec la nôtre, comparaison qui serait tout au desavantage de l’Angleterre, je liens seulement à constater un fait : c’est qu’il y a dans la cuisine anglaise de fort bonnes choses que je voudrais voir acclimater en France.

Les Français, qui pratiquent depuis plusieurs annees de l’autre côte du detroii, savent faire leur profit de ces bonms choses en y apportant du raffinement, en y appliquant ce cachet de bon goût qui leur est propre; en un mot, en les francisant. 11 ne s’agit pas ici de cuisine artistique ou ornementale, je ne veux parler que de cuisine de fond, de cette bonne, franche et saine cuisine que – je le dis tout bas – on sacrifie un peu trop au colifichet et à rornem»;nt. La cause du progrès que je signale est facile à comprendre : la facilite des communications et le

PRÉFACE 3

bon marche relatif des voyages font que les rapports entre Français et Anglais sont devenus plus frequents, et les parents qui destinent leurs fils à la profession de cuisinier n’hesitent pas aujourd’hui à les envoyer en apprentissage à Paris, tandis qu’autrefois ces mêmes parents reculaient devant les depenses du voyage et les difficultes pour communiquer et correspondre avec leurs enfants. Le quart des apprentis formes par les pâtissiers et les restaurants de Paris sont Anglais. Ces jeunes gens rapportent dans leur pays les notions culinaires qui leur ont ete inculquees, et s’ils sont intelligents, travailleurs et perseverants, ils arrivent en peu de temps à se mettre au rang des bons cuisiniers. D’un autre côte, les ecoles de cuisine abondent aujourd’hui en Angleterre et surtout à Londres, où elles sont patronnees par l’aristocratie. Ces ecoles, qui sont dirigees par des cordons bleus experimentes, sont frequentees par des jeunes femmes de la bourgeoisie et même du grand monde qui viennent assister à une conference culinaire. La conferencière, assistee de deux ou trois aides, explique la theorie de la confection des differents mets que les aides preparent seance tenante sous las yeux des spectateurs. Ces Schools of Cookery^ qui existent dejà depuis longtemps, contribuent, puissamment à repandre et à populariser la cuisine française en Angleterre. En France, la femme n’a pas besoin d’apprendre le cuisine. C’est inne chez elle. A peine installee dans son menage, elle se met à la tâche tout naturellement, en mettant en pratique les leçons qu’elle a reçues de sa mère et qu’elle inculquera à sa fille. Il n’en est pas de même en Angleterre, où le type de la menagère n’existe pas. La femme de l’employe et du petitbourgeois croirait deroger si elle s’occupait de cuisine. Quant à l’ouvrier, en rentrant chez lui après son travail, il trouve invariablement sur sa table un morceau de viande froide qui a ete cuit le dimanche et qui doit le nourrir toute la semaine. Il ne peut esperer autre chose de sa menagère, dont les aptitudes et les connaissances gastronomiques se bornent à savoir cuire des pommes de terre et à rôtir ou bouillir un morceau de viande. Les mystères de la poêle et de la casserole lui sont inconnus.

4 PREFACE

Mais si l’Anglais n’est pas initie aux raffinements de la cuisine française, s’il en ignore les principes economiques, on doit admettre que sa manière de se nourrir est saine ‘et nutritive.

Lors de l’inauguration de l’École de cuisine de la rue Bonaparte, Jules Simon, l’honorable senateur qui presidait la seance, nous a vante la force et la vigueur des Anglais, et il attribuait cet etat de choses à la nature de leur alimentation.

J’ai moi-même habite l’Angleterre pendant quarante ans et j’ai ete plus que personne à même d’observer et d’etudier la manière de vivre de nos voisins et de constater que, si l’Anglais ne sait pas manger, il sait du moins très bien se nourrir.

Mon but en ecrivant ce livre est de faciliïer la tâche à ceux de mes confrères qui seront appeles à aller grossir la legion dejà si nombreuse des cuisiniers français dissemines dans le RoyaumeUni de la Grande-Bretagne et dans ses colonies.

Le gentilhomme anglais a toujours un penchant prononce qu’il dissimula mal pour sa cuisine nationale; aussi se fait-il une règle d’y revenir à certains intervalles, non seulement par goût, mais aussi par raison; car son estomac robuste, habilue di»s l’enfance à une nourriture substantielle, s’accommoderait mal d’un regime essentiellement français, avec nos potages legers et nos mets delicats.

Il arrive constammentqu’un cuisinier nouvellement debarque en Angleterre est oblige d’abandonner saposition après un court sejour, souvent à cause des difficultes qu’il eprouve à s’immiscer au langage et aux habitudes du pays, mais plus souvent encore parce qu’ilignore les plus simples notions de la cuisinebrilannique.

Cet ouvrage qui traite exclusivement de la cuisine et de la pàlisserie anglaise, sera donc d’une utilite incontestable entre les mains des cuisiniers allant pratiquer en Angleterre, de memo qu’il fournira à ceux de mes confrères qui resident en France des recettes et des renseignements qui leur sont inconnus; ce qui leur permettra de varier leurs menus en y introduisant de temps à autre des mets qui, quoique etant d’origine anglaise, n’en ont pas moins des qualites très appreciables.

CHAPITRE PREMIER POTAGES ANGLAIS – ENGLISH SOUPS

SOMMAI RK

Bisque de crabes i Bisque ofrrabs).

Bisque de crevettes (Bisque o/’prairna).

Bisque d’ecrevisses à la Malmesbury (Bisqu** o/’ rr/it/ /hft).

Bouillon ecossais (Scotch brofhj,

Iloche-pot à l’anglaise (Hodge podyp),

‘Volage d’anguille (Eei soup),

– d’abatis (Gihlet soup).

~ – à l’irlandaise (Giblef soup à f’ir/anf/aiscj.

– d’esturgeon a Tamericaine (Stucyeon soup). Fausse tortue (Afockturtie).

– aux huîtres (Oi/sfcr soup).

– au jarret de veau fKnuckîe of i^al soup). àiajouc de bœuf (O.r chcck soup).

– Mulligatawny clair (MuNigaffurif/ c/cor).

– Mulligatawny lie (MuUigatattny thick). au lapin (liabbit soup).

au pigeon (Pigeon soup) .

– de perches à la Wastrcfish (Waslrefish soup).

– aux poireaux (Cocky-leeky).

do pieds de veau ù. la Windsor (Ca/fs /eei .soup). k la queue do bœuf (0,c tail souu).

– à la tête de mouton (Sheep’s hend soup).

– A la tête de daim (Deer’s head .wup).

– à la tortue (Turtle soup).

– do poulet au riz (Chicken and ci ce soup). Porridge à l’ecossaise (Scotch porridge).

Puree de grouse (drouse .soup).

– de pois secs (Peas soup).

– de lièvre à la Saint-George (I/are soup ù la St.^(icorye). Soupe aux chain- chowders (Cham-chowder soup).

— aux moules (M usuel soup).

– aux terrapines (Terrnpine soup).

– de venaison (Venison .soup). Tisane de bœuf (Beef tea).

Watersouchet de poisson (Water sourhet offish).

LA

CUISINE ANGLAISE

CHAPITRE PREMIER POTAGES. – SOUPS

En France, la soupe occupe la place la plus importante dans Talimentation. Outre ses qualites nutritives et hygieniques, elle possède un avantage apprecie, surtout des desherites de la fortune, c’est d*être economique en même temps que substantielle. A quelque classe qu’il appartienne, un Français aime la soupe et n’est satisfait de son dîner que s’il est precede d’un potage quelconque. Mais il n’en est pas de même en Angleterre, où l’usage de la soupe est très peu repandu.

Notre pot-au-feu a une reputation universelle, et il est une verite reconnue c’est que nulle part on n’en mange d’aussi succulent qu’en France; c’est que nulle part aussi on n’apporte à sa preparation autant de soin, autant d’art, autant d’amour.

La question de savoir s’il etait logique de servir du potage avant dîner a ete le sujet de nombreuses controverses vers le commencement du siècle. Deux gourmands celèbres, Grimod de la Reynièreet le marquis de Cussy, se mirent de la partie : le premier se fit le champion du potage et le second s’en proclama l’adversaire, firimod pretendait qu’un dîner sans

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LA CUISINE ANGLAISE

^d.

potage serait comme un opera sans ouverture ou comme un edifice sans portique. Selon lui, un potage leger rejouit l’estomac et le prepare à recevoir et à digerer; c’etait aussi l’avis de Brillat-Savarirt.

Le marquis de Cussy, de son côte, comparait un dîner à un livre dont le potage est la preface; or, ajoutait-il, un bon ouvrage n’a pas besoin de preface. Loin d’envisager le potage

comme un aperitif, il pretendait que c’etait folie de se surcharger Pestomac d’un liquide substantiel et nourrissant, au commencement d’un bon dîner. Les arguments de ces deux grands mangeurs m’amènent à tirer la conclusion que, dans un grand repas, on ne doit manger que du potage leger et n’en prendre que moderement : assez pour stimuler les organes digestifs, mais pas assez pour en entraver les rouages.

Les Anglais semblent se ranger de l’avis du marquis de Cussy, car ils ne professent pour le potage qu’un amour très modere; aussi la liste de leurs soupes nationales est-elle très restreinte.

En general, la classe pauvre en Angleterre eprouve pour la soupe une repugnance marquee. On s’explique cette repugnance lorsqu’on a vu l’espèce de breuvage sans nom prepare par les menagères ignorantes, dont les connaissances en cuisine sont des plus restreintes et des plus elementaires. Les gens riches ont chaque jour de la soupe sur leur table; le bourgeois en mange quelquefois, l’ouvrier rarement et le pauvre jamais.

LA CUISINE ANGLAISE

Potage tortue. – Turtle soup.

Le pelage anglais le plus estime, celui qui jouit à boa droit iVune reputation universelle, est, sans contredit, le potage tortue. Il n’est guère connu en France que de nom; mais, en Angleterre et en Amerique, il s’en fait une enorme consommation. Il ne se donne pas un banquet, un repas diplomatique ou un grand dîner ceremonieux sans que ce potage figure en tête du menu.

Deux fois par mois, Liverpool et Londres voient debarquer dans leurs docks des cargaisons de tortues qui sont rùparlies entre quelques grandes maisons speciales qui en font un commerce très lucratif. Elles sont importees de T Amerique du Sud, de l’Afrique et de l’Australie; mais les meilleures et les mieux cotees sur le marche viennent de Tlnde occidentale. – On importe aussi de ces contrees de la viande de tortue dessechee au soleil, mais la soupe faite avec celle substance est moins nutritive que celle obtenue par l’emploi de la viande fraîche. Ses seuls avantages sont d’être moins dispendieuse et d’une manipulation plus facile. La tortue est amphibie et ovipare. On lui donne la chasse à la maree basse, lorsqu’elle vient s’echouer sur le sable pour y dormir ou pour y deposer ses œufs. Les chasseurs ne sont armes que de longs bâtons et de cordages. Les bâtons leur servent de levier pour retourner l’animal qui, lorsqu’il est sur le dos, se trouve dans l’impossibilite de fuir. On lui attache alors les nageoires avec la corde et on le traîne sur le sable jusqu’aux charrettes qui l’emportent

iO LA CriSINE xXNGLAISE

à bord des navires aflfecles à son transport. Sur certains vaisseaux, pour eviter Tencombrement que les tortues causeraient si elles etaient laissees en liberte, on les fixe au plancher au moyen d’enormes clous. C’est ainsi crucifiees qu’elles font la traversee jusqu’en Europe. Ce traitement cruel qu’on leur fait subir explique pourquoi la plupart des tortues ont un trou perce au milieu de chaque nageoire.

La manière la plus simple à employer pour tuer une tortue est de l’attacher solidement avec une corde par les nageoires de derrière et de la suspendre le dos contre le mur. Quand ce moyen n’est pas praticable, on place Tanimal sur une table le ventre en l’air; et, dans Tun ou l’autre cas, on lui enfonce dans la mâchoire un crochet à l’extremite duquel on suspend un fort poids qui force la tortue à tendre le cou. C’est alors qu’on lui tranche la tète. On la laisse saigner pendant quelques heures, puis on commence l’operation du depècement :

Separez la carapace inferieure de la superieure en glissant la lame d’un couteau bien acere entre les deux coquilles. Enlevez d’abord le plastron en laissant les nageoires adherer à la partie bombee, puis retirez les entrailles en ayant grand soin de ne pas percer la poche qui contient le fiel. Jetez les intestins et conservez la viande de l’interieur qui doit contribuer à faire le bouillon de tortue. Cette viande a beaucoup d’analogie avec la chair du veau. Detachez ensuite les nageoires, desquelles vous retirez la graisse verte y adherant; celle graisse {green fat)^ qui se trouve aussi autour de la carapace, est très estimee des connaisseurs, plutôt à raison de sa rarete qu’à cause de son goût, qui est quelque peu insipide. On la fait cuire à part.

La carapace ainsi que le plastron ayant ete scies en quatre morceaux sont laves à grande eau ainsi que les nageoires et la lete, puis le tout est jete dans une grande marmite d’eau bouillante qu’on laisse mijoter pendant quelques minutes. On retire alors les morceaux de tortue dont on enlève facilement l’ecaille. Il faut avoir soin surtout de ne pas laisser blanchir les nageoires trop longtemps, car la peau et les ecailles adhereraient si fortement à la viande qu’il deviendrait presque impossible de les

LA CUISINE ANGLAISE 14

enlever. Rafraîchir alors la tortue pour la mettre ensuite cuire à grande eau legèrement salee dans deux marmites : Tune contenant les nageoires et Tautre la carapace.

Lorsque la viande est cuite, ce qui demande à peu près trois heures pour les nageoires et quatre heures pour les autres parties, egouttez-la sur plusieurs grands plats. La viande, qui se separe alors facilement des os, est detaillee en morceaux de 4 à S centimètres carres qu’on met provisoirement dans Feau froide.

Marquez une marmite avec un jarret de veau, douze livres de bœuf, deux vieilles poules, deux pieds de veau et la viande trouvee dans Tintetieur de Tanimal. Mouillez ces viandes avec la cuisson de la torlue, salez legèrement, garnissez de legumes et d’un fort bouquet de persil et laissez mijoler en l’ecumant jusqu’à parfaite cuisson des viandes. Passez alors à la serviette le bouillon que vous remettez dans une casserole avec les morceaux de tortue; faites bouillir pendant vingt minutes et la soupe est prête. Au moment de servir, ajoutez une cuilleree d’essence obtenue par Tinfusion d’une egale quantite de basilic, de marjolaine, de thym et de sarriette. Puis versez dans le potage en dernier lieu un verre de madère reduit, ainsi que quelques morceaux de graisse verte. Ce potage se sert clair ou lie.

Le poids des tortues importees varie de 25 à 150 kilos, mais on doitchoisirde preference celles du poids de 180 à 130 livres; elles reunissent les meilleures conditions; la chair est plus delicate que celle des grosses et plus nutritive que celle des petites. Le prix des tortues varie selon l’epoque de Tannee et les fluctuations du marche; mais au maximum elle est cotee au prix de un shilling et six pence la livre (1 fr. 80). Le punch que l’on sert avec la tortue se fait ainsi :

Preparez un demi-lilrc de sirop leger aromatise avec du zeste de citron et d’orange; ajoutez une demi-bouteille de rhum, un verre de kirchwasser et le jus de quatre citrons et de quatre oranges. Lorsque le tout est bien mêle, versez dans ce sirop un verre de lait; remuez et laissez reposer pendant quatre heures. Passez alors à travers du papier à filtrer. Le milh’ punch se sert très froid, mais non frappe.

12 LA GUISLNE ANGLAISE

Il existe dans la Cite un etablissement The ship and inrtle tavern^ dont la specialite est de preparer et de debiter la soupe tortue. La reputation de cette maison date de loin et la propriete s’en est transmise de père en lils depuis sa fondation, il y a près d’un siècle, par Georges Painter.

J’ai visite les caves de cet etablissement unique en son genre : là, dans d’immenses reservoirs, une cinquantaine de ces enormes crustaces prenaient leur ebats nautiques, en attendant Theure du sacrifice!… A cùle la chambre des executions, puis la cuisine, où dix ou douze hommes sont constamment occupes à confectionner cette soupe nationale, que Ton expedie journellement p^^^^ en ville, en province et memo à Tetranger ^!^*- au prix exorbitant de une guinee le litre pour le potage lie (26 fr.) et vingt-cinq shillings (31 fr. 25) pour le potage clair. Une assiette de potage tortue servie dans ce restaurant est taxee trois shillings, y compris un verre de punch (milk punch) qu’il est d’usage de boire ensuite.

A propos de tortue, il me souvient d’une aventure arrivees un de mes jeunes confrères recemment debarque 3e France, et ne possedant que d’imparfaites notions de la cuisine anglaise. L’amiral B… l’avait fait venir de Paris, et peu de tempsaprèsson entree en fonction il lui envoya une grosse tortue pour en faire de la soupe. Notre cuisinier, qui ne connaissait les tortues que pour en avoir vu dans la vitrine de Chevet, mais qui n’avait jamais eu maille àpartir avec cet amphibie, reponditàl’amiral, qui l’interrogeait, qu’il connaissait la manière d’operer; puis il se mit à l’œuvre. Le resultat fut loin de satisfaire l’amiral – bien au contraire. – Il ne pouvait s’imaginer comment il se faisait que la chair gelatineuse de l’animal s’etait transformee en !îne substance sèche et sans saveur, qui nageait en morceaux dans le potage et qui ressemblait, à s’y tromper, à la viande de veau.

Il en eut l’explication quelques jours après, lorsque, se promenant dans son jardin fruitier, il aperçut adossee à un cerisier

LA CUISINE ANGLAISE 13

la carapace de sa tortue, que le chef, dans son ignorance, avait neglige d’employer. Il Tavait donnee au jardinier pour en faire un epouvantail à moineaux.

Bouillon ecossais. -• Scotch broth.

Le scotch broth, plus communement appele mutton broih est le pot-au-feu ecossais, – c’est le plus populaire des potages, tout comme le potage tortue est le plus aristocratique, – le mouton d*Écosse et du pays de Galles est preferable pour faire cette soupe au mouton anglais; sa viande a plus de saveur et de delicatesse. Le bouillon de mouton n’est certes pas aussi nutritif que le bouillon de bœuf, mais il n’en possède pas moins des qualites très nourrissantes.

Recette : Mettez dans une marmite une poitrine et un collet de mouton coupes en morceaux, comme s’il s’agissait de faire un navarin. Mouillez la viande avec quatre litres d’eau et un peu de sel. Lorsque le liquide a atteint le point d’ebuUition, Tccumer, y ajouter des carottes, navets, oignons et celeris coupes en gros des, puis un bouquet de persil et deux poignees d’orge perle. Laisser mijoter pendant deux heures et demie, finir avec un peu de persil hache et la soupe est prête.

Tel est le mutton Itroth^ comme le prepare la menagère anglaise; mai3, si l’on veut apporter à sa j.reparation un peu plus de raffinement, on se sert de la viande du carre, que l’on divise en côtelettes ou que Ton desosse et coupe en morceaux egaux. On garnit la marmite de legumes comme ci-dessus, mais on fait cuire à part, dans du bouillon, l’orge ainsi que des carottes et des navets coupes comme pour un potage printanier ou unebrunoise. Le bouillon de la marmite est ensuite degraisse, passe à la serviette et ajoute aux legumes, à la viande et à l’orge perle. Au dernier moment, on jette dans le potage un peu de persil hache et blanchi.

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LA CUISINE ANGLAISE

Hoche pot – Odge podge ou hotsh potch.

Le mot barbare hotsh potch signifie en ecossais confusion et variete. En effet, celte soupe, dont les Écossais font si grand cas, est une espèce d’olla podrida, moins les garbanços, qui sont

remplaces par des pois frais. Mettre dans une marmite un carre de mouton desosse et coupe en morceaux de la grosseur d’un œuf de pigeon, ainsi qu’un morceau de lard fume, egalement divise en gros des. Emplir la marmite d’eau froide legèrement salee, la garnir de legumes de toutes espèces, tels que carottes, navets, laitues, choux, celeri, haricots verts et chouxfleurs grossièrement eminces. Laisser mijoter pendant une heure et ajouter alors un litre de pois verts. Laisser bouillir une heure de plus et Ton obtient une puree indescriptible que les Écossais proclament la meilleure soupe du monde.

On raconte que le prince de Galles, chassant un jour dans les montagnes, entra dans la cabane d’un highiander dont la menagère preparait le repas. L’odeur qui s’echappait de la marmite fumante mil en eveil l’appetit du prince, dejà aiguise par une marche longue et fatigante, et il demanda à goûter la soupe du montagnard, laquelle il trouva si bonne qu’il en ecrivit lui-même la recette sous la dictee de la bonne femme. Le prince

LA CUISINE ANGLAISE 13

donna celte recette à Francatelli, son chef de cuisine, avec l’ordre de servir du hotsh potch sur sa table pendant toute la duree des chasses.

Porridge ecossais. – scotch porridge.

Le porridge, qu’on ne peut comparer à rien de mieux qu’au fameux brouet noir des Spartiates, n’est autre chose qu’une espèce de bouillie faite avec de la farine d’avoine, et constitue la principale nourriture des paysans ecossais. C’est à ce regime sain et nourrissant, autant qu’aux exercices pedestres, qu’on attribue la force physique et la prestance musculaire qui caracterisent les montagnards hiberniens.

Le porridge, outre ses qualites nutritives, est un mets economique; aussi est-il egalement populaire dans la classe ouvrière en Angleterre, quoique parmi les travailleurs il en soit qui, imbus de prejuges, s’abstiennent d’en faire leur ordinaire sous le fallacieux pretexte qu’on en nourrit les pensionnaires des « workhoiises », des prisons et j^des maisons de correction.

Recelte : Faire bouillir un litre d’eau avec 13 grammes de sel, et, lorsque le liquide est en ebuUition, y laisser tomber en pluie à peu près 300 grammes de farine d’avoine. Remuer constamment avec une cuiller de bois jusqu’à ce que l’on obtienne une bouillie compacte qu’on laisse mijoter pendant vingt minutes en la remuant de temps en temps. Le porridge est alors prêt à servir. Chaque convive en prend dans une assiette creuse, puis l’additionne de lait frais ou de crème, et l’assaisonne à sa guise.

16 LA CUISINE ANGLAISE

Soupe au lapin. – Rabbit soup.

J’aime à voir au lapin celle chair blanche et molle.

BOILEAU.

Celle chair blanche, qu’aimait à voir le grand critique, est l’apanage des lapins anglais. Ils sont de plus tellement abondants, dans le Royaume-Uni, qu’on les considère non comme gibier, mais comme vermine, et qu’il est permis de leur faire la guerre toute Tannee sans pour cela se mettre en contravenlion avec les lois sur la chiisse.

Grâce à leur prix minime, on peut, dans un restaurant populaire, se faire servir une gibelotte sans crainte de voir substituer •à cet animal rongeur un quadrupède de la race feline.

Recette : Decouper un lapin comme s’il s’agissait de faire un civet; mettre les morceaux dans une casserole, les couvrir avec du consomme leger et clair, garnir de legumes et d’un bouquet d’aromates el, lorsque le lapin est cuit, retirer les morceaux, les rafraîchir, les egoulter, les parer et les mettre dans un bain-marie avec leur cuisson assaisonnee de bon goût, et prealablement passee à la serviette.

D’autre part, faire blanchir une poignee de riz, le bien laver à plusieurs eaux elle faire cuire dans du consomme clair, l’ajouter ensuite à la soupe de lapin. Chauffer et servir.

Potage aux abatis. – Giblet soup.

Les abatis qu’on emploie pour cette soupe se composent du foie, des ailerons, des pattes, du gesier, de la tête et du cou, soit d’une dinde, soit d’une oie.

LA CUISLNE ANGLAISE 17

Divisez les abatis en morceaux à peu près egaux, et après les avoir flambes, epluches et bien laves, faites-les cuire dans du blond de veau; garnissez de legumes et d’un bouquet garni compose de thym, laurier, basilic et marjolaine.

Retirez du liquide les morceaux au fur et à mesure qu^ils sont cuits; ainsi le foie reclame moins de temps à cuire que les ailerons, tandis que le gesier et les pattes demandent une cuisson plus prolongee que ces derniers. Les pattes doivent être prealablement echaudees pour en enlever la peau qui les recouvre.

Les abatis etant cuits sont rafraîchis, egouLtes et pares, puis deposes dans un bain-marie. On degraisse alors le bouillon, on Tassaisonne et lui incorpore une liaison d’arrow-root. Finalement on ajoute une pointe de cayenne, une pincee de persil hache et blanchi, puis un verre de madère.

On amène le liquide au point d’ebullition et on le verse bouillant sur les abatis.

Potage d’abatis à l’irlandaise. – Giblet soup. Irish style.

Proceder comme dans la recette precedente pour la cuisson des abatis. Mais lorsque ceux-ci sont cuits, rafraîchis et egoutles, les placer dans un bain-marie au garde-manger jusqu’à l’heure du dîner.

On clarifie alors le consomme au moyen de viande de veau hachee et on le laisse depouiller en l’ecumant pendant une demi-heure. On le passe alors à la serviette et on le remet dans une casserole avec des legumes tels que carottes, navets et celeri coupes en forme de brunoise. Lorsque les legumes sont cuits, on ajoute les abatis au potage ainsi qu’une poignee d’orge qu’on a fait cuire prealablement.

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18 LA CUISINE ANGLAISE

Potage de poulet au riz. – Ghicken an rice soup.

Decouper deux jeunes poulets comme s’il s’agissait de faire une fricassee. Les mettre dans une casserole avec quelques champignons, carottes, oignons, celeri, bouquet garni, clous de girofle et un peu de macis. Lorsque le poulet est cuit, regoutter et en parer les morceaux que Ton depose dans un bainmarie.

Passer le bouillon du poulet à la serviette, le degraisser et lui adjoindre une ou deux poignees de riz prealablement lave et blanchi. Lorsque le riz est cuit, on ajoute au consomme les morceaux de poulet.

Potage fausse tortue. – Mockurtle soup.

Les Anglais ont si bien compris que ce potage n’est qu’une pâle imitation de leur fameuse soupe nationale, qu’il» l’ont appele Mockturlle (tortue pour rire).

Certains mangeurs pretendent que l’on peut obtenir, avec une tête de veau habilement preparee, un potage imitant la soupe tortue au point de s’y meprendre. Ces mangeurs-là, plus economes que connaisseurs» ne convaincront jamais de ce fait un cuisinier serieux, pas plus qu’un vrai gastronome.

Le mockturtle se sert clair ou lie. Dans l’un etTautre cas, on desosse une tête de veau bien blanche. Après l’avoir laissee degorger pendant au moins deux heures, on la met au feu à grande eau jusqu’à l’ebullition. On la retire alors pour la plonger dans l’eau froide et la bien laver. Ensuite on la fait cuire dans un bouillon blanc avec un peu de sel, poivre en grains, clous de girofle, un bouquet de persil, quelques oignons, carottes et celeri. Lorsque la viande est tendre au toucher, on l’egoutte pour la mettre ensuite entre deux plats, après avoir enleve prealablement

LA CUISINE ANGLAISE 19

les oreilles, dont on ne se sert pas pour le potage. Quand la tête de veau est entièrement refroidie, on la coupe soit au couteau, soit à Temporte-pièce, en morceaux ronds ou carres, que Ton met en’reserve pour ajouter plus tard au potage.

Preparez une marmite que vous beurrez et au fond de laquelle vous etendez quelques tranches de jambon, un jarret de veau et une vieille poule à moitie rôtie. Ajoutez un litre de bouillon, faites partir à grand feu et laissez bouillir vivement, en ayant soin de retourner la viande de temps en temps avec une fourchette.

Lorsque le bouillon est reduit à demi-glace , ralentissez le feu du fourneau et laissez mijoter la viande dans son jus pendant un quart d’heure en tenant la marmite hermetiquement fermee. Lorsque la viande est d’une belle couleur doree, on emplit la marmite avec la cuisson de la tète de veau, on amène le liquide à rebuUition, on ecume, on garnit de legumes et on laisse bouillir doucement pendant deux heures.

Passer alors le bouillon à la serviette et le clarifier s’il y a lieu. Si le potage doit être servi lie, la clarification n’a pas raison d’être. Operer la liaison dans ce cas simplement avec un peu de roux pu d’arrow-root.

Il ne reste plus pour terminer le potage qu’à y ajouter la .tête de veau, une pointe de cayenne et une legère infusion d’aromates composee de basilic, thym, laurier, persil, ciboule et marjolaine. Avant de servir, on verse dans la soupière un verre de madère et deux douzaines de petites quenelles de volaille.

On envoie à part, sur une assiette, des quartiers de citrons.

Puree de grouse. – Grouse soup.

Causant cuisine dernièrement avec un Anglais de mes amis, je lui vantais les qualites gastronomiques de la caille et de Tortolan. Cedant à un sentiment d’orgueil national, je me mis à

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LA CUISINE ANGLAISE

fredonner le refrain connu de Pierre Dupont : ( Ils n’en ont pas en Angleterre. » « C’est vrai, me repondit mou interlocuteur ensedrapantdans son flegmebritannique, c’est vrai, nous n’avons ni la caille, ni l’ortolan, mais nous avons la gronde, » Je n’y avais pas songe.

La grouse est, en effet, un gibier incomparable qui lient à la fois de la gelinotte et du coq de bruyère. Inconnue en France, elle abonde en Ecosse et en Irlande. Sa chair, d’une couleur foncee, possède une saveur particulière que lui communiquent la bruyère aromatisee et les genêts dont elle fait sa principale nourriture.

L’ouverture de la chasse à la grouse, si impatiemment desiree par les sportsmen et les gourmands, a lieu le 12 août de chaque annee.

Cette chasse fort attrayante est aussi très penible, car ce gibier se plaît principalement sur le sommet des montagnes souvent inaccessibles.

Recette : Faire rôtir quatre grouses, puis detacher des os toute la viande, que l’on pile dans un mortier avec quatre cuillerees de riz bien cuit. Ajouter graduellement à la viande pilee un demi-litre de consomme et passer le tout à l’etamine à l’aide de deux cuillers de bois, puis mettre la puree dans un bain-marie.

D’autre part, faire un fumet de gibier avec les carcasses de grouses que l’on mouille avec un grand verre de madère et autant de bouillon. Garnir de legumes et d’un bouquet

LA CUISINE ANGLAISE 21

d’herbes compose de thym, laurier, basih’c, marjolaine et persil. Faire partir à grand feu, laisser bouillir pendant un quart d’heure et passer à travers une fine passoire. Ajouter ce fumet au potage, que Ton assaisonne de bon goût, avec addition d’une pointe de poivre de Cayenne. Faire chauffer en evitant de laisser bouillir et envoyer à part des petits croûtons de pains frits au beurre.

Consomme de grouse aux quenelles. – Clear , grouse soup.

Prendre quatre vieilles grouses dont on enlève les filets qu’on met de côte.

Avec les carcasses et les debris de gibier rôti dont on peut disposer, on prepare un consomme qu’on garnit de legumes et qu’on mouille avec un grand verre de madère. Faire reduire à feu vif et mouiller avec trois litres de bon bouillon. – Laisser cuire pendant une heure en ecumant et en degraissant. – Passer ei)suile le bouillon, et, lorsqu’il est à demi froid, le clarifier avec la moitie des filets haches très fin avec le même volume de maigre de veau et deux œufs entiers. Lorsque le consomme est clair, on le passe à la serviette. Avec le reste des filets, on fait des petites quenelles qu’on verse en dernier lieu dans le potage. Lorsque les grouses sont jeunes, on peut faire pocher les filets au four et les escaloper pour les mettre dans le potage au lieu de quenelles.

Potage à la joue de bœuf. – Ox cheek soup.

Le potage de joue de bœuf, s’il est prepare avec soin, ne le cède en rien comme succulence au pot-au-feu français.

Étant donnee la quantite de bouillon obtenue avec une tête de

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LA CUISINE ANGLAISE

bœuf qui ne coûte que 2 ou 3 shillings, ce potage a l’avantage d’être peu dispendieux tout en etant d’excellente qualite.

Recette: On prend une tête de bœuf dont on detache la partie charnue qu’on laisse degorger, ainsi que les os, pendant deux ou trois heures à l’eau froide. Marquer ensuite une marmite comme s’il s’agissait d’un pot-au-feu ordinaire, ecumer le liquide lorsqu’il arrive à Tebullilion; une demi- heure après, garnir de legumes et laisser mijoter jusqu’à carotte, un peu de celeri et quelques champignons emiuces; ajouter une cueilleree de fecule et mouiller graduellement avec le bouillon de venaison. Remuer sur le feu jusqu’à l’ebullition, laisser degraisser et passer à travers une mousseline. Ajouter les morceaux de viande et deux douzaines de petites quenelles de gibier ou de daim.

Avant de servir, versw dans le potage un verre de porto bouillant et une legère pincee de poivre de Cayenne.

Potage de pigeons. – Pigeon soup.

Mettre dans une casserole avec quelques petits oignons eminces trois pigeons entiers et brides, – ajouter un peu de jambon cru coupe en des, et un bouquet de persil garni. Faire revenir dans le beurre à feu vif, puis egoulter le beurre, saupoudrer les

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pigeons d’un peu de farine ou de fecule, puis les couvrir avec du bouillon et ajouter un verre de porto. Lorsque les pigeons sont cuits, les egoutter, les depecer et les ranger dans la soupière. – Degraisser le potage et le verser bouillant sur les pigeons dans la soupière. – On peut ajouter au potage du riz qu’on aura fait cuire prealablement dans du consomme.

Puree de lièvre. – Hare soup.

Il en est de ce potage comme de la fameuse recette de la cuisinière bourgeoise concernant le civet, – il faut d’abord prendre un lièvre.

Après ravoir depouille, le couper en morceaux. Émincer ensuite deux carottes, deux oignons, une tranche de jambon et

un pied de celeri; ajouter 150 grammes de beurre, puis le lièvre, que Ton passe avec les legumes jusqu’à ce que la chair soit ferme. Saupoudrer alors avec une cuilleree de fecule oud’arrowroot et mouiller avec du bouillon.

Remuer sur le feu jusqu’à l’ebullition, ajouter un bouquet de persil garni de thym et de laurier, et laisser mijoter. Écumer, et lorsque la viande est bien cuite, la desosser et la piler dans le mortier avec un peu de la cuisson. La passer ensuite à Tetamine en l’allongeant avec le bouillon. Ajouter à l’assaisonnement une pointe de cayenne et une legère infusion de basilic et de marjo

LA CUISINE ANGLAISE 31

laine; faire chauffer au baia-marie sans laisser bouillir, et, avant de servir, ajouter un verre de porto bouillant et deux douzaines de petites quenelles de gibier.

MulligataTvny soup.

Les etymologisles ont en vain oherche à analyser ce nom baroque. En desespoir de cause, ils lui ont assume une origine indienne, en raison de ce qu’il entre du curry dans sa composition.

Decouper un poulet comme pour une fricassee, le faire cuire dans un consomme blanc garni de carottes, oignons, celeri, champignons et d’un bouquet de persil. Lorsque le poulet est cuit, le retirer de sa cuisson, le parer, le rafraîchir et le mettre dans unbain-marie.

D’autre part, hacher deux oignons, les faire frire de couleur blonde, puis y ajouter une cuilleree de fecule et deux de poudre de curry. Delayer graduellement avec la cuisson du poulet, laisser degraisser un quart d’heure au coin du feu, ecumer, ajouter un demi- verre de crème bouillante et passer à travers une fine passoire dans le bain-marie qui contient les morceaux de poulet.

Envoyer à part du riz cuit à Teau.

Potage Mulligataivny clair.

On opère pour confectionner ce potage de la même manière que dans la precedente recette, mais on supprime la fecule. On passe les legumes et la poudre de curry au beurre, puis on mouille avec le bouillon de poulet qu’on laisse mijoter une demi-hôure, que l’on degraisse et qu’on passe à la serviette.

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Le riz, cuit à part, doit être bien lave après la cuisson et bien egoutte, afin qu’il ne trouble pas le potage. On le sert sur une assiette ou on le met dans la soupière à volonte.

Bisque de crevettes à rindienne. – Bisque of praTvns.

Laver les queues epluchees de six douzaines de belles crevettes, les mettre dans un bain-marie contenant un pey de bouillon et les y laisser jusqu’au moment de servir le potage qui 80 fait ainsi :

Faire revenir dans le beurre un oignon emince, une carotte et jiin peu de celeri, et mouiller avec du bouillon et du vin blanc; ajouter un bouquet de persil, un peu de sel, clous de girofle et macis. Laisser bouillir vingt minutes et passer à travers une passoire. Après avoir bien degraisse le bouillon, le lier avec un peu de roux ou d’arrow-root en y ajoutant les coquilles de crevettes prealablement pilees au mortier avec une forte cuilleree de poudre de curry indien et un peu d’essence d’anchois.

Laisser cuire pendant une demi-heure, puis degraisser et passer à la passoire fine. On ajoute alors au potage les queues de crevettes, un peu de crème et une pointe de cayenne.

Bisque de crabe. – ^ Bisque of crab.

Les crabes anglais sont remarquables par leur grosseur. On en voit qui pèsent jusqu’à cinq livres. Faire cuire un gros crabe simplement à l’eau salee en lui donnant vingt-cinq ou trente minutes de cuisson, puis l’egoutter et le laisser refroidir.

Émincer deux carottes, deux oignons, quelques champignons frais, un peu de celeri, gros poivre, thym, laurier et persil.

LA CUISINE ANGLAISE 38

Frire ces ingredients jusqu’à ce que Toignon commence à jaunir, puis mouiller les legumes avec un verre de vin blanc et un demi-litre de bouillon.

Laisser mijoter pendant vingt minutes et passer à la passoire fine. Faire cuire dans cette mirepoix trois poignees de riz. Briser les pattes et les pinces du crabe et en retirer la chair. Ouvrir ensuite le crustace en passant le couteau entre les deux carapaces et mettre le contenu dans un mortier avec la viande des pinces et des pattes; ajouter le riz et piler le tout en mouillant graduellement avec la mirepoix. Passer ensuite à l’etamine à Taide de deux cuillères de bois. Au moment de servir, faire bouillir le potage, Tecumer, lui ajouter une poin(;e de poivre de Gayenne et lui incorporer un morceau de beurre d*anchois. Envoyer separenlent des croûtons de pain frits au beurre.

On peut aussi reserver la chair des pinces qu’on effile au moyen de deux fourchettes et qu’on jette dans le potage avant de le servir, ainsi qu’une douzaine ou deux de quenelles de merlan.

Bisque d’eorevisses à la Malmesbury . – Bisque of crayfish à la Malmesbury.

Ce potage consiste en une bisque ordinaire à laquelle on ajoute au moment de servir deux douzaines de queues d’ecrevisses epluchees, la même quantite de queues de crevettes, trois douzaines de moules cuites et ebarbees, et autant de petites quenelles de merlans prealablement pochees dans du bouillon.

Puree de pois secs. – Puree of split peas.

Apres avoir lave à grande eau un demi-litre de pois secs, les mettre dans une petite marmite avec une demi-livre de

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LA CUISINE ANGLAISE

jamboQcru, une branche de celeri, une carotte, un oignon plante de deux clous de girofle, et deux litres de bouillon. Meltre au feu et laisser bouillir doucement en Tecumant pendant trois heures. Les pois etant cuils, on les ecrase et on les passe à Teta

mine au moyen de deux cuillers de bois. On remet la puree dans une casserole et on la delaye avec le bouillon de la cuisson. Remuer sur le feu avec une spatule jusqu’à ebullition, laisser degraisser, assaisonner et terminer en dissolvant dans le potage un bon morceau de beurre frais. Envoyer à part dans une assiette creuse des croûtons de pain frits et, dans un ravier, de la menthe sechee et passee au tamis de fer.

Soupe aux huîtres. – Oyster soup.

Faire blanchir dans leur propre liqueur trois douzaines de grosses huîtres dites pied de cheval. Au premier bouillon, egouttez-les dans une passoire en conservant leur cuisson. Supprimer les barbes et les tendons et ne conserver que la partie delicate de l’huître qu’on nomme la noix. Deposer les huîtres dans un bain-marie avec l’eau qu’elles ont rendue. Si elles sont trop grosses, on les divise en deux.

LA CUISINE ANGLAISE 35

D’autre part, preparer deux litres de bouillon de poisson. A cet effet, prendre trois merlans dont on enlève les filets, le même nombre de limandes. Hachez grossièrement le tout, moins les filets de merlans, dont on fait de la farce.

Les debris de poisson sont alors mis dans une casserole avec une carotte emincee, un oignon coupe en rouelles, une douzaine de grains de gros poivre, trois clous de girofle, quelques branches de persil, un peu de thym, de laurier et de macis. Mouiller ces ingredients avec un quart de litre de vin blanc et faire bouillir à grand feu pendant dix minutes. Ajouter alors un litre de consomme blanc et laisser mijoter cette essence de poisson pendant une demi-heure en Tecumant de temps en temps. Au bout de ce temps, passer le liquide à travers une passoire très fine et le remettre au feu pour l’epaissir avec un peu de roux ou d’arrow-root. Au moment de servir, finir le potage avec une liaison de quatre jaunes d’œufs et d’un decilitre de crème. Saupoudrez d’une pincee de poivre de Gayenne, et en dernier lieu ajouter les huîtres et les quenelles de merlan.

Potage d’anguille. — Eel soup à la Richemond.

Après avoir depouille deux belles anguilles, les couper en tronçons de cinq centimètres de longueur. Les plonger à l’eau bouillante pendant une ou deux minutes, pour les raidir, et les egoutter.

Faire revenir dans le beurre deux oignons haches. Lorsqu’ils sont d’une couleur blonde, lear adjoindre une carotte emincee, un bouquet garni, deux clous de girofle, quelques grains de poivre ainsi qu’une demi-douzaine de champignons eminces, et quelques poissons ordinaires et osseux pour composer un bouillon succulent, ainsi que les tronçons d’anguilles. Mouiller avec de l’eau et une demi-bouteille de vin blanc et

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laisser mijoter jusqu’à cuisson complète de Tanguille. Passer alors le bouillon à travers une serviette et le tenir au chaud.

Detacher la viande de Tanguille de ses arêtes, la parer et la placer dans la soupière avec un peu d’essence de poisson.

Épaissir le bouillon avec un peu d’arrow-root; l’assaisonner de sel, de muscade râpee et d’une bonne pincee de cayenne; puis au moment de servir lier le potage avec six jaunes d’œufs et de la crème. – En dernier lieu, ajouter un peu de persil hache et blanchi, et verser bouillant sur les morceaux d’anguille dans la soupière.

WTater souchet.

Ce nom derive du mot hollandais waterzootje. Quoiqu’il soit d’usage de servir ce mets comme poisson, il peut être considere comme. potage, car on Tenvoie sur table dans une soupière et on le mange à la cuillère.

Les poissons que l’on doit choisir de preference pour le water souchet sont : le saumon, la perche, la truite, la sole et surtout la limande.

Couper en filets minces, tels que pour une julienne, la partie rouge de deux carottes et un peu de celeri et de racine de persil. Faire cuire dans. du bouillon leger auquel on ajoute un verre de vin blanc. Égoutter ensuite les legumes dont on conserve la cuisson dans laquelle on fait pocher le poisson que l’on a prealablement coupe en filets ou en petits tronçons. – Cinq minutes suffisent à cuire le poisson. On y ajoute alors les legumes et une pluche de persil blanchi. On sert dans une soupière ou dans un plat creux et l’on envoie à part des tranches de pain bis beurrees et coupees très mince.

LA CUISINE ANGLAISE 37

Soupe aux moules. – Mussel soup.

Laver quelques douzaines demoules à plusieurs eaux, et, avec un couteau, enlever la touffe de mousse qui adhère à la coquille.

– On lesmet alors au feu dans une casserole avec sel, poivre, un bouquet garni, deux verres de vin blanc, et on les saute constamment jusqu’à ce qu’elles s’ouvrent. – On les retire alors des coquilles et on les tient à part dans un peu de la cuisson tiree à clair. – D’autre pari, emincer un oignon, une carotte, un peu de celeri, deux clous de girofle et quelques grains de gros poivre; faire frire ces ingredients avec du beurre, puis y ajouter un peu de farine pour en obtenir un roux que l’on delaye avec la cuisson des moules. Faire bouillir et laisser ecumer pendant vingt minutes. Ajouter en dernier lieu quelques cuillerees 3e crème, une pointe de cayenne et passer au tamis fin. – Remettre la soupe dans une casserole pour lui donner quelques minutes d’ebuUition avec les moules.

Les moules comme les huîtres, et tous les coquillages comestibles, ne sont vraiment bonnes que pendant huit mois de Tannee. Aussi est-il prudent de s’abstenir d’en manger pendant les mois de mai, juin, juillet et août. – C’est surtout sur les côtes de Normandie et de Bretagne qu’on pèche ces mollusques. On les trouve suspendus en grappes aux rochers et aux corps solides qu’ils rencontrent dans le voisinage de l’endroit où ils sont nes.

– Les moules, lorsqu’elles sont petites, peuvent se semer sur un radeau ou être cultivees dans un parc. Elles deviennent dans ce dernier cas plus grosses et de meilleure qualite que celles qui vivent dans les conditions ordinaires. Elles possèdent des qualites nutritives remarquables, et leur chair, paraît-il, contient 12 0/0 de matières azotees, c’est-à-dire, à peu de chose près, autant que la viande de boucherie. – Les moules possèdent quelquefois des proprietes nuisibles provoquant des indispositions d’un

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caractère 1res alarmant qui se manifestent pendant l’acte de la digestion par des demangeaisons causees par des maux de cœur et une fièvre intense. – En cas d’empoisonnement par ces mollusques, on recommande de prendre de la limonade additionnee de quelques gouttes d’ether. – On n’est pas bien d’accord sur les causes de cet empoisonnement. On a suppose qu’il pouvait venir du cuivre des navires auxquels les moules auraient ete attachees^ mais je n’en crois rien, car il me semble que, si le bivalve avait absorbe de l’oxyde de cuivre comme on le suppose, il en aurait ete la première victime. – On a attribue aussi cette indisposition passagère à une maladie des moules qu’on n’a pu encore decouvrir, ou bien à la presence, dans l’interieur du coquillage, d’un petit crabe imperceptible, mais la raison la plus plausible est que les personnes atteintes de ce malaise après avoir mange des moules n’etaient pas dans des dispositions normales de sante.

Potage d’esturgeon à l’americaine. – Sturgeon soups.

Se procurer six livres d’esturgeon dont on detache un morceau bien en chair qu’on ficelle el qu’on place dans une casserole et qu’on couvre d’une bonne mirepoix au vin blanc et qu’on fait braiser pendant une heure et demie.

Lorsque le morceau de poisson est cuit, on le met refroidir dans un endroit frais, et lorsqu’il est froid, on le decoupe en escalopes d’egale largeur qu’on met en reserve dans un peu de bouillon de poisson.

Pendant la cuisson du morceau d’esturgeon destine à être escalope, on prepare le potage avec le reste du poisson ainsi qu’il suit :

Beurrer une grande casserole et la foncer avec trois oignons en tranches, une carotte, un morceau de celeri, du thym, du laurier, du persil, quelques clous de girofle, du poivre en grains

LA CUISINE ANGLAISE 39

et une feuille de macie. Ajouter deux vieilles poules et mouiller avec une cuiller à pot de consomme et un grand verre de vin blanc/ Mettre à feu vif jusqu’à ce que la cuisson soit bien reduite et le poisson tombe à demi-glace. Mouiller alors avec du consomme et laisser mijoter, en ecumant, pendant trois heures. Passer à la serviette et melanger le bouillon avec deux cuillerees de roux pour en faire une sauce peu consistante qu’on laisse ecumer et dans laquelle on amalgamera en dernier lieu un peu d’essence d’herbes à potage tortue (voir chapitre des condiments), un peu de beurre d’anchois, une pincee de cayenne, de la muscade râpee, et en dernier lieu les escalopes d’esturgeon, deux douzaines de petites quenelles de homard ou de saumon, et un demi-verre de madère.

Potage de perches à la Wastreflsh.

Nettoyer et ecaler cinq ou sixpercheset les faire pocher dans du vin blanc additionne de consomme. Laisser les poissons refroidir dans leur cuisson, puis les egoutter et en enlever les filets, qu’on divise en morceaux egaux et qu’on depose dans une petite casserole. Reserver le liquide dans lequel les perches ont ete cuites et qui doit servir à faire le potage. Faire un roux blond qu’on delaye avec ce bouillon et remuer sur le feu jusqu’à ce qu’il atteigne le degre d’ebullition. On le retire alors du feu pour le laisser mijoter sur le coin du fourneau, après l’avoir garni de quelques legumes et d’un bouquet de persil. On le laisse ainsi pendant une demi-heure en Tecumant frequemment, puis on le passe à travers une mousseline ou une fine passoire. Finalement on ajoute au potage une julienne de legumes qu’on a fait cuire prealablement, ainsi qu’une liaison de quatre jaunes d’œufs. Verser le potage bouillant dans la soupière sur les escalopes de perches.

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Soupe aux clam-choiTV’ders. – Glam-cho^wder soup.

Ce potage est americain. Les ciam-chowders soDt des coquillages ressemblant un peu aux bucardes, et qui sont très communs aux États-Unis.

Ouvrir une cinquantaine de clams, en ôter la partie dure et hacher le reste, que Ton place dans une casserole avec leur jus naturel. D’autre part, couper en petits des quelques pommes de terre crues. Deux bonnes tranches de jambon et deux gros oignons. Faire frire dans le beurre ces ingredients et lorsque l’oignon est d’une belle couleur jaune, mouillej avec du bouillon et un grand verre de vin blanc. Garnir d’un bouquet de persil. Assaisonner de sel, muscade râpee, poivre de Gayenne et puree de tomates. Faire bouillir le liquide pendant une demi-heure. D’un autre côte, on fait ramollir pendant dix minutes, dans un peu d’eau, une poignee de biscuits americains appeles crackeî’s.

Un quart d’heure avant de servir le potage, on y melange les clams et leur jus, ainsi que les biscuits. On laisse bouillir encore dix ou douze minutes et finalement on incorpore à la soupe un bon morceau de beurre frais, après avoir retire le bouquet de persil.

Soupe aux terrapines. – Terrapin soup.

Plonger les petites tortues à Teau bouillante et les y laisser deux ou trois minutes seulement, car une plus longue immer-sion nuirait à l’operation qui consiste à detacher Tecaille de la carapace et des pattes. Les ecailles etant enlevees, on met les

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terrapines à cuire dans du consomme leger jusqu’à ce que la viande se detache facilement de la charpente de Tanimal. On enlève cette viande avec precaution et on la coupe en morceaux, qu’on place dans un bain-marie avec un peu de la cuisson.

Delayer deux ou trois cuillerees de roux avec un litre de bon consomme et laisser le liquide mijoter au coin du fourneau jusqu’àce qu’il ait jete son ecume, puis on termine le potage en y ajoutant une infusion de basilique et de marjolaine, une pincee de poivre de Cayenne et finalement un verre de madère et la viande des terrapines.

CHAPITRE II POISSONS

SOMMAIRE

Anguille en ragoût (Slewed Eel).

Anguille à la brochette (Spitchcock Ele).

Cabillaud (Cod fish),

Cadgery (Cadgery),

Croquettes de saumon (Saimon croquettes).

Croquettes de turbot au curry (Turbot croquettes au cut*ry).

Filets de saumon {Filets of saimon).

Filets de turbot à l’indienne (Filets of turbot à l’indienne).

Filets de turbot à la Windsor (Filets of turbot à la Windsor).

Harengs fumes de Yarmouth (Yarmouth bloaters).

Kippered herrings (Kippered hern’ngs).

Merluche fraîche (Haddock),

Merluche fumee (Finnan haddock).

Morue salee (Sait fish).

Ombre chevalier (Char et potted char).

Pâte d’anguille.

Raie à Tanglaise (Boiled skate).

Raie frite (Fried skate).

Saint-Pierre (John dory).

Saumon bouilli (Boiled saimon).

Saumon cisele (Crimped saimon).

Saumon fume (Kippered salmonf.

Sprats (Sprats).

Souffle de morue salee (Sait firt souffle).

Pudding de filets de soles (Filets of sole pudding).

Tête de cabillaud (Stuffed cod’ s head).

Turbot à l’anglaise (Boiled turbot).

White hait (White bail).

COQUILLAGES ET CRUSTACÉS

Anges à cheval (Angpls an horse back). Bucardes (Cockles).

Calipash et Calipee (Calipash and Calipee), Clams-chowders (Clams-chowders).

U LA CUISINE ANGLAISE

Crabe à Tanglaise (Crabe English style).

Crabe à Tindienne (Crabe à l’indienne).

Crevettes {Prawns).

Curry de homard (Currt/ of lobster).

Homard à ramericaine (Lobsier à l’americaine).

Homard grille (Boiled lobster).

Homard à la Neuburg f Lobster à la Neuburg).

Huîtres anglaises (natives) {Natives oysters).

Huîtres à la diable (Devilled oysters).

Huîtres en beignets (Fried oysters).

Huîtres à la tartare (Oysters à la tartare) .

Nageoires de tortue (Turtle fins).

Terrapines à la Baltimore (Tet^rapines à la Baltimore) .

Terrine de crevettes (Potted shrimps).

Petits souffles aux huîtres (Small oyster souffles).

CHAPITRE II POISSONS

L’Angleterre est un des pays d’Europe les plus privilegies pour rapprovisionnement du poisson. Entouree par la mer et sillonnee de nombreux cours d’eau, on y trouve en abondance le poisson d*eau douce et la maree. Londres, par sa situation geographique, offre un grand avantage aux pecheurs qui viennent debarquer leur butin jusqu’au cœur de la ville. Le legen

daire marche de Biilingsgate est en effet construit sur le bord de la Tamise, et le poisson se trouve transporte sans transition du pont du bateau jusque sur les dalles de la halle, où il est immediatement vendu à la criee et emporte vivant encore, pour être reparti chez tous les [pourvoyeurs de la capitale; car à Londres on voit des boutiques de marchands de poissons disseminees dans tous les quartiers, même les plus aristocratiques, et point n’est besoin, pour le consommateur ou la menagère, d’aller jusqu’à la halle affronter le danger de s’entendre interpeller dans un langage souvent par trop naturaliste. Ces

Mi LA CUISINE -NGLuISE

marchands sont amplement approvisionnes de poisson de toute espèce, depuis le gigantesque esturgeon jusqu*au minuscule tchiie baUf et chaque soir, au moment de la fermeture de la boutique, le poisson arrive le matin qui ne s*est pas vendu dans la journee est distribue aux pauvres gens à des prix très minimes, car tout pourvoyeur qui se respecte ne vend pas à ses clients du poisson de la veille. C est surtout le saumon, ce roi des poissons, qui pullule dans les rivières de TÉcosse et d’Irlande. On Texpedie en grande quantite dans toutes les capitales de l’Europe, où il fait une serieuse concurrence au saumon hollandais, quoiqu’il soit inferieur à celui-ci comme qualite. Autrefois, lorsque les communications etaient plus difficiles et les lois sur la pèche moins draconiennes qu’aujourd’hui, le saumon etait en si grande abondance dans certains districts ecossais, qu’il composait la principale nourriture du peuple. On raconte qu’à celte epoque les ouvriers et les «apprentis avaient iatroduit une clause dans leurs engagements stipulant que les patrons ne leur donneraient du saumon à leurs repas que trois jours par semaine. Les temps sont bien cbuiges, car le saumon, qui valait alors 2 pence la livre, se vend aujourd’hui 2shilfiiigs. L’Anglais est très amateur de poisson. 11 est d’usage de le servir dans les diners immediatement après le potage, et chaque espèce doit être accompagnee d’une sauce speciale. Ainsi la sauce obligatoire pour le turbot est la hollandaise ou la sauce homard. La raie se sert avec une sauce aux crevettes, tandis qu’avec le cabillaud la sauce aux huîtres est de rigueur. Avec ia merluche et la morue salee, il faut une sauce aux œufs durs, et avec le maquereau bouilli Tusage veut qu’on envoie une sauce au fenouil. Quant au poisson frit, on l’accompagne invariablement d*une sauce à l’essence d’anchois.

LA CUISINE ANGLAISE

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^White bait.

« Petit poisson deviendra grand », a dit La Fontaine. Si le fabuliste avait connu le white bait, il aurait fait une exception en sa faveur, car ce petit poisson ne grandit pas. Certains cuisiniers s’obstinent à le designer sous le nom de blanchaille, mais c’est un tort, car il diffère essentiellement de ce qu’on est convenu d’appeler blanchaille.

Le uitite bait est un poisson special qui se pêche principale

ment à Tembouchure de la Tamise. Sa consommation est si grande à Londres, durant la saison, que, pour suffire aux demandes des consommateurs, on est oblige de le melanger avec du fretin de certains poissons, tels que le hareng et le merlan, que l’on trouve dians les mêmes parages; mais le white bait se distingue facilement de ceux-ci; il est blanc et transparent, tandis que les autres ont la forme et la couleur du hareng.

Ainsi que le potage tortue, c’est le complement oblige de tout dîner diplomatique à Londres. Il est même notoire que chaque annee, la veille de l’ouverture du Parlement, les ministres de la reine, fidèles en cela à une vieille tradition, se reu

48 LA CUISINE ANGLAISE .

nissent à Grëenwich daii^ un ])anqûet où figure mvariablement cette incomparable friture.

Ce poisson est d’une si. grande delicatesse, que, s’il n’est employe toqt de suite^lperd toutes ^s qualites; aussiles amateurs qui veulent en fair^tin regal font-ils le voyage à Grëenwich, où il se pêche ptoîi tous les restaurants en font leur principal plat du jour. Là, plus que pariout ailleurs, ce delicieux petit poisson peut être reellement apprecie, car il saute pour ainsi dire de la Tamise dans la poêle à frire.

La manière d’operer pour faire frire les white bail exige un certain soin. Il est d’abord de toute necessite que le poisson soit excessivement frais; aussi le conserve-t-on, jusqu’au moment de le faire cuire, dans une terrine contenant un gros morceau de glace. On egoutte le ïohite bail sur un tamis, puis on en prend deux ou trois poignees qu’on egraine dans de la farine etendue sur une serviette. On les roule vivement dans cette farine, et^ s’ils sont très frais, ils se separent facilement. Dans le cas contraire, ils se collent ensemble et il devient impossible de les separer. Lorsqu’ils sont bien impregnes de farine, on les jette dans un panier à frire que l’on secoue vivement afin d’enlever le ‘surplus de farine; puis on les plonge immediatement à grande friture pendant deux ou trois minutes. Cette friture doit être neuve autant que possible et ne doit être employee que très chaude; autrement le poisson serait mou au lieu d’être croustillant.

On se sert de saindoux ou de graisse de bœuf, mais cette dernière est preferable.

Lorsque les white bail sont cuits, on les egoutte, on les saupoudre de sel et on les envoie aussitôt sur table accompagnes de tranches de pain bis beurre et de quartiers de citron. Il est d’habitude de faire suivre le premier plat de white bail d’un second, fortement assaisonne de poivre de Cayenne et que Ton designe sous le nom de deviUed white bait {white bdit à la diable).

Pour qu’une friture de white bait soit bien reussie, il est essentiel que le poisson reste blanc et soit croustillant. On le

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saupoudre de ôel avant de.rènvoyer,’et on le. dressa sur un plat garni d^une serviette qui doit être très chaude. Garnir de persil irît. . .

Saumon bouilli. – Boiled salmon:

Le saumon bouilli à l’anglaise se fait sîmplemeat cuire à l’eau salee. On le met soil à Teau froide, soit à l’eau J)ouillante. Dans l’un ou l’autre cas, il faut avoir soin de bien saler la cuis

sou. Mis à Teau froide, il doit être place sur un fourneau ardent et, lorsque le liquide arrive au point d’ebuUition, il faut le laisser mijoter doucement pendant une demi-heure. Mis à Teau bouillante, il demande trois quarts d’heure de cuisson s’il est de grosseur ordinaire. Le saumon à Tanglaise se sert generalement accompagne d’une sauce homard ou d’une sauce au persil. On

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envoie aussi quelquefois de l’eau de la cuissoa dans une saucière. Les amateurs fanatiques de ce poisson ne le mangent qu’arrose simplement de cette eau.

Saumon cisele. -^ Crimped salmon.

N’en deplaise aux cuisiniers qui pjersistent à vouloir trouver un mot français correspondant au mot anglais crimped, je â^outiens qu’il nV adans notre langue aucun mot qui ait la même signification, et je conclus qu’il est plus simple de conserver le terme usite en anglais plutôt que de faire du français fantaisiste et peu comprehensible.

Le saumon est ainsi denomme à cause du traitement quelque peu barbare qu’on lui fait subir après sa capture. En effet, sitôt sorti de Teau, on Tetend sur Therbe, puis Ton procède au martyre de l’animal en commençant par lui faire une large et profonde incision un peu au-dessous de Touïe. Les incisions sont repetees sur toute la longueur du saumon en les espaçant chacune de 4 ou 5 centimètres.

On retourne le poisson pour repeter l’operation de l’autre côte, puis on le suspend par la queue pour le laisser saigner quelques minutes et finalement on l’immerge pendant un quart d’heure dans l’eau froide. Le saumon traite de cette façon est fort apprecie des connaisseurs. La chair en est plus onctueuse et plus ferme; cependant cette qualite recherchee par les uns n’est pas du goût des autres, et pour ma part je me range dans cette dernière categorie.

Le comble du raffinement pour un veritable amateur de saumon est de le faire cuire et de le manger au bord de l’eau aussitôt qu’il vient d’être peche et après l’avoir coupe vivant.

11 faut croire qu’il est avec les sentiments humanitaires des accommodements tout comme avec le ciel; sans cela, comment expliquer ce fait, que la Societe protectrice des animaux ne pro

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teste pas contre Tusage barbare qui consiste à ecorcher vive l’anguille avant de la mettre en matelote; à plonger dans Teau bouillante le homard, le crabe et la crevette; à vivisecter enfin le saumon, le turbot et le cabillaud.

Pourquoi cetle societe philanthropique, qui s’indigne contre les combats de coqs et les courses de taureaux et qui sevit sans pitie contre les charretiers brutaux, se montre-t-elle si indulgente pour ceux qui, de gaiete de cœur, torturent impitoyablement ces inoiïcnsifs animaux ?

On me fera observer que les poissons ont très peu de cervelle, et qu’il est avere que moins un animal est doue sous ce rapport, moins il est sensible à la douleur.

C’est possible, mais il m’est difficile de croire que l’anguille qui se tortille lorsqu’on la depouille, que le saumon qui fait des soubresauts desesperes sous le couteau qui tranche dans sa chair vive, le homard qui se debat dans la marmite bouillante, eprouvent des sensations agreables au moment psychologique.

Peut-être TindifiFerence de la societe susnommee est-elle motivee par la crainte de soulever une tempête dans le monde gastronomique et de causer une revolution parmi les nombreux adeptes de la bonne cuisine.

Pour cuire le crimped salmon, comme le font les Anglais, on

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le plonge à Teau bouillante et salee et on le laisse bouillir vivement pendant dix ou douze minutes.

On le sert accompagne d’une sauce homard ou hollandaise, ou bien encore avec une sauce genevoise ou italienne.

Il est bon d’observer que le saumon qui a ete crimped demande beaucoup moins de temps à cuire que le saumon ordinaire, car Teau bouillante, en penetrant dans les chairs par les incisions faites au poisson, facilite et abrège l’operation de la cuisson.

On sert avec le saumon bouilli une salade de concombres.

Filets de saumon à l’indienne. – Filet of salmon à llndienne.

Enlever l’arête et la peau d’une darne de saumon, puis diviser la chair en filets egaux coupes, soit en biais, soit transversalement; les aplatir, les parer et les placer dans un plat à sauter grassement beurre; les assaisonner, les recouvrir d’un rond de papier et les mettre pocher quelques minutes à four vif.

Lorsqu’ils sont cuits, les dresser en couronne et les masquer d’une sauce au curry.

Garnir le centre des filets avec du riz cuit à Teau.

Croquettes de saumon. – salmon croquettes.

Cette recette pourrait être classee parmi celles qui constituent l’art d’accommoder les restes. Ce mets se confectionne generalement avec du saumon cuit de la veille, et, quoique economique, il n’en est pas moins excellent. On enlève la peau et les arêtes du poisson, et Ton hache la chair en l’assaisonnant de sel, d’un peu de cayenne et de muscade râpee. On met le hachis dans

LA CUISINE ANGLAISE 53

une casserole pour le lier sur le feu avec des jaunes d’œufs et un peu de sauce bechamel reduite. On place ensuite le saumon sur un plat à la glace. Lorsqu’il est entièrement refroidi, on en confectionne des croquettes, auxquelles on donne une forme quelconque, que Ton passe à la mie de pain d’abord, et ensuite à l’œuf battu pour les rouler une seconde fois dans la mie de pdin. Faire frire, dresser sur une serviette et garnir de persil frit.

Ombre chevalier. – Potted char.

Ce poisson, qui est, à mon avis, le meilleur des poissons d’eau douce, se trouve en abondance dans les lacs d’Ecosse, mais il est d’une nature si delicate que le voyage lui fait perdre beaucoup de sa qualite; aussi n’en voit-on que rarement sur le marche de Londres.

On en fait grand cas sous forme de conserve qui se prepare’ de la manière suivante : faire cuire les chars dans une mirepoix et les laisser refroidir dans leur cuisson. Oter alors la peau et les arêtes et, après les avoir bien egouttes, les ranger dans des pots plats et evases. Les recouvrir de beurre clarifie et les mettre au four pendant un quart d’heure. Lorsque les pots sont entièrement refroidis, on ajoute, s’il y a lieu, un peu de beurre clarifie afin que le poisson soit entièrement cçuvert. Le potted char^ tenu dans un endroit frais, peut se conserver pendant quelques semaines. On le sert pour le dejeuner du matin dans le vase même dans lequel il a ete conserve.

Saint-Pierre. – John Dory.

Ce poisson, peut-être à cause de sa forme disgracieuse, jouit de peu de faveur en France, mais il est très estime des Anglais. Sa chair est en etfet ferme et de bon goût et certains

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gourmets ]a prefèrent à celle du turbot. On le sert bouilli ou cuit aufour accompagne d’une sauce homard, hollandaise ou crevette* Le nom de Dory, d’après les etymologistes, lui viendrait de ce que la couleur de sa peau a une teinte doree.

Cadgery

Le cadgery se fait avec du turbot cuit de la veille et ne se sert generalement que pour le dejeuner du matin. Après avoir detache la chair des arêtes, ou la brise en morceaux que Ton fait chauffer dans une sauce bechamel avec des œufs durs coupes en des et du riz bien cuit. On dresse sur un plat creux le melange qui doit être tenu un peu epais et qu’on masque de sauce blanche.

Ce mets, tout bizarre qu’il paraisse être, forme un plat excellent dont les Anglais sont fort friands. On y ajoute parfois un peu de poudre de curry.

Turbot à l’anglaise. – Turbot.

Le turbot au naturel se prepare de trois manières : on le met à l’eau Froide, à l’eau bouillante, ou on le fait cuire à la vapeur.

On a adopte ce dernier plan dans les grands hôtels et les restaurants importants, à Londres. Le poisson est place sur des feuilles de fer etame percees de trous qui sont posees ensuite sur des claies dans des etuves agencees pour faire cuire une vingtaine de turbots à la fois. On frotte le poisson de sel et on le laisse ainsi cuire plus ou moins longtemps, selon sa grosseur. Avec le turbot à l’anglaise, on ne sert que trois sauces : la sauce homard, la sauce hollandaise ou la sauce crevettes.

LA CUISINE ANGLAISE

Filets de turbot à l’indienne. – Filets of turbot à l’indienne.

Les turbots de moyenne grandeur sont les meilleurs pour être servis en filets.

Après avoir detache la viande des arêtes, on enlève la peau, puis on detaille le poisson en escalopes qu’on pare de même grandeur et qu’on place sur un plafond beurre. On l’assaisonne de sel, de poivre et d’un jus de citron, puis on le recouvre d’un papier humecte de beurre fondu. On met au four pocher pendant dix ou quinze minutes, et on l’egoutte sur une serviette. On dresse les filets en couronne dans un plat et on les masque d’une sauce indienne au curry. On garnit le centre du plat de riz cuit à la turque.

Filets de turbot à la “Windsor. – Filets of turbot à la “Windsor.

Preparer les filets de turbot comme dans la recette precedente, et les placer sur un plafond bien beurre. Les assaisonner de sel, poivre et jus de citron el les arroser de beurre frais legèrement fondu. On saupoudre alors les filets avec de la mie de pain fraîche qu’on a fait brunir au four ou dans la poêle. Mettre les filets au four pendant dix ou douze minutes, et les retirer pour les egoutter et les dresser. On doit les dresser à plat et non en couronne, car la mie de pain se detacherait si les filets etaient mis en contact, et cela nuirait à l’apparence du filet. On sert une sauce italienne à part. Cette manière de servir les filets de turbot est une des meilleures que je connaisse. La mie de pain imbibee de beurre frais s’imprègne en même temps de jus’ de poisson et acquiert un goût delicieux. Il ne faut arroser les filets

56 LA CUISINE ANGLAISE

qu’avec precaution pendant la cuisson pour ne pas faire glisser la mie de pain qui n’adhère au filet que superficiellement.

Croquettes de turbot au curry.

Couper en petits des d’egale grosseur les restes d’un turbot. Preparer, d’autre part, une sauce bechamel bien reduite et assaisonnee de bon goût, qu’on lie avec deux ou trois jaunes d’œufs, et à laquelle on ajoute une cuilleree de poudre de curry. Amalgamer à cette sauce le salpicon de turbot et laisser refroidir sur un plat. Former des croquettes qu’on roule une première fois dans de la mie de pain. On donne aux croquettes la forme que Ton desire, puis on les trempe dans l’œuf battu pour les tremper une seconde fois dans la mie. de pain. Faire frire et dresser sur une serviette avec une garniture ‘^e persil frit.

Saumon fUme. – Kippered salmon.

C’est à rÉcosse qu’on est redevable de cet excellent mets de dejeuner si apprecie des Anglais, maif* peu connu en France. Le saumon aussitôt pêche est fendu dans toute sa longueur du côte du ventre, puis vide, lave, seche et mis au sel pendant douze heures. Il est ensuite fume dans des etablissements consacres à cet usage.

Le saumon, prepare de la sorte, se sert pour le dejeuner du matin et quelquefois pour le diner. Dans ce dernier cas, il se mange à la fin du repas en même temps que le fromage.

Pour l’employer, on le coupe transversalement en tranches très minces; on trempe ces tranches dans l’huile ou dans le beurre fondu et on les met pendant deux ou trois minutes au four ou sur le gril. ,v.

LA CUISINE ANGLAISE

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Lorsque le saumon est dresse sur. soq plat, on Tarrose avec un peu de beurre frais fondu. On envoie a part des petites tranches de pain grille (^re’ed ^ias^^).

Cabillaud. – Cod flsh.

De tous les poissons qui. servent, à notre alimentation, le cabillaud est peut-être le plus vorace; ceux que Ton pêche sur les côtes d’Angleterre sont remarquables par leur grosseur, ainsi que par l’excellence de leur «hair. On fait subir à la plupart de ceux apportes sur le marche le cruel traitement de la vivisection, afin de leur donner un regain de qualite.

Ainsi traite, le cabillaud, semblable en cela au saumon, devient plus fernae et plus onctueux et on le designe alors sous la denomination de crimped cod.

Sa voracite est telle qu’on a calcule qu’un seul cabillaud detruisait plusieurs millions de harengs dans le courant d une annee, et qu’il digère même sans inconvenient les crabes et les homards.

On pretend même que les sucs gastriques secretes par ses organes digestifs sont si puissants, qu un^mard, après un court

58 LA CUISINE ANGLAISE

sejour dans son estomac, devient rouge comme s’il avait ete cuit.

Les bateaux des pêcheurs de cabillaud sont agences de manière que le poisson puisse être conserve vivant.

Ils sont apportes ainsi jusqu’à Gravesend, à Tembouchure de la Tamise et à deux heures de Londres. Là, ils sont deposes dans d’immenses reservoirs alimentes par Teau de mer, et c’est de ces reservoirs qu’on vient les chercher pour en approvisionner le marche de Billingsgate.

Ici une remarque dont les pourvoyeurs de maree devraient bien faire leur profit.

Les pêcheurs anglais ont l’habitude d’egorger, de vider et de nettoyer leur poisson aussitôt qu’il est pris, puis ils le rincent à l’eau de mer, et c’est ainsi qu’il est apporte et vendu sur le marche.

Un turbot, par exemple, traite de la sorte est presente à l’acheteur sous un aspect plus blanc, plus propre et plus appetissant que ceux que nous voyons exposes sur les dalles de nos halles, suintant un limon grisâtre et nauseabond.

La methode anglaise est, à mon avis, preferable à la nôtre, laquelle consiste à laisser le poisson agoniser ert mourir en conservant ses intestins, ce qui doit certainement nuire à la succulence de sa chair, surtout pendant les grandes chaleurs.

Tête de cabillaud farcie. – StufFed cod’s head.

On remplit le vide de la tête avec de la farce à l’anglaise (veal stuffing), puis on place la tête du poisson, ainsi farcie, sur un plafond creux bien beurre.

On ajoute du vin blanc et un peu de bouillon, on l’assaisonne et on le met au four en l’arrosant de temps à autre avec la cuisson. Dix minutes avant de sortir le poisson du four, on le saupoudre de mie de pain frite ou de chapelure fine.

On sert avec le cod’s head une sauce aux œufs ou aux huîtres.

LA CUISINE ANGLAISE 59

Sprats.

Ce poisson a beaucoup d’analogie avec la sardine, mais il n’en a pas la delicatesse.

Une compagnie a tente, il y a quelques annees, d’en faire des conserves, mais le resultat obtenu ne fut pas satisfaisant, et l’entreprise fut abandonnee.

On pêche les sprats à l’epervier à l’embouchure des fleuves en Angleterre et en Ecosse.

Les sprats se font frire dans l’huile ou dans la graisse à l’instar des eperlans, et se servent generalement pour le dejeuner du matin.

Les Anglais en sont très friands, surtout lorsqu’ils sont sales et fumes.

Dans ce dernier cas, on les fait cuire sur le gril après les avoir prealablement trempes dans l’huile. Ils se servent aussi à la fin du dîner, en même temps que le fromage, accompagnes de quartiers de citron et de tranches de pain bis beurre.

Dans tous les banquets de Guildhall presides par le lordmaire, il est d’usage de servir un plat de sprats. Cela fait partie du programme, et c’est tout autant de rigueur que la soupe tortue, les tvhile bail et le toast à la sante de la reine.

f)0 LA CUISINE ANGLAISE

Souffle de morue salee. – Sait flsh souffle.

Ce souffle se fait avec les restes de morue de la veille.

Prendre une livre de morue cuite et la debarrasser des arêtes, puis la hacher très fin.

D*autre part, faire cuire à Teau sIk grosses pommes de terre, puis les egoutter et les reduire en puree. Ajouter à cette puree un decilitre de crème ou de lait, 60 grammes de beurre, un peu de muscade râpee, une pincee de poivre de Cayenne, quatre jaunes d’œufs, et finalement la chair du poisson. Après avoir melange tous ces ingredients et les avoir assaisonnes de bon goût, on fouette les quatre blancs d’œufs bien ferme, et on les melange legèrement avec la morue. On dep^jse cette composition dans un plat creux de porcelaine à feu, et Ton met à four chaud pendantàpeu près vingt minutes. Si, au bout de ce temps, la surface du souffle n’a pas pris de couleur, on emploie la salamandre pour aider à la coloration. On envoie le souffle sur un plat garni d’une serviette.

Pudding de filets de soles. – Fillets of sole s pudding.

Laver les filets de deux belles soles et les detailleren escalopes, puis les placer en couronne dans un plat à pudding creux. Faire blanchir trois douzaines de grosses huîtres, les ebarber et les parsemer sur les filets de soles. Preparer ensuite avec la liqueur dans laquelle ont ete blanchies et de la crème une sauce legère liee à la farine ou à l’arrow-root, bien assaisonnee et relevee d’une pointe de cayenne et d’un peu de muscade râpee. Couvrir avec cette sauce les escalopes de poisson et les huîtres. Ktendre sur la surface une couche de puree de pommes de terre

LA CUISINE ANGLAISE 61

et mettre le plat au four chaud pendant vingt minutes. Si, au bout de ce temps, le dessus du pudding n*estpas rissole, on le colore avec la salamandre.

Merluche. – Haddoch à l’anglaise.

Le haddock est le poisson que nous appelons merluche ou aigreiin. Il est très commun en Angleterre. Les plus gros et les plus estimes se pèchent dans la baie de Dublin. Le menagère anglaise ne connaît que deux manières de preparer ce poisson. On le fait cuire au four ou bouillir simplement àTeau salee. Dans l’un et l’autre cas, on le remplit avec une farce appelee veal stuffing (farce de veau). Cette farce est ainsi nommee, non pas, comme on pourrait le croire, parce qu’il entre du veau dans sa composition, mais parce qu’il est d’un usage rigoureux que toute pièce de veau, rôtie, braisee ou bouillie,, soit farcie lorsqu’elle est servie sur une table anglaise.

Veal stuffing : Hacher très fin une livre de graisse de rognon de bœuf, puis y ajouter la même quantite de mie de pain. Assaisonner de sel, poivre, muscade, cayenne et pei*sil hache. Amalgamer le tout avec deux œufs entiers.

Merluche fUmee. – Finnan haddock.

. La ville de Finnan est un petit port de mer situe à six milles d’Aberdeen.

C’est probablement de cet endroit, où les merluches abondent, que le procede de les fumer est originaire. Aujourd’hui, il est pratique sur une grande echelle, non seulement à Finnan, mais dans toute l’Ecosse.

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Gi LA CUISINE ANGLAISE

Walter Scolt, dans un de ses romans, donne la description de ce poisson, qu’il qualifie d’incomparable. L’opinion de Teminent romancier est confirmee par tous ceux qui ont goûte du fmnan haddock^ et je suis surpris que cette excellente manière d’apprêter la merluche soit si peu connue eu France. La ville d’Aberdeen en fait un commerce considerable, et la consommation dans le Royaume-Uni est enorme.

Le haddock, aussitôt peche, est ouvert par le ventre dans toute sa longueur, frotte de sel et suspendu par la queue pour être fume pendant vingt-quatre heures. Ce court espace de temps suffit à lui donner une saveur particulière et un goût d’une extrême delicatesse. Il est vrai que le poisson ainsi prepare ne se conserve que quelques jours, et c’est probablement pour celte raison qu’on ne l’exporte en France qu’en petites quantites.

Pour le servir, on le fait simplement griller quelques minutes et, lorsqu’il est prêt et dresse sur. le plat, on l’arrose de beurre frais fondu. Le pnnan haddock se »crt generalement pour le dejeuner du matin ou avec le the de cinq heures.

On le sert aussi quelquefois avec le fromage à la fin du dîner. Dans ce cas, on le coupe en petits des qu’on fait chauffer dans un peu de sauce curry ou à la diable, et l’on en garnit de petites croustades.

Morue salee. – Sait flsh.

En l’annee lo33, le navigateur Jacques Cartier fut envoye par François V^ explorer les bancs de Terre-Neuve. Il y fut suivi par quelques bateaux de pêcheurs, et ceux-ci peuvent être consideres comme les preconisateurs de la pêche à la morue.

Aucommencementdecesiècle, 300 ou 400 vaisseaux seulement quittaient annuellement les ports d’Europe pour s’aventurer dans ces parages lointains; mais aujourd’hui celte pèche a pris une telle extension que, chaque annee, plus de 10,000 bateaux de toutes

LA CUISINE ANGLAISE

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nationalites vont à la recherche de ce poisson, qui abonde dans Jes mers du Nord, et en rapportent dans leurs ports plus de 30 millions de tonnes.

Ce n’est que grâce à la prodigieuse fecondite du cabillaud que l’espèce doit de n’être pas depuis longtemps annihilee. En effet, il a ete demontre qu’un de ces poissons, pesant une vingtaine de livres, produit par an 2 ou 3 millions d’œufs.

La morue a reçu un singulier avantage que certains gros gourmands souhaiteraient peut-être posseder comme lui : sa gloutonnerie insatiable la porte à engloutir, dans son enorme

bduche, tout ce qui se presente devant elle : coquillages, herbes marines, epaves et autres objets refractaires à la digestion. Or, dans ce cas, lorsque ses fonctions digestives se trouvent enlra^vees par de trop copieux excès, la nature Ta douee de la faculte de vomir son estomac, de le retourner, de le rincer dans Teau de la mer et de le remettre en place.

Les legislateurs ecclesiastiques ont impose le poisson aux fidèles observants des lois de l’Église. La morue surtout a ete adoptee comme aliment principal pendant les jours de jeûne : d’abord à cause de son prix modique, qui la met à la portee de tout le monde, puis en raison de la facilite qu’on a de se la procurer à toute epoque de l’annee.

En Angleterre, la morue n’est obligatoire que deux jours de l’annee : le Vendredi Saint et le mercredi des Cendres, non

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pas parce que cela est prescrit: par les canons de TEglise, mais par respect pour une vieille tradition. A cfes epoi ues, les marchands de poisson font ample provision de morue, quMls font dessaler avant de la mettre en vente.

Le meilleur mpyen de faire cuire ce poisson est de le mettre à Teau froide dans une poissonnière, et de le faire partir à grand feu. Lorsque le liquide a atteint le degre d’ebuUition, laisser pocher pendant un quart d’heure sans bouillir.

On sert invariablement avec la morue une sauce aux œufs durs et Ton garnit le poisson d’un entourage de panais cuits à l’eau. (Voir chapitre des sauces.)

Raie. – Grimped skate.

Les marchands de poisson de Londres mettent une certaine coquetterie dans l’arrangement de leurs etalages, qu’ils agrementent de larges blocs de glace transparente de forme pyramidale. Les poissons de toutes espèces et de toutes provenances sont exposes sur des tables de marbre blanc disposees en gradins. Ici, des saumons enormes, artistiquement groupes, entremêles de merlans et de soles; là, des turbots alignes avec symetrie et resplendissants de blancheur,, puis des, truites; encore vivantes, mouchetees de points rouges, d’un . si appetissant aspect; des cabillauds entrelaces, se balançant dans l’espace; des anguilles, des carpes, des limandes fretillant encore, et, pour encadrer ce seduisant tableau, des guirlandes de crabes, de homards, de coquillages et de fleurs.

La raie, qui par sa forme et sa laideur nuirait à Tharmonie de l’exposition, en est generalement bannie. On la voit cependant quelquefois sur le marbre du pourvoyeur, mais alors on lui a fait subir une veritable transformation. On l’a coupee dans sa longueur en bandes etroites, puis on l’a plongee dans l’eau froide» La raie, lorsqu’on la retire de Teau, a revêtu une forme

LA CUISINE ANGLAISE 65

nouvello; ses chairs se sont resserrees, les bandes se sont roulees en spirales, et c’est sous cet aspect qu’elle est presentee auxr yeux de l’acheteur.

La raie au beurre noir, si populaire en France, n’est pas appreciee des Anglais qui la mangent simplement bouillie à l’eau salee, en l’accompagnant d’une sauce sux crevettes ou aux anchois.

Raie frite. – Fried skate.

Après avoir retire la raie de l’eau où on Ta laissee sejourner pendant deux heures, on tourne chaque bande en spirale et 6n Tegoutte sur une serviette.

Rouler ensuite chaque morceau dans la farine, puis dans l’œuf battu et enfin dans la mie de pain. Faire frire et dresser sur un plat avec une garniture de persil frit. Envoyer une sauce aux anchois ou aux crevettes.

Harengs fumes de Tarmouth. – Tarmouth bloaters.

La ville de Yarmouth, port de mer du comte de Norfolk, jouit d’une grande renommee pour la preparation des harengs fumes connus sous le nom de Yarmouth bloaters. On compte dans cette ville 120 etablissements où se prepare cet excellent poisson. Aussitôt peches, les harengs sont nettoyes et frottes de sel dans le bateau même qui les transporte. On les laisse dans la saumure deux ou trois jours seulement, puis on les embroche par les ouïes dans de longues perches, et on les suspend dans d’immenses fumoirs, où ils demeurent pendant vingt-quatre heures. Ils sont alors debroches et envoyes immediatement sur les mar 6

m LA CUISINE ANGLAISE

ches. Les bloaters sout d’une parfaite delicatesse et bien superieurs aux harengs sales ordinaires. Seulement, ils ont le desavantage de ne se conserver que quelques jours. On les sert grilles, accompagnes de pain beurre, pour le dejeuner du malin ou pour le Ihe de cinq heures (five o’clock).

On trouve ces harengs sur le marche de Paris. Ils sont connus sous le nom de bouffis.

Klppered herrlngs. – Kippered herrings.

On appelle ainsi les harengs qui ont ete ouverts avant d’être fumes, ils ne ressemblent en rien aux harengs fumes ordinaires, ni par la couleur ni parle goût. Par leur apparence, on pourrait croire qu’ils doivent être très secs après la cuisson, mais il n’en est rien et ils sont au contraire remarquables par leur delicatesse. Il y a deux manières de les preparer :

On peut les faire griller pendant quatre ou cinq minutes seulement après les avoir enduits de beurre fondu, ou bien on les fait pocher en les mettant à l’eau froide en leur donnant deux ou trois bouillons. On les arrose de beurre avant de les servir.

P&te; d’anguille. – Eel Pie.

Tous ceux qui ont visite la capitale des Iles Britanniques sivent qu’il existe aux environs de Londres, sur les rives de la Tamise, des sites admirables et de charmants villages, rendezvous habituels des canotiers et des amateurs de la pèche à la ligne. On ne peut se faire une idee de Tetonnant spectacle que presente le lleuve les dimanches et jours de fêtes pendant la belle

L.V CUISINE ANGLAISE

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saison. Des milliers de canols et de bateaux de plaisance, montes par des rameurs des deux sexes, sillonnent la rivière en tous sens; canotiers et canotières font assaut d’adresse, de vigueur et de vitesse dans ces courses à Taviron, où les Anglais excellent, et il n’est pas rare de voir des embarcations dirigees par de gracieuses et aristocratiques jeunes ladies prendre part à ces tournois nautiques.

Echelonnes sur les deux rives du ileuve, les pêcheurs à la ligne dont la legendaire patience est doublee du flegme britannique se livrent à leur delassement favori, et ils ont beau jeu, car le poisson abonde dans la Tamise; aussi les restaurants champêtres de ces parages en sont-ils toujours amplement fournis. Dans ces etablissements, il est un plat du jour qui ne varie pas, c’est le pâte d’anguille. Plat national autant qu’indigeste et dont la denomination sert d’enseigne à la plupart de ces restaurants designes sous le nom de Eel pie house (maison de pâtes d’anguille). On va manger de ce fameux pâte à Kew et à Richemond comme chez nous, on va se regaler d’une friture de goujons à Suresnes et d’une matelote à Chatou.

L’anguille a cela de particulier qu’on la trouve dans toutes les parties du monde : aussi bien dans la zone torride que dans les regions polaires; mais, chose inexpliquable, on n’en a jamais vu dans le Danube, ni dans le lac de Genève. Ce mysterieux poisson a toujours deroute les recherches des naturalistes et des savants qui n’ont pas encore pu decouvrir où, quand etcomment il se reproduit; car il est avere que jamais on n’a rencontre d’anguilles chargees de laite ou d’œufs en maturite. Il est probable que la reproduction s’opère au fond de la mer, car chaque annee, à certaines epoques, on voit dus legions innombrables de fretin d’anguille s’engager à l’embouchure des rivières et en remonter le courant.

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Les anguilles pêchees dans la Tamise jouissent à juste titre d’une excellente reputation; elles sont remarquables» surtout par leur grosseur.

Le pâte d’anguille, tel qu’on le mange dans les restaurants riverains, est le plus souvent apprête par des cordons bleus de deuxième ou troisième categorie et n*a rien de bien appetissant, pasplus au goût qu’à Tœil. Il est tellement assaisonne d’aromates et de condiments de toutes sortes parmi lesquels le poivre rouge domine, que, longtemps après l’avoir deguste, le palais en conserve encore un cuisant souvenir. J’en ai fait manger un jour à un Parisien de mes amis qui ne me l’a jamais pardonne.

Cependant, prepare avec goût et discernement, le pâle d’anguille est une excellente chose :

Depouillez deux anguilles et retirez-en les arêtes. Coupez le poisson en tronçons de 8 centimètres chacun que vous faites blanchir à Teau salee. Égouttez alors les morceaux d’anguille sur un tamis pour les laisser refroidir, et assaisonnez de sel, poivre, muscade râpee et fines herbes.

Prendre un plat à pâte anglais et placer dans le fond un lit d’anguille que l’on recouvre de tranches d’œufs durs assaisonnes de sel, poivre et fines herbes. On etend ensuite une seconde couche de poisson sur laquelle on etend encore des tranches d’œufs et l’on continue de la sorte jusqu’à ce que le plat soit plein. On ajoute un verre de consomme et autant de vin blanc. Le pâte est ensuite recouvert d’une epaisse abaisse de feuilletage, dore et mis au four. Après une heure de cuisson, on retire le pâte dans lequel on infiltre une bonne essence de poisson delayee avec une cuilleree de demi-glace. Ce pâte se mange chaud ou froid.

Il est d’habitude de depouiller l’anguille alors qu’elle est encore vivante. Ce surcroît de souffrance peut être epargne à ranimai en lui traversant la tête avec une fourchette en fer ou la pointe d’un couteau. L’anguille meurt presque immediatement.

Avant de clore ce chapitre, je me permettrai une petite digression interessante à propos d’un vieux dicton populaire con

LA CUISINE ANGLAISE 69

cernant le pdisson dont il vient d’être question. On dit d’un homme qui prend peur et s’effraye sans motif « qu’il ressemble à une anguille de Melun qui crie avant qu’on Tecorche ». Or, à Melun comme ailleurs, les anguilles observent un mutisme complet même lorsqu’on les depouille. Étant de passage daus la ville susnommee, j’ai voulu savoir Torigine de cette expression bizarre et voici l’explication qui m’a ete fournie :

A l’epoque où l’on representait des mystères au theâtre, des amateurs de Melun mirent en scène le martyre de saint Barthelemi qui fut ecorche vif et mis en croix. Un etudiant de la ville, nomme Languille^ charge du rôle de martyr, fut tellement epouvante au moment où les pseudo-bourreaux le saisirent pour simuler le supplice, qu’il se mit à pousser des cris dechirants. De là, paraît-il, vient la locution proverbiale qui a ete denaturee, car la veritable etait à l’origine : Crier comme Languille de Melun et non comme une anguille.

Ragoût d’anguille. – Collared Eel.

Le mets ainsi denomme est tout simplement de l’anguille cuite dans un court bouillon ordinaire avec addition d’un bouquet de sauge.

L’anguille est d’abord depouillee, puis l’arête en est enlevee. On l’enroule ensuite dans une serviette comme on fait pour une galantine. Au bout d’une demi-heure de cuisson, on la retire de ia serviette qui l’enveloppe et on l’envoie sur table, soit entière, soit coupee en tronçons. La sauce se fait avec la mirepoix, bien degraissee, dans laquelle l’anguille a ete cuite.

A Londres, on vend, dans les rues, des ragoûts d’anguille, comme, à Paris, on debite des pommes de terre frites.

C’est generalement à la porte des public-homes des quartiers populeux que des marchands ambulants sontanstalles. La por

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LA CUISINE ANGLAISE

tion se vend un penny et nombre de malheureux en font leurs dîners eu y adjoignant des pommes de terre et de l’eau claire.

Ce rata indescriptible, servi dans des bols ebreches de proprete douteuse par un homme en guenilles, ne tente que les

affames, et Taspect de la boutique, de la marchandise et du marchand indique assez à quelle classe du peuple appartiennent les consommateurs.

D’après une statistique recente, on a calcule que la consommation d’anguilles, à Londres seulement, etait annuellement de 1,650 tonnes et le nombre de contracteurs pour l’achat de ce ce poisson est de 24,000.

Anguille à la brochette. – Spitchcock EeL

Ce mot singulier compose de huit consonnes et seulement de deux voyelles derive, selon les etymologistes, du mot anglais spit (broche) et cock (coq) et correspond au terme ^français à la brochette. Le mot s’applique aussi bien à l’anguille qu’au pigeon, au poulet et aux rognons lorsqu’ils sont prepares pour cuire à la crapaudine ou à la brochette.

Après avoir depouille Tanguille par le procede ordinaire, ou la desosse et on la coupe en tronçons d’egale longueur. On assaisonne ces tronçons de sel, poivre et fines herbes et on les

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roiilodansla farine pour les paner d’abord à l’œuf, puis au beurre. On les transperce ensuite avec de petites brochettes alin qu’ils conservent leur forme à la cuisson et on les fait griller sur un feu doux. On les dresse sur un lit de persil frit et Ton envoie à part une sauce tartare fortement assaisonnee.

COQUILLAGES ET CRUSTACÉS

Calipash et Calipee.

Ces deux mots sont d’origine indienne et signifient carapace. Le calipash est le nom que Ton donne à la coquille superieure de la tortue, tandis que le calipee est la viande qui adhère au plastron de Tanimal.

C’est cette chair qui, avec les nageoires, compose la soupe de tortue que l’on considère comme le plus luxueux des potages.

La tortue ayant ele tuee par le procede decrit à l’article du potage, on etend l’animal sur le dos et l’on separe les deux carapaces en faisant glisser la lame du couteau entre les deux coquilles; on les divise au moyen d’une scie en plusieurs morceaux qu’on fait blanchir afin d’en enlever les ecailles. On les met ensuite à cuire dans une braisière avec de l’eau salee legèrement. On y ajoute un jarret de veau, quelques carottes, poireaux et oignons, un peu de celeri et un bouquet compose de persil, thym, laurier, basilic et marjolaine.

On reconnaît que la tortue est cuite lorsque la viande se detache facilement des os. On la met alors egoutter, puis refroidir

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LA CUISINE .NGLAISE

sur de larges plats. On la detaille ensuite en morceaux egaux et on la sert comme entree à Tinstar de la tête de veau, acconipagnee d’une sauce italienne, madère ou tinancière faite avec la cuisson de la tortue.

Nageoires de tortue. – Turtle fins.

Les nageoires de tortue se servent comme entree et constituent un mets très recherche. On les echaude d’abord pour en enlever les ecailles, puis on les fait braiser avec une bouteille de chablis et assez de bouillon pour qu’elles baignent entièrement. On assaisonne de sel et Ton ajoute quelques carottes et oignons, ainsi qu’un bouquet garni compose de thym, laurier, persil, basilic et marjolaine. On laisse mijoter pendant trois heures. On egoutte alors les nageoires, dont on^delache lesos et que l’on dresse sur un plat. On degraisse la cuisson, que l’on passe à travers une fine passoire et qu’on lie avec une cuilleree de fecule ou d’arrow-rootpour en former une sauce à laquelle on ajoute un verre de madère, et dont on se sert pour saucer les nageoires en les envoyant sur la table.

LA CUISINE ANGLAISE

Terraplnes à l’americaine.

Laterrapine est une petite tortue que Ton trouve en Amerique, principalement sur les côtes de la Caroline. – I) y en a de plusieurs sortes, mais l’espèce connue sous le nom de diamand haclcs (dos de diamant) est la plus estimee. Ce nom leur vient de ce que la carapace superieure est formee de rugosites, ayant l’aspect d’un diamant taille. – Les plus grosses mesurent douze ou quatorze centimètres de longueur.

Pour les preparer, on les plonge vivantes dans de Teau bouillante salee, jusqu’à ce que la peau des pattes et de la tète s’enlève facilement au frottement et que les ecailles de la carapace se detachent. On les remet à cuire dans Teau salee pendant une heure à peu près.

On egoutte alors les tortues, puis on separe les deux carapaces. On jette le gesier, les intestins et surtout le fiel, qui se trouve adherer au foie et qu’il faut avoir soin de ne pas crever, car la moindre goutte de fiel communiquerait au ragoût une amertume que rien ne saurait enlever. On conserve le foie et les œufs pour les ajouter plus tard au ragoût.

Après avoir coupe la viande des terrapines en morceaux, on la met dans une casserole avec du madère, du beurre, un bouquet garni, du sel et du cayenne, et on laisse mijoter pendant trois quarts d’heure On fait alors une liaison de six jaunes d’oeufs delayes avec de la crème double et la cuisson des terrapines qu’on a laissee reduire à demi-glace.

On remue cette liaison sur le feu sans laisser bouillir et, lorsqu’elle a atteint la consistance desiree, on y ajoute la viande des tortues, ainsi que les œufs et le foie, et Ton sert le ragoût dans des coquilles d’argent ou même dans des caisses en papier huile.

La terrapine constitue un plat très delicat et très recherche par les Americains, qui lui assignent le titre de plat national.

74 LA CUISINE ANGLAISE

(Vest surtout dans la capitale du Maryland que ce mets est en faveur et les soupers de terrapines de Ballimore ont une reputation bien connue des gastronomes du nouveau monde.

Huîtres anglaises. – English oysters.

Disons-le tout d’abord, les Anglais, quoique grands amateurs d’huîtres, ne savent pas les manger!…

Cette affirmation, je n’en doute pas. va me susciter une foule de protestations de la part de mes amis d’outre-Manche, mais quoi qu’ils puissent dire, je n’en soutiens pas moins ce que j’avance, et les veritables amateurs de ce divin bivalve se rangeront de mon avis lorsqu’ils sauront que les Anglais mangent les huîtres dans la coquille plate, d’où ils les enlèvent avec la fourchette.

L’huître, j’en conviens, servie de cette façon, apparaît sous un plus gracieux aspect et semble plus appetissante, plus blanche et plus rebondie, mais ce système a le desavantage de la priver de sa precieuse liqueur, sans laquelle elle n’a plus aucun charme pour le connaisseur, qui n’admet qu’une manière de la manger : c’est de la faire glisser de sa coquille creuse, après l’en avoir detachee, directement dans la bouche.

Pour comble de vandalisme, les Anglais remplacent par Taie et le stout le semillant chablis et le petillant sauterne, accompagnement oblige chez nous d’un regal d’huîlres.

Les huîtres anglaises connues sous le nom de native sont les plus recherchees, mais leur prix eleve les rend inabordables aux petites bourses. Il est vrai qu’elles sont d’une delicatesse extrême.

L’huître verte, si appreciee chez nous, est en defaveur en Angleterre, où on lui attribue des proprietes malsaines à cause de sa couleur, qui fait supposer qu’elle provient du voisinage d’un gisement de cuivre, tandis qu’en realite cette teinte ver

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dâtrc lui est communiquee par une certaine plante marine qui croît sur les côtes d’Essex et d’Irlande où ces huîtres abondent. – Comme elles n’ont pas cours sur le marche anglais, elles sont expediees en Belgiqu*e pour être ensuite envoyees à Paris comme provenant des bancs d*Ostende. – ^Les huîtres ecossaises connues sous le nom de « Pandore Oysters » sont très grosses et de très bonne qualite et se prêtent admirablement aux besoins culinaires. Celui qui le premier sut reconnaître et apprecier les principes nutritifs de Fhuitre a bien merite de la reconnaissance des gourmands du monde entier. Celte decouverte est, dit-on, due à un eiïet du hasard et remonte aux temps antiques.

On raconte qu’un jeune Athenien, se promenant un jour au bord de la mer, heurta du pied une huître qui bâillait au soleil. Il introduisit ses doigts entre les deux coquilles pour l’examiner plus à son aise; mais celles-ci, se refermant subitement, emprisonnèrent le pouce et l’index de l’imprudent qui, après s’être degage de l’etreinte, porta instinctivement à sa bouche ses doigts impregnes du jus de l’huître. Alleche par un goût exquis qui lui etait inconnu, notre homme prit une pierre et brisa la coquille, dont il avala le contenu. Ce fut une revelation, et à partir de ce moment l’huître prit place dans l’alimentation.

Une remarque en passant, à propos du genre de boisson qui doit être absorbee en mangeant des huîtres. Il a ete constate qu’une huître, mise dans un verre contenant moitie eau et moitie cognac, devient, au bout de peu de temps, sèche et coriace, tandis qu’une autre, immergee pendant la même periode dans du stout ou de l’aie, reste molle et a des tendances à se dissoudre. De ce phenomène on lire la conclusion que le stout et l’aie sont plus propres à aider à la digestion des huîtres que le cognac et les esprits en general.

7t LA CUISINE ANGLAISE

Huîtres à la tartare. – Native oysters à la tartare.

Choisir une douzaine de coquilles d’huilres creuses et autant que possible de la même grandeur; les laver, les brosser et les essuyer, garnir le fond des coquilles de cresson alenois sur lequel on place trois noix d’huîtres prealablement blanchies et absorbees. Faire ensuite une sauce tartare relevee d’une pointe de cayenne et en masquer les huîtres.

En Angleterre, les huîtres au naturel se servent generalement au diner. On les mange avant le potage en guise de hors-d’œuvre et il est essentiel d’envoyer en même temps de minces tranches de pain bis beurre.

Huîtres à la diable. – Deviled oysters.

Faire pocher, dans leur jus, sans laisser bouillir, trois douzaines d’huîtres; les egoutter en preservant la liqueur, puis supprimer les barbes.

Faire une bechamel maigre avec Teau des huîtres et de la bonne crème; assaisonner de sel, de muscade râpee et d’une forte dose de poivre de Cayenne. Amalgamer les huîtres avec cette sauce, qui doit être tenue un peu epaisse, et garnir une douzaine de coquilles creuses bien lavees et choisies autant que possible de la même grandeur. Saupoudrer la surface avec de la mie de pain frite et, un quart d’heure avant de servir, mettre les huîtres au four pour les chauffer seulement, en evitant autant que possible de les laisser bouillir, car elles perdraient leur arôme et deviendraient coriaces.

On attribue aux decUled oysters les mêmes proprietes qu’au

LA CUISINE ANGLAISE

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homard à Tamericaine, proprietes qui se resument dans ces quatre vers que je copie dans le charmant volume de poesies de mon ami Achille Ozanne :

¦-X l^’^r ^T^TS^’^’^’^ – ^ – – – ‘ ‘

Car plus d’une beaute rigide, Au tôte-à-tete familier Succombe, après ce plat perfide, En cabinet particulier.

Beignets d’huîtres. – Oysters fritters.

On prend deux douzaines de grosses huîtres, on les blanchit legèrement dans leur jus, on les ebarbe et on les egoutte.

Faire une sauce allemande avec un peu de roux, le jus des huîtres, de la bonne crème, un soupçon de glace de viande et deux jaunes d’œufs; assaisonner de poivre de Cayenne et de muscade râpee, puis, lorsque la sauce est bien liee sur le feu, on y trempe separement chaque huître que Ton depose sur un plat pour les mettre ensuite à la glace.

Lorsque les huîtres sont refroidies et la sauce qui les recouvre

78 LA CUISINE ANGLAISE

bien prise, on les detache avec un couteau pour les rouler dans la mie de pain, puis on les pane une seconde fois après les avoir trempees dans de Tœuf battu.

Faire frire et dresser sur une serviette avec garniture de persil frit.

Une manière plus simple de servir ces beignets consiste à tremper les huîtres dans la pâte à frire après les avoir ebarbees et fait legèrement blanchir, au lieu de les paner, puis on les plonge dans la friture bouillante.

Anges à cheval. – Angels horse back.

Chaque huître, après avoir ete prealablement blanchie et ebarbee, est enveloppee dans une petite barde de lard coupee très mince et embrochee par un hàtelet.

Les brochettes sont mises aLoirsà four très chaud pendant quelques minutes, puis on fait glisser les huîtres du hàtelet pour les dresser sur des croûtons de pain grille ou frit. On les saupoudre legèrement de cayenne et de mie de pain frite avant de les envoyer sur table.

Les angels on horse back se servent generalement à la fin du dîner en même temps que le fromage, ou comme hors-d’œuvre.

Huîtres frites au naturel. – Fried oysters.

Choisir de preference les huîtres dites pieds de cheval pour ce mets.

Ebarber les huîtres et en supprimer la partie dure en ne conservant que la noix, qu’on egoulle sur un linge. Au moment de les faire frire, on roule les huîtres dans la farine, puis on les Irempe dans Tœuf battu pour les recouvrir de mie de pain

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fraîche. Faire frire à friture très chaude. Lorsque les huîtres sont prêtes, on les dresse en pyramide sur un plat recouvert d*une serviette. Garnir de persil frit.

Petits souffles aux huîtres. – Small oysters souffles.

Se procurer une douzaine de grosses huîtres (sauce oysters). Les blanchir, les ebarber et n’en garder que la noix, que Ton divise en deux ou trois morceaux, selon que l’huître est plus ou moins grosse.

D’autre part, delayer dans une casserole moyenne trois cuillerees de farine avec la liqueur des huUres et les deux tiers d’un verre de lait. Assaisonnez de sel, muscade râpee et poivre de Cayenne, et ajouter 40 grammes de beurre et quatre jaunes d*œufs. Tournez l’appareil sur le feu jusqu’à ce qu’il epaississe de la consistance d’une crème pâtissière ordinaire. Faire cuire quelques minutes en remuant continuellement avec la cuiller pour empêcher la pâte de s’attacher, puis ajouter les huîtres et en dernier lieu les blancs d’œufs fouettes. Après avoir melange legèrement les blancs à l’appareil, on en emplit des petites caisses à soufQe en porcelaine ou en papier et l’on fait cuire à four modere pendant un quart d’heure. Semer à la surface un peu de chapelure fine.

Crabe. – Dresseb crab.

On sait que les crabes peches sur les côtes de la Grande-Bretagne sont remarquables par leur grosseur. Il n’est pas rare d’en trouver qui pèsent quatre ou cinq livres.

11 est à remarquer que la Providence semble avoir reglemente

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l’arrivee de la saison des homards et des crabes de manière qu’elle coïncide avec l’epoque où les huîtres et les moules cessent d’être bonnes. C’est donc depuis avril jusqu’en octobre que ces crustaces sont en meilleures conditions pour être mangees. On distingue le mâle de la femelle aux pinces, qui sont plus petites chez celui-ci, et à la largeur de la partie inferieure de la carapace, qui est moins large chez le mâle. Mais, s’il y a moins de chair dans les pinces de la femelle, on en est dedommage par la largeur de son foie et par l’abondance de la substance cremeuse qui l’entoure.

On apprête, en Angleterre^ le crabe d’une façon particulière :

Après l’avoir fait cuire à Teau bouillante et salee pendant une demi-heure, on le» laisse refroidir. Lorsqu’il est froid, on lui detache les pattes et les pinces, puis, avec la pointe d’un couteau, qu’on passe entre les deux carapaces, on enlève le plastron de l’animal. On retire ensuite tout le contenu de la coquille creuse, qui se compose d’une viande blanche filamenteuse et d’une substance molle et jaunâtre qui n’est autre chose que le foie du crustace.

On delaye ce foie dans une terriue avec du vinaigre, de l’huile, de la moutarde anglaise, un peu de sel et du poivre de Cayenne. On ajoute à cette sauce la viande de l’interieur, ainsi que la chair des pinces, qu’on efFile au moyen de deux fourchettes.

Après avoir lave et essuye le côte creux de la carapace, on le remplit avec la chair assaisonnee du crabe. On lisse la surface avec la lame d’un couteau et on l’ornemente avec des jaunes d’œufs haches, du persil et du rouge de homard. On emploie generalement la chair de deux crabes pour remplir une coquille. Avec les pattes qu’on rentre l’une dans l’autre, on forme une espèce de chapelet dont on entoure le crabe lorsqu’il est dresse. On garnit de branches de persil. On sert à part de la sauce mayonnaise.

Les marchands de poisson à Londres fournissent sur commande les crabes tout accommodes, et ils mettent une certaine

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coquetterie à dessiner des emblèmes sur la surface avec du persil, du jaune d’œuf et le rouge du homard.

Ils reproduisent parfois de la sorte les initiales et les armes du client.

Crabe à rindlenne. – Grab à l’indienne.

Le crabe à Tiiidienne se sert chaud. On procède comme dans la recelte precedente, mais, au lieu d’assaisonner la chair à rhuile et au vinaigre, on la melange avec une sauce au curry. On la fait chaufler, puis- on en remplit la carapace. On sème de la mie de pain frite sur la surface et l’on met au four pendant un quart d’heure. ‘

Homard à ramericaine.

Le homard à l’americaine n’est pas, .comme on pourrait le supposer, une importation du nouveau monde, pas plus qu’elle n’est d’origine anglaise. La recette en est au contraire essentiellement parisienne, et ce mets fit la vogue du restaurant Peters, qui le mit à la mode vers la fin du règne de Napoleon IIL

Si j’en donne ici la recette, ce n’est donc pas à titre de mets anglais ou americain, mais simplement parce que sa denomi 6

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LA CUISINE an(;laise

nation lui donne droit de faire partie de la nomenclature des plats etrangers.

D’après la recette originale, on doit decouper le homard vivant, mais il est un moyen plus humain d’operer sans nuire à la reussite, et dont je recommande la recette qui a l’avantage d’abreger l’agonie de l’animal, en même temps qu’il facilite l’operation du decoupage; car on n’est plus gêne par les soubresauts de la victime se debattant sous le couteau de son

bourreau. Ce moyen, d’une extrême simplicite, consiste à introduire dans la bouche du crustace, après Tavoir etendu sur la table et en le maintenant de la main gauche, une aiguille à brider dans toute sa longueur. L’animal expire immediatement. On procède alors au decoupage :

Après avoir coupe le homard en tronçons et brise les pinces avec precaution sans les deformer, on le place dans une casserole plate dans laquelle on a mis de l’huile, trois ou quatre oignons coupes en rondelles, trois echalotes, quelques branches de persil, un peu de thym, une feuille de laurier, quelques champignons eminces, une gousse d’ail, du sel, du poivre et une pincee de cayenne. Faire revenir le tout pendant dix minutes, puis egoutter l’huile que l’on remplace par un quart de litre de châbHs, un petit verre de cognac, un peu de glace et deux tomates emincees. Laisser mijoter pendant vingt minutes. Retirer alors les morceaux de homard que Ton place dans un plat creux et que Ton tient au chaud. Ajouter à la cuisson une liaison composee de jaunes d’œufs qu’on melange avec la substance visqueuse qui se trouve dans la tête de l’animal et qu’on a recu^^illie lorsqu’on a decoupe le homard ou la langouste. Remuer la sauce sur le feu sans bouillir, et, lorsqu’elle commence à epaissir, la retirer du feu. Y ajouter un morceau de beurre frais, un jus de citron, et la passer à travers une passoire sur les morceaux de homard.

LA CUISINE ANGLAISE 83

Homard à la NeiT^burg.

Si le homard dit à ramericaine est inconnu en Angleterre, en revanche, on sert frequemment le plat national Newyorkais qu’on nomme le homard à la newbourg et qui se prepare ainsi :

Faire cuire àTeau salee deux homards, puis laisser refroidir. Briser la carapace de manière à retirer toute la chair d’un seul morceau qu’on coupe ensuite en escalopes de l’epaisseur de l centimètre. Faire revenir les tranches de homard legèrement au beurre dans un sautoir, puis les recouvrir de crème et les laisser mijoter sur un feu doux, pendant quelques minutes, en les remuant de temps en temps pour eviter qu’elles ne s’attachent au fond du sautoir. Assaisonner de sel, poivre de Gayenne et muscade râpee, ajouter un verre de madère et quelques tranches de truffes. Finalement, lier le ragoût avec quatre jaunes d’œufs delayes avec un peu de crème, et en dernier lieu avec un morceau de beurre frais. Dresser dans un plat à legumes creux ou au milieu d*une bordure de puree de pommes de terre.

Curry de homard. – Curried lobster.

Retirer la viande d’un gros homard cuit ou d’une langouste, la couper en tranches de 1 centimètre d’epaisseur, et la placer dans une casserole de moyenne grandeur. D’autre part, preparer de la sauce curry (voir au chapitre des sauces) et la verser bouillante sur le homari qu’on laisse mijoter pendant cinq ou six minutes. La sauce doit être tenue un peu epaisse. Ce ragoût doit être ensuite dresse dans un plat creux et entoure d’une bordure de riz cuit à la turque.

8i LA CUISINE ANGLAISE

Homard grille. – Broiled lobster.

Prendre deux homards de moyenne grandeur, et après les avoir tues en leur enfonçant une aiguille à brider dans la bouche on les fend dans leur longueur. On enlève la poche f t les intestins, puis on les enduit d’huile, on les assaisonne de sel et de poivre et on les. fait griller sur un feu vif. Lorsqu’ils sont cuits d’un côte, les retourner de l’autre. En les envoyant sur table, on les dresse le côte ouvert en dessus et on etend sur chaque moitie de homard un beurre maître d’hôtel additionne d’un peu de glace de viande fondue.

Terrine de crevettes. – Potted shrimps.

Choisir une livre de crevettes fraîches. Les eplucher et mettre de côte les têtes et les coquilles. Laver les filets de six anchois qu’on pile dans un mortier avec la viande des crevetles et 30 grammes de beurre, un peu de muscade râpee et une bonne dose de poivre de (Mayenne. Passer la puree à travers un tamis de laiton très fin.

D’autre part, piler les têtes et les coquilles des crevetles avec un morceau de beurre que l’on met ensuite dans une casserole. On les laisse frire pendant quelques minutes pour en extraire l’essence, qu’on passe à travers une fine passoire et qu’on delaye avec la puree de crevettes.

On remet le tout sur le feu en y ajoutant un peu plus de beurre, si cela est necessaire; on laisse cuire la puree pendant quelques minutes sans cesser de la remuer, puis on la verse dans de petits pots lorsqu’elle est presque froide. On egalise la surface avec la lame d’un couteau à palette, et quel

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ques heures après ou recouvre d’un peu de beurre clarifie pour eviter le contact de Tair. Cette puree se sert generalement au premier dejeuner ou avec le the de cinq heures. On la mange etendue sur du pain grille ou sur des biscuits secs. On en fait aussi des sandwiches, sur lesquelles on sème du cresson alenois. Une autre manière de confectionner les « potted shrimps » est de faire revenir les crevettes dans le beurre clarifie après les avoir epluchees. On les assaisonne fortement de poivre de Guyenne, d’un peu de sel et de muscade et on les verse dans les petits pots dans lesquels on les laisse ainsi refroidir. Le beurre doit être assez abondant pour recouvrir les crevettes.

Les Crevettes. – Shrimps and pra^vns.

GommeDt on les poche. – Gomment on les prepare. – Gomment on les sert et comment on les mange.

Quoi de plus appetissant à voir sur une nappe bien blanche qu’un ravier de crevettes bien roses, garni de persil bien vert, et flanque d’une assiette de beurre bien frais?

Ce hors-d’œuvre oblige de tout dejeuner fin attire Toeil et seduit l’odorat en attendant qu’il charme le palais. La couleur en est unique et je suis surpris qu’on n’ait pas encore songe à creer la couleur crevette comme on a imagine la teinte fraise ecrasee, eau du Nil et crème fouettee.

Un des passe-temps les plus agreables, un des sports les plus à la mode au bord de la mer, parmi les visiteurs en quête de plaisirs hygieniques, c’est la pêche à la crevette.

Il y a plusieurs sortes de crevettes : la grise, la rose, qu’on appelle aussi « salicoque», puis la crevette connue sous le nom de « bouquet », qui est plus grosse, plus rare et beaucoup plus estimee que les autres espèces (Prawris).

Ce minuscule crustace se plaît un peu partout, mais princi

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paiement le long- des côtes de la Normandie et de la Bretagne, où Ton en pêche d’enormes quantites; seulement, la manière de les prendre difi^re, selon qu’on opère sur une plage sablonneuse ou dans des parages rocailleux.

Pour se livrer à ce g-enre d’exercice, un costume special adapte aux exigences de la pèche est de rigueur.

Il en est, et c’est le plus grand nombre, qui s’affublent d’un costume de bain, en prevision des accidents qui peuvent survenir, car il arrive souvent que l’on glisse sur les varechs huileux ou sur les herbes marines et que la chute se termine par une immersion jusqu^à mi-corps dans Teau salee. Le même danger n’existe pas sur le sable, mais, par contre, on est expose à être inonde par la vague, qu’il ne faut pas craindre d’affronter si Ton tient à faire une pêche fructueuse.

Bien amusants à voir, ces pêcheurs fantaisistes, hommes, femmes et enfants eparpilles sur la plage ou errant le long des falaises, explorant le creux des rochers et les fondrières où la mer a passe. Tous sont chausses de souliers de toile à semelle de paille tressee, et portent au côte le panier d’osier qui doit renfermer leurs victimes; tous ont les jambes nues bien au delà du genou, et sont munis d’un filet qui varie dans sa forme et dans sa grandeur selon les parages où l’on opère.

Sur le sable, la pêche a lieu à la maree montante. C’est la pêche à la « poussee » et voici comment elle se pratique. Le pêcheur pousse devant lui, à Tendroit où la vague vient mourir, un largo filet mi-circulaire, emmanche d’un long bâton. 11 marche parallèlement à la vague pendant une certaine distance, puis s’arrête pour examiner son filet et en retirer le poisson qu’il met dans le panier qu’il porte à son côte. Il se remet ensuite en route et continue le même manège jusqu’à ce que fatigue s’ensuive.

C’est à maree basse qu’on pêche la crevette dans les rochers. On se precautionne d’un filet en forme d entonnoir qui est fixe autour d’un cercle de fer de 30 centimètres de diamètre, suspendu à l’extremite d’un bâton par quatre bouts de ficelle. C’est ce qu’on appelle la pêche à la balance. On attache un appât au

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fond du filet que Ton descend dans les trous où l’on suppose que la crevette, surprise par le reflux de la mer, a cherche un refuge.

Penche sur la roche, on guette le poisson, et, lorsqu’on le voit se diriger vers le centre du filet, on relève vivement celui-ci par un mouvement brusque et Ton est maître de sa proie.

C’est àEtretat que j’ai vu pecher la crevette par des amateurs plus ou moins experimentes, ainsi que par des jêcheurs de profession qui en font une bonne provende pendant la saison des bains.

De toutes les stations balneaires des côtes normandes, celle qui, à mon avis, olTrele plus d’interêt; celle qui, par so!i admirable situation et son site pittoresque, aie plus inspire le pinceau des peintres et la plume des chroniqueurs, c’est la plage d’Etretat.

Resserree entre deux immenses falaises de 300 pieds de hauteur qui la protègent contre les vents d’Est et d’Ouest, elle forme une large baie spacieuse propice aux baigneuses en même temps qu’accessible aux pêcheurs.

C’est Alphonse Karr qui decouvrit Etretat il y a une quarantaine d’annees. En attendant que la ville, qui lui doit sa prosperite, lui elève une statue, elle lui a fait l’honneur de donner son nom à sa rue principale et son portrait en bas-relief orne le fronton du plus important hôtel de la plage. – Dans l’origine, Etretat n’etait qu’un miserable hameau, peuple seulement par une colonie de pêcheurs qui desertaient chaque annee leurs cahutes pendant cinq mois pour aller à Terre-Neuve pêcher la morue. Aujourd’hui, grâce à la publicite que le celèbre romancier a donnee à sa plage de predilection, les chaumières et les huttes ont fait place à de splendides châteaux, à de charmantes villas et à de ravissants chalets. L’endroit est devenu le rendezvous habituel de la crème du monde artistique et litteraire. Un nombre incalculable d’hommes de merite parmi les peintres, poètes, ecrivains, musiciens et artistes dramatiques ont sejourne à Etretat et le fait est certifie par les livres d’hôtel sur lesquels ils ont appose leurs signatures. Dans un de ces hôtels j’ai feuillete un album rempli de croquis et de bribes poetiques et litte

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raires signes des plus grands noms et que plus d’un collectionneur d’autographes paierait son pesant d’or.

Mais revenons à nos crevettes.

Sept ou huit minutes d’ebuUition à l’eau salee suffisent à leur cuisson.

On les sert de differentes manières, mais on les mange plus communement comme hors-d’œuvre pour dejeuner, avec du pain beurre. – La manière de les presenter sur table varie selon la grosseur et selon l’espèce. – Le plus souvent on les met simplement dans un ravier. Les grosses, « le bouquet », se dressent facilement dans un moule à charlotte. Ce sont celles-ci qu’on nomme prawns.

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On les place symeiriquement par rangs separes d’une couche epaisse de persil, et, lorsque le moule est rempli, on les renverse sur un plat garni d’une serviette. On peut encore piquer les crustaces en gerbe sur une moitie de citron placee au milieu d’un lit de persil.

Une autre manière originale et elegante de les envoyer sur table est celle-ci, qu’on pourrait designer sous le nom de fontaine de crevettes :

Il est essentiel que les crevettes soient belles et autant que possible de même grosseur. On prend un verre à pied evase, sur les bords duquel on accroche les crevettes par la queue en laissant pendre la tête à Texlerieur. – On place alors le verre sur

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un plat, sans serviette, en garnissant la base d’un peu de persil. Au moment de servir, on emplit le verre d’eau jusqu’au bord; et, comme le corps recourbe de l’animal a la forme d’un syphon, il s’ensuit que l’eau s’ecoule hors du vase et vient tomber dans le plat en glissant le long des antennes en forme de gouttelettes transparentes qui se succèdent avec rapidite, ce qui produit un effet des plus pittoresques.

On doit autant que possible servir les crevettes le même jour qu’elles ont ete pèchees, car elles sont d’une nature si delicate qu’elles perdent leur goût en perdant leur première fraîcheur.

X)n emploie encore les crevettes comme garniture de poissons dresses, tels que soles normandes, filets de truite Joinville, etc. – On s’en sert aussi pour la decoration des grosses pièces froides telles que saumon, truites ou aspics de poisson. – On en fait aussi des croquettes, des bouchees, des coquilles au gratin et surtout une sauce excellente pour accompagner le turbot et la barbue.

Bucardes ou Clovisses. – Cookies.

Ces coquillages, qu’on emploie rarement dans la cuisine française, ont pourtant un certain merite que les Anglais savent apprecier. On les mange crus, en les assaisonnant d’un peu de vinaigre ou de quelques gouttes de jus de citron. On les emploie aussi comme garniture dans une matelote normande, en place d’huîtres et de moules, lorsque celles-ci ne sont pas procurables.

A Londres, ce sont les huîtres du pauvre, et Ton peut voir dans les quartinrs populeux de la grande metropole quantite de marchands ambulants installes devant des voitures à bras, autour desquelles se presse une foule de gens du peuple qui, pour la modique somme d’un penny, se payent le luxe de deguster une

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soucoupe remplie de ces mollusques nageant dans le vinaigre, et qu’on saupoudre de poivre noir ou rouge, au gre du consommateur.

Clams.

Ce mollusque est plus connu en Amerique qu’en Angleterre. C’est une variete du clovisse, mais il est plus gros que ce dernier. Il a beaucoup de ressemblance avec le coquillage que dans le midi on. appelle palourde.

On accommode les clams de la même façon que les huîtres, c’est-à-dire qu’on eu fait des potages, des croquettes, des garnitures, des coquilles au gratin, etc. On les mange aussi crues, assaisonnes de quelques gouttes de vinaigre et de poivre de Cayenne. On peut s’en procurer toute l’annee; aussi deviennentils precieux lorsque les huîtres font defaut. Les Americains sont très friands de clams et les affectionnent surtout en potage, qu’on trouve toujours inscrit en tête du menu dans presque tous les restaurants. Cette soupe s’appelle Clam clwwder. Mais la façon la plus usitee comme aussi la plus simple de manger ces mollusques est de les faire cuire dans leur coquille sur de la cendre rouge ou dans un four bien chaud. A Washington, on vend les clams dans les rues comme à Londres on vend les clovisses et le ragoût d’anguille.

CHAPITRE III BŒUF. – BEEF.

SOMMAIRE

Beefsteak aux huîtres {BeefstPak and oyster).

Beefsteak (Beefsteah).

Beelsteak aux oignons {Beefsteak and onions).

Bœuf presse {Pressrd hecf).

Bœuf rôti [Roast heef).

Bœuf sale (Saïl heef).

Bubble and squeak {Bubble and s^fueak}.

Cœur de bœuf {Oj- heart).

Emince de bœuf (Minced heef).

Bœuf de Hombourg râpe {Grated Hombourff heef).

Miroton aux os grilles {Hached and grilled bone).

Os à la moelle {Marrow bones).

Pâte de beefsteaks {Beefsteak pie).

Pâte du berger (Shepherd pie).

Pâte de beefsteaks aux rognons {Beefsteak and kidney pie).

Pudding de beefsteak {Beefsteak pudding).

Pudding de beefsteak aux huîtres {Beefsteak and nyster pudding).

Pudding de beefsteak aux rognons {Beefsteak and kidney pudding).

Pudding de rognons {Kidney pudding).

Pudding roule à l’emince de bœuf {Savory roi/y pudding).

i*oitrine de bœuf salee {Salted bveast of l)eef).

Puree de bœuf en terrine {Potted beef).

Puree de langue en terrine (Potted ojo tongïic).

Bond de bœuf sale {Bound of beef).

Rump steak grille [Broiled rump steak) .

Rump steak braise aux oignons (Steired steak and onions).

Rump steak saute (Fried rump steak).

Saucisses de bœuf [Beef sausage).

Toad in the hole {Toad in tlie hole).

Tripes aux oignons {Tripe and onions).

Tripes frites {Fried tripe).

CHAPITRE III BŒUF. – BEEF.

Le Roast-beef.

De tous ses plats uationaux, celui dont l’Anglais est le plus fier, celui qu’il se largue à bon droit de savoir apprêter, servir et manger mieux que tous les autres peuples de la terre, c’est sans contredit le bœuf rôli.

L’importance attachee à ce mets est telle en Angleterre, qu’on en a fait le molif d’un chant patriotique : the roast-beef of old England, qui va de pair avec le God saie the Queen et le Riile Brilannia.

Il est des personnes non initiees à la langue anglaise qui ecrivent le mot roast-beef tel qu’il se prononce, c’est-à-dire rosbif, c’est un tort. Car, en denaturant l’orthographe d’un nom etranger, on s’expose ainsi à en denaturer le sens. Carême luimême, quoique ayant habite l’Angleterre, ignorait la veritable signification du mot roast-beef, puisque dans son livre il commet la grotesque erreur d’appeler une longe de mouton rôtie roast-beef de mouton.

Dans certaines grandes occasions, telles que la celebration de la majorite d’un fils de famille^ il etait autrefois d’usage de faire rôtir un bœuf entier. Cette coutume ridicule tend heureusement à disparaître, et ce n’est, maintenant, que rarement qu’on se conforme à la tradition. Il m’a ete donne d’assister à l’un d«’ ces festivals monstres où un bœuf entier fut oficrt aux nombreux invites comme pièce de resistance. Une immense cheminee avait ete construite pour la circonstance, ainsi qu’une ciiorme broche, à quatre branches, longue de cinq mètres, mise en mouvement au moyen de deux fortes poulies reposant sur deux chaînes

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circulaires. Sur celte broche etait fixe le bœuf dont on avait enleve la poitrine, la tête et les jarrets et qu’on avait enveloppe dans une epaisse muraille de pâte faite de farine et d’eau, recouverte ensuite d’une couche de fort papier. Le tout, bien ficele et bien arrose de graisse, fut place à une grande distance du foyer et demanda quatorze heures de cuisson. Cette extravagante et ridicule coutume fut mise en pratique lors du jubile de la reine Victoria. Les municipalites de plusieurs grandes cites d’Angleterre et d’Ecosse, dans leur enthousiasme, ne trouvèrent rien de mieux, pour manifester leur amour et leur respect pour leur bien-aimee souveraine, que de faire rôtir en son honneur un representant de la race bovine dans son entier.

Pendant le rigoureux hiver de 1G90, la Tamise fut entièrement gelee et l’on raconte qu’une foire foraine fut installee sur la glace. La principale attraction de cette fête improvisee fut l’exhibition d’un bœuf entier que l’on fit rôtir sur la rivière gelee sous une des arches du pont de Londres.

Le cuisinier anglais, il faut lui rendre cette justice, est excellent rôtisseur. Nul ne sait mieux que lui rôtir à point un morceau de viande quels que soient son poids et son volume, qu’il s’agisse d’une simple mauviette ou d’un bœuf entier.

On croit generalement en France que les Anglais se nourrissent de viande saignante, c’est un prejuge que rien ne justifie, car, en Angleterre, on mange au contraire la viande plus cuite que chez nous.

L’origine des mots siiioin of heef pour designer l’aloyau remonte à Henry VIII. Ce roi etait un grand mangeur et le roast-beef avait pour lui un attrait particulier. Un jour, transporte à la vue d’un magnifique aloyau bien cuit à point et des flancs duquel s’echappait un jus succulent, il le proclama chevalier, parodiant en cela l’acte de Caligula qui eleva son cheval favori au rang de senateur romain. Le titre de nobilite octroye

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par la bouche royale à la longe de bœuf a ete sanctioune par l’usage, et l’on ne designe aujourd’hui ce rôti que par le nom de sirloinof beef, ce qui signifie baron de bœuf.

C’est à Henry qu’on doit l’institution du corps des beef eaters (mangeurs de bœuf). Ces soldats, qui composaient une garde d’elite, etaient soumis à un regime de nourriture’ très substantielle, compose presque exclusivement de bœuf bouilli et rôti. C’etaient les gardiens de la Tour de Londres.

Aujourd’hui encore, les hommes preposes à la garde du donjon historique ont conserve le costume traditionnel.

Ce grotesque accoutrement, qui divertit les visiieurs etrangers, se compose d’un justaucorqs ecarlate à manches bouffantes avec les armes royales brodees en or sur la poitrine. La tête de ces hommes emerge d’une epaisse collerette tuyautee, et leur chapeau plat est agremente de nœuds de rubans rouges et bleus. En outre, pour completer le tableau, ils sont armes de hallebnrdes.

C’est encore Henry VIII, de gourmande memoire, qui, s’etant un jour e^’^are à la chasse, demanda l’hospitalite dans un château, pretendant qu’il etait un gentilhomme de la suite du roi. Le châtelain lui offrit gracieusement la table et le gîte. La pièce de resistance du dîner etait precisement le morceau fiivori du prince: une Ionise de bœuf rôtie.

Le roi, un peu glouton de sa nature et dont la faim etait aiguisee par une longue course à cheval, devorait d’un tel appetit que son hôte, un dyspeptique qui mangeait à peine, en etait emerveille.

Il ref^ardait d’un œil d’envie les morceaux disparaître de l’assiette royale et manifesta le regret de ne pouvoir tenir tête à sou auguste invite, ajoutant qu’il donnerait volontiers cent

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guinees pour qu’il lui fût possible de faire un semblable repas.

Le roi prit conge de son hôte en lui donnant Tassurance que son souhait serait exauce.

A peu de temps de là, des archers vinrent querir le seigneur, et par ordre superieur l’emmenèrent à la Tour de Londres, où il fut enferme et mis à une diëte absolue. Après trois jours de jeûne, on lui apporta un rôti de bœuf à peu près semblable à celui qu’il avait offert au roi quelques jours auparavant. On conçoit sans peine avec quelle avidite le prisonnier, mis en

appetit par une longue abstinence, fit honneur au festin. Ce fut alors que le facetieux monarque, soulevant une portière, apparut aux yeux du noble lord et lui reclama en souriant les cent guinees si imprudemment promises.

L’Anglais professe une sorte de veneration pour le bœuf rôti. Aussi dans toute maison bourgeoise, ainsi que d«uis les collèges et les administrations où les employes sont nourris, il est etabli comme rè^le d’en avoir un morceau sur la table deux fois par semaine, le jeudi et le dimanche.

Cet usage est si bien admis, que j’ai vu des domestiques quitter leur place plutôt que de se soumettre aux fantaisies d’un chef reformateur qui voulait rompre avec la tradition.

Il ne faut jamais omettre de servir avec le roast-beef une

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sauce au raifort ou simplement du raifort gralte. Cette racine possède, paraît-il, des principes digestifs 1res appreciables.

La sauce au raifort (horse radish sauce) se fait ainsi :

Râper de la racine de raifort et y ajouter un peu de mie de pain imbibee dans de la crème double; assaisonner de sel, de moutarde anglaise, de quelques gouttes de vinaigre et d’une pincee de sucre.

Il est aussi d’usage de servir, avec le bœuf rôti, un certain pudding appele yorkshire pudding et qui se prepare de la manière suivante :

Delayer dans une terrine cent vingt-cinq gramûies de farine avec trois œufs entiers, un demi-litre de lait, deux pincees de sel et un peu de muscade râpee. Faire fondre de la graisse dans un plat à sauter profond et, lorsqu’elle est bien chaude, y verser la pâte liquide. Mettre au four chaud pendant quelques minutes, puis placer le plat et son contenu sous le roast-beef de manière qu’il se trouve arrose par la graisse et le jus decoulant de la viande. Lorsque le pudding est cuit d’une belle couleur, le retourner sur un plaf( nd, le couper en morceaux de quatre ou cinq centimètres carres, dresser sur un plat et servir en même temps que le bœuf.

Pudding de beefsteaks. – Beefsteak Pudding.

Preparer en escalopes minces deux livres de filet de bœuf. Faire une pâte à la graisse de bœuf. A cet effet, hacher très lin trois cent cinquante grammes de graisse de bœuf que l’on amalgame avec une livre de farine, une forte pincee de sel, et de l’eau en quantite suffisante pour former une pâte ferme, avec laquelle on fonce un moule en forme de dôme ou simplement un bol de cuisiûe prealablement beurre.

Assaisonmer les escalopes de sel, poivre, oignon hache, champignons etpersil,! puis les ranger dans le moule. Ajouter un peu

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de bouillon ou d’eau et recouvrir la viande d’une abaisse de pâte que l’on sonde en rbumectant, avec les bords du pudding qu’on enveloppe ensuite dans une serviette beurree, dont on attache

solidement les extremites avec une ficelle.

Le pudding est alors plongea Teau bouillante et doit cuire pendant deux heures et demie.

Au bout de ce temps on retire le moule de l’eau, on l’egoutte qifelques minutes, on enlève la serviette, et on renverse le pudding sur un plat. – Si au lieu de filet on emploie de la viande prise dans toute autre partie du bœuf, il faut donner au pudding une heure de plus de cuisson.

Pudding de beefsteaks aux huîtres, and oyster pudding.

Beefsteak

Ce pudding se prepare comme le precedent, seulement on ajoute aux escalopes de bœuf trois douzaines de grosses huîtres blanchies et ebarbees.

Les Anglais sont très friands de ce pudding que pour ma part je n’admire pas. Les huîtres, après une si longue cuisson, ne peuvent être qu’indigestes. De plus, je trouve illogique et de mauvais goût ce melange de viande et de poisson.

Pudding de beefsteaks aux rognons. – Beefsteak and kidney pudding.

Le moule ayant ete fonce avec de la pâte à la graisse, on dispose dans l’interieur et alternativement les escalopes de bœuf

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et les rognons grossièrement eminces et assaisonnes. On procède ensuite comme pour le pudding de beefsteaks ordinaire.

Pudding de rognons de bœuf. – Kidney pudding.

On fait egalement des puddings composes exclusivement de rognons. – On emince les rognons en escalopes epaisses après avoir enleve Tepiderme qui les recouvre. On les assaisonne d’oignon hache, ainsi que de persil egalement hache, puis on le melange avec le tiers de leur volume de champignons escalopes. – Proceder ensuite comme pour les autres puddings. – Donner trois heures et demie de cuisson.

Pâte du berger. – Shepherd pie.

II est essentiel pour faire ce pâle de se procurer un certain moule special en fer-blanc epais, auquel est adapte un couvercle perfore de même metal. – Couper en escalopes minces, de la viande de bœuf que Ton assaisonne de sel, poivre et fines herbes. Ranger ces escalopes symetriquement, dans le moule qui ne doit être rempli qu’aux trois quarts. Mettre assez de bouillon leger ou d’eau pour couvrir la viande; placer le couvercle perfore du moule sur lequel on etend une epaisse couche de puree de pommes de terre. Faire partir sur le fourneau et mettre au four pendant deux heures. La surface de la puree, lorsque le pâte est cuit, doit être d’une belle couleur doree. Ce pâte est generalement envoye aux rendez-vous de chasse. Il a la propriete de se conserver chaud très longtemps. – Lorsqu’on le sert, on enlève le couvercle avec la puree qui le recouvre, et que l’on depose dans un plat separe. Cette puree de pommes de terre, se trouvant impregnee dufumetquien s’echappant traverse les trous du couvercle, acquiert, on le conçoit, une saveur particulière.

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Beefsteak aux huîtres. – Beefsteak and oysters.

Blanchir deux douzaines d’huîlres dans leur propre jus, les egoutter et les ebarber en ne conservant que les noix. Avec le jus qui provient des huîtres et un peu de roux, on fait une sauce à laquelle on ajoute un peu de demi-glace ou de jus de viande. On tient celte sauce un peu epaisse et au dernier moment on y ajoute les huîtres.

Faire griller le beefsteak et, lorsqu’il est cuit, on verse dessds la sauce aux huîtres.

Rump steak.

Le rump steak, ainsi que le mutton chop^ est un plat fondamental de la cuisine anglaise. Il s’en consomme journellement dans le Royaume-Uni des quantites incalculables. Il est vrai de dire que le veritable rump steak, lorsque le bœuf est de bonne qualite, est d’une succulence bien superieure au filet. Ou le fait cuire de trois manières : grille, saute ou braise.

Rump ste(fk grille, – Le rump steak se coupe dans la partie du bœuf adherant à la culotte. Il doit se faire cuire vivement et assez près du feu afin que la viande, saisie superficiellement par Taclion de la chaleur, conserve bien tout son jus. On sert avec le rump steak grille du raifort gratte en copeaux.

Stewed steak and oniom (steak braise aux oignons). – Le steak ne doit pas avoir moins de trois centimètres d’epaisseur. On le fait braiser simphiment dans Teau ou dans un bouillon leger pendant trois heures. On le garnit d’un bouquet de persil, de quelques carottes et d’une douzaine d’oignons. Lorsque le steak est cuit à point, on le dresse sur un plat et on le garnit avec les oignons.

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Fried steak and oniom (steak saute aux oignons). – Le steak ayant ete frit dans la poêle, on le dresse sur un plat et on le couvre entièrement avec des oignons finement eminces en lames et prealablement frits d’une couleur blonde.

Les Anglais sont particulièrement friands de cette manière d’accommoder les beefsteaks.

P&te; de beefsteak. – Beefsteak pie.

Couper dans un filet de bœuf des escalopes de six ou sept centimètres de diamètre; les assaisonner de sel, poivre et fines herbes. Les ranger symetriquement dans un plat creux de fonte emaillee ou de porcelaine à feu, en ayant soin de laisser un vide

dans le centre du plat pour y placer quelques pommes de terre tournees de la grosseur d’une cerise. Ou ajoute ensuite de Teau en quantite suffisante pour atteindre le niveau des filets.

Faire une demi-livre de feuilletage auquel on donne sept tours. Mouiller legèrement avec un pinceau les bords du plat et y appliquer une bande de pâte que Ton mouille egalement. Couvrir la viande et les bords du plat d’une abaisse de pâte qu^Ton fait adherer avec l’abaisse inferieure en pressant legèrement avec le pouce. On coupe ensuite le superflu de la pâte au ras du plat, puis on gaufre la galerie avec la pointe du couteau, et on ornemente le surface du pâte avec les rognures de la pâte que Ton coupe à Temporte-pièce. Au sommet du

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pâte, on laisse une petite ouverture que Ton ferme avec un petit lanipon de pâte decoupe eu forme d’artichaut.

Dorer à Toeuf battu la surface du pâte que Ton fait cuire à four vif pendant une heure et demie.

Pâte de bœuf et rognons. – On fait aussi des pâtes avec la viande prise dans la culotte ou dans toute autre partie de bœuf. On coupe cette viande en escalopes et on y adjoint la moitie de son volume de rognon egalement escalope. On se sert indifferemment de rognons de bœuf, de mouton, de porc ou de veau, mais il est evident qu’on doit donner la preference aux rognons de veau et de mouton.

Bœuf sale. – Sait beef.

Les Anglais excellent dans l’art d’apprêter le bœuf sale. Ils emploient à cet effet une saumure speciale qui se prepare ainsi :

Dissoudre six kilogrammes de sel gris dans un demihectolitre d’eau. Faire infuser dans ce liquide six feuilles de laurier, un fort bouquet de thym, vingt-quatre clous de girofle, une poignee de poivre en grains et ajouter cent vingt grammes de salpêtre et deux cents grammes de cassonade.

Avant de mettre le bœuf dans celte marinade, on doit le frotter fortement sur toutes ses faces avec du sel gris et le laisser dans un saloir pendant douze heures, afînque le sel penètre dans les pores de la viande qu’on met ensuite dans la saumure, où elle doit rester quinze ou vingt jours.

Le beefsteak.

Le tilet de bœuf, lorsqu’on le detaille pour le faire griller ou sauter, prend le nom de « beefsteak ». Le mot beefsteak est d’origine anglctise : beef signifie bœuf et sleak veut dire tranche. J’ai rencontre de fins cuisiniers et de bonnes cuisi

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liières, qui, ignorant Tetymologie du mol, commettaient l’erreur d’ecrire sur leurs menus : beefsleak de moulon pour designer des filets de mouton grilles; ce qui est un non-sens, car, traduit en français, cela signifierait: tranche de bœuf de mouton.

On prepare avec le filet trois espèces de beefsteaks : le chateaubriand, le beefsteak proprement dit et le tournedos.

Le chateaubriand se coupe dans la meilleure partie du filet et ce qui le distingue, c’est son epaisseur qui est au moins le triple du beefsteak ordinaire.

C’est le restaurant Champeaux, de vieille renommee, qui imagina ce mets et le mit à la mode à Tepoque de la vogue de Chateaubriand qui venait de publier son Genie du Christianisme,

Le veritable chateaubriand, d’après la recette primitive, doit se faire cuire d’une certaine façon pour eviter qu’il ne brûle pendant le temps relativement lopg qu’il doit rester sur le gril. On le place entre deux minces tranches de bœuf trempees dans, rhuile qui lui servent de plastron; et c’est ainsi qu’on peut impunement le faire grillera feu vif. Quand il est cuit à point, on le debarrasse de ses deux cuirasses qui sont calcinees et qu’on jette, puis on dresse le chateaubriand, sur lequel on etend un beurre maître d’hôtel et qu’on entoure de pommes de terre frites. Inutile de dire qu’on a abandonne co mode de cuisson, et que l’on fait très bien cuire aujourd’hui un beefsteak, quelque epais qu’il soit, sans avoir recours à cet extravagant système.

Poitrine de bœuf salee. – Salted brisket of beef.

La poitrine de bœuf, avant d’être employee, doit avoir sejourne au moins pendant quinze jours dans la saumure. On la fait cuire à grande eau pendant quatre ou cinq heures. £lle se sert avec une garniture de carottes et de navets et accompagnee desuet dumplings (voir à l’article Rond de bœuf sale).

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Cœur de bœuf rôti. – Ox heart roasted.

Bien laver le cœur de bœuf et le degager du sang dont il est impregne, puis preparer une farce à la graisse de bœuf (voir Veal Stuffin^), avec laquelle on farcit le cœur dans toutes ses cavites. On l’enveloppe alors dans du papier huile ou graisse et on le met à la broche ou bien ou le fait cuire au four. Il faut deux heures de cuisson. On l’envoie sauce d’une sauce brune aromatisee d’un peu de ketchup ou de harvey sauce; servir aussi une saucière de gelee de groseilles.

Os à la moelle. – Marrow bones.

Les os à la moelle se servent au naturel, au second service. Le moyen le plus pratique pour les faire cuire est de les etuver. On les place perpendiculairement dans un potatoe steamer après avoir bouche Torilice de chaque os avec un linge que Ton fixe avec de la ficelle à la partie superieure, ou bien avec de la peau de vessie, puis on laisse etuver pendant deux heures. Pour les servir, on enveloppe chaque os dans une petite serviette et on les envoie sur table, accompagnes de tranches de })aia grille bien chaudes. Les Anglais se servent, pour manger les os à la moelle, d’une cuillère speciale longue et etroite qu’on appelle « marrow spoons ».

Rond de bœuf sale. – Round of beef.

Le morceau de bœuf employe pour ce mets pantagruelique esL la partie qui se trouve à l’extremite superieure du cuissot. On coupe le rond de bœuf transversalement en lui donnant une epaisseur de vingt centimètres environ; On detache l’os et on

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roule la viande en ramenant le panoufle autour de la partie charnue avec la graisse y adherant. On maintient la forme du rond de bœuf au moyen de brochettes en bois, puis on le met mariner dans la saumure pendant environ trois semaines (voir Saumnre, chapitre Xlll).

Lorsqu’on relire le rond de bœuf de la saumure et avant de le mettre dans la marmite, on l’entoure d’une forte bande de toile ou d’une corde solidement attachee qu’on enlève après la cuisson, mais pas avant d’avoir fixe la partie qui constitue le panoufle et la graisse avec de longs hatelets.

Le rond de bœuf sale se sert ordinairement dans les repas de corps et les banquets, ainsi que dans les maisons où l’on nourrit un nombreux personnel. Cette pièce de resistance par excellence pèse de vingt-cinq à trente livres et se fait cuire h grande eau pendant cinq heures. OnTenvoie sur table avec une garniture de carottes et de navets que l’on a fait cuire dans la marmite avec le bœuf. On sert en même temps un certain pudding à la graisse de bœuf qu’on appelle « suet dumpling » et qui se fait de la manière suivante :

Hacher bien fin une livre de graisse de rognon de bœuf que l’on amalgame avec une livre de farine et une forte pincee de sel. Ajouter ensuite assez d’eau pour former une pâte ferme dont on fait des boules de la grosseur d’un œuf et qu’on fait bouillir avec le bœuf pendant une heure. On envoie dans une saucière du bouillon de la cuisson prealablement ecume et legèrement colore.

Bœuf presse. – Pressed beef.

Prendre une poitrine de bœuf ayant sejourne pendant deux semaines dans une saumure bien aromatisee, la faire bouillir pendant six heures, puis l’egoutter et la desosser complètement. La iofieltre alors sous une forte pression dans un vase de forme

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ovale ou carree. Laisser refroidir dans un endroit frais pendant vingt-quatre heures, puis on la pare et on en glace la partie superieure.

Ce mets constitue un excellent plat de lunch ou de souper que certains amateurs prefèrent au jambon. Un charcutier français, M. Benoist, qui represente dignement à Londres depuis bon nombre d’annees Tart de la charcuterie parisienne, s’est acquis une certaine notoriete pour le raffinement qu’il a apporte à la preparation de ce bœuf epice qui est une des specialites de sa maison.

Tripes aux oignons. – Tripe and onions.

On fait cuire les tripes dansdu lait sale pendant quatre heures. 11 faut avoir soin de faire bouillir le lait avant d’y mettre les tripes afin d’eviter qu’il ne tourne. On cuit en même temps une douzaine d’oignons coupes en tranches très epaisses.

Lorsque les tripes sont cuites, on egoutte les oignons qu’on hache grossièrement et qu’on mêle ensuite à une sauce blanche faite avec la cuisson des tripes. – C’est une excellente manière de preparer les tripes, et les Anglais ne les mangent guère autrement.

Tripes frites. – Fried tripe.

Les tripes qui ont ete cuites à l’anglaise font une excellente friture. Il faut pour cela les laisser refroidir dans leur cuisson, puis avec la lame d’un couteau enlever une partie de la sauce qui les recouvre. On les roule ensuite une première fois dans la mie de pain fraîche qu’on fait adherer avec pression, et après avoir trempe chaque morceau de tripe dans l’œuf i)attu on les

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pane une seconde fois. II ne reste plus qu’à les faire frire à grande friture- On peut servir avec les tripes prepareos de cetle façon une sauce piquante ou italienne, mais le plus communement on les assaisonne simplement d’un peu de sel.

Toad in the hole.

Ce mets est un de ceux qui peuvent figurer avantageusement dans le livre qui traite de Tart d’accommoder les restes.

Toad in the hole signifie, en bon français, « crapaud dans un trou ».

Le mot de crapaud, associe à une preparation culinaire, semble d’autant plus bizarre qu’il n’entre dans sa composition rien qui ressemble en quoi que ce soit au batracien susnomme. Mais avons-nous le droit de nous montrer exigeants sur l’elymologie des termes culinaires etrangers, nous qui acceptons, sans pouvoir non plus l’expliquer, la.denomination de pet de nonne pour designer un beignet souffle.

Le toad in the hole est un mets economique frequemment confectionne par les menagères anglaises et se prepare ainsi :

Prendre un plat profond semblable à ceux dont on fait usage pour les pâtes à l’anglaise. Beurrer grassement l’interieur de ce plat pour y placer des tranches minces de viande rôtie de la veille, assaisonner de poivre, sel et muscade râpee, puis recouvrir la viande jusqu’au ras du plat avec la preparation suivante :

Delayer soixante grammes de farine avec deux œufs entiers et deux verres de lait legèrement sale et poivre. Mettre à four chaud pendant une heure, et, lorsque la pâte est d’une jolie couleur, servir sur un plat garni d’une serviette.

Bubble and squeak.

Encore un mets qui fait partie de la cuisine dite rechauffee. Il se confectionne avec du bœuf sale cuit de la veille; le couper

108 LA CUISINE ANGLAISLI

en tranches très minces que Ton fait chauffer vivement dans la poêle avec de Thuile ou du beurre. Dresser les escalopes sur un lit de choux haches et accommodes au beurre. Lo poivre doit dominer dans l’assaisonnement des choux.

Savory roUy pudding.

Prendre de la chair à saucisse bien assaisonnee et relevee d’un peu de muscade râpee et d’une pointe de cayenne, y amalgamer quelques fines herbes hachees et l’etendre sur une abaisse de pâte à la graisse de bœuf [suet paste).

Rouler ensuite la pâte sur elle-même comme s’il s’agissait d’un pannequet garni. Envelopper le pudding dans une serviette prealablement beurree et l’attacher aux deux extremites avec une ficelle comme on le fait d’une galantine. Lo pudding, qui doit être à peu près de la grosseur d’un rouleau de pâtisserie, est alors plonge dans une casserole d’eau bouillante et salee, où on le laisse mijoter pendant deux heures. On le retire alors de son enveloppe et on le coupe en tranches de deux centimètres d’epaisseur. On dresse ces tranches en couronnes et on les arrose d’une sauce espagnole claire ou simplement d’un bon jus.

Émince de bœuf. – Minced beef.

On sert beaucoup d’emince de bœuf pour le lunch et le dejeuner. On emploie la viande du rôti de la veille qu’on coupe en 1res petits des ou qu’on hache bien fin. Lorsqu’on a de la sauce espagnole, on fait simplement chauffer Temince dans la sauce et on assaisonne de Unes herbes hachees et passees au beurre. A defaut de sauce, ou en fait un peu en passant au beurre de l’oignon. L’oignon etant frit, on y ajoute une legère cuilleree de farine pour faire un roux que l’on mouille avec un peu de

LA ClISINE ANGLAISE 109

bouillon en ayant soin do tenir la sauce epaisse. On y joint Temince qu’on assaisonne et que Ton lient au chaud sans bouillir.

Pour servir Temince, on peut le dresser dans un plat creux et Tentourer de fleurons de pain frit ou bien dans le puits d’une bordure de riz prealablement preparee, ou bien encore dans une croûte à flan ou dans une bordure de pommes de terre. Dans certains cas, on dresse l’emince dans le fond d’un plat à legumes creux et on pose sur la surface cinq ou six œufs poches.

On sert egalement et de la même manière des eminces de mouton, de veau, de volaille et du gibier.

Pudding roule à Femince de bœuf. – Minced beef rolly pudding.

Preparer l’emince comme dans la recette qui precède, mais en tenant la sauce plus epaisse et en corsant Tassaisonnemeut. Étendre au .rouleau de lap&te; ferme à la graisse de bœuf {suet paste) de façon que l’abaisse soit plus longue que large, puis relever un des bords de l’abaisse du côte de la largeur et rouler la pâte sur elle-même de manière à bien envelopper l’emince. Mettre le pudding dans une serviette beurree ou graissee qu’on attache aux deux extremites avec de la ficelle. Faire cuire à l’eau bouillante salee pendant une heure et demie. Avant de dresser le pudding, on coupe les deux extremites, et, lorsqu’il est sur le plat, on l’arrose d’une sauce brune au madère.

Miroton de bœuf aux os grilles. – Haslied beef and

broiled bones.

Le mot anglais hcfsh n’a pas d’equivalent dans la langue française. Il constitue un mets assez semblable^au miroton. Mais qui n’est pas le miroton proprement dit. Le plat qui nous occupe

110 LA CUISINE ANGLAISE

se serl souvent au personnel dans les maisons bourgeoises. C*est une manière simple et economique d’employer les restes de bœuf rôli.

Escaloper la viande en tranches très minces que Ton degage de la peau et des parties nerveuses. Quaat aux os du rôli, on les casse en morceaux en ayant soin d’y laisser adherer un peu de viande.

Faire frire dans une casserole deux oignons haches fins auxquels on ajoute^ lorsqu’ils sont d’une belle couleur, une cuilleree de farine pour faire un roux, que-l’on delaye avec du bouillon pour obtenir une sauce epaisse à laquelle on ajoute un peu de ketchup et de luirvey sauce. Assaisonner de sel et de poivre et finalement melanger la viande escalopee qu’on fait chauffer sans bouillir.

D’autre part, assaisonnez les os de sel, poivre et d’un peu de cayenne et les faire griller à feu vif dans un four très chaud. Verser le ragoût dans un plat creux et dresser les os grilles autour.

Bœuf de Hombourg r&pe.; – Grated Homboarg beaf

Dans certaines maisons, on sert pour le dejeuner du matin ou pour le the de cinq heures du bœuf fume de Hombourg. On le râpe avec une râpe à larges trous et on l’envoie dans un ravier. Les amateurs de ce mets le sèment sur du pain beurre ou sur des biscuits à Teau, egalement beurres. A defaut de bœuf de Hombourg, on râpe de la même façon du jambon fume et de la langue de bœuf.

Puree de bœuf en terrine. – Potted beef.

La viande de poitrine de bœuf ou de plale-côto qui a servi au pot-au-feu de la veille, en raison de sa nature entrelardee, se

LA CUISINE ANGLAISE 111

prêtcî mieux que tout autre morceau pour la confection de ce mets. On coupe la viande en morceaux et on la met dans un morlier avec du sel, du poivre, une pincee d’epices, un soupçon de cayenne, le quart de son volume de beurre et un peu de sauce brune.

On pile le toul jusqu’à ce que le beurre soit bien melange à la viande, que Ton retire ensuite du mortier pour le passer à travers un tamis à quenelles à Taide d’une cuiller de bois.

La puree, après avoir ete melangee de nouveau pour lui donner du corps, est mise dans une petite terrine semblable à celles qui servent pour les pâles de gibier. Si la puree doit être mangee tout de suite, il est inulile de la faire cuire, mais, si Ton veut la conserver quelques jours, il faut la faire cuire une demi-heure au bain-marie ou au four. Lorsque la puree est refroidie, on verse sur la surface du beurre clarifie ou du saindoux pour empêcher Taclion de Tair sur la viande. Cette puree, dont on fait une grande consommation en Angleterre, se mange froide et se sert frequemment avec le the; on en fait aussi des tartines et des sandwiches. On l’appelle potted beef.

Puree de langue de bœuf. – Potted ox tongue.

Lorsqu’on a des debris de langue de bœuf, on peut les employer de la même manière que ceux de bœuf bouilli, en pilant les morceaux avec le quart de leur volume de beurre et un peu de graisse de bœuf cuite. On assaisonne de poivre, de cayenne et d’epices, mais on omet le sel, car la langue est assez salee par elle même. Après avoir passe la puree, on procède pour la cuisson comme pour le potted beef.

41î2 LA CUISINE ANGLAISE

Saucisses de bœuf. – Beef sausages.

Hacher menu de la viande maigre de bœuf avec la même quantite de graisse de rognon. Assaisonner de sel, poivre, epices et d’un peu de sauge sèche passee au tamis de fer. Ajouter un peu de mie de pain detrempee dans de Teau, puis emplir les boyaux avec la preparation. On espace les saucisses en leur donnant la longueur ordinaire. On les fait griller, cuire au four ou bouillir.

CHAPITRE IV

MOUTON ET AGNEAU. – MUTTON AND LAMB

60MMAIRK

Agneau rôti [Roast lamb).

Blanquette d’agneau [Blanquette of lamb).

Blanquette d’agneau à l’indienne {Blanquette à l’indienne).

Carre de mouton bouilli (Boiled neck of mutton).

Côtelettes à la Reforme {Côtelettes à la Refovm).

Curry de mouton {Curry of muiton).

Fraissure d’agneau {Lamb’s fry) .

Gigot de mouton bouilli {Boiled leq ofinutton).

Lamb chops [Lamb chops).

Mutton chops [Mut ton chops).

Pâte de mouton. {Afutton pie).

Petits pâtes de mouton [Small mutton pies).

Pudding de mouton {Mutton pudding).

Ragoût de mouton à Tirlandaise {/rish stew

Selle de mouton rôtie {Roast saddle of mutton).

Scotch haggis {Scotch hagtjis).

Tète de mouton {Sheeps’ head).

Tête d’agneau [Lamb*s head).

CHAPITRE IV

MOUTON ET AGNEAU

MUTTON AND LAMB

Selle de mouton rôtie. Roast saddle of mutton.

La selle de mouton rôtie est la pièce de resistance obligee de tout grand dîner en Angleterre. On la sert comme releve après les entrees. Au contraire de ce qu’on fait generalement en France, on ne desosse jamais la selle de mouton. En cela les Anglais ont raison, car il y a une difference de saveur marquee entre une selle de mouton desossee et une qui ne Test pas. La difference est tout à l’avantage de cette dernière, qui retient bien mieux son jus et son arôme en conservant ses vertèbres.

On a le tort en France de manger le mouton trop frais. La meilleure viande n’est tendre et succulente que si elle

H6 LA CUISINE ANGLAISE

est suffisamment mortifiee. Les bouchers anglais, pendant les temps froids, ne debitent leurs moutons que huit jours après qu’ils ont ete tues. J*ai vu, en hiver, conserver le mouton trois semaines avant de remployer.

P&te; de mouton. – Mutton pie.

Ce mets se confectionne soit avec une longe de mouton, soit avec un carre. Decouper la viande en côlelelles que Ton assaisonne de sel, de poivre, d’un oignon hache et de fines herbes. Ranger les côtelettes en couronne dans un plat creux en terre à feu et garnir le centre avec des petites pommes de terre tournees de la grosseur d’une cerise. Ajouter de l’eau en quantite suffisante pour baigner la viande, recouvrir le pâte d’une abaisse de feuilletage à huit tours et terminer l’operation d’après la manière decrite pour le beefsteak pie. Cuire à four vif pendant deux heures. A la sortie du four, entonner dans le pâte quelques cuillerees de bon jus.

Côtelettes à la Reforme.

Alexis Soyer, le fameux cuisinier qui a tant fait pour propager et populariser la cuisine française en Angleterre, fut pendant plusieurs annees chef du Reform Club, un des cercles les plus aristocratiques de Londres. C’est lui qui imagina les côlelelles à la Reforme, qui se preparent ainsi qu’il suit :

Après avoir pare et taille des côtelettes de mouton, on les trempe dansTœuf battu, puis on les roule dans de la mie de pain melangee de jambon hache très fin. Après avoir fait sauteries côtelettes dans du beurre clarifie, on les dresse en couronne avec une garniture ainsi composee : ouper en bâtonnets d’egale

Lk CUISINE ANGLAISE

447

longueur quelques coraichons coniits, de la langue de bœuf, du blanc d’œuf dur et des truffes. Amalgamer ces divers ingredients avec deux ou trois cuillerees de sauce espagnole. On masque rentree d’une sauce poivrade claire dans laquelle on a incorpore une pointe de poivre de Cayenne et un peu de gelee de groseilles.

Côtelettes de mouton. – Mutton chop.

Lemutlanchopy tel que les Anglais le comprennent, se tranche dans la longe de mouton. Elle doit être coupee très epaisse et se

– – .:~~ – r yN -vV

faire cuire sur un feu vif. Ce mets, malgre sa simplicite, ou peutêtre à cause de cela, joue un rôle important dans Talimentation anglaise. Il y a dans la Cite de Londres des restaurants speciaux où l’on ne sert au consommateur que des côtelettes et des heefsteaks accompagnes de pommes de terre et de legumes cuits à l’eau. A Tune des extremites de la salle, on aperçoit un large fourneau rempli de coke chauffe à blanc, au-dessus duquel est suspendu un immense gril d’acier poli.

118 LA CUISINE ANGLAISE

Il y a même des etablissemenls où ce gril est en argent massif; cela ne veut pas dire que la viande soit plus tendre ou mieux cuite que dans les maisons moins fastueuses : bonne renommee, comme dit le pro.verbe, vaut mieux que ceinture doree.

Devant ce gril, un cuisinier en costume d’ordonnance tourne et retourne les côtelettes au moyen d’une pincelte en acier nickele.

Dans quelques restaurants, le cuisinier opère à l’entree de la salle. A sa gauche est le fourneau et à sa droite sur de larges plats sont empilees des pyramides de côtelettes toutes parees et prêtes à griller. Le client en passant choisit lui-même sa chop, qu’il presente au bout d’une fourchette au chef, qui la fait cuire selon les instructions qu’on lui donne et la renvoie au consommateur, cuite à point, sur une assiette chaude.

En sortant de la salle, il est d’usage de deposer un penny dans une sebile placee devant le cuisinier. II y a de ces etablissements où celui-ci fait ainsi des recettes de quinze à vingt francs par jour.

Irish ste’CAr. – Ragoût à llrlandaise.

Ce ragoût est le mets national irlandais. Quoique d’une simplicite extrême, il constitue un plat substantiel et nourrissant, grâce aux pommes de terre qui entrent dans sa composition et qui en sonl la base essentielle.

La classe pauvre irlandaise, on le sait, fait de ce precieux tubercule sa principale nourriture. La qualite du sol du pays se prête admirablement à sa culture, qui est facile et peu dispendieuse, deux qualites precieuses pour un peuple dont la pauvrete est connue et la paresse proverbiale.

Lorsque les malheureux insulaires veulent ameliorer uh peu leur regime, ils ajoutent aux pommes de terre des oignons et quelques bas morceaux de moulon, et cela constitue le irish slew dans sa forme primitive.

LA CUISINE ANGLAISE H9

Le ragoût irlandais se confectionne d’une manière plus ou moins raffinee, selon la table sur laquelle il doit être servi, mais le irish stew^ tel qu’on le mange dans la bourgeoisie, se prepare ainsi :

Prendre un collet de mouton et le decouper en morceaux d’egale grosseur. Mettre cette viande dans une casserole avec quatre ou cinq gros oignons et une douzaine de pommes de terre coupees en deux. Assaisonner de sel et surtout de poivre. Couvrir le tout d’eau froide. Faire partir à grand feu et laisser mijoter pendant deux heures. A ce moment, le liquide doit se trouver presque absorbe par la viande et les pommes de terre qui se trouvent être reduites en puree. On verse le tout pêlemêle sur un plat au moment de servir.

Le irish stew se sert aussi comme entree. Dans ce cas, on remplace la viande de collet par des côtelettes prises dans le carre du mouton. On met un bouquet garni, on tourne les pommes de terre en olives et Ton choisit do petits oignons de même grosseur, Mouiller les côtelettes de consomme leger, et lorsqu’elles sont cuites à moitie, y ajouter les oignons; un quart d’heure après, on joint au ragoût les pommes de terre. Au moment de servir, dresser les côtelettes en couronne et en garnir le centre avec les pommes de terre et les oignons. On degraisse la cuisson, qu’on lie legèrement avec un peu de puree de pommes de terre; on ajoute une pincee de persil hache et blanchi, pui? on vefse cette sauce sur les côtelettes.

Scotch haggis.

Ce mets est un des plats nationaux ecossais, et n’est guère mange que dans la patrie de Shakespeare. Les Anglais en font peu de cas, mais les Écossais en sont très friands et en font leurs delices.

Il faut se procurer pour preparer un haggis la poche de l’esto

120 LA CUISINE AiNGLAISE

mac d*uQ mouton, qu’on nettoie parfaitement et qu’on retourne ensuite de manière que la paroi interieure se trouve en dehors.

Prendre le cœur, le foie et les poumons d’un mouton. Faire bouillir le tout pendant une demi-heure à Teau salee. Retirer la viande qu’on emince très fin, à l’exception d’une partie du foie» qu’on laisse bien refroidir pour pouvoir le râper. L’emince est alors etale sur la table et as.saisonne de sel, poivre, muscade, cayenne, oignon hache. On ajoute encore le foie râpe, une poignee de farine d’avoine {oat meal) et une livre de graisse de bœu hachee.

On emplit alors la poche de Testomac de mouton avec la preparation, mais de façon à laisser un vide pour eviter que la peau ne crève lorsque la viande gonfle par l’effet de la chaleur.

Ajouter un verre de bon jus, piquer la poche en divers endroits avec une forte aiguille et coudre l’orifice. Faire bouillir à grande eau pendant trois heures.

Il arrive quelquefois que la poche contenant la viande crève pendant la cuisson et que le contenu s’en echappe. Pour obvier à cet inconvenient, on enveloppe le haggis dans une serviette avant de le plonger dans Teau bouillante.

Tôte de mouton & Fecossaise. – Sheep’s head.

La tête de mouton, après avoir ete flambee et nettoyee, est separee en deux et mise à degorger à Teau froide pendant deux heures. On retire alors la cervelle, qui se fait cuire à part dans de l’eau salee et acidulee. Les deux moities de tête sont mises ensuite à cuire dans de l’eau legèrement salee. On ajoute quelques oignons, carottes et celeri. On laisse mijoter pendant quatre heures, puis on egoutte la tête de mouton qu’on place sur un plafond graisse. On la badigeonne de beurre et l’on sème de la chapelure sur la surface. Mettre à four chaud pour prendre

LA CUISINE ANGLAISE 141

couleur et servir accompagne d’une sauce blanche dans laquelle on a melange de la sauge hachee et blanchie, et la cervelle coupee en petits morceaux.

Gigot de mouton bouilli. – Boiled leg of mutton.

Les Anglais sont très friands de mouton bouilli en general, mais ils ont un faible pour le gigot. On le fait bouillir à grande eau salee pendant trois. heures et on le sert avec une sauce blancheauxcapres.il est d’habitude de l’accompagner de navels bouillis dans la cuisson, entiers ou mis en puree. On passe Ihs navets à travers un tamis de fer, puis on met la puree dans une casserole. On Tassaisonne de sel, poivre et muscade râpee. On la dessèche sur le feu pendant quelques minutes et on y ajoute en dernier lieu un bon morceau de beurre et un peu de sauce blanche. Au moyen d’une cuiller à bouche on moule la puree que l’on dispose symetriquement autour du mouton. Envoyer à part une saucière de jus.

Carre de mouton bouilli & la Soubise. – Boiled neck

of mutton.

Parer un carre de mouton comme pour rôtir, le ficeler pour lui conserver sa forme et le faire bouillir dans la marmite ou simplement à l’eau salee. Deux heures de cuisson suffisent. Dresser sur un plat, entourer de bon jus et servir à part une sauce Soubise.

122 LA CUISINE ANGLAISE

Pudding de mouton. – Mutton pudding.

Desosser une longe de mouton et en supprimer une partie de la graisse. Diviser^a viande en tranches de l’epaisseur d’une côtelelte. Faire revenir legèrement dans une casserole de moyenne grandeur 2 echalotes hachees et un oignon. Ajouter les tranches de mouton qu’on fait sauter vivement pendant quelques minutes,’ après les avoir saupoudrees de sel, poivre et champignons haches. Égoutter la graisse et mêler à la viande une cuilleree de farine, puis un peu de jus et de Ketchup pour obtenir une sauce legère. Donner un bouillon et retirer du feu.

Beurrer et foncer un moule à dôme ou un bol de cuisine avec de la pâte à la graisse (suet paste) et ranger les tranches de mouton dans Tinterieur. Ramener les bords de la pâte excedant la hauteur du moule vers le centre, de façon que rorifice soit parfaitement bouche. Beurrer une serviette dans laquelle on enveloppe le pudding en plaçant la partie beurree sur la pâte. Nouer les quatre coins de la serviette en dessous du moule et plonger celui-ci à Teau bouillante. Le faire cuire pendant trois heures; le demouler, le dresser sur un plat creux et servir.

Petits p&tes; de mouton. – Small mutton pies.

Foncer de grands moules à tartelettes creux avec de la pâte à timbale.

Couper en petits des de la viande de mouton, moitie maigre, moitie graisse. Assaisonner de sel, poivre et fines herbes (le poivre doit dominer), puis emplir les moules. Recouvrir la viande avec une abaisse de feuilletage à huit tours, dont on mouille legèrement les bords pour faire adherer à l’abaisse inferieure.

LA CUISINE ANGLAISE 423

Dorer la surface à TœuE ballu, faire une petite ouverture sur le sommet du couvercle avec la pointe du couteau. Cuire à four modere pendant trois quarts d’heure et à la sortie du four, entonner dans Tinterieur du pâte la valeur d’une cuilleree à cafe de demi-glace legère ou de sauce brune.

Ces pâtes sont excellents froids et sont recherches par les chasseurs et les voyageurs. Ils remplacenl^avantageusement les sandwiches.

Curry de moutOD. – Curry ofmutton.

Couper le mouton en morceaux comme s’il s’agissait d’un ragoût, et le faire revenir pendant un quart d’heure avec deux ou trois oignons haches. Saupoudrer la viande avec une bonne cuilleree à bouche de poudre de a Curry ». Melanger bien avec une cuiller de bois, puis mouiller avec un bouillon leger. Assaisonner de bon goût, et laisser mijoter deux heures. Dresser dans un plat creux et envoyer à part du riz cuit à la turque.

Agneau. – Lamb.

L’agneau anglais est preferable à l’agneau de France. Il est generalement plus blanc, plus gros et surtout plus gras. Il s’en fait une très forte consommation en Angleterre depuis le mois de mai jusqu’en septembre. Dans les grands dîners, on sert souvent un releve d’agneau rôti. C’est surtout la selle qu*on emploie dans ces circonstances. L’epaule est très estimee comme plat de luncheon. On la sert sans la desosser. Le carre se fait quelquefois bouillir et dans ce cas on le masque d’une sauce aux câpres. Le « hind quarler ». (quartier de derrière) comprend le gigot.

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124 LA CUISINE ANGLAISE

auquel on laisse attache une des longes. Le « fore quarter » se compose de Tepaule jointe à la poitrine et au carre. L’agneau rôti et servi froid a de nombreux partisans, mais à la condition expresse qu’il soit accompagne d’une sauce à la menthe. L’Anglais, pratique en toutes choses, estime que la viande blanche n*est digestive que si elle est arrosee d’une sauce stimulante. C’est pourquoi il ne mange le porc qu’avec de la marmelade de pommes, et l’oie qu’accompagnee d’une puree de groseilles vertes ou de pommes et farcie de sauge. Quant au veau, l’Anglais n’en mange qu’avec du lard ou du jambon. Il ne faut donc jamais omettre de servir la sauce menthe avec l’agneau – qu’il soit froid ou chaud. – Un oubli en ce sens constitue pour l’Anglais un crime de lèse-cuisine. (Voir Mint sauce.)

Lamb chops.

Les chops d’agneau se taillent dans la longe. Elles doivent être coupees d’une epaisseur de deux centimètres. On les nomme champ chops lorsqu’elles sont prises dans la partie epaisse de la longe qui se trouve rapprochee de là queue. Envoyer de la sauce menthe dans une saucière.

Tête d’agneau. – Lamb’s head.

.Retirer la cervelle d’une tête d’agneau qu’on a partagee en deux. Celte cervelle est cuite à part dans un peu d’eau salee et acidulee. Quant aux moities de tête, on les fait braiser pendant deux ou trois heures, puis on les met à refroidir dans leur cuisson, après avoir enleve les os de la mâchoire. Pour les servir, on les place sur un plafond beurre, on les arrose de beurre

LA CUISINE ANGLAISE 125

fondu et Ton sème dessus de la mie de pain frite. On met au four pendant un quart d’heure, puis on dresse sur un plat avec la cervelle comme garniture. Finalement, on l’entoure d’une sauce piquante, italienne, ou simplement d’un bon ju§.

Fressure d’agneau. – Lamb’s fry.

Ce mets est très apprecie comme plat de dejeuner. lise compose du foie, du cœur, des poumons et des ris de l’agneau. Faire blanchir les poumons pendant dix minutes, puis les couper en tranches ainsi que les ris, le foie et le cœur. Assaisonner le tout et saupoudrer de farine, puis faire frire dans le beurre sur un feu vif. Au bout de quelques minutes, le fry est cuit. Les retirer de la poêle, dans laquelle on met une pincee de farine, qui, melangee avec le beurre, forme un roux que Ton delaye avec un peu de madère et de bon jus additionne de harvey sauce. Dresser la fressure sur un plat et saucer.

Tête d’agneau farcie. – Stuffed lamb’s head.

Après avoir echaude la tête d’agneau par le même procede qu’on emploie pour nettoyer une tête de veau, on la desosse entièrement et on en farcit l’interieur avec une farce à l’anglaise {veal stuffing) faite de graisse de bœuf hachee et de mie de pain, et bien relevee en assaisonnement. On melange à cette farce un gratin que l’on prepare avec le foie de l’agneau et du lard qu’on fait revenir ensemble, et qu’on pile dans un mortier.

La tête d’agneau etant farcie, on l’enveloppe dans une serviette comme s’il s’agissait d’une galantine, en essayant de lui conserver la forme primitive, puis on la met braiser dans du bouillon. On garnit la casserole d’une carotte, d’un oignon,

126 LA CUISINE ANGLAISE

d*un bouquet de persil, et de quatre clous de girofle. On laisse braiser pendant une heure et demie. On sert generalement, avec la tèle d’agneau farcie, une sauce Pascaline qui se fait ainsi :

Hacher quelques champignons que Ton fait cuire dans le beurre pendant deux ou trois minutes. On ajoute alors un peu de vin blanc qu’on laisse reduire, puis quelques cuillerees de sauce blanche. Finalement on lie la sauce avec deux jaunes d’œufs et avant de servir on la termine avec une pincee de persil hache et blanchi, le jus d’un demi-citron et une pointe de poivre de Cayenne.*

Blanquette d’agneau. – Lamb Scollops.

On prepare la blanquette avec de Tagneau froid qu’on coupe en escalopes et qu’on melange avec des tranches de langue à l’ecarlate. On amalgame le tout avec de la sauce allemande bien liee, et l’on dresse l’entree dans une bordure de riz ou de pommes de terre.

Blanquette d*agneau à 1 indienne.

Se prepare comme la precedente. La seule difference est qu’on remplace la sauce allemande par une sauce au curry.

CHAPITRE V

VEAU. – VEAL.

SOMMAIRE

Escalopes de veau à Tanglaise (Veal roi laps).

Filet de veau rôti (Roast filet of veal).

Foie de veau saute {Calfs h’cer).

Longe de veau rôtie {Roast loin of veal).

Pâte de veau au jambon [Veal and kam pie}.

Pâte de tête de veau (Calfs head pie).

Poitrine de veau bouillie {Boiled bveast of veal).

Tôle de veau à l’anglaise {Calfs head).

Pain de veau et jambon {Veal and ham cake).

CHAPITRE V VEAU. – VEAL

Si la viande de bœuf et de moulon anglais est superieure à la nôtre, il n’en est pas de même de la viande de veau, qui est loin d’atteindre la perfection qu’elle a chez nous. Nos voisins ont une veritable antipathie pour le veau; aussi n’attachent-ils que peu d’importance à son elevage pour Talimentation; ce qui fait que la chair en est presque toujours rouge et molle. Lord Chesterfield, qui se piquait d’être un gastronome emerile et qui avait la reputation de bel esprit, disait plaisamment que la chair de veau etait aussi insipide que le baiser d’une bellemère.

Au contraire de la viande de bœuf et de mouton, celle du veau ne demande pas à être gardee et doit être employee bien fraîche.

Filet de veau rôti. – Roast filet of veal.

Couper dans le cuissot de veau, à l’endroit où il est le plus large, une tranche epaisse de dix ou douze centimètres en y laissant adherer la partie qu’on nomme la tetine. Enlever l’os qu’on remplace par de la farce {veal stuffiîuj). On donne au morceau de veau une forme ronde en l’enveloppant avec la tetine qu’on assujettit avec des hatelets. On met ensuite la viande au four ou à la broche. Lorsque le veau est cuit, on enlève les brochettes de fer, qu’on remplace par des hatelets d’argent. On sert avec le veau rôti une saucière de bon jus et un morceau de lard ou de jambon.

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130 LA CUISINE ANGLAISE

Escalopes de veau à. l’anglaise. – Veal coUops.

Escaloper une noix de veau ou un morceau pris sur la longe, donner aux escalopes la forme de côtelettes, les assaisonner de sel et de poivre et les rouler dans la farine. Les tremper ensuite dans Tœuf battu, puis les paner à la mie de pain fraîche. On les range alors dans un plat à sauter dans lequel on a etendu du beurre clarifie ou du saindoux, et on fait sauter les côtelettes jusqu’à ce qu’elles soient d’une belle couleur de chaque côte. D’autre part, on fait frire des tranches de lard uniformement coupees, et, lorsqu’on dresse les escalopes, on les alterne avec les tranches de lard frit. On garnit le centre du plat d’une macedoine de legumes ou d’une puree quelconque. Verser quelques cuillerees d’espagnole au madère ou de sauce tomate autour del’entree.

Longe de veau rôtie. – Roast loin of veal.

Il y a deux choses qu’il ne faut jamais omettre lorsqu’on sert du veau sur une table anglaise, c’est de le farcir et de raccompagner d’un morceau de lard* ou de jambon bouilli. La farce qu’on emploie en cette occasion s’appelle ceal stuffing et se prepare ainsi : hacher 1res fin une livre de rognon de bœuf que Ton melange avec la même quantite de mie de pain fraîche passee au tamis à quenelle et à laquelle on ajoute deux œufs entiers, du sel, du poivre, un peu de muscade râpee et du persil hache. On etend cette farce le long du filet mignon et on l’enveloppe avec la bavette du veau. On entoure la longe d’un fort papier beurre qu’on maintient avec de la ficelle, et l’on fait rôtir soit au four, soit à la broche. On sert le lard où le jambon qui accompagne le veau, au naturel et simplement parseme de chapelure.

J

LA CUISINE ANGLAISE 131

Poitrine de veau bouillie. – Boiled breast of veal.

Desosser une poitrine de veau, puis etaler dans Tinterieur une couche epaisse de farce telle qu’elle a ete decrite dans Tarticle qui precède. Rouler la viande sur elle-même, la ficeler et la faire bouillir à Teau salee ou dans la marmite pendant deux heures et demie. Lorsqu’elle est cuite, on Tegoutte et on la dresse sur un plat, puis on verse dessus, au moment de l’envoyer sur table, une sauce au persil ou aux câpres. Quelquefois aussi on Tarrose d’une sauce brune additionnee d’une ou deux cuillerees de harvey ou de ketchup. On sert à part, comme accompagnement oblige, du lard bouilli ou des tranches de lard frit.

Pftte de veau et jambon à l’anglaise. – • Veal and

ham pie.

Decouper des escalopes de veau; les assaisonner de sel, poivre et fines herbes, puis les placer en les superposant dans un plat à pâte de faïence allant au feu. Placer entre chaque escalope une tranche mince de lard fume ou de jambon et proceder ensuite comme pour le pâte de beefsleaks (page 101). Ce pâle est meilleur froid que chaud et se sert ordinairement dans les piqueniques et les dejeuners de chasse.

Tête de veau à l’anglaise. – Galf’s head.

La tête de veau à l’anglaise se sert par moitie et non desossee. Ainsi qu’avec le veau rôti ou bouilli, on envoie à part un mor

v^

132 LA CUISINE ANGLAISE

ceâu de lard ou de jaîaboa. Quant à la sauce qui accompagne la tète de veau, c’est une sauce blanche ordinaire à laquelle on melange du persil hache et blanchi et un peu de muscade râpee.

Foie de veau. – Calfs liver à Fanglaise.

Couper le foie en tranches, couper egalement en tranches très minces du lard de poitrine fume; faire cuire le lard dans une poêle, puis Tegoutler sur une assiette. Assaisonner les tranches de foie, les tremper dans la farine et les faire frire dans la poêle qui a servi pour Je lard. Dresser ensuite sur un plat en alternant les tranches de foie et de lard et tenir au chaud. On retire la graisse de la poêle, dans laquelle on verse un peu de bouillon et quelques gouttes de madère. Tourner sur le feu pour bien delayer le gratin qui s’est forme dans le fond de la poêle et se servir de ce jus pour faire une sauce legèrement liee dans laquelle on ajoute un peu de persil hache et blanchi, quelques’ gouttes de citron et une cuilleree de harrey sauce.

Pâte de tête de veau. – Calfs head pie.

La tête de veau, après avoir ete bien echaudee, lavee et blanchie, est mise à cuire dans du bouillon leger avec un bouquet de persil, quelques oignons et carottes, 4 clous de girofle et du gros poivre. Laisser cuire pendant deux heures et demie, puis egoutter.

Lorsque la tête est froide, on la coupe en morceaux que l’on assaisonne de poivre, sel et fines herbes hachees. On place ces morceaux dans un plat à pAle anglais en les entremêlant de tranches de lard de poitrine blanchi et on les arrose de quelques

LA CUISINE ANGLAISE 133

cuillerees de bouillon. Le pâte est ensuite recouvert de pâle ainsi qu’il est dit pour le pâte de beefsteaks^ puis mis au four. Laisser cuire une heure et demie. A la sortie du four, on entonne par le sommet du pâte un peu de gelee de viande. Ce pâte ne se sert que froid. – Les fines herbes dont on assaisonne le pâte se composent d’echalotes, de champignons et de persil.

Pain de veau et jambon. – Veal and ham cake.

Excellent plat de dejeuner inconnu en France.

Escaloper une livre du veau cru et â peu près la même quantite de jambon egalement cru. Faire cuire cinq œufs durs et les couper en tranches dans leur largeur. Hacher et passer au beurre des echalotes, des champignons et du persil. Beurrer un moule à charlotte et garnir le fond avec des tranches d’crufs durs sur lesquelles on place des escalopes de veau prealablement assaisonnees de sel, de poivre et de fines herbes. Étendre sur le veau les tranches de jambon qu’on recouvre avec des œufs durs, puis on reniet des escalt)pes parsemees de fines herbes, et ainsi de suite jusqu’à ce que le moule soit presque plein. On finit de l’emplir avec de la gelee de viande et on fait cuire au bainmarie ou à la vapeur jusqu’à ce que la viande soit bien cuite, ce dont on peut s’assurer au moyen d’une aiguille à brider qu’on ^ enfonce dans la viande. On laisse alors bien refroidir le moule qu’on met en presse à la glace ou au frais. Lorsqu’on veut le servir, on trempe le moule dans l’eau chaude et on le retourne sur un plat. On l’envofe garni de gelee et de persil.

CHAPITRE VI VENAISON

SOMMAIRE

Bouchees de venaison (Venison pallies). Civet de venaison {Civel of venison). Croquettes de venaison ( Venison croquelles). Côtelettes de venaison ( Venison cut’lels). Fressure de venaison ( Venison fry). Hanche de venaison [Haunch of venison). Hash de venaison {f/ask of venison). Langues de Rennes (Bein deevs longues). Tanade de venaison ( Venison panade). Pâte de venaison ( Venison pasly). Petits pâtes de venaison [Smafl venison pies). Quenelles de venaison ( Venison quenelles). Timbale de venaison milanaise {Venison limbale).

CHAPITRE VI VENAISON. – VENISON

Hanche de venaison. – Haunch of venlson.

Le terme « venaison d s’applique au chevreuil, au daim et au cerf.

Les Anglais sont grands amateurs de daim {huck) et de cerfs {red’deer)^ mais ni le chevreuil, ni le faon, même marines,

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n’ont pour eux aucun attrait. Ces animaux vivent à Tetat sauvage dans les montagnes d’Ecosse, où chaque annee d’aristocratiques sporlsmen vont leur donner la chasse pendant les mois d’août et de septembre. Accompagnes de gardeschasse ecossais et vêtus comme ceux-ci du costume tradilionnel, ils vont se mettre à l’affût dès l’aube derrière des accidents de

138 LA CUISINE ANGLAISE

terrain dans la montagne, et passent des journees entières h guetter le passage du gibier, dirige de leur côte par des rabatteurs intrepides et intelligents envoyes la veille à la decouverte. Los daims et les cerfs s’en vont par bandes et ne se laissent pas approcher; aussi n’est-ce qu’avec des precautions infinies et qu’en faisant usage d’armes à longue portee qu’on parvient à les tuer.” Inutile de dire que les chasseurs reviennent très souvent bredouilles.

Les daims sont plus estimes que les cerfs, surtout ceux qui sont eleves et nourris dans les parcs. Il s’en fait une grande consommation, et depuis juin jusqu’en octobre, dans tous les dîners, un rôti de venaison est de rigueur.

La hanche et le carre sont les deux seules parties de l’animal que l’on sert comme rôti. Quant à l’epaule, on en fait peu de cas; on l’emploie seulement pour des pâtes et des ragoûts.

Pour bien rôtir la venaison, il est certaines règles auxquelles on doit se conformer. Tout d’abord il est essentiel que la viande soit bien mortifiee, autrement elle serait dure et denuee de goût. Il faut donc la conserver le plus longtemps possible. l*our cela, on la frotte de farine melangee avec du poivre et on la suspend dans un courant d’air. La farine a pour but de pomper l’humidite, et lepoivre, d’eloigner les mouches que l’odeur de lu viande mortifiee attire. – Avant de mettre la venaison sur broche, on la pare et on l’enveloppe dans une pâte commune très ferme faite de farine et d’eau. – On l’enveloppe une seconde fois dans du fort papier que Ton fait adherer à la pâte au moyen de ficelle. On fait rôtir quatre heures en ayant soin d’arroser souvent. Il faut bien se garder d’enlever la graisse adherant à la venaison; plus l’animal est gras, plus il est recherche. Dix minutes avant de debrocher le rôti, on le debarrasse de la pâte et du papier qui Tenvelopperit. On l’arrose alors de beurre fondu et on le saupoudre de sel et de farine. On l’approche ensuite plus près du feu pour lui faire prendre une couleur doree.

Ily a à Londres des marchands speciaux qui ne vendent que de la venaison. Elle ne se vend pas au poids; elle est tarifee

LA CUISINE ANGLAISE 139

selon sa qualite et selon Tepaisseurde sa graisse. Le prix moyen pour une hanche de venaison de bonne qualite est de cent à cent vingt-cinq francs.

On sert avec la venaison rôtie des haricots verts cuits àl’eau et on envoie de la gelee de groseilles dans une saucière.

Emince de venaison. – Hash of venison.

Ce plat dont on fait un grand cas en Angleterre, se prepare avec de la venaison qui a ete prealablement rôtie. – On coupe la viande en escalopes très minces, que Ton fait chaulTer quelques minutes avant de servir dans une sauce ainsi preparee :

Hacher un petit oignon qu’on met dans une casserole avec deux ou trois clous de girofle, quelques grains de gros poivre, un peu do thym et deux verres de vin de Porto. Faire reduire le vin et ajouter une cuilleree à bouche de gelee de groseilles delayee avec du consomme et du jus de venaison; lier avec un peu de roux, faire bouillir, ecumer et passer à travers une fine passoire. Assaisonner de sel et d’une forte pincee do poivre de Cayenne.

La graisse de la venaison coupee en lames doit se faire chnuifer à part dans la poêle. Lorsque le hash est dresse, on dispose les morceaux de graisse de place en place sur la surface. On garnit d’une bordure de croûtons de pain grille. Envoyer à part une saucière de gelee de groseilles.

Côtelettes de venaison. – Venison chops.

Les venison chops se font griller ou sauter comme les mutUm chops. On les sauce generalement avec une sauce claire au

440 LA CUISINE AxXGLAISE

porlo, et on les garnit d’une puree de pommes de terre ou de pommes tournees et frites. On envoie à part de la gelee de groseilles. – On les sert aussi panees et sautees.

Pftte de venaison. – Venison pasty.

Ce pâte se fait, comme tous les pàles à l’anglaise, dans un plat creux de porcelaine allant au feu. On emploie generalement les parties de l’animal qui ne se font pas rôtir. L’assaisonnement se compose de fines herbes et d’epices et doit être force en poivre. Lorsque le pâte est cuit, on y entonne un bon jus fait avec les os’ de la venaison, auquel on ajoute un peu de glace de viande.

Fressure de venaison. – Venison fry.

Le mot fry signifie fressure et se compose du foie, du cœur, de la rate et des rognons du daim, que Ton coupe en tranches minces et que Ton fait frire à feu vif dans l’huile, après avoir assaisonne et roule chaque morceau dans la farine. Go plat doit être servi très chaud et simplement arrose d’un bon jus.

Parmi la fressure du daim, on comprend le velours qui recouvre les jeunes cornes. On sait que chaque annee les cerfs perdent leurs cornes, qui sont remplacees par de nouvelles pousses; or, lorsque ces cornes sont jeunes, elles sont recouvertes d’une substance veloutee qui disparaît lorsque les cornes grandissent. C’est ce velours qui, detache des cornes, et coupe en petites lanières, constitue la partie la plus estimee du venmn fry. Quoique cela puisse paraître singulier, ce velours frit est croustillant et d’un goût très delicat.

LA CUISINK ANGLAISE 141

Civet de venaison. – Civet of venison.

Couper la viande en morceaux de la grosseur d*un çeuf de pigeon et la mettre dans une casserole avec du lard de poitrine coupe en gros des et un morceau de beurre. Faire revenir celle viande avec le lard pendant quelques minutes, puis egoutler la graisse. Saupoudrer la venaison d’une cuilleree de farine, puis mouiller avec du vin rouge et du bouillon. Ajouter une cuilleree à bouche de gelee de groseilles et assaisonner de sel et de poivre et garnir d’un bouquet d’herbes aromatisees compose d’une feuille de laurier, d’une branche de thym, de basilic, de marjolaine et de persil. Laisser mijoter une demi-heure et ajouter deux ou trois douzaines de petits oignons. Continuer la cuisson jusqu’à ce que la viande soit cuite. Ajouter alors deux douzaines de petits champignons tournes et laisser cuire quelques minutes deplus. Degraisser le civet, retirer le bouquet garni et servir. On place autour du plat une bordure de croûtons de pain grille et l’on envoie une saucière de gelee de groseilles.

Quenelles de venaison.

Mettre dans un morlier 300 grammes de maigre de venaison que l’on pile avec 200 grammes de panade et 200 grammes de beurre frais. Lorsque tout est bien pile, on ajoute du sel, du poivre, un peu de muscade râpee et trois ou quatre jaunes d’œufs. Passer au lamis à quenelle et remellre la farce dans une terrine pour k travailler avec une cuiller de bois et y incorporer une cuilleree de sauce blanche ou de crème. Mouler ensuite les quenelles et les faire pocher à l’eau bouillante. Les egoutler lorsqu’elles sont à point el les dresser en couronne.

iA2 LA GUISLNE ANGLAISE

Les garnir de petites pommes de terre en boules de la grosseur d’une noisette et frites au beurre clarifie. Saucer d’une sauce chevreuil.

Bouchees et croustades de venaison.

On fait un emince de venaison tel qu’il vient d’être decrit à Tarticle croquettes, et on en garnit des petites bouchees ou des croustades à la Monglas. On en fait egalement des rissoles et des kromeskis.

Petits p&tes; de venaison. – Small venison pies.

Coiiper en des de la viande crue de cerf ou de chevreuil en ayant soin de n’y laisser adherer aucun fragraeni de nerfs ni de peau. Couper egalement en des un peu de graisse de mouton. Assaisonner de sel, cayenue et fines herbes composees de champignons et de persil, ainsi que d’un peu d’echalote hachee et passee au beurre, puis melanger à l’emince une cuilleree ou deux de sauce brune. Foncer en pâle fine quelques moules à tartelettes creux, les garnir avec la viande et les recouvrir d’une abaisse de pâte. Dorera l’œuf et faire cuire pendant trois quarts d’heure. A la sortie du four on introduit par une ouverture reservee sur le couvercle un peu de bon jus de venaison. Ces pâtes se servent chauds ou froids.

Timbale de venaison milanaise.

Kmincer en fines escalopes de la viande de venaison rôtie, imincer egalement de la langue de renne et quelques trulîes.

LA CUISINE ANGLAISE 4i3

Amalgamer le tout avec de la sauce espagnole additionnee d’un peu de sauce tomate.

D’autre part, faire bouillir à l’eau salee du macaroni qu’on egoutle lorsqu’il est cuit à point, et qu’on coupe en bâtonnets de quatre centimètres de long, puis» qu’on melange à Temince. Finalement on ajoule au ragoût une poignee de parmesan râpe et autant de gruyère.

Decorer avec de la pâte à nouilles un moule à charlotte beurre qu’on fonce ensuite avec de la pâle à foncer ordinaire et dont on masque les parois interieures avec des bandes de papier beurre. On emplit alors le moule d’une substance quelconque telle que riz, lentilles ou farine cuite, et l’on met au four à chaleur moderee.

Lorsque la timbale est cuite, on la vide, on retire le papier dont elle est garnie à l’interieur et on Templit avec la preparation decrite ci-dessus.

Il ne reste plus qu’à la demouler dans un plat et à la servir.

Langues de rennes fumees. – Rein deer’s tongue.

Ces langues, d’un goût particulier, sont importees de Russie et de Norvège et sont fort estimees des Anglais. Elles sont, paraît-il, fumees avec de la sciure de bois de sapin, et c’est ce fumage qui leur communique ce goût qui les distingue.

On sert generalement ces langues froides pour dejeuner ou luncher, mais quelquefois on en fait des entrees chaudes qu’on garnit d’epinards et qu’on accompagne d’une sauce poivrade.

Panade de venaison. – Venlson panade.

Prendre une livre de viande de venaison rôtie, la degager de ses os et de la graisse et la piler avec la mie d’un petit pain

444 LA CUISINE ANGLAISE

qu’on a prealablement fait imbiber dans du bouillon. On assaisonne et on delaye la puree avec du jus de venaison. On passe alors la panade à travers une etamine au moyen de deux cuillers de bois. Cette puree est un mets de malade.

Puree, emince et hachis de venaison.

On sert aussi la venaison en puree, ou bien emincee en petits des, ou encore hachee très menue. On lui donne la consistance desiree en y .melangeant de la sauce brune, et on l’aromatise avec un peu de muscade râpee. Après avoir dresse sur un plat la puree ou le hachis, on Tentoure de croûtons de pain frit et Ton pose sur la surface quelques œufs poches bien à point.

Croquettes de venaison. – Venlson croquettes.

Aiusi que je Tai dit au commencement de ce chapitre, lorsqu’on se trouve appele à suivre dans les montagnes d’Ecosse une compagnie de chasseurs {shoolimj pffrty), on se trouve souvent prive pendant plusieurs jours de viande de boucherie. Il faut alors s’ingenier pour y substituer la viande de venaison et l’employer de toutes les façons imaginables en les deguisant sous toutes espèces de formes. On peut donc, pour en varier l’emploi, en faire des potages, des hors-d’œuvre et des entrees.

On trouvera au chapitre des potages comment on peut employer la tête pour en faire un potage tortue {dears head soup) et une puree k Tinstar de la puree de lièvre. Pour preparer des croquettes, on coupe en très petits des de la viande de venaison rôtie; on coupe egalement de la même manière quelques truffes al champignons et on amalgame le tout avec une cuilleree ou deux de sauce brune, à laquelle on ajoute deux jaunes d’œufs et dont on relève l’assaisonnement d’une pointe de cayenne et

LA CUISINE ANGLAISE 145

d’un peu de muscade râpee. Ou etend cette preparation sur une assiette qu’on place dans un endroit frais, et lorsqu’elle est tout à fait froide, on en fait des croquettes auxquelles on donne une forme quelconque et qu’on roule dans la mie de pain, puis qu’on trempe dans Tœuf battu pour les enduire à nouveau de mie de pain. Faire frire à grande friture et dresser sur une serviette avec une garniture de persil frit.

Nomenclature des differentes espèces de venaison:

Cerf. – Stag – Red deer.

Renne, – Rein deer.

Daim. – Buck deer.

Daine. – Doe Venison.

Biche. – Hind deer.

Chevreuil, – Roe buck.

Chevrette. – Roe venison. •

Une remarque qui paraîtra singulière à ceux qui ne sont pas inities à la langue anglaise est celle qui suit, concernant la viande de boucherie :

Il est bon de savoir que l’animal change de nom lorsqu’il passe de vie à trepas. C’est ainsi que le bœuf, qui de son vivant se nommait un ox, devient beef en perdant la vie. Le veau, qui etait un calf lorsqu’il etait sur pied, s’appelle veal sur l’etal du boucher, et le mouton, qui portait le nom de sheep de son vivant, devient mutton après sa mort.

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CHAPITRE VIII PORC. – PORK.

SOMMAIRE

Bath chap .

Boudin noir à l’anglaise {Black pudding).

Ck chon de iait rôti (Roast sucking pig).

Ck)chon de lait à Tamericaine (Sucking pig à Vnmèricnine).

Côtelettes de porc (Pork chops).

Côtelettes de porc à l’indienne (Pork cutlets à l’indienne).

Échine de porc (Chine of pork).

Jambon d’York (York ham).

Lard bouilli et frit (Boiled and fried bacon).

Lard grille (Broiled bacon) .

Pâte de porc (Pork pie).

Pâte chaud de porc frais (Hot pork pir).

Petits pains aux saucisses (Samage rolls).

Porc rôti (Roast pork).

Porc bouiUi [Boiled pork).

Pudding de saucisses (Sausage pudding).

Saucisses anglaises (Engli.^h saussages).

CHAPITRE Vil Porc rôti. – Roast pork.

En Angleterre, le porc est excellent. La chair en est blanche Vît delicate et la graisse onctueuse. Du reste, Teloge des jambons d’York et du lard du Wiltshire n’est pas à faire. On consomme enormement de viande de porc, surtout sous la forme de lard fume. Les parties de l’animal qu’on ne convertit pas en jambons ni en lard, se font rôtir et bouillir. Lorsque Tanimal est jeune, on le fait rôtir avec la peau, mais il faut avoir soin, avant de le mettre à la broche, de le ciseler avec la pointe d’un couteau : cette operation forme des sillons dans la peau, ce qui facilite puissamment la cuisson. On enveloppe ensuite le rôti dans du papier beurre et on le met à cuire. Un quart d’heure avant de le debrocher, on enlève le papier qui l’enveloppe, afin de permettre à la peau de secher et de devenir croustillante. Il est d’usage de servir avec le porc rôti de la marmelade de pommes passee au tamis de fer et une farce composee desauge, d’oignon et de puree de pommes de terre. En ete, on emploie la sauge fraîche, mais en hiver on l’emploie dessechee. On la passe au tamis de fer avant de la melanger à la puree de pommes de terre. Quant aux oignons, on les hache grossièrement après les avoir fait cuire à l’eau.

LA CUISINE ANGLAISE

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La sauce aux pommes {appk sauce), ainsi que la sauce à la sauge (sage and onion sauce) se servent dans des saucières.

Côtelettes de porc à, rindienne. – Pork chops à, rindienne.

Après avoir pare les côtelettes, on les trempe dans de ToBaf battu melange d’un peu de beurre fondu, puis on les roule dans la mie de pain fraîche. On les fait sauter dans le beurre clarifie et, lorsqu’elles sont cuites, on les egoutte et les dresse en couronne. On garnit le centre avec du riz cuit à l’eau et on sauce les côtelettes avec une sauce au curry dans laquelle on melange du piment rouge hache et des cornichons egalement haches.

Porc bouilli. – Boiled pork.

Le porc que Ton fait bouillir doit avoir prealablement sejourne dans la saumure de dix à quinze jours. On emploie generalement, pour bouillir, le gigot et la poitrine. La tête ellemême se sert egalement et est très appreciable, surtout servie froide. Lorsqu’on sert du porc bouilli sur des tables anglaises,

150 LA CUISINE ANGLAISE

il faut toujours l’entourer de panais que Ton a fait cuire avec la viande^ et envoyer un pudding de pois, secs egalement bouilli dans la marmite avec le porc {jpeas pudding, chapitre IX).

Côtelettes de porc à, la puree de pommes. – Porkchops ^with apple sauce.

Faire griller les côtelettes, les dresser en couronne et garnir le centre du plat d’une puree de pommes legèrement sucree. Arroser la viande d’un peu de demi-glace claire ou d’un bon jus.

Boudin noir à, 1 anglaise. – Black pudding.

Le boudin noir anglais diffère du nôtre en ce qu’il entre dans sa composition du gruau en grains ou du riz qu’on a fait cuire avant de le melanger au sang. II doit être fortement epice et d’un assaisonnement releve.

Cochon de lait. – Sucklng plg.

Charles Monselet, de gourmande memoire, professait pour le cochon une admiration sans bornes qu’il a celebree dans un sonnet demeure celèbre. Un autre ecrivain aussi gourmand, mais plus gourmet, le raffine gastronome Fulbert Dumonteil, ce charmant chroniqueur dont le talent est si vivement apprecie des lecteurs de la France, de VArl culinaire et de bien d’autres revues scientifiques et litteraires, a dit, en parlant du cochon de lait, qu’il n’y avait pas de saveur comparable à celle de sa chair.

LA CUISINE ANGLAISE 451

Quant à sa graisse, il affirme que c’est une « crème, une quiniescence, une substance ambrosiaquc ».

Mon enthousiasme pour ce jeune pachyderme ne va pas si loin, cependant je dois convenir que je lui reconnais des qualites exceptionnelles. J’ai lu, dans un livre de cuisine anglais qui date de deux cents ans, la curieuse recette suivante pour faire rôtir un cochon de lait, et qui se resume ainsi : « Après avoir embroche ranimai, mettre dans la lèchefrite deux bouteilles de madère et Ten arroser constamment pendant la cuisson. » L’auteur s’etend ensuite sur la manière de preparer la farce et sur la façon de servir et de decouper le rôti; mais, ce que j’ai trouve sublime, c’est le nota bene à la fin de l’article : « Si vous trouvez que deux bouteilles de madère ne soient pas assez, ajoutez-en une troisième t » A cette epoque, on le voit, le vin jouait un grand rôle dans la cuisine anglaise. Aujourd’hui on remplace les trois bouteilles de madère par une demi-bouteille d*huile et le cochon de lait ne s’en trouve pas plus mal.

Le cochon de lait est dans toute sa perfection à l’âge de dix-huit ou vingt jours. Avant de le mettre sur broche, on le farcit avec la preparation suivante :

Hacher très fin deux gros oignons et une douzaine de feuilles de sauge. Faire blanchir et egoutter. Mettre la sauge et les oignons dans une casserole avec un bon morceau de beurre, du sel et du poivre, et laisser mijoter sur le feu pendant dix minutes. Ajouter alors deux poignees de mie de pain fraîche et trois jaunes d’œufs. On introduit cette farce dans l’interieur du cochon de lait, dont on coud le ventre et qu’on fait cuire à feu doux pendant une heure et demie, en ayant soin de l’arroser constamment avec de l’huile. On sert à part une saucière de puree de pommes et des raisins deCorinthe dans un ravier.

Autrefois, paraît-il, il etait d’usage en Angleterre d’occire le cochon de lait d’une façon des plus singulières. On le fouettait avec des verges, sur tout le corps, jusqu’à ce que mort s’ensuive. Ce procede avait, paraît-il, la propriete de rendre la chair de l’animal tendre et delicate au delà de toute expression. Depuis longtemps, on a renonce à ce raffinement de cruaute que desa

152 LA CUISINE ANGLAISE

voueraient nos mœurs actuelles, et le petit cochon de lait est simplement egorge comme le sont ses vieux parents.

A quoi bon, en effet, chercher à bonifier une chair aussi succulente? Est-il besoin d*ajouter de la saveur à la fraise et du parfum à la rose? .

Cochon de lait fttrci à, l’americaine. – Sucking pig à ramericaine.

Desosser un cochon de lait, excepte la tête et les pieds, puis le farcir d’une chair à saucisse aromatisee d’epices et de sauge hachee. Coudre la peau du ventre du cochon, auquel on conserve autant que possible la forme primitive. On Tentoure ensuite de bardes de lard, puis on Tenveloppe dans une pâte à l’eau. On le met à la broche ou au four pendant deux heures et demie. Lorsqu’il est cuit, on enlève la pâte et le lard, et on le place devant le feu après l’avoir saupoudre de farine pour colorer la peau et la rendre croustillante.

Pâte de porc. – Pork pie.

Le pâte de porc est une specialite du comte de Leicestershire. C’est un mets peu digestif; aussi je ne le recommande ni aux dyspeptiques, ni aux estomacs delicats. Il s’en fait en Angleterre une enorme consommation, et dans tous les « Juncheon bars » Qspork pies partagent avec les sandwiches la faveur des clients. La petite ville de Melton Monbray, près de Leicester, a la repuation de faire ces pâtes meilleurs que partout ailleurs; aussi en expedie-t-on de cet endroit des quantites considerables dans outesles provinces du Royaume-Uni. Cet engouement pourcette

LA CUISINE ANGLAISE 453

marque de fabrique est d’autant plus difficile à comprendre qu’il n’existe aucun secret dans la confection du pork pie, qui est d’une simplicite primitive.

La pâte se fait ainsi :

Prendre 500 grammes de farine que l’on melange avec de l’eau chaude dans laquelle on a fait fondre 125 grammes de saindoux et un peu de sel, pour en faire une pâte à foncer très ferme. On laisse reposer cette pâte à l’abri de Tair pendant un quart d’heure et on l’emploie avant qu’elle soit entièrement refroidie, parce qu’elle est plus malleable. Pour dresser le pâte, on se sert d’un bloc de bois cylindrique sur lequel on moule la pâte tiède, qui se raifermit en refroidissant. On enlève le man* drin de bois et l’on garnit l’interieur du pâte avec de la viande de porc coupee en des d’un demi-centimètre cube, gras et maigre en egale proportion. On y piet du sel, beaucoup d’epices et enormement de poivre. Ce surcroit d’assaisonnement a pour objet de combattre l’action indigeste de la viande de porc. Le pâte est recouvert ensuite et decore avec la même pâte qui a servi à sa confection et mis au four pendant trois heures. Lorsqu’il est cuit, on infiltre par le sommet du jus fait avec les 03, la couenne et les parures de la viande de porc. Plus le pâte est gros, plus on lui donne naturellement de cuisson.

P&te; chaud de porc frais. – Hot pork pie.

Prendre, sur une longe de porc, des tranches de viande que Ton pare et qu’on assaisonne de sel, de poivre et de fines herbes hachees composees d’echalotes, de champignons et de persil. Masquer le fond d’un plat à pâte anglais de tranches de jambon cru. Ranger sur le jambon une couche de pommes de terre coupees en tranches qu’on assaisonne, et sur lesquelles on place les tranches de porc frais, saupoudrer legèrement la surface de la viande de sauge hachee, et recouvrir d’une autre couche de

154 LA CUISINE ANGLAISE

lames de pommes de terre. On verse dans le plat la valeur d’un verre d’eau ou de consomme et Ton procède comme pour le p&te; de beef-steak, c’est-à-dire qu’on le recouvre d’une pète fine qu’on ornemente à la surface avec des feuilles coupees à l’emportepièce dans une abaisse de feuilletage. Finalement on dore le pâte qu’on met au four chaud en lui donnant deux heures de cuisson.

Joue de porc famee. – Bath chap.

Les joues de porc fumees se servent generalement froides. Celles qui sont originaires du comte de Somerset ont une grande renommee. On les nomme haih chaps. On les fait cuire simplement à l’eau.

Jambon d’York. – York ham.

La manière employee ordinairement par les Anglais pour cuire les jambons est des plus elementaires. Ils les font simplement bouillir à grande eau sans autre assaisonnement, estimant qu’ils ont ete suffisamment aromatises lors de la salaison, sans qu’il soit utile d’ajouter à leur saveur par l’adjonction d’une mirepoix.

Choisir un jambon de douze ou quatorze livres, en scier le bout du manche et parer la partie du dessous ainsi que l’os du quasi. Mettre à degorger pendant dix ou douze heures. On Tegoulte alors et on l’enveloppe dans un torchon; puis on le met dans une marmite contenant de l’eau froide et on le fait partir à grand feu. Arrive au point d’ebullition, on recule la marmite au coin du fourneau pour la laisser mijoter pendant trois heures. On la retire alors entièrement du feu et on la met

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loin du fourneau avec le jambon, qu’on laisse refroidir une . heure encore dans sa cuisson.

Lorsqu’on l’egoutle, on enlève Ife torchon qui Tenveloppe, et le jambon est mis au garde-manger pour n’être pare que le jour suivant, s’il doit être mange froid; mais, s’il doit être mange chaud, on supprime la couenne et on remet le jambon dans une braisière avec une bouteille de vin de Xerès (sherry), puis, une heure avant de le servir, on le met au four. Le vin dans lequel le jambon a ete rechauffe, après qu’il a ete degraisse et reduit, est melange à la sauce qui doit l’accompagner sur table.

Jambon rôti. – Roast ham.

Après avoir pare le jambon comme il est dit plus haut, ou le fait bouillir à grande eau pendant une heure, puis on l’egoutle et on supprime la couenne, qui se detache facilement. Le jambon est alors mis dans une terrine profonde et etroite et on le mouille juste à hauteur avec une marinade de legumes au madère. Au bout de douze heures, on retire le jambon du vase et on l’enveloppe avec sa marinade dans de la pâte à Teau chaude, ainsi qu^on fait pour la venaison, puis on recouvre la pâle d’une couche de papier de cuisine qu’on fait adherer à la pâle au moyen de ficelle. Lorsqu’il est ainsi enveloppe, on fait rôtir le jambon au four ou à la broche. Dans ce dernier cas, il faut se servir d’une broche anglaise, car en le transperçant on abîmerait le jambon.

Lard bouilli et frit. – Boiled and firied bacon.

Le lard fume de Wiltshire est à bon droit fort estime; aussi s’en fait-il une enorme consommation. On le sert bouilli comme accompagnement oblige de certains mets; c’est ainsi qu’il faut

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toujours en envoyer un morceauavec le veau, de quelque manière qu’on le serve, ainsi qu’avec la tète de veau, les lapins bouillis, la dinde et les poulets braises, les fèves de marais, etc. Dans ce dernier cas, les fèves et le lard doivent être cuits dans la même marmite. Pour le servir, on enlève la couenne et on le saupoudre de chapelure fine. On l’entoure generalement de choux cuits à l’eau. Le lard frit se voit sur presque toutes les tables bourgeoises ou aristocratiques, au premier dejeuner du matin. C’est surtout le plat de fondation des hôtels et des tables d’hôte. On le sert le plus souvent dans des plats speciaux (bacon dishes). Ces plats ont un double fond perfore ou sont munis d’une fine grille en argent, afin d’eviter que le lard ne baigne dans la graisse.

Lard grille. – Broiled bacon.

Cette manière de cuire le lard est très appreciee des amateurs :

On le coupe en tranches très minces qu’on roule sur ellesmêmes comme des paupiettes et qu’on embroche avec des hâtelets très fins; puis on place ces hàtelets ainsi garnis dans un gril ferme devant un feu vif ou dans un four très chaud. Le lard cuit ainsi devient très croustillant. On le sert sur des grillades de pain {dried toasts).

Pudding de saucisses, – Sausage pudding.

Les saucisses anglaises^ et notamment les saucisses de Cambridge, sont très grosses et très compactes. On les sert generalement grillees ou frites à la poêle, mais on les mange aussi bouillies à l’eau et on en fait des puddings.

LA CUISINE ANGLAISE 157

Prendre deux livres de saucisses et diviser chacune en trois parties en les tordant, puis les blanchir à Teau bouillante pendant quelques minutes. Les egoutter et les rafraîchir dans Teau froide.

Foncer un moule à dôme ou une terrine de cuisine avec de la pâte à la graisse de bœuf {beef suit poste). Hacher un oignon et le passer au beurre. Lorsqu’il est frit, ajouter une cuilleree de farine et mouiller avec du bouillon. Assaisonner de poivre, sel et muscade râpee, et tourner la sauce sur le feu pendant quelques minutes. Placer les saucisses dans l’interieur du moule par rangs superposes en arrosant chaque rang avec la sauce; recouvrir ensuite Torifice du pudding avec une abaisse de pâte, en souder les bords et envelopper le moule ou la terrine dans une serviette. Entourer le bord d’une forte ficelle et reunir les quatre coins de la serviette en les attachant ensemble. Faire bouillir deux heures à grande eau.

Petits pains aux saucisses. – Sausage rolls.

Le sausage roll est très apprecie par les chasseurs et les voyageurs. On le prepare ainsi :

On fait une pâte à pain ordinaire avec de la farine de gruau. Lorsque la pâte a fait son levain, on la divise en petites parties d’egale grosseur, et dans l’interieur de chaque portion on introduit une saucisse crue. On bouche hermetiquement les issues, on laisse monter la pâte pendant une demi-heure environ et Ton met à four vif. La graisse de la saucisse s’etend dans l’interieur du pain, mais la croûte lui interdit de s’echapper, ce qui contribue à donner de la saveur au sausage roll.

On fait egalement des sausage rolls avec de la pâte feuilletee. Dans ce cas, on fait cuire la saucisse avant de l’envelopper dans la pâte. A celles-ci je prefère les premières.

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Échine de porc. – Chine of pork.

L’echiue de porc est la partie de l’animal qui se trouve entre le derrière de la tète et la naissance de Fepaule. On la fait rôlir ou bouillir. Dans le premier cas, la viande doit être fraîche; mais, dans le second, elle doit avoir ete prealablement mise au saloir pendant une douzaine de jours. C’est un mets qu’on sert rarement, quoiqu’il constitue une excellente pièce de resistance. C’est generalement le jour de Noël qu’on mange Techine de porci

Saucisses anglaises. ~ English sausages.

Les villes de Cambrigde et d’Oxford ont une reputation notable pour les saucisses de porc. On en expedie des quantites incalculables dans toute l’Angleterre. Elles sont du reste excellentes, quoique trop fortement assaisonnees; mais elles sont du goût des Anglais qui affectionnent les epices et particulièrement le poivre.

Dans presque tous les bars où le public va luncher, le plat du jour principal est la saucisse chaude et froide. Il en est de même dans les « cook shops ) des quartiers populeux, où les saucisses se debitent à des prix de bon marche fabuleux. Seulement, dans ces derniers endroits, la marque de Cambrigde et d’Oxford n’est pas garantie et la provenance des produits, de même que la fabrication est enveloppee de mystère!

CHAPITRE VIII Volaille et gibier. – Poultry and game.

SOMMAIRE

Becasse rôtie. – Woodcock. Canard d’Amerique. – Canvas back duck. Canard sauvage à l’americaine. – WHd duck Curry de lapin. – CuPrtj of rabbit. Curry de poulet. – Curry of chicken, . Cygne rôti. – Cygnet, Dinde à Tanglaise. – Turkey,

Dinde braisee aux huîtres. – Braised turkey oyster sauce. Dinde au celeri. – Braized turkey celeri sauce. Faisan. – Pheasant.

Filets de volaille à l’indienne. – Filets of chicken à l’indienne. Grouse rôtie. – Grouse.

La chasse en Angleterre. – Shooting in England . Le lapin. – Rabbit. Lapin bouilli. – Boiled rabbit. Lapin rôti. – Roast i^abbit. Lièvre rôli. – Hare. Oie rôtie. – Goose. Œufs de pluviers. – Ploversyggs. Pâte d’à bâtis. – Giblet pie. Pâte du chasseur. – ffunter’s pie. Pâte de corbeau. – Rook pie. Pâte de lapin. – Rabbit pie. Pâte de pigeon – Pigeon pie. Pâte de poulet, – Chicken pie. Pâte de Devonshire. – Devonshire pie. Perdreaux. – Partridges. Poularde à l’anglaise. – Poulard. Poulet bouilli à l’indienne. – Chicken à l’indienne Poulet bouilli sauce persil. – Boiled chicken parsley sauce. Poulet aux huîtres (bouilli). – Chicken oyster sauce. Poulet saute aux huîtres. – Chicken saute with oysters. Poulet efûle et grille. – Pulled and grilled chicken. Poulet effile aux concombres. – Pulled chicken with cwumbers. Poulet grille à la diable. – Devilled chicken. Pudding de lapin. – Rabbit pudding. Pudding de mauviettes. – Lark pudding. Pâte de Yorkshire. – Yorkshire pie. Pâte monstre du Jubile. – The Jubilee monster pie. Pâte de becasses en terrine. – Woodcock pie. Terrine de puree de lièvre. – Potted hare. Paonneaux rôtis. – Peacock.

CHAPITRE VIII Volaille et Gibier. – Poultry et Game.

II y a certaines denominations pour designer la volaille selon son âge et sa qnalite. En voici la liste en procedant par ordre genealogique :

Le poussin.

Le poulet à la reine.

Le poulet de grain.

Le coq vierge,

La poulette.

Le chapon.

La poularde.

La poule.

Le vieux coq.

La vieille poule.

– The infant.

– The spring chicken.

– Tho boy chicken.

– The young gentleman.

– The young lady.

– The capon.

– The fat pullet.

– The fowl.

– The old cock.

– The old hen.

Poulardes à l’anglaise.

Les poulardes à l’anglaise ne sont autre chose que des poulardes braisees à blanc, et garnies d’un bouquet de persil,

LA CUISINK ANGLAISE 161

quelques oignons dans chacun desquels on plante un clou de girofle.

On les dresse sur un plat long en les separant avec une langue à Tecarlate et en les entourant d’une garniture à la jardinière. On les sauce d’une bechamel.

Poulet bouilli, sauce persil. – Boiled chicken parsley sauce.

Le poulet, ayant ete bouilli ou braise, est sauce et servi avec une sauce bechamel dans laquelle on a melange du persil hache et blanchi. On doit toujours servir du lard ou du jambon avec lepoulet bouillie

Poulet à l’indienne. – Boiled chicken à llndienne.

Faire bouillir ou braiser un poulet et le saucer d’une sauce au curry. On envoie à part du riz cuit à la turque.

Sauce curry : Émincer deux gros oignons et les faire frire d’une couleur blonde dans du beurre clarifie. Ajouter un peu de thym, laurier et persil, ainsi qu’une cuilleree à bouche de curry et une de farine pour en faire un roux. Delayer ce roux avec du consomme de volaille ou du blond de veau et remuer sur le feu avec une cuiller de bois jusqu’à ebullition. Laisser mijoter sur le coin du fourneau pendant un quart d’heure, ecumer et degraisser. Faire reduire ensuite et passer à travers une etamine ou une fine passoire. On peut y ajouter une liaison de trois jaunes d’œufs.

Curry de poulet. – Curry of chicken*

11 y a deux manières de faire le curry de poulet : 1° Preparer le poulet comme pour une fricassee ordi 11

162 LA CUISINE ANGLAISli

naire. Lorsque le poulet est cuit^ on fait une sauce au curry telle qu’elle est decrite dans l’article qui precède, en se servant de la cuisson du poulet.

2® Après avoir decoupe le poulet, ou range les morceaux dans un plat à sauter contenant du beurre clarifie ou de l’hliilo, et on le fait legèrement revenir. On Tegoutte alors sur une serviette pour le degager de Thuile ou du beurre dont il est sature, et on le met à cuire dans une casserole contenant une sauce clairQ au curry. Lorsque Je poulet est cuit, on fait reduire la sauce après Tavoir bien degraissee, on y ajoute une liaison de (rois jaunes d’œufs, et, après avoir passe la sauce à la passoire fine, on on couvre le poulet.

On envoie à part un plat de riz à la turque.

Le riz Caroline est preferable aux autres espèces. On le fait cuire à grande eau legèrement salee, puis on Tegoutte pour le remettre immediatement dans la casserole sans lui donner le temps de refroidir. Alors on le place à Tetuve pendant vingt minutes en ayant soin de tenir la casserole hermetiquement fermee.

Filets à rindienne. – Filets of cbicken à llndienne.

Parer les filets comme pour un suprême; les sauter et les dresser en couronne, puis les masquer d*uuo sauce au curry. On garnit le centre du plat avec du riz à la turque. Alterner les filets de volailles avec des lames de langue à Tecarlate coupees à Temporte-pièce.

Poulet saute aux huîtres. – Chicken and oysters.

Decouper un poulet et en ranger les morceaux dans un plat à sauter avec de Thuile, deux oignons coupes en rouelles, quelques branches de persil et des parures de champignons frais.

LA CUISINE ANGLAISE 163

Faire partir sur le feu et couvrir à four modere jusqu’à entière cuisson. Égoulter le poulet. IVautre part, faire blanchir deux douzaines de grosses huîtres, les egouUeretles ebarber! Retirer rhuile du plat à sauter, mais y laisser les legumes, auxquels on ajoute une cuilleree de farine que l’on delaye avec le jus des huîtres, un peu de bouillon et de glace de viande. Faire bouillir ia sauce quelques minutes, la passer à travers une fine passoire et finalement y ajouter les huîtres. Celte sauce, qui doit être tenue un peu epaisse, se verse sur le poulet lorsque celui-ci est dresse.

Poulet bouilli aux huîtres – Boiled chicken and oysters.

Trousser le poulet avec les pattes en dedans et le faire bouillir ou braiser selon Tusage en le garnissant de legumes et d’un bouquet de persil. On ajoute egalement les barbes des huîtres dont on conserve les noix pour la sauce. Cette sauce se fait avec le jus des huîtres additionne du bouillon du poulet et de crème double, melange avec du roux en quantite suffisante pour obtenir une sauce epaisse à laquelle on ajoute en dernier Keu les noix des huîtres, un peu de cayenne et un soupçon de muscade râpee. Masquer le poulet avec cette sauce.

Poulet efOle et grille. – Pulled and grilled chicken.

Cette entree, un peu bourgeoise peut-être, est peu connue des praticiens français et merite une mention speciale :

Prendre un poulet froid, bouilli ou rôti. En enlever les cuisses et les reins; puis, au moyen de deux fourchettes, on

i64 LA CUISINE ANGLAISE

effiloche les filets aussi minces que possible. Ces filaments sont ensuite melanges avec une sauce bechamel bien reduite. D*autre part, on place les cuisses et le dos du poulet sur le giil, après les avoir prealablement roules dans le beurre et assaisonnes. Lorsque le poulet est d’une belle couleur doree, on en dresse les morceaux simplement sur le pulled chicken.

Poulet effile aux concombres. – Pulled chicken vrith cucombers.

Detacher toute la viande des cuisses et de Testomac d’un poulet rôti ou poêle et Teffiler ainsi qu’il est explique dans la recette qui precède.

D’autre part, eplucher deux concombres verts. Les coupen en tronçons de (rois centimètres de longueur que l’on divise en quatre morceaux. Enlever la graine et parer les morceaux en escalopes epaisses qu’on laisse degorger pendant deux heures dans une terrine avec une cuilleree de sel et quelques gouttes de vinaigre. Au bout de ce temps, onegoutte les concombres, on les lave et on les place dans une casserole à legumes, avec 75 grammes de beurre, deux cuillerees de consomme de volaille, une pincee de poivre, une cuilleree à cafe de sucre en poudre et un oignon entier (un bouquet d’oignons verts est preferable).

Faire braiser les concombres pendant une demi-heure, puis les egoulter sur un tamis. Prendre un peu de sauce allemande bien liee et la melanger au poulet effile. Fembre, jour do la Saint-Michel, est l’anniversaire d’une grande bataille navale gagnee par les Anglais sur les Espagnols. La reine Elisabeth, qui regnait alors, etait à table lorsqu’on lui apporta la nouvelle de la deslruclion de la floUe espagnole. La pièce de resistance elait ce jour-là une oie rôtie dont la reine, parall-il, etait particulièrement friande, et ce fut alors que, dans un accès d’exultation patriotique et gourmande, elle decreta qu’en commemoration de cette glorieuse journee une oie rôtie serait servie sur sa table chaque annee à pareille date. La noblesse fit naturellement comme la reine et les bourgeois imitèrent les nobles. Et voilà pourquoi lo 29 septembre est un jour de deuil pour les habitants des vergers et des. bassescours, mais en même temps un jour de rejouissance pour ceux qui, fidèles à la tradition, fêtent joyeusement la Saint-Michel en se conformant aux decrets de la grande reine Elisabeth.

L’elevage des oies exige des soins particuliers, et on doit surtout s’attacher à ne pas les laisser manquer d’eau, car elles sont constamment alterees: aussi les eleveurs de ces volatiles ont-ils imagine, dans les pays où l’eau fait defaut, de suspendre au cou des oies reunies en troupeau des petits godets profonds remplis d’eau et dans lequel elles viennent reciproquement se desalterer.

D’après Aristote, les oies auraient l’instinct de la prevoyance

LA CUISINE ANGLAISE 171

plus developpe que les autres animaux. Comme preuve à Tappui de celle assertion, il raconle que lorsqu’une. troupe d’oies sauvages traverse le mont Taurus, repaire de leur plus cruel ennemi, Taigle, chaque oiseau a la precaution de tenir un caillou dans son bec afln de ne pas trahir sa presence par son cri, qu’il ne peut maîtriser autrement, tant la loquacite est naturelle chez lui. Les Romains, on le sait, avaient pour les oies une grande veneration; aussi, chaque annee, à ranniversaiiJ». du jour oh le Capitole fut sauve par ces palmipèdes qui, par leurs cris, donnèrent l’eveil à la garnison, une oie etait portee en triomphe sur un coussin de velours, tandis que par derrière un chien crucifie vif sur une planche etait impitoyablement promene à travers les rues de Rome, en souvenir de ce que les chiens charges de la surveillance de la ville s’etaient laisse detourner de leur vigilance par les assiegeants.

Deux grands mangeurs, que je soupçonne fort d’être deux grands Gascons, discutaient des merites gastronomiques de Toie et de la dinde, faisant valoir, chacun à son point de vue, les qualites de ces deux volatiles. L’un vantait la saveur de l’oie et l’autre la delicatesse de la dinde : « Une oie, disait le premier, est plus que suffisante pour une personne, mais pas assez pour deux. – Quand je mange du dindon, observait le second, je n’aime voir à ma table qu’un autre compagnon : c’est le dindon. » 11 est bon d’ajouter que l’admirateur de l’oie professait un profond dedain pour les cuisses et que l’amateur de dinde, à l’exemple de Brillât-Savarin, n’en mangeait que les sot-l’y-laisse.

L’oie rôtie ne se sert jamais sans avoir ete prealablement garnie d’une farce très relevee en assaisonnement, dont la mission est de contrebalancer les effets nuisibles que peut produire la chair indigeste de ce volatile. Les Anglais, pratiques en toutes choses, et surtout en matière de nourriture, ont soin d’accompagner toutes les viandes reputees indigestes d’un stimulant sous forme de sauce ou de farce, destine à venir en aide aux sucs digestifs dans l’accomplissement de leurs fonctions. C’est ainsi que le porc rôti se sert, non seulement farci.de sauge

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LA GUISi JE ANGLAISE

et d’oignon, mais encore accompagne de sauce aux pommes. Il en est de même du veau, que Ton garnit d’une farce epicee; du canard sauvage, qu’on arrose de jus de citron; de l’agneau, qu’on ne mange jamais sans sauce à la menthe et au vinaigre, et du cœur de bœuf, qu’on assaisonne de gelee de groseilles. La farce dont on garnit Foie se fait ainsi :

Hacher separement six gros oignons et une poignee de feuilles de sauge fraîche ou sèche. Faire blanchir ces ingredients pendant cinq minutes, puis les egoutler sur un tamis. Les mettre dans une casserole avec un morceau de beurre et les faire frire pendant cinq autres minutes en les remuant avec une cuillère de bois.

Ajoutez une poignee de mie de pain fraîche, du sel et surtout beaucoup de poivre. La sauce aux pommes se sert dans une saucière.

LA CUISINE ANGLAISE 173

Dinde rôtie. – Roast turkey.

Le dindon est originaire de Tlnde; aussi le designail-on autrefois sous le nom de coq d’Inde. Il fut introduit en Espagne vers la fin du xvn^ siècle par les jesuites, auxquels il sera beaucoup pardonne pour avoir enrichi Talimentation de ce precieux volatile. On l’appela longtemps l’oiseau des jesuites et il s’acclimata rapidement en Europe, où il supplanta bientôt Toie, qui jusque-là avait ete la reine des basses-cours. Ce fut aux noces de Charles IX que le premier» dindon fut servi sur une table française. L’elevage de cet oiseau prit rapidement un grand developpement et aujourd’hui il se pratique sur une immense echelle et donne lieu à un commerce des plus lucratifs.

La dinde, malgre son apparence robuste, est d’une nature très delicate; aussi est-on oblige d’avoir recours à des soins particuliers pour Tamener au degre d’embonpoint requis pour lui permettre de figurer dignement sur nos tables. La femelle commence à pondre vers Tâge de dix mois et elle fait chaque annee deux pontes de vingt à vingt-cinq œufs.

La dinde est certes la plus belle et la plus noble pièce de volaille qu’on puisse servir dans un dîner. Qu’elle soit truffee ou non^ farcie de saucisses ou bourree de marrons, elle constitue un releve des plus riches et des plus recherches.

La dinde, comme sa camarade l’oie, a la reputation d’être un animal stupide. Peut-être est-ce à celte allegation qu’il faut attribuer le dicton populaire qui dit d’un homme victime de sa bêtise qu’il est le dindon de la farce. Cette expression, parait-il, vient de ce qu’autrefois les acteurs qui jouaient les rôles de dupes dans les comedies etaient appeles j)ères dindons, par allusion à ces oiseaux dont on a fait le symbole de la sottise.

Il existe encore une metaphore proverbiale dans laquelle le dindon est mis en cause. C’est celle qu’on emploie en parlant

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174 LA CUISINE ANGLAISE

d’une chose qu’on fait à conlre-cœur tout en ayant l’air de la faite de bonne grâce. Ou dit alors : C’est la danse des dindons. Ce diclou est fonde sur Tanecdote suivante :

Dans une petite ville de province, un saltimbanque de passage annonça à son de trompe qu*il donnerait un ballet de dindons. Lorsque le rideau se leva, on vil en effet apparaître sur la scène les acteurs emplumes qui sautaient frenetiquement tantôt sur une patte, tantôt sur Tautre, en poussant des cris discordants^ aux applaudissements des assistants, qui ne decouvrirent le subterfuge que lorsqu’une etincelle, sortant du parquet, fit comprendre que les dindons ne se donnaient tant de mouvement que pour essayer de se soustraire au contact d’une plaque de tôle brûlante sur laquelle ils etaient places.

Cette reputation de stupidite dont on affuble la dinde ne s’applique en realite qu’au jeune dindonneau, car à Tâge adulte il devient fnCelligftiyL et courageux, au point qu’il brave et combat le coq et les autres voUtUes de la bassecour.

Gomme pour les poulets, les faisans et les perdreaux, on sad avec la dinde rôtie de la sauce au pain. Il est essentiel aussi, lorsqu’on sert une dinde à l’anglaise, de la remplir d’une farce faite avec de la graisse de bœuf hachee (deux cent cinquante grammes), de la mie de pain fraîche (deux cent cinquante grammes), deux œufs entiers, sel, poivre, muscade râpee et persil hache. On doit envoyer egalement à part des saucisses ou un morceau de lard et de la sauce au pain {bread sauce).

Dinde poêlee au celeri. – Boiled turkey Tvith celery.

Farcir la poche de la dinde avec une farce semblable à celle qu’on emploie pour la dinde rôtie. La brider avec les pattes en dedans; la placer dans une braisiëre avec un bouquet de persil

L/V CUISIiNE AiNGLAISE 175

garni, quelques carottes et oignons et un bouquet de celeri. Une heure et demie avant de servir, couvrir la dinde avec du bouillon chaud de la marmite, passe, mais non degraisse. Laisser cuire à feu modere. Au moment de servir, debrider l’a dinde, la dresser sur un plat long et la garnir de morceaux de celeri braise au jus. Saucer la dinde d’une puree de celeri.

Puree de celeri, – Prendre la partie blanche de six pieds de celeri que Ton divise en morceaux de quatre centimètres de longueur et que l^on blanchit à Teau bouillante pendant cinq minutes. Ëgoulter sur un tamis et remettre le celeri dans une casserole avec 60 grammes de beurre, deux oignons, une pincee de sucre, un peu de sel et du bouillon blanc. Faire mijoter jusqu^à ce que le celeri soit bien cuit. On Tegoutte alors et on le passe au tamis de crin ou à travers une etamine. D’autre part, faire un peu de roux qu’on delaye avec la cuisson du celeri et un peu de crème, afm d’en obtenir une sauce un peu epaisse à laquelle on ajoute la puree de celeri.

On masque legèrement la dinde de cette sauce et l’on envoie le reste à part dans une saucière.

Avec la dinde bouillie, comme avec la dinde rôtie, il faut servir un morceau de lard fume, du jambon ou une langue salee.

Dinde sauce aux huîtres.

On sert egalement la dinde poêlee ou bouillie, avec une sauce aux huîtres. On la fait cuire comme dans la recette precedente et on la masque d’une sauce aux huîtres (chapitre Xlil).



f ‘

La Chasse en Angleterre

L’Aûf^lelerre est de tous les p^ys de

TEurtipe celui où il y a de }^l^ls br^llrs r basses. Mais il îiiui se hâtur d’ajoiiler, pour consoler les chasseurs français, que

clias&se; n’y est pas, romme chez nnus, un plaiâir à la portee de loutle monde.

La chasse elaiL autrefois en Angleterre comme en France un privilège essentiellement aristocratique. C’etait même dans les temps les plus eloignes un droit reserve exclusivement au roi, qui seul pouvait en autoriser Texercice. Au commencement du siècle, pour chasser, il suffisait d’être fils d’esquire ou d’avoir 2,300 francs de rentes.

En Angleterre, comme dans notre pays, le droit de chasse etait, quoiqu’à un degre moindre, l’objet de revendications et de discussions des plus violentes.

Aussi une reforme vint s’operer en 1831 et accorder le droit

LA CUISINE .AiNGLAïSE 177

de chasse à tout citoyen anglais, sous la seule condition, dejà suffisamment restrictive, qu’il payât l’impôt sur le revenu. Mais celte faculte, concedee en principe, est en realite singulièrement diminuee dans la pratique.

Tout d’abord, la religion, les mœurs, la legislation, interdisent de chasser les dimanches et le jour de Noël, prescription qui eloigne toute la classe des gens qui travaillent, du haut en bas de l’echelle sociale. Si une telle defense existait en France, c’en serait fait de la chasse, qui n’existerait plus que pour quelques richards… et pour les braconniers.

En outre, les taxes sont beaucoup plus elevees qu’en France.

Le permis de chasse, valable pour un an, coûte 75 francs. On peut, il est’vrai, obtenir pour 50 francs un permis de chasse valable pour un seul semestre. Mais comme ce semestre est celui qui commence le !«’ avril pour finir le 31 octobre, et que pendant cette periode la chasse de Ja plupart du gibier est fermee, cette latitude n’a rien de favorable.

Tout porteur d’un fusil, d’ailleurs, qui n’a pas de permis de chasse, est oblige de payer une taxe representant un port d’armes et coûtant 12 fr. 50. Tel est, par exemple, le fermier qui, depuis la reforme de 1880, peut tirer en tous temps sur sa ferme, les lièvres et les lapins.

Pftte de corbeau. – Rock pie.

Le pâte de corbeau, en depit des sceptiques et des incredules, constitue un mets qui n’est pas à dedaigner, s’il est judicieusement assaisonne et convenablement prepare. Il faut dire tout d’abord qu’on n’emploie pour confectionner ce pâte que les oisillons qui n’^ont encore vecu que dans les regions elevees qui les ont vus naître. A peine la plume a-t-elle remplace le duvet sur le dos des jeunes corbeaux qu’ils quittent leurs nids; mais, n’osant encore s’aventurer jusqu’en bas, ils se contentent, pour

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essayer leurs ailes, de voltiger de branche en branche d’abord, et d’arbre en arbre ensuite. C’est alors que les chasseurs, embusques au pied de ces arbres, font des hecatombes des jeunes et imprudents volatiles.

C’est vers le mois de mai qu’a lieu la chasse aux corbeaux. Ce genre de sport a beaucoup d’attrait pour ceux qui s’y livrent, à la condition toutefois de ne tirer le gibier qu’au vol. Tout sportsman qui faillirait à cette loi serait conspue par les camarades. Gela me rappelle une anecdote à propos d’un jeune novice qui, se trouvant en compagnie de chasseurs emerites, ajustait un perdreau qui courait dans un champ. Un des chasseurs, indigne, l’interpelle en ces termes : « J’espëre, monsieur, que vous n’allez pas tirer sur un oiseau qui court? – Oh! non, repondit l’inexperimente sportsman, ne craignez rien… J’attends qu’il s’arrête I »

Revenons à nos corbeaux et à la manière d’operer pour faire ce pâte dont les Anglais sont si friands.

Il est certaines règles qu’il est indispensable d’observer pour arriver à un bon resultat. Tout d’abord, on ne plume pas les corbeaux, on les depouille et l’on ne garde que les estomacs. Les cuisses sont dures et les carcasses amères.

Les estomacs ayant ete bien laves, on les laisse tremper six heures dans du lait, puis on les decoupe et on en range les morceaux, que l’on assaisonne en ne menageant ni le poivre, ni les epices, dans un plat à pâte. Le fond du plat doit être prealablement fonce avec quelques tranches de filet de bœuf. On place sur les morceaux de corbeau quelques bardes de lard fume, et l’on pose de place en place des moities de jaunes d’œufs durs. Le pâte est ensuite recouvert d’une pâte feuilletee et mis au four pendant une heure et demie. On y infiltre un peu de bon jus additionne d’une legère dose de demi-glace à la sortie du four.

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Pftte de lapin. – Rabbit pie.

Oq procède de la même manière que pour le pâte de poulet. Mais Tadditioa des tranches de veau dans le fond du plat est facultative. On sert egalement en Angleterre des pàteà de toutes espèces de gibier qu’on prepare de la même façon.

Lie Lapin – The Ralibit.

Le lapin est originaire de Grèce. On le rencontre aujourd’hui dans toutes les regions temperees, où il s’est facilement acclimate. Sa fecondite est tellement prodigieuse, que, s’il n’etait constamment pourchasse, il deviendrait en peu de temps un veritable fleau pour le pays qu’il habite. C’est ce qui est arrive en Australie, oîi la race s’est propagee si vite et si bien que les lapins sont devenus pour la colonie une calamite publique. Malgre les battues organisees sur une grande echelle, malgre tous les encouragements donnes aux amateurs de sport, et malgre même la mise à prix de leurs têtes, les lapins ont continue à pulluler d’une manière inquietante.

Ils devastent les vergers et les jardins, s’attaquent aux racines des arbres fruitiers et detruisent les recoltes. On en fait de veritables hecatombes, on en confectionne des conserves de toutes sortes pour l’exportation, on en nourrit les animaux domestiques et on en fait même des engrais.

Le lapin est, parait-il, bon epoux et bon père, et c’est plaisir de le voir folâtrer avec ses enfants lorsqu’ils commencent à s’aventurer hors du terrier maternel. Il les caresse avec amour et les regarde prendre leurs gracieux ebats, l’oreille au guet, le

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nez au vent, et, au premier symptôme de danger, il les fait tous rentrer au logis, où il ne penètre lui-même que le dernier.

La nature, qui Ta depourvu de moyens de defense, l’a doue d’un odorat sensible, d’une ouïe fine et d’une vue perçante. La subtilite de ces sens, jointe à la rapidite de sa course, lui sert d’auxiliaire puissant pour echapper au chien qui le poursuit, au chasseur qui le traque, au braconnier qui l’apprehende au collet, La Providence Ta de plus doue de la faculte de pouvoir

se creuser sous terre des

repaires inaccessibles, Cest dans ces l4E’Ct7^”;^^’^

terriers qu’il naît, croît et multiplie. ^ ^^^^^

Quel est celui d’entre nous qui, habitant 7

la campagne, n’a pas, dans son enfance, eleve des lapins et qui ue se rappelle avec quelle tendre sollicitude on allait leur porter la nourriture journalière en les accablant de caresses et de baisers. Mais l’enfant est devenu homme, et l’interessant animal n’a plus d’attrait pour lui que sous la forme d’une gibelotte ou d’une fricassee.

Il y a deux espèces de lapins : le lapin de choux et le lapin de garenne. La chair de ce dernier est moins blanche que celle du premier, mais elle est plus estimee que celle du lapin domestique et se prête mieux aux preparations culinaires à cause de l’arôme qui la distingue.

En Angleterre, la femme du peuple, la compagne de l’ouvrier, n’a que des notions très elementaires de la cuisine bourgeoise.

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On raconte à ce sujet une anecdote assez plaisante : Un ouvrier anglais nouvellement marie, allant à son travail, avait achete sur sa route un lapin qu’il envoya à sa femme pour qu’elle le lui preparât pour dîner, A sonretour à la maison, quelle ne fut pas la surprise de Thomme en trouvant sa femme s’evertuant à arracher le poil du lapin. Elle croyait, dans son ignorance, que le lapin se plumait comme un poulet.

Lorsqu’on choisit un lapin, il faut s’assurer que ses griiïes sont flexibles et effilees, que son poil est doux, qu’il n’y a pas de poil blanc dans sa fourrure, et que l’os de la mâchoire inferieure se brise facilement sous la pression de la main.

Lapin rôti. – Roast rabbit.

Lorsqu’on fait rôtir un lapin, on doit avoir soin de le farcir . . avant de le mettre à la broche. On emploie à cet effet la même farce dont on se sert pour la dinde et la longe de veau, farce que l’on nomme en anglais veal stuffing. On recouvre les reins du lapin de bardes de lard, et, lorsqu’il est cuit, on le dresse sur un plat avec un peu de bon jus; puis, on envoie à part une sauce faite ainsi :

Après avoir fait blanchir le foie du lapin qu’on avait mis en reserve, on le hache et on l’ajoute à de la sauce bechamel bien epaisse dans laquelle on met egalement un peu de sauge hachee et blanchie, ainsi qu’un peu de muscade râpee et une pointe de cayenne.

Lapin bouilli. – Boiled rabbit*

Les Anglais mangent le lapin le plus souvent bouilli. Dans ce cas» on le farcit de la même manière que lorsqu’on le fait rôtir. On enveloppe bien la farce avec la peau du ventre que

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Ton assujettit en le bridant avec de la ficelle, et on plonge le lapin à grande eau legèrement salee, ou bien en pleine marmite. Une heure de cuisson doit suffire. On dresse alors le lapin sur un plat et on le masque d’une sauce soit au persil, soit aux câpres, mais, le plus souvent, d’une sauce aux oignons. On. emince des oignons que l’on fait cuire dans du lait et un peu de sel et de poivre. Lorsque les oignons sont bien cuits, on lie la cuisson avec un peu de roux et de crème. Cette sauce doit être tenue très epaisse. Cette manière de servir le lapin s’appelle en anglais rabit smothered with onions (lapin etouffe sous les oignons).

Pudding de lapin. – Rabbit pudding.

On doit, autant que possible, n’employer que de jeunes lapins pour la preparation de ce mets. On procède de la même manière que pour le pudding de beefsteaks, c’est-à-dire que l’on fait une pâte à la graisse de bœuf avec laquelle on fonce un moule en dôme ou simplement un bol de faïence. Après avoir decoupe le lapin en morceaux egaux, on l’assaisonne de sel, poivre et fines herbes composees de champignons, echalotes et persil, le tout prealablement hache et passe au beurre. On place les morceaux de lapin dans l’interieur du moule, on ajoute deux cuillerees de jus et on soude la surface de la pâte, aGn que l’eau ne puisse penetrer dans le pudding, que l’on enveloppe dans un linge assujetti au moyen de ficelle. On plonge le pudding en pleine eau bouillante pour l’y laisser de deux heures à deux heures et demie. On ajoute quelquefois au lapin des rognons de mouton ou de veau, coupes très minces, mais cela est facultatif.

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Curry de lapin. – Curry of rabbit.

Proceder exactement comme pour le curry de poulet. – Pendant la cuisson du lapin, faire bouillir du riz à l’eau legèrement salee pendant vingt minutes, Tegoutter et le remettre dans la casserole hermetiquement fermee. On place cette casserole à Tetuve pendant vingt minutes, pendant lesquelles le riz finit de se cuire. Lorsqu’on est prêt à servir, on remue legèrement le riz avec une fourchette, on forme une bordure autour du plat, et l’on dresse le curry de lapin dans le milieu.

Lièvre rôti. – Roast hare.

Il faut avoir soin, lorsqu’on depouille un lièvre, de lui laisser toute la peau du ventre, qui doit servir à envelopper la farce qu’on met dans l’interieur. Cette farce est la même que celle dont on garnit la dinde et le veau {veal stuffing). Le lièvre etant barde et trousse, on le fait rôtir soit au four, soit à la broche, et on le sert en envoyant à part une saucière de gelee de groseilles.

Grouse.

La chasse à la grouse est la plus attrayante que je connaisse. L’ouverture de cette chasse se fait invariablement le 12 août et ferme le 10 decembre. Cette date du 12 août marque la fin de la saison de Londres, ce qui permet à Telite des

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sportsmen d’emigrer vers les montagnes d’Ecosse et d’Irlande, où abonde cet incomparable gibier. La grouse est peu connue en France, mais elle est fort estimee des gourmets anglais, qui la prefèrent au faisan et au perdreau, à cause de la saveur particulière que communique à sa chair la bruyère aromatique et le serpolet des montagnes, dont elle se nourrit.

La grouse est de la famille des tetras et tient du coq de bruyère et de la gelinotte. Son plumage est brun et a ceci de remarquable, que celui du coq est en tout semblable à celui de la poule, de sorte qu’il est impossible de reconnaître le mâle de la femelle. Les pattes sont recouvertes, jusqu’à la naissance des ongles, de plumes blanches, fines et serrees.

La grouse se sert bardee et rôtie, avec accompagnement de sauce au pain {brecui satice) et de mie de pain frite. On la sert encore avec une sauce soubise, ou bien grillee à la crapaudine. On en fait aussi d’excellents pâtes.

Coq de bruyère. – Black game.

Le coq de bruyère, dont la chair ressemble un peu à celle de la grouse, est familier des sites montagneux d*Écosse et d’Irlande. On l’accommode comme la grouse. – La poule de bruyère s’appelle en anglais moor hen.

Faisan rôti. – Roast pheasant.

Le faisan, le perdreau, la grouse et le poulet, lorsqu’ils sont rôtis, ne doivent jamais se servir sur les tables anglaises qu’accompagnes d’une sauce au pain (bread sauce), (Voir le chapitre des sauces.)

L’expression « manger de la viande faisandee » explique

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suffisamment qu’il est reconnu que le faisan n’est bon qu’à la condition d’avoir ete conserve un certain temps avant d’être mis à la broche. S’il est mange trop frais, sa chair est fade, et moins delicate que celle du poulet; mais, s’il est mange dix ou douze jours après qu’il a ete tue, il possedera les qualites voulues pour être apprecie d’un vrai gourmet. On doit le conserver sans qu’il soit plume, car il est avere qu’il perd de son parfum lorsqu’il est expose sans plumes à l’action de l’air. De plus, la sève qui sert à nourrir les plumes se trouve insensiblement resorbee par la chair de l’oiseau et contribue à lui conserver son arôme.

D’après un vieux prejuge, le faisan n’est bon à manger que lorsque, en le suspendant par la queue, les plumes vous restent dans la main. Arrive à cette periode, l’animal est plus que faisande, il subit simplement un commencement de putrefaction; donc il est evident que sa chair ne peut être que malsaine et insalubre.

Perdreaux. – Partrldges.

On sert les perdreaux rôtis avec une sauce au pain (bread sauce) ou braises avec une sauce soubise, ou bien encore on les fait griller à la crapaudine. Dans ce dernier cas, on les ouvre en deux après les avoir vides et flambes, on les trempe dans le beurre fondu, pour les paner et les faire griller à feu modere.

Becasse. – TVoodcock.

Fulbert Dumonteil, le savant et gourmand naturaliste, a dit en parlant de la becasse : « On venère tellement cet oiseau que même ses dejections, religieusement recueillies sur d’onctueuses rôties, sont mangees par ses admirateurs. »

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Empruntons à un autre naturaliste bien connu, M. Victor Fatio, un exemple interessant deTintelligence deces animaux. La becasse ne serait pas si becasse qu’on veut bien le dire, d’après les faits suivants. En effet, M. Fatio, en chassant, a eu l’occasion d’observer à plusieurs reprises que cet oiseau, blesse» pratique sur lui-même, avec son bec et au moyen de ses plumes, des pansements fort ingenieux; il s’applique un emplâtre sur une plaie saignante, ou il opère adroitement une solide ligature autour d’un de ses membres brise. M. Fatio tua un jour une becasse qui, sur une ancienne blessure à la poitrine, portait un large emplâtre fait de petites plumes duveteuses arrachees à differentes parties de son corps, et solidement fixees sur la plaie par du sang desseche. Une autre fois, c’etait sur le croupion blesse que l’emplâtre fabrique de la même manière se trouvait pose. Deux fois, M. Fatio a trouve des becasses qui portaient à l’une des pattes une ligature de plumes serrees et entortillees autour de Tendroit où l’os avait ete fracture.

Il est un vieux proverbe qui dit :

A la Saint-Miehel, Becasse tombe du cieL

Ce qui signifie que, vers la fin de septembre, la becasse fait sou apparition chez nous’; m&is; ce proverbe comme bien d’autres est errone, car c’est un fait acquis et reconnu des chasseurs que le vrai moment de l’arrivee de la becasse est en novembre et en decembre. Certains gourmets proclament la becasse comme etant la reine du gibier à plumes; quant à moi, je ne partage pas l’estime qu’ils ont pour cet echassier, auquel je prefère un perdreau bien en point; mais respectons les prejuges et ne discutons pas sur les goûts.

Sur certaines tables anglaises, et notamment dans les clubs et les mess, lorsqu’on sert des becasses ou des becassines, les (êtes sont reservees et renvoyees à la cuisine, où on leur fait subir l’operation suivante :

On les enduit de graisse de mouton fondue, puis on les

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assaisonne de sel et de poivre. Ainsi preparees, elles sont renvoyees sur une assiette dans la salle à manger à la fin du dîner, et presentees, accompagnees d’une bougie allumee, à chaque convive qui la grille^ ou plutôt qui la brûle à la flamme de la lumière et la croque ainsi toute gresillante après Tavoir saupoudree de cayenne.

Dans certains dîners intimes, la tète de la becasse, après avoir ete traversee par une longue epingle, est fixee sur un bouchon où elle est en equilibre au moyen de petits bâtons croises agissant comme balanciers. Cet appareil est ensuite place delicatement sur le goulot d’une bouteille, puis, d’un coup de doigt, ^amphitryon fait vivement pivoter la tète, et celui des convives que le long bec pointu de l’oiseau designe en s’arrètant, a le privilège de croquer le crâne rissole devant les regards envieux de ses voisins.

Pudding de mauviettes. – Lark pudding.

Preparer une pâte à la graisse de bœuf ainsi qu’il en est donne la recette pour le pudding de beefsteaks et foncer avec cette pâte un moule à dôme ou une terrine à fond rond. Après avoir beurre la terrine ou le moule, on en garnit les parois avec la pâte, qui doit être un peu ferme. Prendre douze mauviettes, les vider, couper les tètes et les pattes, et les faire revenir dans le beurre. Faire revenir egalement quelques escalopes de veau et la même quantite de lard maigre coupe en tranches. Assaisonnez le tout de poivre, sel et fines herbes, et saupoudrez les oiseaux de farine. Mouiller avec un demi-verre de jus et retirer du feu au premier bouillon.

^ Emplir le vide du moule avec les mauviettes, en alternant avec le veau et le lard. Recouvrir ensuite d’une abaisse qu’on soude avec les bords du pudding, dont on replie le superflu de la pâte vers le centre, de façon que la viande soit bien hermeti

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quement enveloppee. Beurrer le centre d’une serviette et l’appliquer sur la surface, puis ramener les quatre pans du linge qu’on attache solidement avec une ficelle.

Le pudding ainsi prepare est alors plonge en pleine eau bouillante et doit cuire sans interruption pendant une heure et demie. Au moment de servir, egoutter le puddings 6ter la serviette qui Tentoure et le demouler dans un plat creux. Finalement, saucer d’une sauce bruue.

Canards sauvages d’Amerique. – Canvas back ducks.

Ce canard sauvage, que les Americains nomment le roi des oiseaux aquatiques, est originaire de l’île de Carrol, situee dans la baie de Chesapeake, entre la Virginie et le Maryland. Cette lie, qui mesure une surface de 1,200 acres et n’a pas moins de dix milles de côtes^ est le rendez-vous de toutes sortes d’oiseaux emigrants de la famille des palmipèdes, et surtout de l’espèce connue sous le nom de Canvas ba^k duck. Une particularite à observer chez ces oiseaux, c’est qu’ils se nourrissent principalement de celeri sauvage; or, comme cette plante croit abondamment dans les îles de la baie de Chesapeake, on s’explique pour-, quoi ces volatiles affectionnent ces parages.

Cette chasse offre une grande attraction aux Americains et aux Anglais, qui entreprennent de longs voyages pour se passer la fantaisie de tuer quelques-uns de ces canards.

Aller à l’île de Carrol chasser le canvas back duck au moins une fois dans sa vie est un des plus grands desirs du chasseur yankee.

Llle de Carrol appartient à un syndicat de sportsmen qui en est proprietaire depuis plus de cinquante ans. Autrefois, à l’arrivee des hôtes ailes, les proprietaires de l’endroit s’embusquaient vers les côtes, armes de canons de long calibre qu’ils chargaient à mitraille, et il arrivait frequemment qu’une simple decharge abattait une centaine de pièces de gibier.

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Cette chasse etait si fructueuse et le massacre du gibier si considerable, que les fermiers trouvaient de l’economie à remplacer, pour la nourriture de leurs employes, la viande par le gibier; aussi ces derniers, fatigues d’un tel regime, en etaient arrives à stipuler dans leurs contrats que les patrons s’engageaient à ne faire manger du canvas bach duck à leurs ouviiers que deux fois par semaine.

Les Americains ont une façon originale de chasser le canard sauvage : une boîte carree, assez large pour contenir quatre chasseurs confortablement assis, est enfoncee dans l’eau à une cinquantaine de mètres du rivage. On y arrive par un pont volant sur lequel on etend des roseaux» ainsi que sur le dessus de la box^ qui emerge de cinquante centimètres à la surface de l’eau. Des ouvertures pratiquees à la partie superieure de la boîte, permettent au chasser d’ajuster le gibier qui voltige sans mefiance autour de la cachette mysterieuse.

Les chiens qu’on emploie pour cette chasse sont d’une race particulière et d’une sagacite rare. Éleves dans ces parages giboyeux, ils ont un instinct naturel pour la chasse aux oiseaux aquatiques. Leur poil est long et soyeux; mais sous cette fourrure il en existe une autre courte et touffue qui les protège contre l’humidite et leur permet de rester dans l’eau pendant un temps indefini, par les plus grands froids. Leur amour pour la chasse est des plus remarquables, et à leurs demonstrations de joie lorsqu’ils partent pour une excursion matinale on devine qu’ils apprecient le sport tout autant que leurs maîtres.

Le canvas bock duck est fort apprecie pour la delicatesse de sa chair, et je suis surpris de se rarete sur les marches français.

Le celeri sauvage, dont il se nourrit presque exclusivement, communique à sa chair un goût particulier qui le distingue des autres canards sauvages.

Pour le rôtir, on le farcit d’une farce à la puree de celeri et on l’accompagne d’une salade de celeri. En Amerique, on ser avec ce canard de la gelee de groseilles.

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Jeune cygne rôti. — Roast cygnet.

Gastronomiquement parlant, le cygne a peu de merite; mais, comme c’est relativement un oiseau rare, il est considere comme un mets princier. – Depuis le règne de Charles II, les etangs des parcs royaux, et surtout ceux des parcs de Windsor et de Richemond sont peuples de ces gracieux palmipèdes, et chaque annee, à l’occasion des fêtes de Noël, il est d’usage que le souverain en fasse une distribution aux ministres et à quelques gcanda dignitaires de la couronne. – Les privilegies font un grand cas du cadeau royale et^ par respect pour la majeste du donateur, il est convenu d’admettre que cet oiseau est excellent; mais, comme je n’ai aucune raison de menager la suscqplibiliie royale, je proclame hautement que c’est un mets detestable .

La bourriche qui contient le temoignage de la munificence royale est toujours accompagnee d’une recette imprimee que je copie textuellement :

Après avoir plume le cygne, le vider, le flamber et le trousser pour rôtir. Faire une chair à saucisse composee de bœuf hache et de lard de poitrine fume en egale quantite. On ajoute à cette farce, qui doit être fortement assaisonnee, trois echalotes hachees et passees au beurre, et une pincee d’epices. – Après avoir farci le cygne, on l’enveloppe d’une pâte faite de farine et d’eau chaude, puis on recouvre le tout d’une feuille de papier graisse que l’on fixe autour de la pâte au moyen d’une ficelle. – Trois heures au moins sont necessaires pour rôtir un cygne enveloppe de cette façon. On doit l’arroser souvent pendant la cuisson. On envoie à part une sauce au porto. (Voir chapitre des sauces.)

LA CUISINE ANGLAISE 191

P&te; du chasseur. – Hunier ‘s pie

Prendre un pain de mie carre dans lequel on pratique une ouverture sur la partie superieure, en reservant le morceau de croûte enleve. Extraire toute la mie du pain en ne conservant que la croûte.

On remplit l’espace vide soit avec une fricassee de poulet froide, une salade de volaille, un chaud-froid de gibier, ou avec une mayonnaise de homard ou de saumon. Lorsque le pain est rempli, on verse sur la viande ou le poisson de la sauce mi-froide pour remplir les cavites et donner au p&te; une surface unie. – On bouche ensuite Torifice du pain avec le morceau de croûte que Ton avait prealablement enleve pour pratiquer l’ouverture.

Ces pâtes sont frequemment servis dans les rendez-vous de chasse, les dejeuners sur Therbe et les luncheons des champs de courses.

P&te; de becasses en terrine à. l’irlandaise. VtTood-cock pie.

Cette manière de cuire les becasses est des plus simples. – Après avoir flambe les becasses et coupe les pattes et les ailerons, on les fend en deux dans leur longueur. Retirer les gesiers, mais laisser les intestins. Ranger les moities de becasses dans une terrine à pâte, les assaisonner de sel, poivre, epices et fines herbes et les couvrir entièrement de beurre clarifie. Étendre sur la surface des bardes de lard, puis couvrir la terrine avec une epaisse abaisse de pâte à l’eau, soudee hermetiquement, et mettre au four modere pendant deux heures. Lorsqu’on retire le pâte du four, on le remplit avec du beurre clarifie après

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avoir enleve la pâte, qu’on jette. On lave Texterieur et les bords de la terrine, qu’on laisse refroidir avant de servir.

Terrine de puree de lièvre. – Potted hare.

Après avoir depouille et vide un lièvre, on le coupe en morceaux comme s’il s’agissait d’en faire un civet. D’autre part, on detaille deux livres de lard de poitrine fume en gros dès que l’on met dans une casserole et qu’on fait revenir sur un feu vif. Lorsque le lard a rendu sa graisse, on retire les morceaux qu’on depose provisoirement sur une assiette et qu’on remplace dans la casserole par la viande du lièvre que l’on fait revenir egalement.

Cette operation terminee, on egoutte la graisse superflue, qu’on met à part; puis on ajoute au lièvre les morceaux de lard frit, un quart de litre de madère et autant de bouillon, – un bouquet garni compose d’une branche de thym, de basilic et de* marjolaine, ainsi que de deux feuilles de laurier.

Ajouter encore six clous de girofle, une gousse d’ail, quatre

oignons, un peu de macis, une trentaine de grains de poivre,

une douzaine de champignons et une pincee de cayenne. Quant

au sel, il faut en mettre avec moderation à cause du lard qui est

dejà sale.

On fait partir sur un feu vif et on laisse mijoter sur le coin du fourneau pendant une heure et demie, à moios que ce ne soit un vieux lièvre. Dans ce cas, on devra le laisser cuire plus long* temps.

Lorsque les chairs sont devenues tendres au toucher, on egoutte les morceaux de lièvre sur un tamis et on degage la viande des os. Cette viande est alors mise dans un mortier avec le lard et la graisse qu’il a rendue lorsqu’on Ta fait frire.

On ajoute à la puree une cuisson reduite, et l’on passe le tout, avec l’aide d’une cuiller de bois, à travers un tamis à que

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nelle. – On remet la puree dans une bassine pour la bien melanger, puis on en remplit des terrines à pâte, qu’on recouvre et qu’on met au four dans des plafonds creux à moitie remplis d’eau.

Une heure de cuisson suffiL – Lorsqu’on sort les pâtes du four^ on egalise la surface avec le dos d’une cuiller. Lorsqu’ils sont froids, on les recouvre d’une couche de saindoux ou de beurre clarifie d’un centimètre d’epaisseur, puis d’un papier impermeable dont on huile la surface. – On replace alors les couvercles sur les terrines qu’on range dans yn endroit frais pour s’en servir au besoin.

P&te; de Yorkshlre. – Torkshire pie.

A Noël (Christmas), la coutume est, dansles giandes familles, de confectionner un immense pâte compose de toutes espèces de viandes, de volaille et de gibier. C’est ce pâte qu’on nomme Yorkshîre pie. Un vieil usage dont l’origine remonte à une epoque inconnue veut que chaque annee le vice-roi d’Irlande enyoie au souverain regnant un enorme pâte comme present. Ce pâte est confectionne d’après la recette du Yorkshire pie et se fait ainsi :

Desosser qne dinde, une oie, deux faisans, quatre perdreaux, quatre becasses, douze becassines, quatre grouse, et quatre sarcelles. Faire cuire un jambon d’York et deux langues de bœuf salees. Garnir la volaille et le gibier de farce dans laquelle on melange du lard de poitrine coupe en des, ainsi que les deux langues egalement coupees comme le lard. Toutes ces galantines doivent être cousues, afin que la farce ne s’en echappe pas; puis on les place dans une braisière foncee de bardes de lard et de legumes, ainsi que de trois bouquets de persil garnis. On recouvre les viandes de nouvelles bardes de lard et d’un rond de fort papier. On mouille ensuite avec une demi-bouteille de vin blanc,

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194 . LA CUISINE ANGLAISE

on couvre la braisière qu’on met à four modere pendant à peu près trois heures.

Pendant que cuisent les viandes, on prepare une pâte à dresser à Teau chaude avec douze livres de farine, trois livres de saindoux et une poignee de sel. On procède ainsi :

Mettre la farine sur. le tour en forme de puils. D’autre part, mettre le saindoux dans une casserole avec un demi-litre d’eau chaude. Lorsque le saindoux est fondu et amalgame avec l’eau, m procède à la confection de la pâte qu’on laisse reposer pendant vingt minutes avant de l’employer, mais on doit avoir soin de la conserver dans une casserole fermee pour eviter son contact avec l’air afin de Tempècher de secher. Celte pâte ne doit pas être tenue trop ferme au debut car elle devient dure en refroidissant. On doit l’employer, tandis qu’elle est encore tiède. Elle est alors très malleable. On se sert dans le Yorkshire, pour dresser ces pâtes, de mandrins en bois autour desquels on dresse la pâte. Lorsque la hauteur desiree est atteinte, on relire le moule et on peut facilement terminer le dressage, tandis que la pâte est encore chaude; mais il faut se hâter, car, la pâte etant refroidie, on ne peut plus la travailler et il faut la faire rechauffer pour pouvoir s’en servir, ce qui est facile à faire enlamettant àTetuve dans une casserole fermee.

Il reste maintenant à garnir le pâte. On le fonce d’abord de bardes de lard qu’on met dans le fond et sur les côtes, et sur les^ quelles on etend une couche de chair à saucisses. On place alors les plus grosses galantines qu’on recouvre de farce et de tranches de jambon; on emplit ainsi le pâte en alternant les viandes, le jambon et la farce, en reservant les plus petites galantines pour le dessus. Finalement, on met une dernière couche de farce ainsi que quelques bardes de lard,, et on recouvre le pâte. Il ne reste plus qu’à orner les côtes et le couvercle avec des feuilles en pâte ami ncie coupees à l’emporle-pièce et soudees avec de la dorure . On met le pâte sur un plafond à four modere, et on lui donne quatre ou cinq heures de cuisson. A sa sortie du four, on lui entonne du jus prepare avec les carcasses du gibier et dans lequel on a fait fondre quelques feuilles de gelatine.

LA CUISINE ANGLAISE . 195

La quantite de viande et de gibier employee pour la confection de ce pàle parait peut-être extravagante, mais il ne faut pas oublier qu’aux fêles de Noël, Tabondance de victuailles est à Tordre du jour, et que chaque famille riche se fait une gloire ce jour-là, d’exhiber un buffet pantagruelique aux yeux de ses invites.

Un p&te; monstre.

La petite ville de Denby Dale dans le comte de Yorksbire est celèbre pour ses pâtes dont la reputation est universelle… en Angleterre.

A Toccasion du jubile de la reine» en 1887 pour celebrer le cinquantième anniversaire de son règne» la municipalite de la ville eut Tidee, plus originale que pratique, de faire confectionner par un des meilleurs faiseurs de la localite un pâte qui devait surpasser en grandeur tout ce qu’on avait encore vu.

Un four enorme fut construit tout exprèspourle cuire; et, pour le decouper un couteau de dimension formidable fut commande à Shefâeld. La lame avait deux pieds et demi de longueur et sur le manche d*ivoire on avait grave une inscription commemorât ive.

Ce fantastique pâte, de forme ronde, mesurait deux mètres cinquante centimètres de diamètre. On employa pour sa confection 3 sacs de farine, 1,000 livres de bœuf, ISO livres de veau, 200 livres de porc, 150 livres de mouton, 150 livres de saindoux, 100 lapins, 30 lièvres, 50 poulets, 100 pigeons, 20 grouses, 5 dindes, S oies, 12 faisans, 20 pluviers, 40 livres de jambon et 30 livres de lard.

Trois ouvriers travaillèrent pendant huit jours à la fabrication du geant. La viande avait ete cuite k moitie avant d’être mise dans le pâte dont le moule seul pesait 1,500 livres.

Le couvercle etait decore avec les emblèmes des trois

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royaumes unis, c’esl-à-dire la rose, le trèfle et le chardon. On y voyait aussi les armes du prince de Galles, ainsi que quelques devises patriotiques.

Le malin du jour à jamais memorable du jubile de la reine, le fameux pâte, place sur un char richement orne et traîne par

10 chevaux enrubannes, fut transporte dans le parc, sous une tente immense, où avaient ete convies tous les habitants du comte. On peut se faire une idee du nombre de personnes presentes à la ceremonie par le chiffre de la recette des prix d’entree qui s’eleva à la somme de 240 livres sterling (6,000 francs).

Chaque billet d’entree donnait droit à une tranche de pâte, mais la stupefaction fut grande quand commença la distribution des parts; car, lorsque le couteau eut fait une brèche dans le flanc du monstre, il s’en exhala une si forte odeur de putrefaction que les spectateurs se reculèrent epouvantes.

La deception fut grande pour tous ces braves gens qui etaient venus la plupart de très loin, afin de goûter au fameux pâte du jubile dont on avait preconise les merveilles, mais que le bon sens avait condamne d’avance.

Il etait en effet difficile d’admettre qu’une telle quantite de viandes de tant de natures differentes, entassees et surchauffees, puissent refroidir sans fermenter, surtout lorsque Ton songe que cela se passait au cœur de Tete.

L’odyssee du jubile pie se termina par un enterrement civil.

11 fut enfoui le soir même sous un lit de chaud vive.

LA CUISINE ANGLAISE

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Paonneau. – Pea cock.

Le paon, ce superbe oiseau qu’on s’est fatigue d’admirer par la seule raison qu’il n’est pas rare, peut être considere comme le plus bel oiseau de la creation. Il est originaire d’Asie, où on le trouve à l’etat sauvage. Ce fut, dit-on, Alexandre le Grand, qui, après sa conquête de l’Inde, l’introduisit en Grèce où il s’acclimata facilement. De Grèce, il se propagea bientôt dans toute l’Europe. En France ou considère le paon comme un ornement de basse-cour plutôt que comme un oiseau comestible; mais en Angleterre il a des partisans, et on le voit assez souvent figurer comme rôti sur les tables aristocratiques. On en rencontre des troupeaux dans quelques parcs seigneuriaux. Le duc de Bedford les tenait en grande estime et en avait une centaine qu’il elevait avec soin. Un de ses passetemps favoris etait de leur apporter lui-même la nourriture quotidienne, et il se complaisait à les voir faire la roue, tandis qu’il leur distribuait leur pitance.

Le paon n’est mangeable que lorsqu’il est jeune. Sa chair ressemble un peu à celle do la pintade. ^On ne le sert jamais autrement que rôti et la poitrine couverte de lardons. Après

Crtnt/} TTrt JJ A/

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avoir plume, vide, flambe et larde le paon, Tenvelopper dans du papier blanc bien beurre et le mettre au four ou à la broche. Lorsqu’il est presque cuit, le deballer et le laisser encore au feu pour prendre couleur, puis le servir accompagne d’un bon jus et d’une sauce au pain [Bread sauce, chap. xui).

En Allemagne, on sert le paonneau avec une sauce à la crème aigre. A cet effet, lorsque le papier est enleve, on arrose l’oiseau de temps en temps avec deux ou trois Verres de crème aigre et, finalement, on ajoute du jus ou du bouillon au fond de cuisson qu’on fait reduire vivement jusqu’à ce que la sauce devienne assez epaisse; puis on la passe à la passoire fine et on en masque le paonneau avant de l’envoyer sur table.

Canard sauvage à. ramericaine. – VtTild duck à. ramericaine.

Faire rôtir un canard à la broche après lui avoir frotte l’estomac avec son foie. Vingt minutes de cuisson suffisent, car l’oiseau doit être vert cuit. Lorsqu’il est debroche, on le decoupe en aiguillettes, mais sans detacher les tranches qui doivent rester adherentes à la carcasse.

On decoupe ainsi l’oiseau pour en extraire tout le jus qu’on reserve dans une petite casserole. On y ajoute un peu d’essence d’extrait de viande, un demi-verre de porto, du sel et du poivre et le jus d’un demi-citron. On fait chauffer cette sauce à laquelle on ajoute encore un bon morceau de beurre et on la verse sur le canard. Le canard sauvage arrose de la sorte est excellent froid.

Ailerons de poulets en tortue.

Desosser deux douzaines d’ailerons de poulet, depuis la première jointure; les flamber et les farcird’une quenelle de volaille

LA GUISÎNE ANGLAISE 199

bien epicee et relevee en assaisonnement par une pointe de cayenne. Foncer une casserole plate de tranches d’oignons, de quelques branches de persil et de parures de champignons. Ranger les ailerons à plat sur tes legumes, les assaisonner de sel et de poivre et les arroser d’huile d’olives. Faire partir sur le feu et au bout de quelques minutes retourner les ailerons, puis couvrir la casserole et la mettre au four modere. Laisser mijoter pendant vingt ou vingt-cinq minutes, puis egoutter les ailerons sur une serviette.

D’autre part, retirer l’huile de la casserole et la remplacer par un verre de madère. Ajouter alors un peu de thym, de laurier, de basilic et de marjolaine, et remettre la casserole sur le feu jusqu’à complète reduction du madère. Melanger aux ingredients une cuilleree de roux, une de tomate et du consomme un peu colore. On obtient alors une sauce tortue, qu’on relève d’une pincee de poivre de Cayenne, et qu’on passe à travers une passoire fine. Après avoir laisse degraisser la sauce pendant un quart d’heure au coin du fourneau, on l’ecume et on la reduit, afin d’obtenir la consistance et le veloute desirables.

Il ne reste plus qu’à faire chauffer les ailerons dans cette sauce et à completer le ragoût par l’addition de quelques truffes, champignons et quenelles.

P&te; de grouse. – Grouse pie.

Lever les filets de quatre grouses crues (en anglais, le mot grouse ne prend pas de pluriel). Placer ces filets dans un plat creux, les assaisonner de sol et d’epices, et leur adjoindre trois cents grammes de lard de poitrine fume coupe en tranches ou de jambon. Arroser les chairs de quelques cuillerees d’eau-de vie et les laisser mariner ainsi pendant deux ou trois heures.

D’autre part, prendre la chair des cuisses et la degager des nerfs et des os, l’assaisonner et la piler dans un mortier avec les filets de deux poules et autant de viande maigre de veau et

200

LA CUISINE ANGLAISE

la même quantite de lard frais qu’il y a de veau et de poule. Ajouter à la farce, lorsqu’elle est bien pilee, une pincee d’epices et une cuilleree de fines herbes composes d’echalotes, de persil et de champignons.

Foncer avec de la pâte brisee un moule à pâte et en masquer le fond et les parois avec une couche epaisse de farce. Emplir le pâte en alternant la farce, les filets et le jambon, et en semant de place en place quelques belles tranches de trufTes.

Couvrir le pâte d’une epaisse abaisse de pâte, en orner la surface avec une rosace formee de feuilles coupees à Temportepiëce; dorer à Tœuf battu et mettre au four chaud pendant deux heures et demie.

Une demi-heure après la sortie du four, on infiltre dans le pâte, au moyen d’un petit entonnoir, de la gelee de viande melangee avec une essence de gibier faite avec les carcasses du gibier – moins les dos, qui communiqueraient un goût d’amertume qu’on doit eviter. – On peut ajouter à cette essence la marinade dans laquelle on a fait macerer les filets.

Sous la tonnelle.

CHAPITRE IX

ŒUFS ET LÉGUMES. – EGGS AND VEGETABLES

SOMMAIBE

Celeri (Cèlery,)

Choux de mer (Seakale).

Choux rouges {Red Cabbages),

Concombres (Cucombers).

Courges {Vegetable marrow).

Cresson Alenois (Mustard and cress).

Fèves de marais {Broad beans).

Gingembre (Ginger),

Haricots verts (French beans).

Oignons farcis [Farced onions).

Oignons farcis à l’indienne {Farced onions).

Oignons d’Espagne {Spanish onions).

Œufs à la coque {Plain boiled eggs).

Œufs farcis à l’indienne (Farced Eggs),

Œufs de pluviers(/*/ot?er5 Eggs).

Omelette de Noël {Christmas Omelette),

Omelette au curry (Curried omelette).

Pâte du pauvre homme {Poôr man’s pie).

Pommes de terre en robe de chambre (Potatoes in theirjacket).

Ppmmes de terre soufflees {Souffle potatoes).

Pommes de terre bouillies et rôties (Potatoes roasted and boiled).

Pommes de terre à l’eluvee (Stewed potatoes).

Pudding de pois secs {Pea^ pudding).

Pudding de choux (Cabbage pudding).

Pudding de truffes (Truffle pudding).

Pommes de terre à la vapeur (Steamed potatoes).

Pommes de terre au four [Baked potatoes) .

Pommes de terre nouvelles (New potatoes).

Pommes de terre en vermicelle (Vermicelli potatoes).

Puree de pois ( Puree of peas).

Puree de pommes de terre gratinee ( Puree of peas au gratin).

Raifort (Horse radish).

Rhubarbe (Rubarb).

Tomates (Tomatoes).

Topinambours ( Jerusalem Artichokes).

Tomates en surprise ( Tomatoes en suprise).

Topinambours frits (Fried artichokes).

Œufs à la coque. – A Tanglaise.

Les Anglais ignorent l’usage de la « mouillette » de pain. Ils mangent les œufs à la coque avec de petites cuillers speciales arrondies qu’on appelle « egg spoons ». Après avoir decapite rœuf,ils l’assaisonnent de ^el, poivre et d’un morceau de beurre frais qu’ils font fondre en le remuant avec la cuiller, et ils mangent l’œuf accompagne de pain grille ou de pain bis.

Œufs frits au jambon et au lard. Fried eggs and bacon.

Faites frire dans une poêle quelques tranches de lard ou de jambon. Égouttez-les, et dressez-les sur un plat que vous tenez

LA CUISINE ANGLAISE 20î^.

au chaud. Remettez la poèle au feu et faites frire les œufs dans la graisse bouillante, et, après les avoir separes avec un epiportepièce, enlevez-les de la poêle avec une ecumoire pour les dresser sur le jambon ou le lard.

L’œuf frit au lard ou au jambon est très en honneur pour le premier dejeuner du matin. On pourrait presque classer ce mets parmi les plats nationaux anglais.

OBufs poches à la diable. – Devilled poached eggs.

Faites pocher des œufs très frais pendant trois minutes dans de Toau salee et acidulee avec un peu de vinaigre. Lorsqu’ils sont cuits, egoutlez-les et mettez-les dans de petites cocottes que Ton a fait chauffer, et masquez-les d^ine sauce à la diable.

Sauce à la diable : Faites frire dans l’huile ou du beurre clarifie trois ou quatre echalotes hachees. Lorsqu’elles sont d’une belle couleur blonde, egouttez l’huile et remettez-les dans la casserole avec une grosse pincee de poivre de Cayenne, un peu de moutarde anglaise et une cuilleree à cafe de worcestershire sauce. Mouillez ces ingredients avec de la sauce bechamel bien reduite. Donnez à la sauce un simple bouillon, passez-la à travers une passoire fine et masquez-en les œufs.

*CBufs poches au lard. – Poached eggs and bacon.

Après avoir poche les œufs, egouttez-les et dressez-les sur des croûtes de pain grille que vous coupez à* l’emporte-pièce rond de la grandeur des œufs. Faites frire des tranches de lard fume coupees très minces et entourez-en les œufs poches.

204 LA CUISINE ANGLAISE

Œufs farcis à l’indienne. – Stufied eggs à l’indienne.

Faire cuire six œufs durs. Les ecaler, les couper en deux dans leur longueur, et en retirer les jaunes que l’on broie dans une terrine ou dans un petit mortier avec deux jaunes d’œufs crus, une cuilleree à cafe de curry, 60 grammes de beurre, un peu de sel et une cuilleree de sauce bechamel bien reduite. Ajouter à cet appareil deux ou trois cuillerees de riz bien cuit que Ton mêle legèrement avec une fourchette, et remplir la partie de Tœuf restee vide par Tabsence du jaune. Il faut ensuite lisser la surface, à laquelle on donne une forme legèrement bombee, avec un couteau trempe dans le beurre, et mettre au four pendant dix minutes sur un plafond beurre. Dressez les œufs sur une legère couche de farce à quenelle ou sur un peu de puree de pommes de terre, et saucer d’une sauce à Tindienne.

Œufs en surprise à la Madras.

Choisir six œufs de même grosseur. Pratiquer une ouverture à la plus petite extremite au moyen d’un petit couteau bien aiguise et d’une fine lame triangulaire. Vider le contenu des œufs dans un vase.

D’autre part, emincer en petits des de la viande de poulet bouilli ou rôli. Émincer egalement de la langue à Tecarlate, des truffes et des champignons. Amalgamer le tout avec un peu de sauce au curry bien reduite, liee avec deux jaunes d’œufs et assaisonnee de bon goût, avec addition d’un peu de riz cuit à la turque.

Mettez les coquilles d’œufs dans des coquetiers et emplissezles avec le salpicou au moyen d’une petite cuiller, puis fermez l’orifice avec le morceau de la coquille qui a ete decoupe. Servez

LA CUISINE ANGLAISE 205

dans les coquetiers avec des cuillers à œufs et des rôties, ainsi que cela se pratique pour les œufs à la coque.

On peut bouclier l’orifice des œufs, si Ton prefère avec un rond de truffe ou do langue ou avec un champignon tourne.

Cette manière originale de servir les œufs est très effective, mais à la condition seulement que les œufs soient coupes avec une grande nettete. L’operation do scier les œufs etant très longue et très difficile doit se faire à temps perdu; les coquilles d’œufs, après avoir ete lavees, se conservent indefiniment. Lorsqu’on commence l’operation de la decapitation des œufs, il faut marquer au crayon la ligne circulaire que doit entamer la lime. On trace alors un sillon avec un des côtes tranchants de la lime et Ton finit d’ouvrir l’œuf avec la pointe d’un canif ou d’un couteau d’office. Si l’on sert ces œufs pendant les fêles de Pâques, on peut colorer les coquilles avec de l’eau dans laquelle on a fait infuser de la cochenille ou du bois de campèche.

Omelette au curry. – Omelette -with curry.

Hachez un petit oignon que vous faites frire dans le beurre. Lorsqu’il est frit, mettez dans la casserole une cuilleree à cafe de curry indien que vous faites cuire avec l’oignon pendant deux minutes et auquel vous ajoutez deux cuillerees de crème. Mêlez le tout avec cinq œufs entiers bien battus et assaisonnez de sel seulement, car la poudre de curry est assez poivree par ellemême. Faites fondre 30 grammes de beurre dans une poêle et procedez comme pour une omelette ordinaire, mais, avant delà renverser sur le plat, garnissez l’interieur de riz que vous avez fait cuire d’avance de la manière suivante :

Lavez une poignee de riz. Égouttez-le et epongez-le sur une serviette pour en retirer toute l’humidite. Remettez-le dans la casserole avec 100 grammes de beurre; faites-le frire pendant quelques minutes en le remuant avec une cuiller de bois. Mouillez ensuite avec du consomme blanc et bouillant, garnis

206 LA CUISINE ANGLAISE

sez d’un oignon entier et assaisonnez de seL Lorsque le riz est cuit, retirez Toignon et ajoutez un morceau de beurre que vous mêlez avec une fourchette. Le riz à Tindienne ne doit jamais être remue avec une cuiller. Versez autour de l’omelette une sauce claire au curry.

Omelette de N06I à l’anglaise. – Christmas Omelette.

Cette omelette ne se sert guère en Angleterre que pendant les fêtes de Noël, et se garnit avec la preparation connue sur le nom de « mince meat » avec laquelle on confectionne les fameux gâteaux appeles « mince pies ». (Voir le chapitre X.)

Après avoir cawe les œufs dans une terrine, on les bat avec deux cuillerees de crème et autant de rhum ou de cognac, une pincee de sucre et un grain de sel. On procède comme pour une omelette ordinaire; mais, avant de la rouler sur elle-même, on la garnit de trois cuillerees de mince meat. Lorsqu’elle est retournee sur le plat, on l’arrose de rhum ou de cognac, on la saupoudre de sucre fin, et on y met le feu au moment de l’envoyer sur table.

Œufs de vanneau. – Plovers eggs.

On confond souvent le pluvier, le vanneau et le chevalier gambette. Mis à la broche, bardes de lard et rôtis à point, on peut s’y meprendre. Mais, si ces oiseaux se ressemblent par le goût, ils dillèrent essentiellement par le plumage.

Le vanneau est huppe et d’une couleur verdâtre; le chevalier gambette est marque d’un collier de plumes brunes et le pluvier a le plumage d’une teinte doree et le ventre blanc.

Ces trois espèces d’echassiers hantent les bords des etangs, les rivières et les marais où ils s’ingenient à deterrer, dans les fonds humides et limoneux, les insectes dont ils se nourrissent.

LA CUISINE ANGLAISE 207

C’est vers le milieu du .mois de mars que les pluviers et les vanneaux commencent à pondre et, d*aprës une coutume antique, les premiers œufs qui sont apportes sur le marche de Londres sont envoyes à la reine.

Ces oeufs, lors de leur apparition, sont tellement recherches et l’engouement pour s’en procurer est tel, que Ton voit souvent les amateurs les payer jusqu’à ‘huit et dix shillings la pièce.

Le vanneau fait son nid en pleine terre et Tubrile sous une couche d’herbe, ce qui fait qu’on eprouve quelque difficulte à le decouvrir. On a remarque que Toiseau derange de ses œufs ne s’envole pas immediatement, mais se met à courir une certaine distance avant de prendre son vol comme s’il voulait par cette tactique detourner l’attention des chercheurs. Le vanneau ne pond jamais plus de quatre œufs, aussi, lorsqu’il s’en trouve moins que ce nombre dans le nid, on peut en conclure que l’oiseau n’a pas encore commence à couver et par consequent ses œufs sont bons. On peut du reste s’en rendre compte en les mettant dans l’eau froide. S’ils surnagent perpendiculairement la pointe en bas, c’est que l’incubation a commence; si, au contraire, ils s’enfoncent horizontalement, ils sont frais.

Les gardes-chasse, les laboureurs et les bergers tirent un bon profit des œufs de vanneaux qui ne se vendent jamais moins de trois shillings par douzaine.

Ces œufs sont de couleur verdâtre et mouchetes de taches noires. Ils ressemblent, à s’y tromper, aux œufs de corbeaux; mais, lorsqu’ils sont cuits et ecales, il est très facile de les distinguer, car l’œuf de vanneau est bleuâtre, transparent et d’une delicatesse extrême, tandis que l’œuf de corbeau est d’un blanc mat, ferme au toucher et coriace sous la dent.

Les œufs de vanneau se mangent generalement durs et ou les sert aussi chauds comme entrees. Dans ce cas, on les dresse dans une croustade de riz ou de pain frit garnie d’une puree de volaille ou de gibier. Poches daiïs de petites cocottes, elles constituent un elegant plat de dejeuner.

Huit ou dix minutes suffisent pour cuire les œufs de pluviers. Il s’en consomme une enorme quantite en Angleterre. On- les

208 LA CUISINE ANGLAISE

sert le plus communement dans leurs coquilles, dresses simplement dans un nid de mousse qu’on se procure chez les marchands de volaille. On sert à part des tartines de pain beurre coupees très minces. On sert aussi les œufs de pluviers en belle vue dans un aspic ou dans une crouslade de riz. On les emploie aussi pour garnir le tour d’une salade russe ou d’une mayonnaise de homard. Ce genre de bordure est d’un charmant effet sur un buffet de bal.

Coupes en tranches et places entre deux tartines de pain beurre, sur lesquelles on a seme du cresson alenois ils font d’excellentes sandwiches.

Œhifs de mouettes.

Les œufs de mouettes sont moins estimes que les œufs de pluviers, et comme ces derniers, se servent froids. Us sont d’une couleur bleuâtre et bizarrement marbres de taches noires.

On les fait cuire à l’eau bouillante pendant dix ou douze minutes et s’emploient coupes en quartiers comme les œufs ordinaires pour bordures de mayonnaises ou pour garnir la salade; mais ils se servent plus souvent dans leurs coquilles, dresses sur une serviette avec une garniture de persil.

Ces œufs se trouvent en abondance dans certaines îles avoisinant les côtes d’Ecosse.

On en voit peu sur les marches anglais. Us n’ont en realite rien de remarquable comme goût et leur prix relativement eleve ne repond pas à ce qu’on pourrait eu attendre.

Pomme de terre. – Potatoes.

Les Anglais sont grand mangeurs de legumes, mais ils les prefèrent simplement cuits à l’eau. La pomme de terre est surtout en honneur chez eux, et dans un dîner il ne faut jamais oublier d’en servir accommodees au moins de deux manières

LA CUISINE ANGLAISE 209

differeûles. La pomme de terre fut introduite en Angleterre par sirWalter Raleigh plus de cent ans avant que Parmentier eût dote la France de ce precieux tubercule. Elle est cultivee sur une grandeechelle, surtout en Irlande^ où la nature du terrain convient parfaitement à sa culture. Ce ne fut que longtemps après son introduction en Angleterre que Ton commença à employer la pomme de terre comme aliment. Pendant bien des annees elle ne fut cultivee que comme une curiosite botanique. Les legumes sont en general très beaux chez nos voisins, mais, à part le celeri, ils sont moins savoureux qu’en France. Il en est certains qui sont obligatoires comme accompagnement de mets speciaux. C’est ainsi qu’il ne faut jamais omettre de servir des petits pois avec les canetons, et avec Tagneau; des haricots verts avec la venaison; des panais avec la morue; des carottes et des navets avec le bœuf et le porc sale; de la puree de navets avec le mouton bouilli; des concombres eminces avec le saumon. Il est à remarquer que dans les hôtels les restaurants et les maisons bourgeoises, les legumes se servent avec le rôti et simplement cuits à Teau. On ne les sert comme entremets que sur les tables aristocratiques.

Pommes de terre en robe de chambre. – Potatoes in

thelr jackets.

L’Angleterre est le pays du monde où Ton mange le plus de pommes de terre. On en sert à tous les repas accommodees de differentes manières, et il est de rigueur d’en presenter aux convives avec le poisson et le rôti, et même avec les entrees. En un mot, elles font l’office du pain dont nos voisins font une très faible consommation.

Laver les pommes de terre à grande eau, et avec une brosse, enlever la terre y adherant. Mettez-les ensuite dans une casserole et couvrez-les d’eau froide : ajoutez une poignee de sel et

il

210 LA CUISINE ANGLAISE

faites partir à grand feu en maintenant le couvercle sur la casserole. Lorsque le liquide est au point d’ebullition, laissez mijoter pendant une demi-heure. Lorsque les pommes de terre sont cuites à point, ce dont on s’assure en les piquant avec une aiguille à brider, egouttez-les complètement en renversant la casserole et en se servant du couvercle pour retenir les legumes. On les remet ensuite sur un feu doux pendant quelques minutes , afin de les bien secher. On ne doit jamais les laisser dans Feau lorsqu’elles sont cuites, et il faut eviter qu’elles bouillent trop vivement. Si les pommes de terre sont de bonne qualite, elles seront blanches et farineuses, et la peau se fendra naturellement. On les sert sous uue serviette pliee, ou bien dans une sebile de bois blanc.

Pommes de terre pelees et bouillies. – Peeled and boiled potatoes.

Il faut, lorsqu’on fait bouillir des pommes de terre, b’s choisir autant que possible de la même grosseur.

Ce point est important si l’on veut obtenir une cuisson uniforme, car il est evident que les grosses mettent plus de temps à cuire que les petites. Pelez les pommes de terre et lavez-les à grande eau. Mettez-les dans une casserole couverte avec de l’eau salee et faite partir à grand feu, puis moderez la flamme du fourneau pour terminer la cuisson. Égouttez l’eau de la casserole, couvrez les pommes de terre d’une serviette, remettez le couvercle et replacer la casserole pendant trois ou quatre minutes, sur un feu doux, pour enlever toute l’humidite, puis dressez dans un legumier.

Pommes de terre cuites à la vapeur. -^ Steamed

potatoes.

Dans les grandes cuisines, on fait cuire les pommes de terre à la vapeur au lieu de les faire bouillir.

LA CUISINE ANGLAISE 211

A cet effet, on emploie un appareil. appele poïâîoe-^^eàrwer, (rës simple de construction, en même temps qu’il est très prati^ que à l’usage.

Il consiste en une sorte de chaudron en fonte, muni d’une longue poignee, et qui a pour fonction de contenir l’eau bouillante. Â Torifice de ce chaudron s’adapte un autre recipient mobile, dont le fond est perfore de toutes parts* Le steamer, place sur un feu vif, produit bientôt une vapeur intense, qui, passant par les trous du recipient superieur, vient envelopper les pommes de terre qui cuisent ainsi à la vapeur.

On les fait etuver soit à leur etat naturel, c’est-à-dire dans leur peau, soit pelees. On les saupoudre de sel en les mettant au feu.

Celte façon d’operer est preferable à la cuisson en pleine eau, et la pomme de terre ainsi traitee est plus sèche et plus farineuse.

Le steamer est peu connu en France, et pourtant il est d’une utilite incontestable, car il sert non seulement pour les pommes de terre, mais on l’utilise encore pour faire cuire à la vapeur tous les puddings français ou anglais, crèmes renversees, pots de crème, etc., qui doivent être poches au bain-marie.

Un de nos confrères a imagine un steamer beaucoup plus pratique et moins encombrant que le steamer anglais dont la forme ronde et ventrue presente un obstacle à son admission dans les petites cuisines.

Ainsi qu’on peut en juger par le dessin represente ci-dessous, la forme du nouveau steamer est carree. Il se compose de trois pièces. Le compartiment inferieur est destine à contenir Teau bouillante et la partie superieure consiste en un tiroir perfore dans lequel la vapeur vient s’enmagasiner. A ce tiroir, qui contient les pommes de terre ou le pudding, est adapte un cou* vercle mobile construit de telle sorte que la vapeur, en se condensant sur les parois, retombe dans le compartiment inferieur dans mouiller le contenu. ‘ *.

En France, lorsqu’on veut etuver des pommes de terre, on les place avec un peu d’eau dans un vase de fonte ou de terre

212

LA CUISINE ANGLAISE

sans les avoir epluchees. On les saupoudre de sel, on les recouvre d’une serviette humide et Ton ferme hermetiquement la casserole que Ton fait partir sur le feu. De cette manière, les pommes deterre cuisent à la vapeur. Il faut avoir soin d’observer qu’un peu d’eau reste constamment dans le fond du vase pour produire la vapeur et empêcher les legumes de brûler.

Ce moyen d’etuver les pommes de terre offre nombre d’inconvenients. Outre que les legumes absorbent l’eau dans laquelle ils baignent, le linge qui les recouvre leur communique quel

quefois un mauvais goût. De plus, il faut surveiller constamment la cuisson afin d’eviter que les pommes de terre s’attachent au fond de la casserole.

On peut se procurer ces steamers ^à Londres, chez Jones, chaudronnier, 14, Down Street (Piccadilly).

Pommes de terre. cuites au four. – Baked potatoes.

Lorsqu’on fait rôtir des pommes de terre au four, il est essentiel de fendre superficiellement la peau ou de faire une legère entaille à Tune des extremites de chaque pomme do terre.

LA CUISINE ANGLAISE 213

Cette precaution est utile pour eviter les explosions qui se produisent quelquefois chez les tubercules très farineux. Il arrive souvent qu’au moindre choc, ou sous la plus petite pression à la main, la vapeur concentree sous la peau eclate comme une bombe, en projetant dans toutes les directions la pulpe brûlante, qui produit parfois des brûlures serieuses sur la figure et les mains de celui qui les retire du four. Le même phenomène se produit chez les marrons qu’on a omis de fendre avant de les griller.

Pommes de terre nouvelles à la menthe. – New

potatoes.

Lorsque les pommes de terre nouvelles sont fraîches, on ne les pèle pas. On en enlève la peau en les grattant legèrement avec la lame du couteau. Mais, lorsqu’elles ne sont pas fraîches^ il est preferable de les faire cuire ou etuver dans la peau et de les peler lorsqu’elles sont cuites. On les sert au naturel ou bien on les accommode à la sauce, au beurre ou à la crème. Les Anglais ont l’habitude de mettre un bouquet de menthe avec les pommes de terre nouvelles en les faisant cuire au naturel. Cet aromate communique au legume un goût assez agreable.

Puree de pommes de terre gratinee. – Brown puree of potatoes.

Preparez une bonne puree de pommes de terre. Ajoutez du beurre et de la crème en quantite suffisante pour la conserver un peu ferme. Assaisonnez avec discretion et dressez la puree en pyramide sur un plat en porcelaine à feu prealablement

214 LA CUISINE ANGLAISE

beurre; puis, avec le dos de la lame d’un couteau, imprimez sur les flancs des lignes diagonales pour former des sillons assez profonds. Arrosez la puree avec un pinceau trempe dans le beurre fondu et mettez gratiner à four chaud, en ayant soin de tourner le plat de tenips en temps.

D’autre part, faites frire au beurre clarifie des pommes de terre coupees en boules à l’emporte-pièce et garnissez-en la base de la puree.

Pommes de terre en vermicelle. – Potatoes vermicelli fashion.

La pomme de terre etant cuite, egouttee et sechee, la passer à travers un tamis à quenelles sous lequel on a place le plat dans lequel la puree doit être servie. Cette manière de servir les pommes de terre est assez originale. Il faut surtout eviter d’y toucher; elle doit être servie telle qu’elle est. On essuie seulement les bords du plat.

Raifort. – Horse radish.

Le raifort est une plante dont la racine possède un goût amer et très piquant. Ce condiment se sert avec le bœuf rôti. On le gratte en copeaux et on l’envoie à part dans un ravier, ou plus communement on le place sur le bœuf. On en fait aussi une sauce. Dans ce cas, on le râpe et on le melange avec de la crème (voir Sauce raifort).

LA CUISINE ANGLAISE 21^

Pommes de terre soufflees, en robe^de chambre. – Souffle potatoes.

Choisir dix pommes de terre de moyenne grosseur et les faire cuire au four. Lorsqu’elles sont cuites, pratiquer vers le milieu de chacune avec la pointe d’un petit couteau, une ouverture circulaire de trois centimètres de diamètre^ et avec une cuiller à cafe, vider entièrement la pomme de terre, en ayant soin de ne pas endommager la peau. Passer la partie extraite à travers un tamis de fer, et amalgamer à la puree ainsi obtenue un bon morceau de beurre frais, et quatre jaunes d’œufs dont on fouette les blancs. Assaisonner de poivre, sel et muscade râpee, puis melanger les blancs fouettes. Remplir avec cet appa reil la croûte de la pomme de terre, que Ton met ensuite au four chaud un quart d’heure avant de servir. Colorer à la salamande si cela est necessaire et dresser sur un plat garni d’une serviette chaude.

Pâte du pauvre homme. – Poor man’s pie.

Eplucher 3 livres de pommes de terre et les couper en tranches. Couper en des et melanger avec les pommes de terre une demi-livre de graisse de bœuf hachee, et la chair de deux ou trois harengs saurs detachee des arêtes et coupee en morceaux. Assaisonner de poivre, de muscade râpee, d’un oignon hache, de très peu de sel, et placer le tout dans un plat à pâte. Recouvrir les pommes de terre d’une pâte au saindoux (une livre de farine pour une demi-livre de saindoux) et cuire au four une heure et demie.

216 LA CUISINE ANGLAISE

Pudding de truffes. – Truffle pudding.

Faire une farce fine composee d’une livre de chair à saucisses à laquelle on ajoute la même quantite de foies gras crus. Après avoir bien melange la farce dans un mortier et Tavoir assaisonnee de haut goût, en ne menageant ni le poivre ni les epices, on la passe au tamis de fer.

Brosser et eplucher une livre de truffes fraîches et les couper en lames epaisses. Les mettre dans une terrine et les assaisonner. Faire reduire un verre de madère avec les parures des truffes et un peu de bouillon. Ajouter à cette reduction un peu de beurre manie de farine, afin d’obtenir une sauce un peu epaisse qu’on passe à la passoire et qu’on melaoge avec les truffes emincees.

D’autre part, beurrer un moule à dôme, ou à defaut de moule, un simple bol de cuisine que l’on fonce avec de la pâte à la graisse de rognons de bœuf (suet poste) et que l’on masque interieurement avec la farce preparee. On etend alors dans le fond du moule une rangee de truffes qu’on recouvre d’une couche epaisse de farce, et sur la surface de laquelle on place de nouveau une couronne de truffes escalopees. On continue de la sorte jusqu’à .ce que le moule soit plein. On recouvre la partie superieure d’une abaisse de pâte qu’on humecte pour la souder aux rebords du pudding, qu’on enveloppe dans une serviette dont on attache les quatre pans en dessous du moule, après toutefois l’avoir bien ficelee. Plonger le pudding à l’eau bouillanle pendant une heure et demie; puis l’egoutter, le deballer, le demouler, le dresser sur un plat et le masquer d’une sauce Perigueux.

Courges. – Vegetable marro^w^s.

La courge passe pour un legume très nutritif. Il en existe une grande quantite d’espèces, mais la plus estimee est celle qui

LA CUISINE ANGLAISE 217

a la forme d’un gros concombre et dont la couleur est jaunâtre exterieurement. La chair interieure est blanche.

Peler la courge et la debiter en morceaux de la grandeur et de la forme de la moitie d’un gros œuf. Faire cuire à grande eau legèrement salee^ puis egoutter et dresser en couronne dans un legumier. Au moment de servir, verser sur les courges une bonne sauce au beurre à laquelle on a melange un peu de persil hache et blanchi, et un demi jus de citron.

Oignons d’Espagne. – Spanish unions.

Ces oignons se servent après dîner avec le fromage. On les fait cuire au four ou bien bouillir à l’eau salee. Us demandent deux heures de cuisson^

Oignons farcis. – Stuffed onions.

Prendre huit ou dix oignons de même grosseur, les peler et les faire blanchir pendant dix minutes. Les egoutter sur un linge ou un tamis. Quand ils sont froids, enlever le cœur au moyen d’un coupe-p&te; à colonne, et remplir le vide avec une fai*ce de veau dans laquelle on a melange une pincee de cayenne et des fines herbes hachees et passees au beurre. Placer ensuite les oignons dans une casserole à legumes beurree et les assaisonner de sel, poivre et d’une pincee de sucre. Couvrir les oignons de bardes de lard et les mouiller d’un peu de bouillon. Les laisser mijoter jusqu’à entière cuisson et les dresser dans un legumier. On degraisse ensuite la cuisson à laquelle on ajoute un verre de madère et deux ou trois cuillerees de sauce espagnole. Laisser reduire et verser sur les oignons.

218 LA CUISINE ANGLAISE

Cresson alenois. – Mustard and Cress.

On aromatise loute espèce de salade avec le cresson alenois qu’on emploie aussi pour garnir des sandwiches. On le sème entre deux minces tartines de pain beurre ou bien entre deux tranches de pain grille et beurre.

Gingembre. – Ginger.

Le gingembre est une plante aromatique originaire de l’Inde et que Ton cultive aussi en Chine et au Japon. – C*esl la racine de la plante seule que Ton utilise. Le gingembre de la Jamaïque est surtout renomme. On en fait une sorte de confiture très estimee des Anglais. L’odeur du gingembre est aromatique et penetrante; son goût est très epice, acre et brûlant; ses qualites sont astringentes. Sechee et reduite en poudre, la racine de gingembre produit une espèce de farine avec laquelle on fait des puddings et des gâteaux secs delicieux.

Rhubarbe. – Rubarb.

La rhubarbe qu’on n’emploie en France que comme produit pharmaceutique, est 1res cultivee en Angleterre pour Tusage alimentaire. On ne se sert que des tiges qui supportent les feuilles. Cette tige, après avoir ete depouillee de l’enveloppe rouge qui la recouvre, est employee pour en faire des pâtes, des tartes, des glaces, des gelees et même un certain vin mousseux qu’on vend quelquefois pour du Champagne.

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Choux rouges confits. – Pickled cabbage.

Prendre ua chou rouge bien pomme et le degarnir des feuilles exterieures. Couper le chou en quatre, et, au moyen d’un grand couteau de cuisine, Temincer comme de la choucroûte. Le chou etant emince, on le met dans un plat creux et on le saupoudre de sel. On le laisse ainsi pendant deux ou trois jours en le remuant de temps en temps. Le chou est alors egoutte et mis dans un pot de grès avec quelques grains de gros poivre et deux feuilles de laurier, puis on remplit le vase de vinaigre blanc et on le couvre hermetiquement. Les choux seront prêts à employer au bout de quinze jours.

Topinambours. – Jerusalem artichokes.

En Angleterre, on mange beaucoup de topinambours. On les lave à grande eau et on les epluche en leur donnant la forme d’une poire ou d’une olive, puis on les fait cuire dans du lait additionne d’eau. On sale la cuisson, à laquelle on ajoute un oignon entier pique de deux clous de girolle. Lorsque les topinambours sont cuits, on les egoutte sur un tamis et on les dresse dans un legumier. On fait ensuite une sauce blanche avec la cuisson. Cette sauce, qui doit être tenue très epaisse, est versee sur les topinambours au moment de les envoyer sur table.

Topinambours frits.

Apres avoir fait cuire, les topinambours comme il est dit dans la recette qui precède on les egoutte sur un tamis, puis on les

220 LA CUISINE ANGLAISE

trempe dans une pâte à frire pour les cuire dans une friture bien chaude. On les dresse sur une serviette et on les garnît de persil frit.

Celeri. – Celery.

Le celeri est parfaitement cultive en Angleterre. On l’obtient très blanc et très croustillant; aussi le mange-t-on principalement à la croque-au-sel. On le presente ordinairement avec le fromage à la fin du dîner, et on en sert aussi avec le the de cinq heures. Pour le preparer, on le detaille en petites branches qu’on laisse tremper une heure dans l’eau. L^eau a la propriete de rendre le celeri friable. On le sert dans une coupe ou dans un vase de cristal.

Concombres. – Cucumbers.

Il est d’usage de servir des concombres avec le poisson bouilli et surtout avec le saumon. Prendre un beau concombre et l’eplucher. On le coupe ensuite en tranches aussi minces que possible. On met ces tranches dans une terrine avec quelques pincees de sel. Au bout d’une heure, on egoutte l’eau, et on assaisonne les concombres de poivre et de vinaigre, puis on les envoie sur table dans une assiette à soupe.

Haricots verts. – French beans.

Les Anglais ont une manière particulière de preparer les haricots verts. Ils les coupent en diagonales minces et les font cuire à l’eau salee dans laquelle on fait dissoudre un petit morceau de carbonate de soude, qui a la propriete de les rendre

LA CUISINE ANGLAISE 221

plus verts en cuisant. Lorsqu’ils sont cuits, on les egoutte et on les dresse immediatement sans leur faire subir aucune autre preparation.

Fèves. – Broadbeans.

Les fèves se font cuire generalement avec un morceau de lard fume. C’est un des plats nationaux anglais. Lorsqu’elles sont cuites à Teau salee, on les immerge dans Teau froide et on les egoutte. On fait ensuite une sauce au beurre à laquelle on ajoute du persil hache, du sel, du poivre et uq jus de citron. On laisse mijoter les fèves pendant dix minutes dans cette sauce, et on les sert autour du lard bouilli.

D’après une vieille coutume anglaise, il est d’usage que les patrons donnent chaque annee un dîner à leurs employes.

A ce dîner, le plat fondaipental consiste en un jambon garni de fèves preparees comme il vient d’être dit. Ce dîner avait lieu autrefois le jour de l’Epiphanie, et c’est probablement de cette fête qu’est venue l’habitude chez nous d’introduire une fève dans le gâteau des rois traditionnel.

De là vient le nom de Bean feast (festin de fèves) qu’on donne à ces agapes d’ouvriers.

Choux de mer. – Seakale.

Ce legume originaire d’Amerique est très peu connu en France. Il ressemble un peu au celeri par la forme et à l’asperge par le goût. On le sert avec une sauce blanche et on en fait des purees pour potage.

Lavez une douzaine de seakales et brossez-les avec soin pour bien enlever le sable qui se trouve entre les tiges. Coupez la partie noire de la racine et liez les tiges en bottes comme des

2:2 LA CUISINE ANGLAISE

asperges; jelez-Ies dans une casserole pleine d’eau bouillante salee et laissez-les bouillir jusqu’à ce qu’ils soient tendres au toucher. Égouttez-les et dressez-les sur une traûche de pain grille. La cuisson demande environ trente à trente-cinq minutes si ce sont de jeunes pousses. On masque les seakales avec une sauce blanche un peu epaisse.

Peas pudding.

Laver à grande eau un quai*t de litre de pois secs et les laisser tremper pendant deux ou trois heures. Les mettre ensuite dans une casserole avec deux oignons et un litre de bouillon leger . Mettre sur le feu et laisser mijoter jusqu’à complète cuisson des pois, qu’on egoutte alors et qu’on passe par pression à travers un tamis à quenelle. On remet la puree dans une terrine et on la travaille avec une cuiller de bois, en y ajoutant un bon morceau de beurre, de l’assaisonnement si cela est necessaire, et un peu de muscade râpee. Ajouter egalement deux œufs entiers.

La puree de pois est alors mise dans un moule à dôme beurre, puis attache dans un linge à l’instar de plum-pudding et mis à bouillir à grande eau pendant deux heures. Ce pudding se sert avec le porc bouilli.

Pudding de choux à l’irlandaise. – Galecannon.

Ce plat est essentiellement irlandais.

Après avoir fait cuire des choux, des epinards et des pommes de terre, on egoutte ces legumes dans une passoire, et on en exclut toute l’humidite par la pression, puis on hache tout ensemble. Après y avoir mis l’assaisonnement necessaire, et un bon morceau de beurre, on met les legumes dans une bassine en forme de

LA CUISINE ANGLAISE

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dôme que l’on a prealablement beurree. On met au four pendant une demi-heure et on demoule au moment de servir.

Tomates en surprise à la Cadogan {entree froide).

On trouve à Londres, chez les chaudronniers, des moules à tomates de fabrication recente qu’il est essentiel de se procurer pour faire cette entree :

Masquer les deux parties du moule d’une puree de tomates additionnee d’aspic et les remplir avec l’appareil suivant : piler et passer les chairs d’une volaille froide (rôtie ou braisee), leur amalgamer deux cuillerees à bouche de veloute, autant d’aspic et une demi-pinte de crème fouettee. Reunir les deux parties du moule en les pressant pour les faire adherer, et les mettre à la glace pendant vingt minutes. Les demouler ensuite et les servir, soit sur une bordure, ou simplement sur une serviette avec une garniture de persil.

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CHAPITRE X PATISSERIE

Sommaire

Bal moral cake. Banbury cake. Biscotes.

Bouchees de mince meat. Buns.

Butter biscuits. Cheese cake. .Cheese biscuits. Compote de rhubarbe. Curd cbeese cake. Cramberry lart. Devilled biscuits. Fioating Island. Gâteaux à la noix de coco. Giuger cake. Goosberry fool. Madeira cake. Maids of honour. Mince pies. Muffins.

Notes sur la pâtisserie anglaise. Omelettes de Noël. Pancakes. Pancakes souffles. Plum-cake. PufT crackers. Queen’s cake. Rissoles de mince meat. Rusks. Seed cake.

Tartes de fruits en general. Tarte de groseilles et framboises. Tarte de pommes. Tartelettes de groseilles vertes.

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226 LA CUISINE ANGLAISE

Tarte de potiron.

Tarte de rhubarbe.

Turnover.

Tipsy cake.

Trifle.

Water biscuits.

WeddîDg cake.

Vol-au-vent de rhubarbe.

York biscuits.

CHAPITRK X PATISSERIE ANGLAISE

La repulalion de la pâtisserie anglaise a, de tout temps, ete surfaite; car, à part les plum-cakes et les biscuits secs, rien ne justifie ce renom d*oxcelleiice qu’on a*esL toujours plu àlui accorder. ]1 faut admctlre, cepeudau!, la superiorite des Auglais pour la confecllon des biscuits à base d’arrowrool et de fecule, dont ils ont la specialite, et je dois constater que, pour celte fabrication, aucun pays du monde ne peut rivaliser avec eux. Cette fabrication est tellement importante, et Texportation des biscuits est si considerable, qu’une seule maison, Huntley and Palmer, emploie journellement plus de deux mille ouvriers. La pâtisserie anglaise proprement dite n’est qu’une grossière imitation de la nôtre, et ne comporte qu’un choix très limite de gâteaux

228 LA CUISINE ANGLAISE

d’une simplicite des plus primitives. Cette mediocrite est d’autant plus curieuse à constater, que les Anglais sont les meilleurs clients de nos pâtissiers parisiens, et que, dans toutes les mai sons en vogue, ce sont eux qui, à l’heure du goûter, composent la majeure partie des consommateurs.

Le pâtissier, dans toute Tacception du mot, n’existe pas en Angleterre’. Il est remplace par les boulangers qui debitent quelques gâteaux speciaux tels que les Buns, Cheese cakes, Bambury cakes, plum cakes, etc. D’aulres etablissements, qui s’intitulent « confectioners », c’est-à-dire confiseurs, etalent dans leurs montres et sur leurs comptoirs des sandwiches et des assiettes de gâteaux varies qu’un pâtissier parisien, même de second ordre, rougirait d’exhiber. Il est à prevoir cependant que dans un avenir prochain les « confectioners » feront place à des pâtissiers serieux, grâce à Tiniliative deBenoist, le Chevet de Londres, qui a adjoint à son splendide magasin de comestibles de Piccadilly, une annexe de pâtisserie à Tinstar de Paris. C’est une attraclion nouvelle pour les habitants du West End, qui se pressent en foule devant la devanture de notre sympathique compatriote, non seulement pour admirer ses seduisants produits comestibles et sa savoureuse charcuterie, mais encore pour contempler ses elegantes pièces montees et ses appetissants gâteaux qui peuvent rivaliser pour la delicatesse avec ceux des meilleures maisons de Paris.

Les etablissements de a confectioners », ainsi que les boulangers, sont la providence des promeneurs qui, à l’heure du goûter, viennent savourer une sandwich au jambon en degustant un verre de Xerès ou de Porto. C’est aussi le rendez-vous des buveurs de the à l’heure reglementaire de cinq heures (five o’clock). On voit alors la foule envahir ces tea rootns et s’asseoir autour de petites tables en marbre blanc qui garnissent la salle, ou bien s’installer devant lecomptoir où la bouillotte fumante est sans cesse en permanence, et derrière lequel s’agitent une demidouzaine de jeunes filles proprettes et coquettement vêtues, coiffees d’un elegant bonnet de tulle orne de rubans de couleurs chatoyantes.

LA CUISINE ANGLAISE 229

Le goûter du five o^clock c’est, pourTAnglaiset surtout pour l’Anglaise, une operation solennelle. A cinq heures sonnant, toute preoccupation est releguee, tout travail est abandonne, et pendant une demi-heure au moins, l’ouvrier laisse de côte ses outils, le banquier ne songe plus aux affaires, le marchand quitte son comptoir et le commis son bureau; tandis que l’enfant depose ses jouets et le soldat lui-même met ses armes au repos, pour aller se delecter devant une tasse de the, qui se deguste invariablement à cinq heures, mais avec plus ou moins de raffinement, à la caserne, à l’atelier, à la nursery, au salon ou dans l’arrièreboulique.

Dans les familles aisees, le service du the est tout un poème : Les tasses sont rangees sur un large plateau ovale, au centre duquel figurent la theière en metal ou en porcelaine, et deux sucriers, dont l’un est garni de sucre blanc et l’autre de sucre candi. A chaque extremite du plateau sont places deux petits pots en porcelaine contenant, l’un du lait et l’autre de la crème; puis un bol vide destine à recueillir le depôt du fond des tasses, lorsqu’elles doivent être remplies une seconde fois. Sur la table de côte, une bouillotte en argent ou en cuivre, d’un brillant irreprochable^ est constamment tenue en ebuUition au moyen d’une petite lampe à esprit-de-vin, et remplace avantageusement l’antique samovar importe de Russie et qu’on a relegue sur les planches de Toffice.

Le plateau {The tea tray) est place devant la maîtresse de la maison, qui occupe le haut de la table, et à qui incombe la tâche de remplir les tasses, ce dont elle s’acquitte avec un soin des plus minutieux et une grâce parfaite, interrogeant chaque convive à la ronde sur son goût; et selon sa reponse, elle prepare la decoction forte ou faible, nuagee de lait ou de crème, et additionnee de sucre raffine ou cristallise.

Devant chaque convive est placee une petite assiette, et sur la table, recouverte d’une nappe blanche immaculee, figurent, symetriquement arranges, des compotiers en cristal et en porcelaine contenant des confitures diverses, des fruits, des sandwiches, des tartines de pain beurre, du cresson et les gâteaux de circôn

230 LA CUISINE ANGLAISE

stance tels que les muffins, les buns, les plum cakes, tea cakes et autre cakes plus ou moins indigestes du repertoire de la pâtisserie anglaise. Le the de cinq heures est une coutume que nous avons empruntee à nos voisins. Nous avons même adopte le terme « five o’clock 9 qui est maintenant francise. Gela me rappelle Terreur d’une dame du monde qui, ne sachant pas que l’expression anglaise signifiait cinq heures, avait ecrit sur ses cartes d’invitations : le five o’clock aura lieu à 4 heures.

Plum-cake.

Les Anglais excellent dans la fabrication de ce” gâteau que l’on peut classer parmi leurs mets nationaux. La recette en est bien simple : Une livre et demie de farine, une livre de sucre, une livre de beurre, huit œufs entiers, un verre de rhum, une pincee de sel, Tecorce râpee d’un citron, une livre de raisins de Corinthe, un quart de Smyrne, et un quart d’orange confite et de cedrat, et autant de cerises sèches; le tout coupe en petits des. Mettre dans une bassine le beurre ramolli en pommade et le sucre en poudre. Melanger avec une spatule pendant quelques minutes, puis ajouter les œufs graduellement. Travailler encore vigoureusement pendant dix ou douze minutes, et mêler à la pâle la farine et les autres ingredients.

fieurrez un moule à charlotle qu’on garnit de papier de cuisine egalement beurre, puis y verser la pâte. Mettre cuire ensuite à four modere jusqu’à parfaite cuisson, ce dont on s’assure en enfonçant une aiguille à brider dans le milieu du gâteau. S’il est cuit, l’aiguille, lorsqu’on la retire, est tout à fait sèche; dans le cas contraire, il faut remettre le plum cake au four. Le temps de cuisson depend naturellement de la grosseur du plum cake.

Gâteau de mariage du duc dTork. – Dukeof York’s Wedding cake.

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Le gâteau de mariage. – Wedding cake.

C’est avec la pâte de plum cake que l’on confectionne le fameux gâteau de mariage qu’on voit figurer comme pièce de milieu dans tout dejeuner de noce. On en fabrique de toutes grandeurs, et le prix du gâteau varie depuis cinq francs jusqu’à cinq cents francs. Il est ainsi mis à la portee de toutes les bourses, depuis celle du plus humble citoyen jusqu’à celle du lord richissime. Il existe à Londres des ‘maisons speciales pour la fabrication de ces gâteaux, qui ont la propriete de se conserver pendant un long laps de temps. Quelques jours avant le mariage, les conjoints vont faire emplette du Wedding cake, qu’ils choisissent à leur gre, et ce choix a pour eux autant d’importance que s’il s’agissait d’acheter un meuble ou un bijou.

Le temps de cuisson à donner au gâteau de mariage depend de son volume, et l’experience seule peut servir de guide au fouruier. Lorsqu’il est cuit, on le laisse refroidir pendant un jour u deux, puis on le pare et on Tenduit d’une conche epaisse de pâte d’amandes, autrement dit, pâte à macarons. On masque ensuite entièrement le gâteau d’une glace royale au blanc d’oeuf bien travaillee. On lisse la surface et les côtes avec la lame d’un couteau mouille» puis on laisse secher pendant un jour. Le wedding cake est ensuite elegamment decore, orne d’attributs appropries à la circonstance, et agremente de fleurs d’oranger, de nœuds de satin blanc et d’ecussons symboliques. Qiielquefois le gâteau est surmonte d’un temple de l’hymenee, sous la coupole duquel on entrevoit des figures allegoriques en paslillage, reposant sur un socle, au pied duquel s’ebattent en se becquetant les tourterelles traditionnelles.

A la fin du dejeuner, après les toasts de rigueur, le wedding cake est decoupe de la main de l’epousee, qui en offre une tranche à chaque convive. Puis, le lendemain de la ceremonie.

LA CUISINE ANGLAISE 233

le reste du gàleau est divise en une infinite de parts, qui sont envoyees par la poste, dans d’elegantes petites bottes, à to^is les parents et amis qui n’assistaient pas au repas de noces. Une omission dans cette distribution, est consideree comme un manque d’egards envers les interesses.

Les jeunes filles superstitieuses attachent une grande importance à ce petit morceau de gâteau de mariage, qu’elles conservent religieusement.pour le placer sous leur traversin, avec la conviction qu’elles verront en rêve l’image de celui qui devra un jour leur offrir l’anneau nuptial.

Recette : Mettre dans une terrine cinq cents grammes de beurre frais en pommade. Le travailler avec une spatule en y ajoutant quatre cents grammes de sucre en poudre et graduellement dix œufs entiers. Mêler à l’appareil huit cents grammes de farine, trois cents grammes de raisin de Gorinthe, la même quantite de raisin de Smyrne et de Malaga, et deux cents grammes de cedrat et d’orange confits coupes en petits des. Ajouter un verre de cognac ou de rhum, deux cents grammes d’amandes hachees, une forte pincee de canelle, le zeste râpe d’un citron, et une pincee de sel.

Beurrer un moule à wedding cake dont on garnit les parois de papier egalement beurre; emplir le moule avec l’appareil et cuire à four modere. Le temps de cuisson depend de la grosseur du gâteau.

Ces gâteaux se servent aussi à l’occasion des baptêmes. On les appelle alors christening cakes. La composition de la pâte est la même; la seule diiïerence consiste dans le decor et les attributs allegoriques.

Le plus gros plum-cake qui ait ete fait fut presente à la reine Victoria lors de son jubile.

Ce gâteau gigantesque, qui figura sur la table royale au banquet, avait trois mètres de circonference et deux mètres cinquante centimètres de hauteur, y compris la pièce montee qui la surmontait. Il pesait deux cent cinquante kilogrammes. Celui dont je donne la reproduction, dessine d’après nature par Froment, parut sur la table du dejeuner, lors du mariage de duc

34 LA CUISINE ANGLAISE ‘

d’York, le fils unique du prince de Galles, avec sa cousine la princesse de Teck, et fut fabrique par le confiseur de la reine. La base, ornee d’un ecusson aux armes d’Angleterre, etait entoure d’une couronne formee de roses, de chardons et de trèfles, symboles de l’Angleterre, de TÉcosse et de l’Irlande. Six gracieuses cariatides supportaient un vase renaissance, duquel s’echappaient des guirlandes de fleurs d^oranger. Le gâteau reposait sur un socle triangulaire, autour duquel on avait place, entre des amours artistiquement groupes, des cornes d’abondance debordant de fleurs. Enfin, sur le premier plan, et bien en evidence, l’inevitable lion britannique et son inseparable compagne la licorne.

Au mariage de la princesse Beatrice, la plus jeune des filles de la reine, les principales villes d’Angleterre envoyèrent chacune un « Wedding cake » et le poids total de tous ces gâteaux fut evalue â plus d’une tonne. Celui qui fut offert par la ville de Windsor, mesurait quatre-vingts centimètres de diamètre et deux mètres de hauteur. Il etait merveilleusement decore en pastillage et en glace royale, et orne d’ecussons aux armes des conjoints. Le sommet se terminait par un groupe d’amours supportant des medaillons sur lesquels etaient peintes des scènes pastorales et des faisceaux allegoriques.

Buns.

Les buns sont des gâteaux qui tiennent lieu de brioches, lesquelles sont inconnues chez nos voisins. D’une pâte plus commune, elles sont plus legères que nos brioches ordinaires. Ces gâteaux sont très en vogue, et se debitent chez les boulangers et chez les confectioners. C’est surtout le vendredi sain qu’il s’en consomme une grande quantite, car ce jour-là les buns sont aussi obligatoires que les crêpes le mardi gras. Les Cross buns se distinguent des buns ordinaires, en ce qu’on les assai

LA CUISINE ANGLAISE 235

sonne de cannelle et de carvi. Puis elles sont agrementees d’une croix (cross) faite avec deux coups de ciseaux lorsqu’on les moule.

Recette : Un demi-verre de lait, un demi-verre d*eau, une livre et demie de farine, cent cinquante grammes de sucre, cinquante grammes de beurre, deux oeufs, deux cents grammes de raisins de Corinthe, deux cents grammes de raisin de Smyrne, quinze grammes de levure, une bonne pincee de cannelle en poudre et un peu de sel.

Mettre le quart de la farine dans une bassine et la delayer avec l’eau et le lait legèrement chauffes; y ajouter les œufs, la levure, le sucre et le sel. Laisser revenir ce levain pendant deux heures àpeu près. Melangeralorsle reste delafarine aveclebeurre et les fruits, puis avec le levain. On doit obtenir une pâte legère qu’on laisse revenir de nouveau en la couvrant, pour la preser- • ver de Tinfluence de l’air. Au bout d’une heure la pâte est prête à mouler. On prend autant de fois cent grammes de pâte que l’on desire avoir de buns. Chaque morceau de pâte est roule en forme de boule et place sur un plafond à quelques centimètres l’un de l’autre^ afin d’eviter que les buns ne se touchent en cuisant. Mettre les gâteaux à revenir dans une chambre chaude et lorsqu’ils sont assez montes, ce qui ne doit pas durer plus d’une demi-heure, on les met au four chaud. Quand ils sont cuits, on les dore legèrement avec un peu de lait sucre dans lequel on a amalgame un œuf entier.

Cheese cake.

Ces gâteaux ne sont autre chose que des mirlitons. Cheese cake signifie gâteau au fromage, et cependant il n’entre pas la plus petite parcelle de fromage dans leur composition; mais on leur a probablement donne ce nom à cause de la grande quantite de beurre qui sert à leur confection :

236 LA CUISINE ANGLAISE

Mettre dans une casserole de moyenne grandeur six jaunes d’œufs et 200 grammes de beurre divise en petits morceaux et 40 grammes de sucre en poudre. Placer la casserole au bainmarie et remuer avec une cuiller de bois jusqu’à ce que la preparation ait la consistance d’une sauce hollandaise. Ajouter alors deux cuillerees de mie de pain fraîche, avez le zeste râpe ainsi que le jus d’un citron. Avec cet appareil, remplir desmoules à tartelettes prealablement fonces avec du feuilletage. Placer sur la surface un mince morceau de cedrat et cuire à four moderement chaud. On peut remplacer le cedrat par quelques raisins de Corinthe.

Mirlitons au lait caille. – Curd cheese cake.

Mêler dans un mortier 250 grammes de lait caille qu’on a presse dans un linge pour en absorber le liquide superflu. Ajouter 150 grammes de sucre en poudre, 60 grammes de beurre, six jaunes d’œufs, un peu de muscade râpee, tYois ou quatre macarons secs, le zeste d’un citron hache très fin, et une legère pincee de sel. Foncer des moules à tartelettes creux avec du feuilletage et les emplir avec cet appareil. Saupoudrer de sucre fin, laisser reposer quelques minutes, et mettre au four chaleur moderee.

Mince Pies. – {Prononcer Mince paille.)

Ingredients : une livre de graisse de rognon de bœuf hachee très fin, une livre de raisins de Corinthe, une livre de raisins de Smyrnc, une de raisins de Malaga haches, une demi-livre de sucre en poudre, une livre de pommes pelees et hachees, une demi-livre d’oranges confites, egalement hachees, et la même

LA CUISINE ANGLAISE 237

quantite de cedrats. Après avoir bien melange tous ces ingredients, on y ajoute 20 grammes d*epices melangees et passees au tamis de soie (ces epices se composent de cannelle, muscade, clous de girofle et gingembre), 15 grammes de sel, un verre de cognac, un verre de rhum et un de xerès. On peut ajouter à cette recette une livre de bœuf rôti et hache très fin, mais cette addition n’est que conventionnelle.

On place ces ingredients, lorsqu’ils sont bien melanges, dans un vase en grès verni que Ton bouche hermetiquement, et on les laisse macerer ainsi pendant environ un mois, en ayant soin de les remuer tous les huit jours.

Lorsqu’on veut employer le « Mince meat » (c’est le nom qu’on donne au melange), on fonce des moules à tartelettes avec de la pâte à trois quarts, puis on les emplit avec les fruits.

On recouvre ensuite les tartelettes avec des abaisses de feuilletage à sept tours. Souder les bords, et après avoir dore la surface à l’œuf battu, faire un trou au centre avec la pointe du couteau pour faciliter l’evaporation, et cuire à four vif.

Les Mince Pies doivent être manges très chauds, et on envoie, en les servant, du cognac enflamme dans une saucière d’argent.

Le Mince Pie est le^gâteau oblige du jour de Noël. On y attache autant d’importance en Angleterre, que nous le faisons pour le gâteau des Rois le jour de l’Epiphanie.

Rissoles de Mince Meat.

La Mince Meat, grâce au vin et aux spiritueux dont il est impregne, peut se conserver pendant plusieurs mois. On en fait un excellent entremets sous forme de rissoles.

Prendre de la pâte brisee ou du feuilletage use, et l’abaisser très mince au rouleau sur la table farinee. Prenez la valeur d’une cuiller à cafe de Mince Meat pour former chaque rissole,

238 LA CUISINE ANGLAISE

qu’on doit espacer de trois ceatimètres. Humecter la pâte avec ua pinceau, et couvrir les rissoles avec une autre abaisse de pâle. Souder la pâte en appuyant avec le pouce, et couper les rissoles en forme de demi-lune, au moyen d’un coupe-pâte cannele. Les tremper dans Tœuf battu pour les paner, puis les faire frire à grande friture en les remuant constamment avec une ecumoire.

Lorsque les rissoles sont cuites, on les dresse en pyramide sur une serviette ployee. On sème legèrement de la glace de sucre sur la surface.

Bouchees de Mince Meat.

On peut egalement employer le Mince Meat pour en garnir des petites bouchees. Dans ce cas, lorsqu’on sort les bouchees du four, on les ouvre et ou enlève la partie pâteuse; puis on saupoudre la surface de glace de sucre. On donne le brillant avec la salamandre chauffee à blanc.

Omelette de Noël. – Chrismas Omelet.

Battre six œufs auxquels on ajoute une cuilleree de rhum, autant de crème et un peu de zeste de citron râpe. Verser les œufs dans une poêle dans laquelle on a fait fondre 75 grammes de beurre. Remuer sur lo feu jusqu’à ce que les œufs commencent à prendre. Retirer la poêle du feu et garnir l’interieur de Mince Meat. Plier Tomelette et après Tavoir retournee sur le plat, la saupoudrer de sucre, Tarroser copieusement de rhum, et rallumer au moiaenl de l’envoyer sur table.

LA CUISINE ANGLAISE 239

Banbury cakes.

La petite ville de Banbury, situee dans le Gloucestershire, a le monopole d’un certain gâleau dont il se fait un enorme debit dans tous les buiïets de chemin de fer. Ce gâleau, lorsqu’il est nouvellement confectionne, est des plus delectables et la reputation dont il jouit dans les trois royaumes n’est nullement surfaite.

Recette : Une livre de farine, trois quarts de beurre, 15 grammes de sucre en poudre, une pincee de sel. Delayer la farine et le sucre avec assez d’eau froide pour en obtenir une pâte assez ferme. Laissez reposer quelques minutes et l’etaler sur le marbre. Appliquer le beurre prealablement manie sur la pâte. Ramener sur la surface du beurre les côtes de la pâte, de manière à ce que le beurre soit complètement enveloppe. On obtient ainsi du feuilletage à trois quarts, auquel on donne six tours. On fait alors des abaisses ovales de dix centimètres de long sur six de large. Au milieu de cette abaisse, on place une cuilleree à cafe de raisins de Corinthe melangee avec une demi-cuilleree de cedrats coupes très minces. Ces fruits confits ont ete prealablement amalgames avec assez de beurre mou, de sucre en poudre et de biscuit emiette, pour en former une pâte consistante, qu’on aromatise avec une bonne pincee de cannelle en poudre. Ces raisins doivent avoir sejourne pendant vingt-quatre heures dans le rhum. On les enveloppe alors avec l’abaisse de pâle en plaçant la soudure du gâteau en dessous. Puis on les pose sur un pla^ fond. On les saupoudre abondamment de sucre en poudre et l’on fait cuire à four chaud.

Maids of honor (Demoiselles d’honneur).

Ces gâteaux, dont le nom est assez bizarre, jouissent en Angleterre d’une grande reputation. Il y a même un certain

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mystère attache à leur fabricalion, et le secret de la recette, qui dans Torigine aurait ete paye mille livres sterling-, a ete transmis de père en fils depuis plusieurs generations.

D’après la legende, Anne de Boleyn, alors demoiselle d’honneur à la cour d’Angleterre, confectionna ces gâteaux dans le but de plaire au roi Henry VIII qui, on le sait, etait très gourmand. Le monarque les trouva fort à son goût, et faisant acte de flatteuse galanterie à l’adresse de celle qui devait devenir plus tard reine d’Angleterre, il les baptisa du nom de « Maids of honor » (demoiselles d’honneur).

Ce gâteau est une specialite de Richemond, charmante petite ville situee sur les bords de la Tamise, à quelques kilomètres de Londres. Cette ville possède un vieux château royal et un parc magnifique, but de promenade des Londonniens les dimanches et fêtes, et rendez-vous des sportsmen, des pêcheurs à la ligne et des canotiers.

On ne va pas à Richemond sans manger des Maids of honour, pas plus qu’autrefois on ne pouvait passer par Saint-Denis sans goûter à ses celèbres talmouses; ni par Nanterre sans acheter un de ces gâteaux dont cette ville avait la renommee.

Un seul pâtissier de la ville possède le monopole et le soidisant secret de la recette des a Maids of honor », dont il expedie journellement en grande quantite par toute l’Angleterre.

Ce gâteau ressemble un peu au mirliton, avec cette difference qu’il est plus grossier de forme et moins delicat de goût.

Gâteau ivre. – Tipsy cake.

Le mot tipsy veut dire ivre et le mot cake signifie gâteau. Il y a plusieurs manières de faire cet entremets; mais la recette suivante est celle que je prefère :

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Cuire un gâteau genois dans u^ moule à charlotte et le laisser rassir pendant deux ou trois jours.

Le couper entranches de l’epaisseur d’un centimètre, et bien imbiber chacune de ces tranches de cognac, de rhum ou de kirsch. Etendre sur chaque surface une couche de confitures d’abricot, et redonner au gâteau sa forme première, en superposant chaque tranche imbibee et garnie. Faire fondre de la marmelade d’abricot avec un verre de xerès ou de cognac, et la passer au tamis de fer. Masquer le gâteau avec cette marmelade lorsqu’elle est encore chaude, et decorer le tipsy cake avec des amandes, des pistaches, des cerises sèches et de Tangelique. On peut remplacer ce decor par une couche de crème fouettee, aromatisee d’une essence quelconque. Au lieu d’un gâteau genois, on peut avec avantage employer un biscuit de Savoie rassis.

Trifle. – Trifle.

Couper, en morceaux à peu près egaux, du biscuit de Savoie rassis ou def biscuits à la cuiller casses, egalement rassis, qu’on place dans un plat et qu’on saupoudre de macarons ecrases. Arroser le tout de kirsch et de marasquin, et laisser macerer pendant un quart d’heure. D’autre part, fouetter (de la crème double qu’on sucre legèrement et qu’on aromatise d’une essence quelconque.

On fait ensuite avec six jaunes d’œufs et du lait, une crème anglaise très epaisse.

Prendre un compotier de cristal dans lequel on empile les morceaux de biscuits et les macarons, en leur donnant une forme conique. Masquer le tout de confiture de groseilles liquide, et verser dessus la crème anglaise.

Finalement recouvrir le tout avec une couche epaisse de crème fouettee sur laquelle on sème des pistaches hachees, des raisins de Corinthe ou de la nonpareille de Verdun.

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Gooseberry fooL

Pendant la saison des groseilles à maquereaux, et avant qu’elles ne soient mûres, on en fait en Angleterre une enorme consommation.

On en fait des tartes, des puddings et des glaces. On en fait aussi un entremets qu’on nomme gooseberry fool, qui est fort apprecie des dames anglaises.

On fait cuire les groseilles vertes dans un {poêlon d’office, avec du sucre et très peu d’eau. Lorsqu’elles sont en puree, on les passe- à travers un tamis de crin, et on les melange avec de la crème double prealablement fouettee. On sert les gooseberry fool dans des verres à punch. On envoie avec cet entremets des gaufrettes, des palmiers, ou des biscuits à la cuiller. Cet entremets se fait aussi avec de la rhubarbe ainsi qu’avec des fraises. Dans ce cas, on le nomme Rubarb fool et Strawberry fool.

Tarte de pommes & l’anglaise. – Apple tart.

Émincer des pommes dans un plat creux. Les recouvrir de sucre fin, et semer à la surface un peu de zeste de citron hache. Mettre dans le fond du plat un demi-verre d’eau. Faire une pâte ferme, dans la proportion de : une livre de farine pour trois quarts de beurre, trente grammes de sucre en poudre et deux jaunes d’œufs. Abaisser cette pâte au rouleau, decouper une bande, qu’on fixe sur le bord du plat humecte d’eau, couvrir entièrement la pomme d’une abaisse de pâte, souder les bords, mouiller la surface, et semer du sucre en poudre mettre à four modere et cuire trois quarts d’heure. Pour varier, on dore

LA CUISINE ANGLAISE 243

quelquefois la tarte à Tœuf, et lorsqu’elle est cuite on la saupoudre de sucre fin, et on la glace à la salamandre. Parfois aussi, on parfume la pomme de cannelle, de clous de girofle ou de vanille.

Tarte de rhubarbe. – Rhubarb tart.

La rhubarbe anglaise est preferable, pour employer comme entremets, à celle qu’on cultive sur le continent et qui possède une certaine àcrete que n’a pas celle qui croit en Angleterre. Choisir de jeunes tiges de rhubarbe; les eplucher, c’est-à-dire enlever la peau filandreuse qui les recouvre, et les couper en morceaux de 4 à 5 centimètres de longueur. Les ranger dans un plat à tarte anglais, et les couvrir de sucre en poudre ou de cassonade blanche. Verser dans le fond du plat deux cuillerees d’eau, et couvrir la tarte avec de la pâte fine, en procedant comme pour la tarte de pommes; trois quarts d’heure de cuisson suffisent. Cette tarte se sert chaude ou froide, mais elle est meilleure froide. On envoie avec cet entremets, comme avec presque toutes les tartes de fruits, de la crème double dans un petit pot à lait, ou de la crème fouettee dans un compotier.

Tarte de groseilles et framboises.

Mettre dans un plat creux des framboises et des groseilles en egale quantite. Recouvrir les fruits de sucre en poudre ou de bonne cassonade, et proceder comme pour toutes les tartes de fruits en generaL C’est-à-dire qu’après avoir masque les bords du plat avec une bande de- pâte qiCon humecte, on recouvre les fruits avec une large abaisse de pâte. Après avoir soude les bords

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LA CUISINE ANGLAISE

par la pression, on saupoudre la surface de sucre en poudre et l’on fait cuire à four chaud pendant 45 minutes.

Tartes de fruits en general.

On fait des tartes avec tous les fruits, même lorsqu’ils sont

encore verts. Ainsi on en fait avec les groseilles à maquereaux avant qu’elles ne soient mûres. Il en est de même des jeunes abricots et du verjus. Les cerises, les pèches, les abricots et les prunes font d’excellentes tartes.

Compote de rhubarbe. – Rhubarb compote.

Éplucher les tiges de rhubarbe dont on qnlève la substance fllandreuse qui les recouvre, et les diviser en morceaux de huit centimètres de longueur. On les fait cuire dans un sirop dans lequel on fait infuser un peu de vanille ou de cannelle.

La rhubarbe ayant la propriete de fondre facilement, on doit en surveiller attentivement la cuisson, afin de conserver les morceaux entiers, qu’on egoutte avec precaution sur un tamis lorsqu’ils sont cuits. On les dresse ensuite dans un compotier. On fait alors reduire le sirop au degre de la « nappe » et on le verse sur la rhubarbe lorsqu’il est froid.

Vol-au-vent de rhubarbe. – Rhubarb vol-auvent.

Faire un vol-au-vent d’entremets que l’on saupoudre de sucre en poudre et qu’on glace à la salamandre, lorsqu’il est cuit,

LA CUISINE ANGLAISE 245

après avoir enleve la partie pâteuse non cuite de Pinterîeur. Garnir le puits avec une compote de rhubarbe telle qu’elle vient d’être decrite. On envoie à part dans un compotier de la crème fouettee.

Tartelettes de groseilles vertes. – Gooseberry tartlets.

Faire cuire dans un sirop leger des groseilles à maquereaux, qui ne doivent pas être beaucoup plus grosses qu’un noyau de cerise. Lorsqu’elles sont cuites, en les egoutte pour les remettre ensuite dans le sirop lorsqu’on l’aura faire reduire à la nappe. D’autre part, foncer des moules à tartelettes ordinaires avec une pâte fine, ou avec des rognures de feuilletage. Mettre les tartelettes à four chaud, après les avoir remplies de lentilles ou de riz pour qu’elles conservent leurs formes. Lorsqu’elles sont cuites, on les vide, on saupoudre les bords de sucre fin et on les glace â la salamandre. On les garnit alors avec les groseilles.

Tarte de ptiron. – Pumpkin tart.

Ce mets est plutôt americain qu’anglais. On enlève la peau du potiron» puis on le coupe en morceaux qu’on place dans un plat à tarte. On recouvre le potiron de sucre comme pour toute tarte de fruits, on sème à la surface le zeste d’un citron hache menu, et l’on etend ensuite une large abaisse de pâte qu’on soude sur le bord du plat. Avoir soin de ne pas oublier de verser dans le plat un demi verre d’eau ou de vin blanc, avant de recouvrir de pâte, afin d’empêcher que le potiron ne s’attache au fond du plat. Humecter la surface de la pâte, la saupoudrer de sucre fin et cuire & four chaud pendant trois quarts d’heure.

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Cambridge cake.

Faire une pâle ferme et lisse composee de 300 grammes de farine, 250 grammes de beurre, 250 grammes de sucre en poudre, une pincee de baking powder , un peu de sel et deux œufs entiers. Travailler vigoureusement cette pâte, et l’abaisser de l’epaisseur d’un demi-centimètre. La couper avec un coupe-pâte rond et uni, et pincer les bords des gâteaux qu’on range sur une plaque. Les dorer et les rayer en losanges avec la point d’un couteau. Cuire d’une couleur blonde à four modere.

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G&teauz; au gingembre. – Glnger cakes.

Ingredients : une livre de farine, 350 grammes de beurre, 350 grammes de sucre tamise, 60 grammes de gingembre en poudre, une pincee de sel, huit jaunes d’œufs.

Melanger tous ces ingredients ensemble sur le marbre ou sur le tour à pâtisserie, et en former une pâte compacte qu’on laisse reposer un quart d’heure, puis qu’on abaisse de l’epaisseur d’un demi-centimètre.

Ensuite, avec un coupe-pâte d’une forme quelconque, on

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decoupe les croquets qu’on place sur un plafond beurre. Lorsqu’ils sont à moitie cuits, on les saupoudre de sucre fin, puis on les remet au four prendre couleur.

Granberry tart.

Les cranberries sont des fruits qui ont l’apparence de groseilles rouges, mais dont le goût est totalement different. On les recolte dans les montagnes d’Ecosse où ils poussent à Tetat sauvage, parmi les bruyères. On les emploie pour en faire des tartes et des puddings, des gelees et des confitures.

Ce fruit est très commun en Russie et on en expedie des quantites considerables en Angleterre.

Après avoir epluche et lave les cranberries, les mettre dans un plat à tarte et les sucrer. Proceder ensuite comme pour toute tarte de fruits à l’anglaise.

Puff crackers.

Preparer une demi-livre de feuilletage dans les proportions de trois quarts de beurre à la livre, et donner six tours à la pâte.

D’autre part, prendre des meringues et garnir chaque coquille avec de la marmelade de pommes. Abaisser la pâte et la detailler en autant d’abaisses circulaires qu’on a de moities de meringues. Chaque demi-meringue est ensuite placee, partie creuse en-dessous, sur une abaisse dont on humecte les bords. On recouvre la meringue d’une autre abaisse circulaire et on soude les deux parties en relevant les bords en torsade, ainsi qu’on le fait pour les chaussons de pommes. On dore alors les

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g&teaux; à Tœuf battu et on met cuire à four chaud. Lorsque les crackers sont presque cuits, on les saupoudre de sucre fin et on les glace à la salamandre, si le four n’est pas assez chaud pour les colorer.

On peut remplacer la marmelade de pommes par du Mince Meat ou par de la crème p&tissi;ëre.

Seed cake.

Ce genre de gâteau se sert avec le the de 5 heures.

Ingredients : 3 livres de farine, une livre et demie de sucre en poudre, une livre de beurre, 10 œufs entiers, 30 grammes de graine de carvi (ou cumin), deux verres de lait, 120 grammes de cedrat hache très fin, un peu de sel et un verre de rhum ou de cognac, et une pincee de baking powder.

Melanger le beurre ramolli avec le sucre et les œufs, puis y ajouter la farine, le carvi et le cedrat. Le melange doit s’operer graduellement pour ne pas former de grumeaux. Lorsque tout est bien amalgame, on verse la pâte dans des moules unis, prepares à l’avance, c’est-à-dire beurres et garnis de papier à l’interieur. Cuire à four chaud, et lorsque les gâteaux sont cuits, les demouler sur un tamis et les laisser refroidir avec le papier qui les entoure.

Balmoral cake.

Le Balmoral cake est un gâteau qui se sert avec le the.

Ingredients : 2 livres de farine, 330 grammes de beurre, 400 grammes de sucre en poudre, 4 œufs entiers, 4 decilitres de lait, 20 grammes de graine de cumin oud’anis, et 40 grammes de cedrat confit coupe en très petits des.

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Melanger le beurre ramolli avec le sucre, les œufs, Tanis ou le cumin, et le cedrat. Puis ajouter la farine et le lait graduellement afin d’eviter les grumeaux. Sitôt le melange opere» transferer la pâte immediatement dans un moule à charlotte beurre, et garni de papier egalement beurre. Cuire à four modere. Ce gâteau doit être mange frais, car il devient vite rassis, à cause de la grande quantite de farine qui entre dans sa composition.

Madeira cakes.

Ingredients : 500 grammes de farine, 375 grammes de beurre, 375 grammes de sucre en poudre, 8 œufs entiers, le zeste râpe ou hache d’un citron, un verre de rhum, une pincee de sel.

Faire ramollir le beurre en le mettant au bain-marie quelques minutes, sans que pour cela il devienne liquide. Le placer ensuite dans une terrine avec le sucre et le travailler dix minutes avec une spatule. Ajouter les œufs un par un, en continuant de travailler l’appareil. Lorsque la pâte assume une apparence cremeuse, ajouter la farine et le rhum. On ne doit plus travailler la pâte après que la farine est bien melangee. Ces gâteaux se font cuire generalement dans des cercles en fer-blanc de 5 centimètres de hauteur sur 4 de diamètre, qu’on a prealablement garnis de bandes de papier beurre.

Queen’s cakes.

Avec 250 grammes de farine, 6 jaunes d’œufs, une bonne pincee de sel et 30 grammes de beurre, preparer de la pâte à nouilles qu’on abaisse aussi mince que possible, puis qu’on divise en bandes de 4 centimètres de largeur, pour les cou

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per ensuite en vermicelle. Faire secher les nouilles sur un tamis pendant une heure ou deux en les remuant de temps en temps, puis les mettre dans une casserole contenant deux verres de crème, 30 grammes de beurre, 200 grammes de sucre enpoudre, un verre de cognac, et laisser bouillir en remuant legèrement jusqu’à ce que les nouilles aient absorbe toute la crème. Retirer alors du feu, laisser un peu refroidir et melanger à la preparation six jaunes d’œufs.

Beurrer deux plaques d’office sur chacune desquelles on etend la pâte qui doit être d’un demi-centimètre d’epaisseur. On met les plaques au four et lorsque la pâte est cuite on la detache de la plaque. On etend sur la surface d’une des abaisses, de la marmelade d’abricot qu’on recouvre avec la seconde abaisse. On detaille alors les gâteaux en forme de demi-lune avec un emporte-pièce, et on les dresse en couronne. On peut se servir, pour garnir ces gâteaux, de toutes espèces de confitures, et même de frangipane, et leur donner n’importe quelle forme. On peut aussi les meringuer legèrement, et semer à la surface des pistaches hachees et des raisins de Gorinthe. Dans ce cas on les met quelques minutes à l’etuve ou au four, pour secher la meringue.

Blscotes. – Busks.

Ingredients : 500 grammes^ de farine, 400 grammes de beurre, 200 grammes de sucre en poudre, 4 œufs entiers et 4 jaunes. Une bonne pincee de sel, 15 grammes de levure et 3 cuillerees de crème.

Melanger tous ces ingredients (excepte la levure) sur le marbre, comme on fait pour la pâte à brioche. On doit avoir mis en reserve une partie de la farine pour melanger avec la levure. Pendant que s’opère la fermentation du levain, on travaille la farine, le beurre et les œufs avec les mains, jusqu’à ce que la pâte ait acquis une apparence lisse et elastique. On y melange

LA CUISINE ANGLAISE 251

alors le levain, puis on place la pâte dans des moules farines, de forme oblongue, qui sont affectes à cet usage. Ces moules sont places dans un endroit chaud, et lorsque la pâte est assez revenue, on renverse les moules avec soin sur une plaque d’office beurree. On enlève les moules, on dore à l’œuf la surface des gâteaux, et on les met à four chaud. Lorsqu’ils [sont cuits et refroidis, on les coupe transversalement en ^tranches d’un cenlimëtre d’epaisseur; on les range à plat sur un plafond, et on les remet au four chaud, jusqu’à ce que les rtisks aient atteint une couleur doree de chaque côte.

Ces gâteaux secs se servent generalement pour le premier dejeuner et avec le the de cinq heures.

Turnover.

Le turnover est le gâteau qu’en terme de pâtisserie on appelle, on ne sait trop pourquoi, un chausson. On le confeclionne le plus souvent avec des pommes; mais il peut se faire avec toute espèce de fruits. Si ces fruits sont d’une nature delicate, tels que les pêches et les abricots, on les emploie crus, en se contentant de les rouler dans le sucre après en avoir retire les noyaux et eminces; dans tout autre cas, on reduit les fruits en marmelade avant d’en garnir le turnover.

Abaisser du feuilletage de l’epaisseur d’un demi-centimètre, et le couper de la forme et de la grandeur d’une assiette. On en garnit la moitie avec le fruit, puis on humecte les bords avec un pinceau mouille. Recouvrir ensuite la partie de la pâte ganilb avec la moitie qui ne l’est pas. Après cette operation, le gâteau doit avoir la forme d’une demi-lune. Souder les bords qu’on relève en formant un tortilafin d’opposer une digue au fruit qui s’echapperait sans cela; puis mouiller la surface avec de Peau. Finalement saupoudrer le gâteau de sucre et le mettre au four. Si l’on prefère obtenir une surface brillante, remplacer l’eau par de Tœuf, et proceder comme pour les gâteaux feuilletes.

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LA CUISINE ANGLAISE

Floatlng Island. – Ile flottante

Prondre un biscuit de Savoie qu’on a fait cuire dans un moule à charlotte, et le laisser rassir pendant deux ou trois jours. On

Au buffet.

le coupe alors en tranches d’un centimètre d’epaisseur qu’on humecte de curaçao, de kirsch ou de marasquin. On masque chaque tranche de marmelade d’abricot, qu’on parsème de raisins de Corinthe et d’amandes hachees. On superpose les tranches de biscuits jusqu’à ce qu’on ait atteint la hauteur d’un moule

LA CUISINE ANGLAISE 253

d’entremets ordinaire. On masque alors le gâteau de crème fouettee legèrement sucree et aromatisee. On egalise la crème avec un couteau, et Ton sème sur la surface et sur les côtes du gâteau, des pistaches coupees en minces filets, et quelques raisins de Gorinthe. Placer ensuite le g&teau; dans un compotier de cristal et verser autour un sirop de framboises ou une crème anglaise aromatisee de vanille.

Pancakes.

Le mot pancake, qu’on a tort d’ecrire pannequet, est un mot anglais dont les derivatifs pan et cake signifient gâteau et poêle.

En Angleterre comme en France, l’usage exige que l’on mange des crêpes le mardi gras.

L’appareil à pancake se prepare ainsi :

Delayer 120 grammes de farine, 10 grammes de sucre, 20 grammes de macarons ecrases, un peu de tleur d’orange, une pincee de sel, 4 œufs entiers, un demi-litre de lait et 30 grammes de beurre fondu. Faire frire dans la poêle comme les crêpes ordinaires. Les macarons ne sont pas obligatoires.

Pancakes souffles.

Mettre dans une casserole 60 grammes de farine, autant de sucre et delayer le tout graduellement avec un verre et demi de lait. Ajouter 30 grammes de beurre, un grain de sel et le zeste râpe d’un citron. Tourner l’appareil sur un feu ardent jusqu’àce qu’il epaississe, et le faire reduire pendant cinq minutes en remuant constamment. Retirer l’appareil du feu et, lorsque la pâte est un peu refroidie, ajouter 4 jaunes d’œufs dont on fouette les blancs bien ferme.

Faire fondre dans une petite poêle une cuilleree à bouche de

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beurre clarifie et, lorsqu’il est bouillant, etendre dans la poêle assez d’appareil à souffle pour en couvrir le fond. Lorsque le pancake est colore d’un côte, on le retourne, et lorsqu’il est colore de Tautre côte on le fait glisser sur le plat dans lequel il doit être servi, et qui doit être en porcelaine à feu ou ea argent. On met le plat à four modere, pendant qu’on prepare un second pancake, lequel on fait glisser sur le premier, que Ton a prealablement enduit de marmelade de pommes ou d’abricots. On continue ainsi en alternant la marmelade et le pancake jusqu’à ce que l’on ait la hauteur desiree. Cet entremets ne doit sortir du four que pour aller sur table.

O&teauz; à la noix de coco. – Gocoa nut pastry.

Preparer une demi-livre de pâte à genoise legère et la faire cuire sur un plafond carre. Lorsqu’elle est cuite, la retourner sur une feuille de papier et la laisser refroidir. On detaille alors la genoise en bandes larges de six centimètres à peu près, que l’on fend par le milieu pour la garnir de marmelade d’abricots à laquelle on a melange de la noix de coco râpee. On reunit les deux abaisses, et l’on glace la surface de la genoise avec une glace à l’eau, ou avec une couche de fondant; puis avant que le sucre ne soit tout à fait sec, on sème sur les gâteaux de la noix de coco râpee. On detaille ensuite la genoise d’après la methode ordinaire.

Mufflns.

Preparer une pâte molle avec une livre de farine delayee avec un verre de lait tiède, 10 grammes de sel et 15 grammes de levure.

LA CUISINE ANGLAISE 255

Placer la pâte dans une sebiile et la laisser revenir pendant trois ou quatre heures. Le remettre sur le tour et y ajouter de la farine afin de la rendre assez consistante pour pouvoir la travailler. En former des boules de la grosseur d’un œuf, qu’on aplatit et qu’on pose sur un linge bien farine dans un endroit chaud.

Lorsqtie les muffins sont revenus à point, on les fait cuire sur la plaque d’un fourneau en fonte bien chauffee et lorsqu’elles sont cuites d’un côte on les retourne avec un couteau à palette. Quelques minutes de cuisson suffisent. On mange ces gâteaux pour dejeuner, ou avec le the de 5 heures. Les fendre en deux lorsqu’on veut les servir et les faire griller comme des rôties de pain ordinaire. On etend du beurre frais sur chaque tranche qu’on rassemble ensuite en donnant aux muffins leur forme primitive.

Butter biscuits.

Ingredients : une livre de farine, 100 grammes de beurre, -un demi-verre de lait, une pincee de sel, autant de sucre et 10 grammes de levure. Former une pâte trës ferme qu’on abaisse et qu’on detaille avec un coupe-pàte uni, et qu’on pique ensuite avec un ustensile appele « tampon à clou ». Laisser revenir une heure, et cuire à four chaud. A leur sortie du four les humecter legèrement avec un pinceau trempe dans du lait sucre et melange avec de l’œuf battu.

York biscuits.

Ingredients: que livre de farine, 100 grammes de beurre, 100 grammes de sucre en poudre, 2 jaunes d’œufs, une pincee

256 LA CUISINE ANGLAISE

de sel, et le tiers d’un litre de lait. Dissoudre le sucre et le sel dans le lait chaud. Placer la farine sur le marbre, et avec le lait et les autres ingredients, faire une pâte ferme qu’on abaisse de l’epaisseur d’un centimètre et qu^on decoupe avec des emportepièce de fantaisie. Cuire à four chaud.

Gheese biscuits.

Ces biscuits, qui sont de la grandeur d’une pièce de 10 centimes, sont mis gratis à la disposition des clients dans les bons public houses. Ce sont des biscuits secs et non sucres qu’on mange aussi avec le fromage en guise de pain.

Ingredients : SOO grammes de farine de gruau, 150 grammes de beurre, un œuf, une grosse pincee de sel, un verre de lait.

Melanger d’abord la farine et le beurre; puis après avoir fait un puits avec la farine ajouter le lait et l’œuf entier. Amalgamer tous les ingredients pour en former une pâte très ferme qu’on laisse reposer plusieurs heures enveloppee dans un linge mouille. On abaisse la pâte de l’epaisseur d’un demi-centimètre, et l’on detaille les biscuits qu’on fait cuire à four chaud, après les avoir piques de plusieurs trous avec une fourchette. Lorsqu’ils sont cuits il faut encore les faire secher à l’etuve pendant une heure.

Water biscuits ou hard biscuits.

Les boulangers et les pâtissiers anglais ont une superiorite marquee pour la fabrication de ces biscuits secs appeles Water biscuits (biscuits à l’eau).

Ils en confectionnent une infinite de varietes, comme forme et comme grandeur, et s’ils diffèrent par les ingredients qui

LA CUISINE ANGLAISE 257

les composent, leur manipulation est toujours à peu près la même. Il faut d’abord, dans tous les cas, commencer par melanger le beurre et la farine en frottant ensemble les deux ingredients, jusqu’à ce que la farine apparaisse comme sableuse sous la pression des doigts, afin que le peu de beurre que contient la pâte soit egalement distribue. Ce n’est qu’alors qu’on ajoute les autres ingredients, qui se composent invariablement, en plus ou moins grande quantite, de farine, de lait ou d’eau, et d’œufs. La pâte doit toujours être très ferme, et c’est ^avec une grande difficulte qu’on arrive à obtenir un bon resultat. Aussi, les fabricants ont-ils recours à un système de rouleau à levier, ou à une espèce de cylindre en bois sous lequel on fait ‘ passer et repasser la pâte jusqu’à ce qu’elle devienne parfaitement lisse.

11 faut alors l’envelopper dans un linge humide, et la laisser reposer plusieurs heures avant de s’en servir.

Après avoir detaille les « Water biscuits » à l’emporte-pièce, on les pique au moyen d’un coupe-pâte auquel plusieurs pointes sont ajustees. A defaut de cet instrument, on se sert d’une four chette de fer à pointes acerees.

Règle generale : ces biscuits doivent être cuits à four chaud et laisses, après être sortis du four, dans une etuve, pendant une heure ou deux.

Ce n’est qu*à cette dernière condition qu’on les conservera secs. Il faut aussi avoir soin, lorsqu’ils seront bien refroidis, de les preserver de l’humidite en les enfermant dans des boites en er-blanc, inaccessibles à l’air.

Gaptain biscuits.

Le biscuit sec le plus en honneur est le Gaptain biscuit. On en fait de deux espèces : le Gaptain biscuit epais {Thick captain), et le mince {Thin captain); mais la manipulation et la

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composition de la pâte est la même, sauf que, pour les minces, on met un peu moins de beurre.

Ingredients : 1 kilogramme de farine, 60 grammes de beurre, 1 œuf entier, 20 grammes de sel et un verre d’eau. Proceder comme il est explique precedemment, pour le Water biscuit. On les coupe avec un coupe-pâte rond, de six ou huit centimètres de diamètre.

Biscuits & la diable. – Devilled biscuits.

Ces biscuits, que Ton ne sert que dans certains dîners, notamment dans les mess d’officiers et les repas de chasse, se preparent ainsi :

On etend du beurre sur les deux faces d’un Captain hiscuit », qu’on saupoudre de poivre rouge. On le met ensuite sur le gril pendant quelques minutes. Quelquefois, pour varier, on ajoute au beurre un peu de poudre de curry, de la puree d’anchois ou de la moutarde anglaise. On sert les Devilled biscuits à la fin du dîner ou du souper, lorsqu après avoir enleve la nappe, on apporte les vins de Porto et de Xerès.

Celte antique coutume qui consistait, en Angleterre, à manger des hors-d’œuvre endiables (Devilled), après le dîner, dans le but de provoquer une soif artificielle, pour exciter les buveurs repus à boire de nouveau, a, depuis longtemps, disparu des mœurs anglaises; mais il fut un temps où, lorsque les dames avaient quitte la table, on apportait un assortiment de mets fortement epices, tels que harengs saurs, sardines et anchois roules dans le curry et le paprika; rôties de pain au fromage, saupoudrees de poivre de Cayenne; biscuits au gingembre, carcasses de volaille et de gibier grilles, et enduits de condiments diaboliques. Un dîner n’etait complet qu’à la condition de voir figurer un de ces excitants au dessert.

En ce temps-là, et cette epoque n’est pas encore très eloignee,

LA CUISINE ANGLAISE 259

le depart des dames donnait le signal de Torgie. Le vin de Porto, le xerès, le Champagne et le whisky etaient apportes, et les bouteilles pleines succedaient aux bouteilles vides, avec un admirable entrain. Aussi, après une heure ou deux de ces libations desordonnees, la moitie des convives roulaient inevitablement sous la table. Aujourd’hui, nos voisins ne s’adonnent plus à ces excès d’intemperance; ou si, dans certains cas, ils veulent encore faire revivre la vieille tradition, ils le font avec plus de decence et de moderation.

Scotch scones.

Ce g&teau; est d’origine ecossaise. C’est un biscuit sec qui se sert ordinairement avec le the, surtout en province. On etend du beurre frais dessus.

Recette: Une livre de farine, 125 grammes de beurre, une cuilleree à moutarde de bicarbonate de soude, un peu de sel et assez de crème ou de lait pour former une pâte ferme. Abaissez au rouleau et detaillez les scones de la forme triangulaire et de la grandeur des a sables 9 parisiens.

On doit mettre les scones au four à chaleur moderee aussitôt qu’ils sont sur plaques. Quelques minutes de cuisson suffisent.

Il est important de bien amalgamer le carbonate de soude avec la farine avant d’operer le melange avec la crème ou le lait.

Ginger nuits

Ingredients : une livre de farine, un quart de beurre, 200 grammes de melasse, 30 grammes de gingembre en poudre, un peu de zeste de citron hache très fin, deux ou trois œufs entiers, et S grammes de carbonate de soude. Melanger ces ingredients, et en former une pâte ferme qu’on abaisse au rouleau de l’epaisseur d’un demi-centimètre. Detailler à Temporte-pièce mesurant 5 centimètres de diamètre et cuire à four chaud.

. CHAPITRE XI PUDDINGS

Sommaire

Àmber pudding.

Apple dumpling bouilli (Boiled apple dumpling).

Apple dumpling au four (Baked apple dumpling),

Bakewell pudding.

Batter pudding (Batter pudding).

Beurre au cognac (Brandy butter).

Crème anglaise (Custard),

Grôme renversee (Custard pudding) »

Dampfnuden à Tallemande (German dumpling) .

Dumpling ordinaire (Dumpling) .

Krapfens k la viennoise (Austrians pu/fs).

Collège pudding {Collège pudding).

Nursery pudding (Nursery pudding).

Œufs au lait (Custard pudding).

Pudding de Noël.

Plum pudding (Plum pudding).

Pudding au citron (Lemon pudding).

– à l’orange (Orange pudding),

– à la mie de pain (Bread crumbs pudding),

– & la Prince Albert (Prince Albert pudding).

– de fruits en general (Fruit pudding in gênerai),

– à la moelle (Marrow pudding).

– mousseVme (Muslin pudding). souffle (Souffle pudding).

– souffle à la pâtissière (Souffle pudding),

– roule (Rolly pudding).

– de pain bis (Brown bread pudding),

– de pain beurre (Bread and butter pudding)

– de riz au naturel (Plain rice pudding),

– de riz aux œufs (Rice pudding),

au raisin de Corinthe (Currant pudding)

– de pain aux cerises (Cherry bread),

– & la Gobourg (Cobourg pudding), – au gingembre (Ginger pudding).

LA CUISINE ANGLAISE

261

Pudding de tapioca (Tapioca pudding),

– de cabinet (Cabinet pudding) ,

– de figues (Figg pudding),

– de riz aux amandes.

– à la Sefton. Torkshire pudding.

Pudding du sportman (Sportman pudding).

Tôt fait (Hasty pudding).

Pudding monstre (Monster pudding),

– de marrons (Chesnut pudding).

L’Amerique est le seul pays au monde qui puisse rivaliser avec TAngielerre, pour la diversite d’espèces de pudding qu’elle possède à Tactif de sa cuisine nationale.

J*ai dans ma bibliothèque culinaire un livre americain, traitant exclusivement des puddings, et qui contient plus de 1 000 recettes. Je m’abstiendrai de les enumerer toutes, car il en est de ces entremets comme des omelettes, qui peuvent être apprêtees de 200 façons differentes; mais qui ne varient entre elles que par l’assaisonnement ou l’addition d’une substance alimentaire quelconque. Ces innombrables manières de confectionner des omelettes, pourraient se resumer en quelques lignes; comme les mille recettes de mon volume de puddings pourraient être decrites en quelques pages.

Je no m’occuperai donc dans ce chapitre que des principaux puddmgs anglais, en laissant de côte ceux que la fantaisie ou l’originalite peut avoir suggere à l’auteur du livre, et quinesont après tout que des derivatifs de ceux dont je donne les recettes.

LA CUISINE ANGLAISE 263

Doit-on ecrire Pudding, Pouding ou Boudin?

Si la question m’etait soumise, je repondrais que, lorsqu’on emprunte un mot à une langue etrangère, pour designer un objet ou une chose originaire d’un pays qui n’est pas le nôtre, nous devons respecter l’orthographe du nom de cet obJQt ou de cette chose. Aussi, dirai-je et ecrirai-je toujours le mot pudding » tel que les Anglais l’ecrivent.

Plum-Puddlng.

A tout seigneur tout honneur; c’est pourquoi nous nous occuperons tout d’abord de celui des puddings qui constitue l’entremets national par excellence, et dont la reputation est universelle. Le plum-pudding est l’accompagnement oblige du roast-beef le jour du sabbat, et dans les agapes populaires, c’est toujours lui qui trône comme pièce principale de resistance parmi les entremets.

Il existe, en Angleterre, des gens ignorants et timores qui sont convaincus que les Français se nourrissent exclusivement de grenouilles. Par contre, en France, aux yeux de ceux qui ne connaissent pas la manière de vivre des Anglais, le plum-pudding et le roast-beef resument l’ideal de la cuisine britannique.

Le plum-pudding est peu goûte en France; cela tient à ce • que sa composition, de nature indigeste, ne convient pas à nos estomacs delicats. Pourtant je constate que depuis quelque temps, on commence à le voir sur les menus des grands restaurants. On raconte à ce sujet une anecdote amusante : Le marquis de Z., lors d’un voyage à Londres, avait rapporte la recette du plum-pudding qu’il avait donnee à son cuisinier, en lui enjoignant d’avoir à lui en preparer un.

La recette disait bien que les ingredients, après avoir ete melanges, devaient bouillir pendant cinq heures; mais on avait omis de specifier qu’il fallait envelopper la preparation dans une

264 LA CUISINE ANGLAISE

serviette, ou la mettre dans un moule; si bien que le cuisinier, ne sachant comment servir son entremets qui, par suite d*un long sejour dans Teau bouillante, se trouvait à Tetat liquide, crut bien faire en l’envoyant dans une soupière.

Recette : 800 grammes de graisse de bœuf hachee très fin, 250 grammes de mie de pain, 250 grammes de farine, 250 grammes de cassonade, 3 œufs entiers, une pincee de sel, autant de cannelle en poudre et de muscade râpee» 200 grammes de raisins de Gorinthe, 200 grammes de Smyrne, 200 grammes de Malaga, 150 grammes de cedrat, et 100 grammes d’ecorce d’orange confite.

Hachez la graisse de bœuf, lavez et epluchez les raisins de Gorinthe. Épepinez les raisins de Smyrne, et coupez en gros des les ecorces confites. Mêlez ces ingredients dans une terrine avec la farine, le sucre, la mie de pain, les œufs et les epices, et ajoutez un verre de rhum oii de cognac. Beurrez un moule à dôme» emplissez-le avec l’appareil, et beurrez egalement le centre d’une serviette que vous appliquez sur le moule à la surface du pudding. Nouez les pans de la serviette en dessous du moule, et ficelez fortement.

Plongez ensuite le pudding à Teau bouillante et laissez cuire pendant cinq heures, en ayant soin de ne pas arrêter rebuUition. Au momentde servir, deballez le pudding et dressez-le sur un plat. Envoyez à part soit un sabayon, soit même une sauce faite avec de Tarrowroot aromatisee, ou bien encore du beurre au cognac.

Le plum-pudding, à defaut de moule, se fait cuire dans un linge beurre et farine dont on attache fortement les quatre coins avec une ficelle. Lorsqu’il est cuit, on Tegoutte sur le côte le plus creux d’un tamis. On detache les coins de la serviette et on retourne le tamis et son contenu sur le plat. Le linge s’enlève facilement.

On peut aussi faire cuire le plum-pudding dans un moule à cylindre beurre et farine, qu’on emplit avec Tappareil. On le place dans une casserole fermant hermetiquement, avec de Teau jusqu’à la moitie de la hauteur du moule et on le laisse

LA CUISINE ANGLAISE 265

cuire ainsi à la vapeur pendant quatre heures. Lorsqu’il est demoule sur un plat, on Tarrose parfois de rhum ou de cognac qu’on allume avant de l’envoyer sur table.

Beurre au cognac. – Brandy butter.

Faire fondre un quart de beurre en pommade, avec un peu de sucre, et le remuer constamment en y ajoutant goutte à goutte un verre de cognac. Conserverie beurre au frais et le servir sur une assiette en même temps que le plum-pudding.

Pudding de pain bis & la Ootha. – Bro^wn bread

pudding.

Ingredients : 3S0 grammes de mie de pain bis, 150 grammes de sucre en poudre, 6 œufs, un quart de litre de crème fouettee, une pincee de sel, le zeste hache d’un citron et une demi-livre de cerises fraîches. Melanger dans une terrine la mie de pain, le sucre, les jaunes d’œufs, la crème, le citron hache, le sel et en dernier lieu les blancs fouettes. Beurrez un moule à charlotte, et semez un peu de mie de pain dans rinterieur. Étendez dans le fond du moule une couche de l’appareil sur lequel vous semez des cerises fraîches dont on a enleve les noyaux. Ajoutez de nouveau une couche d’appareil, puis des cerises, et ainsi de suite jusqu’à ce que le moule soit presque plein. Mettez alors le pudding cuire à four doux pendant une heure. Demouler et saucez avec un sirop de cerises.

Ce pudding aussi peut se faire cuire au bain-marie.

La charmante pièce de vers qui suit, est extraite des œuvres de mon estimable ami, Achille Ozanne, le Berchoux moderne , et l’auteur de ce spirituel recueil de « poesies gourmandes » que tout cuisinier ayant quelque souci de l’art qu’il professe, doit avoir dans sa bibliothèque.

LA CUISINE ANGLAISE 267

LE PLUM-PUDDING DE NOËL

Ainsi que le drapeau, symbole magislral,

Chaque pays possède un mets national.

Dont les divers destins les rendent respectables.

L*un s’illustre aux combats, les autres sur les tables!

Souverains, magistrats/ femmes, vieillards, enfants

De la noble Angleterre, Chantent du fond du cœur les bienfaits triomphants

Du pudding legendaire t

Sa recette

Raisins d’Espagne et d’Orient,

De rinde, gingembre et cannelle,

Cedrat, muscade à bon escient,

Ce sont les parfums qu’il recèle.

Farine, graisse, lait, des œufs,

Puis mouillez d’un arôme unique.

Ces produits melanges entre eux.

De bon rhnm de la Martinique. Dans un linge assez grand, bien farine, beurre,

Que le pudding se moule. Modele, laçonne, ficele bien serre,

Tout rond comme une boule.

Sachez que sa cuisson est simple en son effet :

Il cuit à l’eau bouillante. On le sert entoure de bon rhum, dont on fait

Jaillir la flamme ardente t

Ses bienfaits

D’un elan genereux, le bourgeois, le richard. Pour les desherites, d’avance ont fait la part. Le pauvre en sa cabane où le chaume le couvre ( )

Fête comme les rois; Et dans toute prison, la ge61e qui s’entr’ouvre Donne au pudding ses droits f

Voilà comment TAnglais, en ce jour de Noël, Comprend l’egalite par-devant TÉternel I

Achille Ozanne. Decembre 93.

1. Excuie-moi, Malherbe.

268 LA CUISINE ANGLAISE

Pudding de pain beurre. – Bread and butter pudding.

Ce pudding est en grande estime chez nos voisins, non sealement parce qu’il est facile et peu coûteux à confectionner, mais aussi à cause de son excellence.

Ingredients : Pain, beurre, œufs, sucre et lait. Couper des tranches de pain beurre très minces et les placer superposees dans un plat à pudding (pudding dish) , après avoir seme sur chacune des tranches des raisins de Corinthe epluches et bien laves. Casser dans une bassine deux œufs entiers et deux jaunes; ajouter du sucre en poudre, battre les œufs et le sucre, et delayer avec un demi-litre de lait, parfumer l’appareil avec du sucre de vanille, de fleur d’orange ou de citron, et le verser sur le pain beurre. Lorsque le pain est bien imbibe, mettre le pudding à four modere pendant une demi-heure. Lorsqu’il est cuit on sème du sucre à la surface et on le glace à la salamandre.

Pudding de riz aux œufs. – Rice pudding.

Laver et faire blanchir 125 grammes de riz. – L’egoutter et le remettre dans la casserole. Le faire cuire avec du lait et 50 grammes de beurre frais, comme s’il s’agissait d’un gâteau de riz; mais il doit être tenu plus liquide. Lorsqu’il est cuit à point, on ajoute au riz du sucre et un parfum quelconque, puis deux œufs entiers. Beurrer un plat à pudding, l’emplir jusqu’au bord avec l’appareil, et le mettre à four modere; une demi-heure de cuisson suffit. Lorsque le pudding est cuit, le saupoudrer de sucre fin et le glacer à la salamandre. Quelquefois on ajoute au riz, lorsqu’il est cuit, une poignee de raisins de Corinthe

LA CUISINE ANGLAISE

Pudding de riz au naturel. – Plaln rlce pudding

Le pudding de riz tel qu’on le prepare dans les familles qui vivent à Teconomie se fait ainsi : Laver le riz et le mettre dans le fond d’un plat à pudding prealablement beurre. Le recouvrir de lait sucre, semer sur la surface un peu de muscade râpee ou de cannelle en poudre, et faire cuire à four chaud pendant une heure.

Crème renversee. – Steamed custard pudding.

L’entremets qu’on appelle en anglais steamed custard pudding^ ne diffère en rien de ce qu’on nomme dans le vocabulaire de la cuisine française, crème renversee, et se compose d’œufs, de sucre et de lait dans la proportion de 6 œufs entiers pour 120 grammes de sucre et un demi-litre de lait. On aromatise ta crème d’une saveur quelconque, et on la passe à travers une mousseline dans un moule beurre qu’on met au bain-marie pendant une heure, en ayant soin de ne pas le laisser bouillir. Demouler dans un plat creux, et saucer d’un sirop de fruits quelconque, ou d’une sauce à l’arrowroot. .

Pudding de pain aux cerises. – Cherry bread.

Piler dans un mortier une livre de belles cerises avec leurs noyaux. On les met ensuite dans un poêlon de cuivre avec 200 graçimes de sucre et un grand verre de vin de Porto. Laisser cuire sur le feu pendant dix minutes, et passer la puree

270 LA CUISINE ANGLAISE

à travers un tamis de Venise au moyen d’une cuiller de bois. Pendant que cuisent les cerises, on prepare des tranches de pain de mie, ou mieux encore de brioche rassie, qu’on coupe d’egale grandeur avec un emporte-pièce et qu’on fait frire dans le beurre clarifie. Lorsque les croûtons de pain ou de brioche sont d’une belle couleur doree, on les trempe dans la puree de cerises et on les place en forme de turban dans un plat à pudding ou dans une caisse à souffle en argent. Semer à la surface un peu de poudre de cannelle, et mettre au four. Laisser mijoter pendant une demi-heure. Les croûtes doivent avoir ete bien imbibees de sirop avant de les mettre au four, et il faut avoir soin de verser un peu de sirop dans le plat, afin que les croûtes ne s’attachent pas au fond.

Pudding de marrons. — Gbesnut pudding.

Enlevez avec un couteau la premiërp- peau de cinquante marrons. Mettre de l’eau à bouillir dans une casserole .pour blanchir les marrons afin d’enlever la seconde peau. Lorsqu’ils sont tous bien epluches, mettez-les cuire avec une demi-gousse de vanille, de l’eau, et 60 grammes de sucre. Lorsqu’ils sont cuits, passez-les à travers un tamis de crin, et remettez la puree dans la casserole avec 100 grammes de beurre et un decilitre de crème. Remuez sur le feu pendant quelques minutes, en ayant soin que la puree n’attache pas au fond de la casserole. Lorsqu’elle n’adhère plus aux parois, retirez-la du feu et laissezla refroidir un peu, puis melangez aux marrons un œuf entier et cinq jaunes. Fouettez les blancs, et amalgamez-les avec le pudding lorsqu’ils sont bien fermes. Beurrez un moule uni, et remplissez le avec l’appareil. Mettez aii bain-marie a etbver pendant une heure et demie. Lorsque le pudding est cuit, demoulez-le sur un plat, et saucez d’une sauce abricot dans laquelle vous melangez Un verre de madère.

LA CUISINE ANGLAISE 2 71

Crème anglaise. – Gustard.

La crème anglaise ou « cuslard » aromatisee d’uae saveur quelconque, le plus souvent de cognac ou de curaçao, se sert pour saucer les puddings. On ne doit pas epargner les jaunes d’œufs pour lui donner une certaine consistance; mais par economie on y ajoute une pincee ou deux d’arrowroot.

Œufs au lait; – Gustard pudding baked.

Le eus tard pudding n’est autre chose que les œufs au lait, et se prepare soit dans un plat à pudding, soit dans des pçtits pots ainsi qu on le fait en France. Ce pudding se fait cuire à four doux, au bain-marie ou dans un steamer.

Pudding de figues. – Pigg pudding.

Prendre une demi-livre de figues, une livre de graisse de ro^’non de bœuf epluchee, et une demi-livre de farine. Hacher

ensemble les figues et la graisse et y ajouter la farine graduellement, pour faciliter le melange, ainsi qu’une pincee de sel et

272 LA CUISINE ANGLAISE

deux œufs entiers. Deposer la preparation dans une serviette beurree dont on attache les quatre coins avec une ficelle, puis plonger le pudding à Teau bouillante et le laisser cuire à grande eau pendant trois heures. Au bout de ce temps, delacher les coins de la serviette, et dresser le pudding sur un plat creux. On le sauce avec une sauce à Tarrowroot aromatisee d’un peu de sucre de -citron ou de vanille ou mieux encore avec une sauce anglaise (custard).

Pudding de riz aux amandes.

Laver 350 grammes de riz et le mettre dans une casserole avec un quart de beurre, un .quart de sucre, une pincee de sel, 120 grammes d*amandes hachees très fin et trois quarts de litre de lait. Laissez le riz bouillir tout doucement jusqu’à complète cuisson. S’il se trouvait trop epais, on ajouterait un peu de lait. On melange au riz, lorsqu’il est un peu refroidi, six jaunes d*œufs et trois blancs fouettes.

Beurrez grassement un moule à charlotte, et semer autour des parais, des amandes coupees en filets. Emplir le moule avec le riz et mettre au four pendant une heure. Lorsque le pudding, est cuit, on le demoule sur un plat et on le sauce d’une sauce abricot, ou d’un sabayon.

Nursery puddings.

Les puddings de tapioca, de semoule, de vermicelle, de sagou, etc., se font de la même manière que les puddings de riz. Ces puddings font partie de la diète des enfants; aussi, dans les les familles, il est d’usage d’en envoyer un à la « nursery » tous jourspourle repas des enfants qui a lieu generalement à une heure.

LA CUISINE ANGLAISE 273

Les puddings sus-mentionnes se font aussi dans des moules à charlotte. Dans ce cas, on les tient un peu moins liquides et on double la quantite d’œufs employes. On les fait cuire au four, au bain-marie ou à la vapeur; et lorsqu’ils sont demoules et dresses sur le plat, on les entoure d’un sirop de fruits quelconque ou d’une sauce à l’arrowroot, dans laquelle on ajoute du sucre et un verre de cognac; ou bien encore, on masque le pudding d’une crëmè anglaise bien liee, a custard sauce ».

Pudding à la Gobourg.

On doit se servir pour preparer ce pudding d’une brioche rassie ayant ele cuite dans un moule à charlotte.

Parer la croûte, puis couper la brioche en tranches horizontales d’un demi -centimètre d’epaisseur. Masquer un des côtes de ces tranches d’une couche epaisse de marmelade d’abricot. Preparer une anglaise de deux œufs entiers, deux jaunes, et d’un tiers de litre de lait, sucrer cette anglaise suffisamment, la parfumer à la vanille ou au citron, la verser dans un plat et en imbiber les tranches de brioclie, que l’on replace dans le moule à charlotte prealablement beurre. Remplir le moule avec le reste de l’anglaise, et mettre le pudding au bain-marie ou à la vapeur pendant une heure et demie. Le demouler alors sur un plat, et le masquer d’une sauce abricot dans laquelle on a melange un verre de madère ou de kirsch.

Prince Albert pudding.

Ingredients : 250 grammes de beurre, 250 grammes de farine, iSO grammes de sucre, cinq œufs, 200 grammes de raisins de Smyme, le zeste d’un citron râpe, une pincee de sel.

18

274 LA CUISINE ANGLAISE

Faire foadre le beurre en pommade et y ajouter d’abord le sucre, puis les jaunes des œufs dont on reserve les blancs. Travailler cette pâte avec une cuiller de bois pendant dix minutes , puis ajouter la farine et le zeste de citron, et en dernier lieu, les blancs d’œufs fouettes. Beurrer un moule à charlotte, Templir avec l’appareil , et faire cuire à la vapeur ou au bain-marie pendant une heure et demie. Lorsque le pudding est cuit, le demouler et le masquer d’une sauce à Tarrowroot, aromatisee de sucre, de citron, ou d’un sirop de fruits quelconque.

Pudding au gingembre. – Ginger pudding.

Ingredients : 200 grammes de farine, 200 grammes de sucre, un demi-litre de lait, 130 grammes de beurre, 6 œufs, 30 grammes de gingembre en poudre et 100 grammes de gingembre confit. Delayer dans une casserole la farine, le sucre et le lait, ajouter ensuite le beurre et une pincee de sel, et remuer sur un feu vif, avec une cuiller de bois, jusqu’à ce que l’appareil comnience à epaissir. Oter alors la casserole du feu, et remuer vigoureusement afin d’obtenir une pâte lisse. Remettre la casserole, et cuire la pâte pendant cinq minutes. La retirer alors et ajouter la poudre de gingembre, puis les six jaunes d’œufs et le gingembre confit. Fouetter les blancs d’œufs et les melanger à l’appareil, qu’on verse dans un moule à charlotte beurre. Faire cuire au bain-marie pendant une heure et demie, et demouler sur un plat creux. Saucer le pudding avec une anglaise dans laquelle on a mis des morceaux de gingembre confit.

Batter pudding.

Melanger dans une terrine 200 grammes de farine, une pincee de sel, 23 grammes de sucre, un demi-litre de lait, 4 œufs entiers et le zeste râpe d’un citron ou d’une orange,

LA CUISINE ANGLAISE 21o

beurrer un moule à dôme, l’emplir avec l’appareil, et faire etuver au bain-marie pendant deux heures.

Saucer d’une sauce au beurre parfumee au citron ou àTorange, et envoyer à part dans deux soucoupes, du sucre en poudre et du beurre frais.

Ce pudd se sert froid ou chaud à volonte.

#Pudding & la sefton. – Sefton pudding.

Ingredients : une livre de beurre en pommade, une livre de sucre en poudre, 8 œufs, une livre de mie de pain fraîche passee au tamis de fer, le zeste d’un demi-citron râpe, un grain de sel, un peu de crème.

Travailler le beurre avec le sucre dans une terrine et y ajouter graduellement les œufs et le zeste de citron.

Lorsque le melange est bien opere, on ajoute la mie de pain.

Beurrer un moule à charlotte, l’emplir avec l’appareil et mettre cuire au bain-marie pendant une heure et demie. Lorsque le pudding est demoule sur le plat dans lequel il doit être servi, on l’arrose d’un sirop d’abricot qu’on aura fait chauffer additionne d’un verre de madère.

286

LA CUISINE ANGLAISE

Pudding sportmar. – Sportman pudding.

Ingredieats : une livre de farine, une livre de graisse de rognon de bœuf hachee, G^œufs entiers, une pinte de crème, 120 grammes de sucre en poudre, une livre de raisins de Corinthe bien laves et epluches, une demi-livre de raisin de

Smyrne epepines et haches très fin, 120 grammes de cedrat et d’orange confite, egalement haches, delà mus.cade râpee ainsi qu’un peu de cannelle pulverisee et un verre de rhum ou de cognac.

Après avoir opere le melange de tout ces ingredients dans une terrine, on beurre un linge dans lequel ou ^ enveloppe le pudding. On fixe une double ficelle autour du linge ainsi que Ton agit pour le plum-pudding ordinaire, puis on laisse cuire à grande eau pendant quatre heures en ayant soin que l’eau bouille constamment. Lorsque le pudding est cuit, on Tegoutte, on le debarrasse du linge qui l’enveloppe, et on le dresse dans un plat creux. On verse dessus une sauce àl’arrowroot, au rhum ou au cognac, ou simplement un sabayon au madère.

Pudding à la moelle. – Marroiv pudding.

Nettoyer et hacher très fin une livre de moelle de bœuf, à laquelle on adjoint une demi-livre demie de pain fraîche. Mettre le tout dans une bassine avec 150 grammes de sucre en poudre,

LA CUISINE ANGLAISE 287

ISO grammes de raisins de Corinlhe laves et epluches, autant de cedrat confit coupe en julienne mince, une pincee de sel, le zeste râpe d’un citron, un verre de cognac ou de madère et trois œufs entiers. Beurrer un moule à charlotte, et Teraplir avec la preparation, poser le moule sur un plafond, et cuire à four modere pendant une heure environ. Lorsque le pudding est cuit, le demouler sur un plat creux et l’arroser d’un sabayon au xerès. Ce pudding doit être servi très chaud.

Pudding mousseline.

Ingredients : 120 grammes de beurre, 120 grammes de sucre, 12 jaunes d’œufs, 8 blancs fouettes^ le jus et le zeste râpe d’un citron.

Melanger d’abord dans une casserole moyenne le beurre et le sucre legèrement chauffes, puis ajouter gradu(.’llement les jaunes d œufs et le jus et le zeste de citron. Mettre la casserole au bainmarie, et faire prendre l’appareil en le tournant, jusqu’à ce qu’il ait atteint la consistance d’une sauce hollandaise. Le retirer alors du bain-marie et lorsqu’il est froid, ajouter les blancs fouettes. Beurrer et sucrer un moule à charlotte à cylindre et remplir avec Tappareil. Mettre une bande de papier autour du moule, et le mettre à pocher au bain-marie dans une casserole fermant hermetiquement. Lorsque Teau est en pleine ebullition, on y place le pudding et Ton ferme immediatement la casserole qu’on retire entièrement du feu. On le laisse ainsi eloigne du feu pendant une demi-heure sans le decouvrir. Au bout de ce temps il doit être cuit. On le laisse reposer quelques minutes avant de le demouler et on le sert avec un sirop de fruits quelconque. Ce pudding est le plus leger et le plus delicat que je connaisse.

LA CUISINE ANGLAISE

Pudding souffle à la pâtissière. – Souffle pudding.

Ingredients : 120 grammes de sucre, 40 grammes de fecule, 4 jaunes d’œufs, 4 blancs fouettes, un verre et demi de lait, 30 grammes de beurre, de Tessence de vanille ou un parfum quelconque, un grain de sel.

Melanger Tappareil comme une frangipane, en le tournant sur le feu, mais en reservant les blancs d’œufs qu’on fouette en neige, et qu’on melange lorsque la crème est un peu refroidie.

Mettre au bain-marie et laisser cuire trois quarts d’heure.

Envoyer avec ce pudding un sabayon ou un sirop de fruits.

Pudding souffle. {Autre recette.)

Delayer dans une casserole 60 grammes de farine, 60 grammes de sucre, et un verre de lait dans lequel on a fait infuser de la vanille; ajouter 30 grammes de beurre et une pincee de sel. Tourner sur le feu jusqu’à ce que l’appareil epaississe, et le faire reduire sans le quitter pendant trois ou quatre minutes. Le retirer du feu, et lorsque la pâte est un peu refroidie, ajouter 4 jaunes d’œufs dont on fouette les blancs. Emplir alors avec cet appareil un moule à. charlotte beurre et sucre» qu’on entoure d’une bande de papier fixe au moyen de ficelle, et mettre cuire le pudding au bain-marie pendant trois quarts d’heure. Lorsqu’il est cuit, le laisser reposer quelques minutes avant de le demouler. Saucer d’un sabayon ou d’une sauce à Tarrowroot.

LA CUISINE ANGLAISE 289

Pudding tôt fait. – Hasty pudding.

Le hasty pudding est simplement ce que les menagères françaises appellent un tdt fait. En voici la recette telle qu’on le fait en Angleterre : Faire bouillir un demi-litre de lait, dans lequel on a fait dissoudre 40 grammes de sucre, et infuser un peu de canilelle ou de vanille. Puis, après avoir retire Taromate, on ajoute une pincee de sel, et tandis que le lait bout, on laisse tomber de la farine en pluie dans la casserole. Tandis que d’une main on met la farine, on doit de l’autre main remuer constamment le pudding avec une cuiller de bois.

On obtient ainsi une espèce de bouillie grumeleuse qu’on verse dans un plat et qu’on fait gratiner au four.

Pudding monstre. – Monster pudding.

A l’epoque de la guerre entre TAmerique du nord et de l’Amerique du sud, le coton devint si rare^ que la plupart des fabriques chômaient en Angleterre, et que des milliers d^ouvriers des villes manufacturières se trouvaient sans ouvrage, et mouraient litteralement de faim. Pour conjurer la famine, que l’histoire designe sous le nom de a Cotton famine», chaque corps d’etat s’unit pour venir en aide aux malheureux, et contribua, chacun dans la mesure de ses moyens, à soulager par des offrandes, la misère generale. C’est alors que la societe des cuisiniers auglais de Londres conçut l’idee d’envoyer aux affames du Lancashire un plum-pudding moustre qui pesait 900 livres.

Voici dans quelles proportions etaient les divers ingredients qui entraient dans sa composition :

19

290 LA CUISINE ANGLAISE

130 livres de raisins de Coriothe, 130 livres de raisins de Smyrne, 210 livres de farine, 130 livres de graisse de bœaf hachee, 80 livres d’oranges et de citrous confits; 80 livres de sucre, 1,040 œufs, 8 gallons d’ale, 4 livres d’epices fines, 1 livre de gingembre en poudre.

Le moule avait 3 pieds de profondeur, 4 pieds de diamètre et 12 pieds de circonference. On le fit cuire dans une des enormes chaudières du Workhouse de Mary-le-Bone. On le fit bouillir pendant 14 heures. Ce plum pudding pantagruelique fut conduit en grande pompe à la cite, escorte par la musique d’un regiment. Il fut exhibe pendant trois jours, puis expedie à Lancaster pour être distribue aux ouvriers afi’ames.

Pudding de cabinet. – Cabinet pudding.

Le pudding de cabinet se fait avec des biscuits à la cuiller rassis. On en garnit les parois d*un moule à charlotte prealablement beurre, et parseme de raisins de Corinthe.

On prepare une macedoine de fruits confits, composee de raisins de Smyrne, Malaga epepine, Corinthe, cedrat coupe en des et angelique.

On alterne les couches de fruits et de biscuits jusqu’à ce que le moule soit presque plein. On fait ensuite une crème anglaise composee de trois œufs entiers et trois jaunes, 50 grammes He sucre, un demi-litre delaitetun parfum quelconque. On emplit le moule une heure avant de le mettre à cuire. On le met au bainmarie pendant une heure et demie. On le demoule dans un plat creux, et Ton sauce d’un saubayon ou d’une crème à l’anglaise.

Gelee sucree de pieds de veau. ~ Calfs foot Jelly.

Dans les soirees et soupers de bal, on sert enormement de gelees sucrees faites de pieds de veau; mais le plus souvent.

LA CUISINE ANGLAISE 291

par economie, on remplace les pieds de veau par de la gelatine. Desosser et faire tremper pendant trois heures six pieds de veau. Les faire blanchir, et jeter la première eau. Les remettre au feu, et les laisser cuire pendant cinq ou six heures. Passez alors le bouillon à la serviette, le degraisser et le mettre à refroidir. Cette operation doit se faire la veille du jour où l’on doit clarifier la gelee. Lorsque le bouillon est tout à fait froid, on enlève facilement le peu de graisse qui reste, en essuyant la surface avec un linge imbibe d’eau chaude.

Mettre la gelee dans une casserole avec le sucre necessaire, un morceau de cannelle,, le zeste de deux oranges et de deux citrons, et le jus de six citrons et de quatre oranges. Casser six ou huit blancs d’œufs, qu’on melange en les fouettant avec un peu d’eau froide, et que Ton verse dans la casserole contenant la gelee. On contiDue à remuer jusqu’à ce que le liquide ait atteint le degre d’ebullilion. On retire alors la casserole du feu, et on laisse reposer quelques minutes, pendantlesquelles on apprête la poche à filtrer que Ton suspend entre deux chaises lorsqu’on n’a pas de boite à gelee; mais il est rare qu’une cuisine n’ait pas cette boîte parmi ses ustensiles. La chausse ou la poche, ayant ete bien rincee, est alors utilisee pour filtrer la gelee qu’on y verse. On la repasse une seconde fois, et si l’operation a ete bien faite, on aura obtenu une gelee des plus limpides. On doit, avant d’operer la clarification, mettre un peu de la gelee à la glace pour s’assurer de sa consistance afin de pouvoir, si elle n’etait pas assez forte, y ajouter de la gelatine.

Ces gelees se parfument de marasquin, d’orange, de noyau ou de rhum, et se mettent dans des moules que l’on tient à la glace jusqu’au moment de les demouler pour les servir. On les garnit parfois de fraises, de pêches, d’ananas ou d’une macedoine de fruits.

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Gelee fouettee. – *Whipped jelly.

Fouetter dans une bassine placee sur glace de la gelee sucree et parfumee. Lorsqu’elle commence à prendre de la consistance, on la verse immediatement dans un moule à gelee. Au moment de servir, tremper le moule à l’eau chaude et demouler la gelee sur un plat d’entremets.

Gelee à la moscovite.

La gelee employee doit être très faible. On la parfume soit à la liqueur, soit à l’orange ou à un sirop de fruits quelconque; puis on la met dans un moule que l’on sangle de glace et de gros sel. Lorsqu’elle est prise, la gelee a perdu sa clarte transparente et a revêtu un aspect irise très original. Pour la sortir du moule on trempe celui-ci dans Teau chaude, et on le renverse immediatement, après l’avoir eponge, sur un plat bien froid.

Pain d’orange.

Enlever, en les frottant sur un morceau de sucre, le zeste de quatre oranges dont on exprime ensuite le jus. Ajouter le jus de deux citrons et du sucre en quantite suffisante. Faire chautfer legèrement sans laisser bouillir, et ajouter un peu de gelatine fondue ou de colle de poisson. Passer le tout àtravers une mousseline, et mettre un peu de l’appareil à essayer sur glace, dans un moule à dariole, pour s’assurer s’il est assez colle. Remuer sur la glace jusqu’à ce que la gelee commence à prendre de la consistance, et verser immediatement dans un moule à gelee h cylindre. Lorsque le pain d’orange est demoule, garnir le puits de crème fouettee.

CHAPITRE XII

ENTREMETS DE FROMAGE ET SANDWICHES (Cheese entremets and sand^^ches.)

Sommaire

Bavarois au fromage.

Beignets au Parmesan.

Biscotins au fromage.

Biscuits glaces au parmesan.

Cheese straws.

Condes au fromage.

Glace au fromage.

Croquets au parmesan.

Devonshire cream.

Darioles au fromage.

Dartois au fromage.

Diablotins au fromage.

Etymologie du sandwich.

Kisch & la lorraine.

Petites croustades de finnan haddock.

Ramequins.

Rissoles au fromage.

Pulled bread.

Sandwiches diverses.

Sandwiches au fromage.

Sandwich du book maker.

Scotch -woodcock.

Souffle au fromage.

Petits fondus au parmesan.

Pudding de fromage au pain.

Tartelettes piemontaises.

Tartelettes milanaises.

Tartelettes soufflees au parmesan.

Welsh rarebit.

Parmi les particularites qui distinguent le service des repas anglais, il en est une très importante que je dois signaler, et qui consiste, dans les grands dîners, à servir un entremets de fromage après le releve de rôti. II en est pour ces mets au fromage comme des puddings, et peuvent se varier à l’infini selon le goût et rimagination du cuisinier.

Les meilleurs fromages nationaux sont au nombre de quatre : C’est d’abord le Stilton, que les Anglais proclament le roi des fromages, et qui est originaire du comte de Leicestershire. Ce fromage, qui a la forme d’un manchon, ressemble un peu par Tapparence au roquefort et au gorgonzola; mais il en diffère essentiellement par le goût. C’est le fromage aristocratique par excellence. Son poids est en moyenne de huit à douze livres. On le sert entier, entoure d’une serviette pliee de manière à cacher la croûte rugueuse et peu appetissante de l’exterieur. Au retour de la salle à manger, pour empêcher le fromage de secher, on

LA CUISINE ANGLAISE 295

recouvre la partie superieure entamee avec une serviette imbibee de vin de sherry ou de porto. Le Chadder cheese est un fromage qui a la forme du gruyère, et a comme lui une apparence solide et blanchâtre; mais la pâte en est compacte comme celle du fromage de Hollande. C’est avec ce fromage qu’on fait les meilleurs Welsh rarebits.

Le chester est le fromage le plus en faveur parmi la cksse moyenne et la bourgeoisie. Quant au Edder cheese, c’est un produit du Warwickshire. Il a la forme et la grandeur du portsalut, mais l’interieur est mou et cremeux, au lieu d’être compact.

Tartelettes piemont aises.

Foncer avec de la pâte fine deux douzaines de moules à tartelettes creux. D’autre part, casser dans une bassine quatre œufs entiers. Assaisonner de sel, poivre de cayenne, muscade. Fouetter ces œufs quelques minutes en y ajoutant graduellement une poignee de parmesan râpe et autant de gruyère, puis un demi-litre de crème. Emplir les tartelettes avec cet appareil et cuire à four vif. A la sortie du four, on les saupoudre de parmesan râpe, et on les envoie immediatement sur table. Cet entremets doit être servi très chaud.

Tartelettes soufflees au fromage.

Ingredients : 50 grammes de farine, 50 grammes de fecule, un verre de lait, 4 œufs, 30 grammes de parmesan, 30 grammes de gruyère, sel, cayenne, 60 grammes de beurre, un peu de muscade râpee. ^

Delayer la farine graduellement avec le lait, le sel, le cayenne

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et la muscade. Tourner sur le feu jusqu’à ce que Tappareil epaississe, melanger vigoureusement avec la spatule, et laisser bouillir encore quelques minutes en continuant de remuer; retirer du feu et ajouter le fromage râpe : puis les quatre jaunes d’œufs dont on fouette les blancs que Ton melange legèrement. Emplir deux douzaines de moules à tartelettes prealablement fonces de pâte fine, et cuire à four vif. Lorsque les tartelettes sont cuites, les demouler, les saupoudrer de parmesan, et servir immediatement. Colorer avec la salamandre s’il y a lieu.

Ramequins.

Preparer de la pâte à choux, en employant du lait au lieu d’eau. Après avoir melange les œufs, on ajoute du sel, du cayenne et du fromage râpe. Coucher la pâte sur un plafond, en donnant aux ramequins la forme de petits choux ou de pains à la duchesse. Parsemer sur la surface, du fromage de gruyère coupe en petits des, et cuire à four de chaleur moderee.

Biscotins au fromage.

Cet entremets de fromage a l’avantage de pouvoir être prepare à l’avance.

Casser dans une terrine deux œufs entiers et trois jaunes. Les delayer avec un demi-litre de crème, du sel, du poivre de cayenne, un peu de muscade, une poignee de gruyère râpe et autant de parmesan.

Beurrer 12 moules à tartelettes petits, mais profonds, et les remplir avec l’appareil qui vient d’être decrit. Placer les moules dans un sautoir avec un peu d’eau chaude, et faire pocher au four modere, en ayant soin que l’eau du sautoir ne bouille pas.

LA CUISINE ANGLAISE 297

Couper à Temporte-piëce des tranches de brioche rassie, de l’epaisseur d’un centimètre, et de même diamètre que les moules à tartelettes, et les faire faire dans du beurre clarifie. Lorsque les œufs sont poches, les demouler et les placer aussitôt sur les rondelles de brioche frite. On sème dessus un peu de fromage râpe et Ton colore à la salamandre.

Cet entremets peut se preparer le matin et se faire rechauffer au four au moment de servir, sans perdre de ses qualites.

Biscuits glaces au parmesan.

Faire une crème angolaise de huit jaunes d’œufs^ qu’on assaisonne de sel, poivre de cayenne et muscade. La prendre sur le feu et la retirer lorsqu’elle commence à epaissir. Lorsqu’elle est tiède, lui melanger une poignee de parmesan râpe et la même quantite de gruyère. Passer à l’etamine avec deux cuillers de bois. V

Lorsque l’appareil est tout à fait froid, lui incorporer un demi-litre de crème fouettee bien epaisse, et remplir des petites caisses à souffle, autour desquelles on a attache des petites bandes de papier. Les ranger alors dans une cave à biscuits glaces, et les sangler legèrement de glace et de gros sel. Avant de les servir, enlever les bandes de papier et dresser sur une serviette. Ces biscuits, n’etant pas sucres, se congèlent très vite; aussi faut-illes surveiller afin qu’ils ne deviennent pas trop fermes.

Pudding de fromage au pain. – Bread and cheese pudding.

Etendre une couche de beurre frais sur des tranches de pain rassi coupees très mjinces. Semer sur ces tranches de pain du

2U8 LA CUISINE ANGLAISE

fromage de parmesan et de gruyère râpes en egale quantite. Disposer alors regulièrement les tartines de pain dans un plat à pudding, jusqu’à ce qu’il soit aux trois quarts plein. ¦ Preparer une crème anglaise avec six jaunes d’œufs delayes avec du bouillon leger, et assaisonner de sel, poivre et muscade râpee. Verser cette crème sur le pain range dans le plat, semer sur la surface du parmesan râpe et faire cuire à four modere. Colorera la salamandre s’il y a lieu.

Bavarois au fromage.

Faire une anglaise de six jaunes d œufs qu’on delaye avec du lait, la remuer sur le feu avec une cuiller de bois, et lorsqu’elle est prise, la verser dans une bassine, l’assaisonner de sel et d’une forte pincee de cayenne, puis, lorsqu’elle est à moitie froide, y melanger une poignee de fromage de gruyère râpe et la même quantite de parmesan ainsi qu’un peu de muscade. On passe ensuite cette crème à Tetamine au moyen de deux cuillers de bois. Ajouter à l’appareil un peu de gelatine fondue, et tourner sur la glace jusqu’à ce que la crème commence à epaissir. On termine par l’addition de crème fouettee, puis on emplit vivement un moule à bavarois ou bien des moules à darioles. Un point essentiel à observer, c’est que dans tous les entremets de fromage servis sur les tables anglaises, il ne faut pas menager le poivre de cayenne.

Glace au fromage à la Gadogan.

Preparez une crème anglaise de six jaunes d’œufs et de lait, comme pour le bavarois au fromage, et assaisonnez de même. Melangez le parmesan et le gruyère, et lorsque Tappa

LA CUISINE ANGLAISE 299

reil est presque froid, passez à Tetamine au moyen de deux cuillers de bois. Sanglez la sorbetière, et mettez la crème anglaise dedans. Remuez constamment avec la spatule et, lorsque le liquide commence à epaissir, melangez un demi-litre de crème fouettee. Evitez de laisser trop prendre la glace. On la dresse en rocher sur un plat garni d’une serviette.

Pailles au fromage. – Gheese StraT^v^s.

Cet entremets est très estime des Anglais :

Preparer une demi-livre de pâte à feuilletage à laquelle on donne une dizaine de tours; mais entre chaque tour, on sème, sur la surface de la pâte, du fromage râpe de parmesan et de gruyère, ainsi qu’une pincee de poivre de cayenne. Lorsque la pâte a dix tours, l’abaisser d’une epaisseur de trois millimètres à peu près, et la diviser avec un grand couteau, en baguettes fines de 12 centimètres de long, qu’on place au fur et à mesure sur un plafond beurre. Les cuire à feu vif. En les sortant du four, les detacher et les dresser sur une serviette chaude.

Gondes au fromage.

Faire une pâle au fromage composee de 4 jaunes d’oeufs delayes avec un peu de crème, du sel, du cayenne et assez de fromage râpe pour en faire une pâte compacte, qu’on etend sur des abaisses de feuilletage, et qu’on detaille ensuite en bâtonnets de la forme et de la grandeur d’un conde d’amandes. Cuire à four chaud.

300 LA CUISINE ANGLAISE

Croquets au parmesan.

Ingredients : une livre de farine, une livre de beurre, une livre de parmesan r&pe;, sel, cayenne et deux ou trois cuillerees de crème double. Melanger le tout, et en faire une pâte que Ton abaisse, et que Ton divise avec un coupe-p&te; cannele de 4 ou 5 centimètres de diamètre. Cuire à four modere. Avant d’envoyer sur table, saupoudrer les croquets de parmesan râpe.

Beignets au parmesan. – Parmesan fritters.

Preparer une crème frangipane avec 4 œufs entiers, 123 grammes de farine, un peu de sel, du poivre de cayenne, de la muscade râpee, 60 grammes de beurre, un demi-litre de lait.

Faire cuire et reduire en remuant constamment la frangipane, à laquelle on ajoute, lorsqu’elle est reduite à point, une poignee de parmesan râpe et une de gruyère. Beurrer un plafond, et y verser la crème qu’on egalise avec la lame d’un couteau et qu’on met refroidir. Lorsque la frangipane est tout à fait froide, on la coupe avec un coupe-pâte rond de quatre centimètres de diamètre. Avec un plus petit coupe-pâte on enlève le centre du beignet, qu’on roule legèrement dans la farine, puis qu’on trempe dans l’œuf battu, et finalement dans la mie de pain. Frire à grande friture, puis egoutter et saupoudrer legèrement de fromage râpe avant d’envoyer sur table. On dresse les beignets en couronne sur une serviette.

LA CUISINE ANGIjVlSE 301

Darioles au froQiage.

Foncer avec de la pâte à 3/4 une douzaine de moules à darioles. D’autre part, casser dans une bassine deux œufs entiers et quatre jaunes, que l’on delaye avec un demi-litre de crème. Assaisonner de sel, cayenne et muscade, et ajouter une poignee de parmesan râpe et une demi-poignee de gruyère. Bien melanger le tout avec un fouet, et remplir les moules avec cet appareil. Saupoudrer la surface de fromage râpe et cuire à four vif.

II ne faut emplir les darioles qu’au moment de les mettre au four. Si on les emplissait trop tôt, le fromage tomberait au fond du moule.

Dartois au ft^omage.

Faire une frangipane au fromage telle qu’elle est decrite à l’article des beignets au parmesan; mais, on doit la faire un peu plus delicate,’ et la reduire un peu moins.

Lorsque la crème pâtissière est tout à fait froide, on l’etend sur une abaisse de pâte, puis onlarecouvre de feuilletage à huittours. On procède ensuite comme pour les gâteaux Dartois ordinaires; mais au lieu de les dorer à l’œuf, on les humecte de crème avec un pinceau, on sème à la surface du fromage de parmesan râpe, melange à du gruyère, et l’on saupoudre de poivre de cayenne.

302 LA CUISINE ANGLAISE

Souffle au fromage.

Mettre dans une casserole 200 grammes de farine tamisee que l’on dissout avec un demi-litre de lait. Ajouter sel, poivre, muscade râpee et 60 grammes de beurre. Tourner sur le feu jusqu’à ce que l’appareil prenne de la consistance, et continuer à laisser cuire pendant quelques minutes. Retirer alors du feu, et ajouter 30 grammes de parmesan râpe et autant de gruyère. Mêler à l’appareil six jaunes d’œufs, dont on fouette les blancs en neige, et qu’on ajoute en dernier lieu. Pour cuire le souffle, on le met, soit dans un plat à tarte anglais, soit dans une caisse en argent fabriquee exprès pour cet usage. A defaut de ces recipients on peut cuire le souffle dans une caisse en papier.

Petites fondues au parmesan.

Casser dans une casserole de moyenne grandeur six jaunes d’œufs auxquels on ajoute 150 grammes de beurre frais, du sel, du poivre de cayenne, et une pincee de muscade. Mettre la casserole au bain-marie et remuer avec une spatule jusqu’à ce que l’appareil epaississe; la retirer du feu, et lui incorporer graduellement 300 grammes de fromage râpe, moitie gruyère et moitie parmesan. Chaufi’er legèrement, et, lorsque le fromage est bien melange, ajouter deux blancs d’œufs fouettes. Un quart d’heure avant de servir, fouetter encore quatre blancs d’œufs qu’on incorpore à l’appareil, avec lequel on emplit deux douzaines de petites caisses, soit en papier^ soit en porcelaine à feu. On les cuit à four doux, et on les dresse sur un plat chaud garni d’une serviette.

LA CUISINE ANGLAISE 303

Kisch à la lorraine.

Cassez quatre œufs dans une terrine. Assaisonnez de se), poivre de cayenne et muscade. Ajoutez deux verres de crème, une poignee de parmesan râpe, et la même quantite de gruyère. Emplissez avec cet appareil une croûte de flan qu’on a fait prealablement cuire, ou bien des petites caisses en porcelaine à feu. Mettez le flan et son contenu à four modere. Quant aux petites caisses en porcelaine on les poche au bain-marie sans bouillir pendant 20 minutes. Semez dessus du parmesan r&pe; et colorez à la salamandre.

Diablotins.

Preparer de la pâte à choux à laquelle on mêle une poignee de parmesan râpe. Prendre une poche à biscuits, munie d’une forte douille deforme ovale, et l’emplir avec la pâte. Faire chauffer du saindoux dans une poêle, en assez grande quantite pour que les diablotins puissent frire à Taise. Lorsque le saindoux est suffisamment chaud, presser sur la partie superieure de la poche, et au moyen d’un petit couteau dont on trempe la lame de temps en temps dans le saindoux, trancher vivement la pâte au fur et à mesure qu’elle sort de la douille. On obtient ainsi des petits beignets souffles de forme uniforme qu’on remue constamment avec une ecumoire jusqu’à cuisson complète. A mesure que les diablotins prennent couleur, on les egoutte sur un tamis de fer; et lorsqu’ils sont tous cuits, on les saupoudre de parmesan râpe et d’un soupçon de poivre de cayenne. Servir très chaud.

304 LA CUISINE ANGLAISE

Rissoles au fromage.

Preparer de la crème pâtissière au fromage. (Voir beignets au parmesan.) Lorsqu’elle est cuite, la laisser refroidir en la remuant de temps en temps, afin de la conserver lisse.

Abaisser de la pâte à feuilletage usee très mince, et sur celle-ci, deposer de place en place en les separant par un espace de deux centimètres, de petites boules de frangipane de la grosseur d’une noisette. Mouillez le tour de la rissole qu’on recouvre d’une abaisse de pâte. On soude les deux abaisses en appuyant avec le pouce. Tremper alors chaque rissole dans de l’œuf battu, et ensuite dans la mie de pain fraîche. Faire frire à pleine friture les rissoles, en les remuant constamment avec une ecumoire, et lorsqu’elles ont atteint une jolie couleur doree, on les egoutte. Avant de les servir, on les saupoudre de parmesan râpe. Dresser sur une serviette et garnir de persil frit.

Crème de Devonshire. – Devonshire eream.

On vend à Londres, dans les cremeries, des petits pots d’une forme particulière, qui contienneijt une excellente crème dont le comte du Devonshire a la specialite.

La « Devonshire cream » se prepare ainsi :

On emplit, jusqu’aux bords, une bassine en etain ou en terre très evasee, avec du lait non ecreme qu’on laisse reposer dans un endroit frais pendant douze heures en ete, et vingt-quatre heures en hiver. Au bout de ce temps, on place le vase sur un trepied eleve pose au-dessus d’un feu de bois, pour le laisser ainsi sans le remuer, jusqu’à ce qu’une epaisse couche de crème

LA CUISINE ANGLAISE 305

se forme à la surface. Il faut surtout avoir soin de surveiller le lait et ne pas le laisser bouillir. LorsquUl commence à a fremir »^ on retire la terrine avec precaution du feu, on la depose dans la laiterie, et lorsque le liquide est entièrement refroidi, on enlève la crème avec une ecumoire. Elle est alors prête à livrer au commerce.

Cette crème est excellente pour faire les mirlitons dits de Rouen.

Pulled bread.

Le pull bread est un genre de pain que Ton sert en même temps que le fromage à la fin du dîner, et qui se prepare ainsi :

On prend un pain qui sort du four et dont on enlève toute la croûte. Pendant qu’il est chaud, on dechiquete la mie en morceaux. du volume d’une grosse noix. Ces morceaux de mie de pain sont alors mis à secher à four chaud pendant un quart d’heure. Ils prennent en sechant un aspect rugueux et une couleur doree, et deviennent très croustillants. Ce pain est excellent mange avec du fromage.

Sand^^iches au fromage. – Gheese sandT^v^iches.

Prendre un morceau de n’importe quel fromage sec, et le râper. Le mettre dans un mortier avec son même volume de beurre, un peu de moutarde aux fines herbes et une pincee de poivre de Cayenne. Lorsque le fromage est bien melange avec le beurre, on etend une couche epaisse de cette puree sur une tranche de pain qu’on recouvre d’une autre tranche comme pour une sandwich ordinaire. Ces sandwiches sont excellentes pour

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306 LA CUISINE ANGLAISE

goûter, avec accompagnement d’un verre d’ale ou destout; mais elles sont bien meilleures encore, si on remplace le pain ordinaire par une epaisse rôtie qu’on fend par le milieu, et qu’on garnit ensuite avec la puree de fromage.

Tartelettes à la Milanaise.

Faire cuire à Teau salee un quart de petit macaroni (spaghetti). Lorsqu’il est cuit à point, Tegoutter, le rafraîchir, puis retendre sur une serviette pour absorber toute Thumidite, et le couper en morceaux egaux de la longueur d’un centimètre. D’autre part foncer des petits moules à tartelettes avec de la pâte fine. Emplir le vide avec des lentilles, et faire cuire à four chaud. Lorsqu’on retire les tartelettes du four, on en vide les lentilles, que Ton remplace par le macaroni, qu’on a prepare d’avance, en le melangeant avec un peu de sauce blauche, du sel, du poivre de Cayennc, un peu de muscade râpee, et du fromage de gruyère et de parmesan eu egale quantite. On saupoudre la surface de parmesan râpe, et on met quelques minutes au four. Avant de les envoyer sur table, on les colore au moyen de la salamandre chaulfee à blanc.

Petites croustades de Finnan haddock.

Ce mets se sert en même temps que le fromage. On appelle Finnan haddock la merluche fumee. Foncez de petites croustades avec de la pâte fine et faites-les cuire à four chaud, en les emplissant de riz ou de lentilles. Lorsqu’on les demoule, les vider et les brosser interieurement avec un pinceau.

Coupez en petits des la chair du poisson que vous faites

LA CUISINE ANGLAISE 307

chauffer dans une sauce au curry, et lorsque Ja preparation est bouillante, garnissez-en les petites croustades, sur la surface desquelles on sème un peu de chapelure et de poivre de Cayenne. Dresser sur un plat garni d’une serviette.

^JVelsh Rabbit.

Le veritable nom do ce mets est Welsk rare bit et signifie : morceau de choix Gallois; mais on le denomme plus communement Wehh rabbit qui veut dire « lapin Gallois ». C’est la manière de servir le fromage la plus connue et la plus en faveur en Angleterre. Le welsh rare bit se mange dans toutes les classes de la societe : au club, au mess, au restaurant, à la taverne. 11 existe à Londres certaines maisons qui en ont la specialite, et où Ton va le soir après le theâtre se faire servir un welsh rare bit, comme à Paris on va mander la soupe à Toignon et au fromage, qui se debite dans les brasseries de nuit. On prepare d’abord des grillades epaisses de pain de mie, qu’on tient au chaud pendant qu’on prepare le fromage.

Couper en morceaux carres une demi-livre de fromage.de Gloucester qu’on met dans une casserole de moyenne grandeur avec un verre à vin de crème ou d’ale, et un peu de moutarde anglaise. Tournez sur le feu legèrement jusqu’à ce que le fro

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mage se liqaefie. A ce moment on le verse immediatement sur les toasts qu’on a enduits de beurre. Égaliser vivement le fromage avec la lame d’un couteau, puis couper le pain en quatre ou six morceaux, et le servir sans plus attendre, après l’avoir saupoudre do cayenne. Le v »lsh rare bit n’est bon qu’à la condition d’être mange très chaud. Dans certaines maisons, on sert le fromage fondu de la sorte dans un plat d’argent à double fond, dans la partie inferieure duquel on met de l’eau bouillante. Au moment de l’envoyer sur table, on achève de le faire fondre à la surface avec la salamandre. On sert à part du pain grille et de l’a/e chaude. On donne à ce mets le nom de « toastedcheesew.Uue manière plus simple, pour faire un welsh rabbil, consiste à etendre sur des rôties bien beurrees une couche epaisse de fromage de Gloucester râpe et mettre quelques minutes au four. On emploie ensuite la salamandre pour achever de faire fondre le fromage, on. sème sur la surface du poivre de cayenne, et l’on etale un peu de moutarde sur le tout.

Becasse ecossaise. – Scotch 70odcock.

Il est à remarquer qu’on ne trouve pas de becasses en Ecosse, quoiqu’elles soient assez communes en Angleterre et surtout en Irlande. C’est probablement à cause de cetle particularite, que par derision, on a donne le nom de becasse ecossaise à ce mets qui n’a aucun rapport avec ce delicieux gibier.

Couper des tranches de pain, que Ton fait griller des deux côtes, devant un feu bien clair. Faire un peu de sauce au beurre bien epaisse, à laquelle on melange une cuilleree à bouche de câpres hachees, et une cuilleree à cafe d’essence d’anchois (essence of anchovy). Étendre cette preparation sur les tranèhes de pain grille, que l’on masque entièrement d’une couche de fromage de parmesan râpe. Colorer à la salamandre et detailler le pain en forme de rectangle de la largeur de deux centimètres sur six de longueur. Servir très chaud..

LÀ CUISINE ANGLAISE 309

Beignets souffles au fromage.

Faire de la pâte à choux dans laquelle on ne mel ni sucre ni aromates, qu’on remplace par du fromage de gruyère et de parmesan en quantites egales, avec de la muscade râpee. Beurrer bien deux ou trois feuilles de papier ecolier sur lesquelles on couche, au moyen d’une poche à biscuit, des petits choux de la grosseur d’un marron. Un quart d’heure avant de servir, on laisse glisser les petits choux dans une poêle contenant du saindoux bouillant; et on les fait frire en les remuant constamment avec une ecumoire, jusqu’à complète cuisson. On egoulte alors les beignets sur une grille ou un tamis de fer, on les saupoudre de parmesan râpe et on les dresse sur un plat garni d’une serviette .

Les sand^wiches

L’orthographe du mot sandwich. – Uq gourmet anglais. – Le marquis de Bechamel et lord Sandwich. – Villeroy, Soubiso et Monglas. – Les bals et les sandwichs. – L’homme sandwich. – La boite à sandwich. – Le pain demie. – Sandwiches de carême.

Les grammairiens ne sont pas d’accord sur le genre qu’on doit attribuer au mot sandwich d’origine anglaise, et que l’on a depuis longtemps francise. En attendant que l’Academie ait statue sur celte grave question, on le met indifferemment au masr culin ou au feminin; de même qu*au pluriel on ecrit sandwichs et sandwiches, sans qu’aucune règle ne puisse vous obliger de l’ecrire d’une façon plutôt que d’une autr«*.

G. A. Sala qui s’est acquis en Angleterre une certaine no

310 LA CUISINE ANGLAISE

toriete comme ecrivain humoristique, joint à son talent de journaliste, des connaissances culinaires remarquables, et possède un goût passionne pour tout ce qui a rapport à la cuisine, – je ne sais s’il en est aussi gourmand qu’il veut bien le dire, mais d’après ses ecrits, je puis certifier que c’est un gourmet consomme, – comme Dumas, Monselet et Fulbert Dumonteil, il semble avoir une predilection pour la litterature gastronomique; et chaque semaine, on peut lire dans son interessante revue Sala’s journal, toute une page, signee de sa main, et consacree à Tart qu’a illustre Carême, qu’a chante Berchoux et qu’a glorifie Brillat-Savarin.

Quoique la noblesse anglaise sache apprecier la bonne cuisine, les veritables gastronomes sont rares de l’autre côte du detroit; et si les richissimes lords tiennent à honneur d’avoir à leur service les meilleurs cuisiniers français, c’est autant par genre que par goût; aussi, lorsque Ton rencontre un connaisseur aussi erudit en science culinaire que G. -A. Sala, on ne saurait trop l’admirer et le feliciter de ce qu’il veut bien s’occuper, avec tant de sollicitude, de l’art que nous professons et qu’il sait si bien apprecier.

G. A. Sala nous apprend donc que l’origine des sandwichs remonte au siècle dernier, et que c’est à lord Sandwich que nous sommes redevables de ce mets si simple à preparer, si facile à deguster et si utile à employer.

La celebrite, but de l’ambition de tant d’hommes de genie meconnus, lient vraiment à bien peu de chose; ainsi, pour ne mentionner que deux exemples qui forment un curieux parallèle, je citf^rai le marquis de Bechamel et lord Sandwich. Le premier conçut la gourmande idee de faire ajouter par son chef un peu de crème à une sauce blanche; et le second, de son côte, peutêtre pour utiliser les restes d’une langue ou d’un jambon, ordonna à sou maître d’hôtel de lui placer une mince tranche de viande entre deux mignonnes tartines de pain beurre, et voilà deux hommes qui seraient restes à jamais ignores, si les gourmands reconnaissants ne leur avaient decerne un brevet de posterite !…

LA CUISINE ANGLAISE

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Combien on est-il encore qui doivent leur renommee, bien plus à la cuisine qu’à leur genie; et Villeroy, Monglas, Duxelles, Soubise et bien d’autres, seraient certes tout à fait inconnus aujourd*hui, si leurs noms ne se trouvaient accoles à quelque preparation culinaire.

Mais revenons à notre sujet : les sandwichs^ et disons qu’il s’en fait en Angleterre une enorme consommation.

Los sandwichs se confectionnent d’une infinite de manières et se preparent selon les goûts du consommateur, et selon les circonstances qui motivent leur emploi. Ils s’assimilent à tous les temperaments, à condition toutefois que la nature de la substance dont ils sont garnis, et leur assaisonnement, conviennent aux estomacs auxquels ils sont destines. Pour les enfants et les personnes delicates, on emploiera du poulet emince ou de la puree de volaille ou de gibier. Pour les appetits robustes, on substituera au poulet ou à la puree, du bœuf, de la langue ou du jambon. Pour ceux-là on moderera le sel et on supprimera les condiments; pour ceux-ci, on ne _: menagera ni la moutarde ni l’assaisonnement. ^

Les sandwichs ont surtout du succès dans les bals et les soirees. Celte faveur dont ils jouissent tient à la faculte qu’on a de les manger sans retirer ses gants, sans avoir recours ù l’assiette et à la fourchette, sans s’asseoir, en causant, voire même en flirtant.

Le mot sandwich est aujourd’hui francise et s’applique à toute chose enfermee entre deux objets à surface aplanie. C’est

^St^

312 LA CUISINE ANGLAISE

ainsi que par une ironie du sort, les loustics parisiens ont baptise du nooi à’homtne sandwich, le malheureux meurt-de-faim, à la solde des agents de publicite, qui se promène melancoliquement dans les rues de Paris et dont la tète et les jambes emergent d’entre deux planches, sur lesquelles s’etalent des reclames plus ou moins mirifiques, et dont le sujet attrayant forme un contraste marquant avec Taspect miserable et l’habillement depenaille de ce martyr du pave.

En Angleterre, il est d’usage et de bon ton de posseder une boite à sandwichs, et tout Anglais, qui se respecte, ne se met jamais en voyage sans avoir dans son sac une sandwich box bien garnie. Ces bottes varient par leur forme et leur nature. Elles sont ovales, oblongues ou carrees. On en voit en nickel, en argent et même en or. Les unes, destinees à mettre dans la poche, ressemblent à des porte-cigares, tandis qu’il en est d’autres presque aussi grandes que des chaufferettes; ce sont des sandwich box de famille.

On emploie pour faire les sandwichs un certain pain prepare tout exprès et cuit dans un moule de forme carree. On le nomme pain de mie (en anglais, tin loaf). On enlève la croûte superieure et l’on etend sur le pain une legère couche de beurre frais melange avec un peu de moutarde. On prepare ainsi deux tartines de même epaisseur. Sur Tune d’elles on place la viande coupee en minces escalopes qu’on assaisonne de sel et qu’on recouvre ensuite avec l’autre tranche de pain beurre. On fait alors adherer la viande au pain en appuyant sur le sandwich avec le fond d’une assiette, puis on les coupe de la forme et de la grandeur qu’on desire.

Sand^^ichs au pain grille

Faire griller une tranche de pain de mie d’un centimètre d’epaisseur, et la fendre en deux dans toute sa grandeur pen

LA CUISINE ANGLAISE 313

dant qu’elle est encore chaude. Laisser refroidir et garnir Tinterieur d’uae viande cuite quelconque, qu on assaisonne et sur laquelle on sème du cresson alenois.

SandTvichs maigni:*e8 ou de carême

Preparer une tranche de pain grille, ainsi que dans la precedente recette et remplacer la viande par des tranches d’œufs durs qu’on assaisonne de sel et de poivre et qu’on parsème de cresson alenois.

SandTvichs à la puree de homard

Ces sandwichs se garnissent avec une puree faite avec les dechets d’un homard ou d’une langouste, qu’on a pare pour une salade ou une mayonnaise. Ces dechets, après avoir ete assaisonnes d’un peu de sel et d’une pincee de poivre de Cayenne, sont mis dans un mortier et piles avec un morceau de beurre, deux anchois et Tinterieur du coffre du crustace, y compris le corail qui est necessaire pour colorer la puree, qu’on passe ensuite au tamis à quenelle et qui sert à garnir les sandwichs.

La garniture des sandwichs peut se varier à TinGni ainsi que je l’ai dit plus haut. Je ne m’etendrai donc pas plus longtemps sur ce chapitre, laissant à l’imagination du praticien le soin d’en combiner la nature, selon les moyens dontil peut disposer.

Sandwich du Book Maker. – Book-maker Sandwich.

Ce genre de sandwich, patronne par les gens qui frequentent les courses, sont des plus substantielles et, d’après l’enonce de

314

LA CUISINE ANGLAISE

la recette qui suit, ou comprend qu’elle peut à l’occasion tenir lieu d’un repas.

On prend un pain de mie anglais carre, dont on detache les deux côtes extrêmes qui forment la croûte, et à laquelle on laisse adherer un centimètre de mie, qu’on revêt d’une legère couche de beurre.

D’autre part, on fait griller un beefstcak epais, bien assaisonne de sel et de poivre. Lorsqu’il est cuit, on le retire du gril pour le laisser refroidir. Lorsqu’il est tout à fait froid, on sème dessus du raifort râpe et on le sature de moutarde; puis on le place entre les deux croûtes de pain qu’on ficelle comme on le fait d’une galantine, et qu’on enveloppe dans plusieurs feuilles de papier buvard. On place ensuite le paquet ficele sous une presse à copier dont on- serre les vis graduellement et on laisse ainsi le sandwich pendant une demi-heure. Au bout de ce temps, on le retire. La partie interieure des tranches de pain se trouveront par le fait de la pression, saturees du jus de la viande, que la partie croutonneuse du pain empêche de s’echapper.

On retire le papier buvard, et on emballe le sandwich dans une boîte ou dans une ou plusieurs feuilles de papier ecolier.

^’f^s^-sr V

CHAPITRE XIII

SAUCES ANGLAISES, AROMATES ET CONDIMENTS

Sommaire

Aromates et Condiments (Condiments).

Bœuf de Hombourg (Hombourg beer).

Brown gravy (Brourn gravi/).

Caviar et Vesiga {Caviar and Vesiga),

Cannelle {Cinnamon).

Chutney.

Choux rouges (Pickled cabbages).

Curry.

Cornichons conûts {Cerkins).

Essence d’herbes pour tortue (Essence of herbs for turtle)

Epices composees {AU spices).

Farce commune (Veal stuffing).

Harengs au whisky (Herring trith irhiskij).

Ladie’s delight.

Moutarde anglaise (English mustard),

Mushroom ketchup.

Oignons frits (Fried onions).

Oignons braises (Braized onions).

Pain frit {Fried bread).

Pâte d’anchois (Anchoirg paste).

Petits oignons confits [Pickled onions).

Piccalilly (Piccalilli).

Sauces anglaises (Engfish .sauces).

Sauce anchois (Anchovy sauce).

Sauce arrowroot (At^owroot sauce).

– à la diable {Deviiied sauce).

– aux aromates (Aromate .muce).

– au beurre.

– Cambridge (Cambridge sauce).

– câp res ( Caper sa uc e) .

– celeri (Celery sauce).

– i la crème (Cream sauce).

– crevettes {Shrimp sauce).

– chevreuil (Roe buck saucp^

– Curry [Curry sauce,.

– Cumberland (Cumberland sauce).

316 LA CUISLNE ANGLAISE

Sauce à Ja crème {Cream sauce),

– homard (Loàster sauce).

– aux huitrcs (blanche; White oyxter taure).

– aux huilres (bmae) Brourn oyster sauce).

– fenouil (Fennel sauce).

– groseille verte {Goosberry sauce).

– moutarde {Mustard sauce). I – menthe {Mint sauce).

– moules {Muscle sauce).

– aux œufi {Egg sauce).

– aux œufs à l’ecossaise (Scotch egg sauce).

– au pain frit (Fn’ed bread sauce).

– aux oignons Onion sauce).

– au pain {Bread sauce).

– au pauvre homme {Poor mans sauce).

– au persil (Parsiey sauce].

– aux pommes {Apple sauce).

– au porto {Port wine sauce).

– princesse (Princess sauce..

– aux queues d’ecrevisses {Crayfish sauce).

– raifort (chaude) (Morse radish sauce hot).

– raifort (froide) {Cold horse radish sauce).

– reforme [Reform sauce).

– à la sauge {Sage sauce).

– tortue {Turtle sauce).

– V i ctor j a ( Victoria sa uce) .

– Wastrefisb ( Wastrefish sauce).

– Yorksh i ro ( Yorkshire sauce) . Saumure (Pickling brine). Veronique (laver).

CHAPITRE XIII

SAUGES ANGLAISES, AROMATES ET CONDIMENTS

Chaque fois qu’il est question de sauces anglaises, on ne manque pas de reediter la remarque du prince de Talleyrand qui, de retour à Paris après un voyage en Angleterre, disait que les Anglais avaient 100 religions, mais ne connaissaient qu’une seule sauce, la sauce au beurre (meited butter). Cette assertion, vraie il y a quelques annees, n’a plus sa raison d’être aujourd’hui, grâce aux ecoles de cuisine etablies dans les principaux quartiers de Londres et dans les villes importantes du RoyaumeUni.

Les principes fondamentaux de la cuisine française se sont intronises rapidement chez le peuple anglais depuis quelques annees, et nos sauces, inconnues jadis, ont acquis maintenant droit de cite chez nos voisins.

Il existe cependant des sauces speciales et essentiellement nationales. Ces sauces jouent un grand rôle dans l’alimentation anglaise, et le nombre en est varie à Tinfini : si bien qu’on pourrait aujourd’hui retourner la phrase du critique, et dire que les Anglais ont beaucoup plus de sauces que de religions.

318 LA CUISINE ANGLAISE

Sur les tables anglaises et surtout dans les hôtels et restaurants, on trouve invariablement un ustensile à compartiments qu’on appelle Cruet stands et qu’en France on nomme Menagère. C’est une espèce d’huilier supportant une demi-douzaine de flacons de cristal, contenant chacun un condiment different, dont chaque convive use à sa fantaisie, en ajoutant la quantite qu*ii lui platt, aux sauces et aux mets qui lui sont servis. C’est d’abord l’huile, puis le vinaigre, la sauce Harvey, la sauce anchois (Essence of Anchovies), le poivre de Cayenne (Cayenne pepper) et le ketchup ou essence de champignons.

Sur le dressoir sont ranges quelques bocaux qui contiennent des choux rouges au vinaigre, des cornichons, des pickles, des noix confites (pickled walnuts) et du c chutney ».

Ketchup ou Catchup.

Cette sauce qu’il ne faut pas confondre avec le Soya auquel elle ressemble par la couleur, se prepare en faisant macerer dans le sel des champignons laves et eminces. On les dispose par lits d’un centimètre d’epaisseur dans une terrine neuve, ou ne servant qu’à cette preparation. Chaque lit est saupoudre legèrement de sel fin, puis on laisse reposer pendant cinq ou six jours. Après ce temps, on presse les champignons de façon à en obtenir tout le jus, qu’on fait bouillir en l’assaisonnant de poivre de Cayenne, thym, laurier et marjolaine. Laisser refroidir, filtrer et mettre en bouteilles.

Chutney.

Le Chutney, comme le Curry, est d’origine indienne. On le mange ainsi que les pickles avec la viande froide. C’est une espèce de puree faite avec des raisins de Malaga dont on a retire

LA CUISINE ANGLAISE 319

les pepins et qu’on a piles dans un mortier avec de Tail; des echalotes, des pommes, de la moutarde, des piments, de la cassonnade et du vinaigre. Ce melange disparate n’est pas du goût do tout le monde, et les vrais gourmets n’usent guère de ce condiment energique, qui denature complètement la saveur du mets servi.

Aromates et condiments.

Les Anglais ont la fâcheuse habitude d’abuser des herbes aromatiques et des condiments; aussi, ne saurais-je trop recommander à mes collègues français appeles à pratiquer en Angleterre, d’eviter de les imiter. Il faut en employer, puisque c’est dans les goûts du pays; mais il faut en user moderement; car, on le sait, Texcès en tout est un defaut, et j’ai souvent vu des mets, prepares par des chefs anglais d’après les meilleurs principes culinaires, totalement denatures par la quantite d’aromates et d’epices dont ils etaient assaisonnes.

Épiees melangees pour assaisonnement. – AU spices for seasoning.

Melanger SO grammes de clous de girofle, SO grammes de muscade râpee, 25 grammes de gingembre, 25 de poivre en grains, 13 de macis, 13 de feuilles do laurier, 5 de basilic, 15 de marjolaine. Toutes ces epices, après avoir ete bien sechees à l’etuve, sont pilees au mortier et passees au tamis Je crin très fin, puis etendues et enfermees entre deux feuilles de papier blanc dont on replie les bords pour eviter l’evaporation. On les remet de nouveau à Tetuve pendant une heure, et

320 LA CUISINE ANGLAISE

lorsque les epices sont bien sèches, on les met dans des flacons pour s’en servir au besoin.

Essence d’herbes pour potage tortue. – Essence of herbs for turtle soup.

Les herbes aromatiques dont on se sert pour l’assaisonnement du potage tortue sont le basilic, la marjolaine, le thym, le laurier, la sarriette, la racine de persil et les oignons verts. On fait de ces herbes une puree ou une infusion. S’il s’agît d’aromatiser un potage clair, on fera infuser ces herbes pendant une demi-heure dans du consomme; mais si l’essence est destinee à un potage lie ou à une sauce tortue, on mouillera les herbes avec de la sauce, et on les laissera cuire pendant une heure; puis on les reduira en puree en les passant à l’etamine au moyen de deux cuillers de bois.

Sauce aux aromates. – Aromatic sauce.

Mettre dans une casserole une branche de thym, une de basilic, une de sarriette, autant de marjolaine, de sauge et de de ciboulette, deux echalotes, un peu de muscade râpee et quelques grains de gros poivre. Mouiller ces aromates avec du bon consomme et faire bouillir vivement pendant dix minutes. Passer à travers une fine passoire et remettre dans la casserole. Lier le jus de la cuisson avec un peu de roux. Laisser reduire jusqu’à ce que la sauce soit de la consistance d’une bechamel, et, finalement, y ajouter une liaison de trois jaunes d’œufs delayes avec un peu de crème. En dernier lieu, finir avec un morceau de beurre frais, un jus de citron, et un peu de cerfeuil et d’estragon hache et blanchi.

LA CUISINE ANGLAISE 3^21

Sauce princesse. – Prlncess sauce.

Râper dans une petite casserole Tecorce d’un citron et la même quantite de raifort. Ajouter un peu de muscade egalement râpee et deux cuillerees de vinaigre blanc. Laisser reduire quelques minutes et ajoutez un peu de sauce blanche. Donner un bouillon et passer à la mousseline, dans un bain-marie. Au moment d’employer la sauce, amalgamer un bon morceau de beurre frais et du persil hache et blanchi. – Cette sauce se sert avec le frilôt de poulet ou avec le poulet Villeroy. – On la sert aussi avec les filets de soles ou de merlans dits à la «princesse d; dans ce cas, il faut ajoutera la sauce un peu d’essence d’anchois {essence of anchovy).

Sauce raifort chaude. – Albert sauce.

Râper dans une casserole trois racines de vailori{horse radish) qu’on fait bouillir pendant une demi-heure avec du consomme blanc. Ajouter de la sauce blanche ainsi qu’un quart de litre de crème epaisse, et un peu de mie de pain fraîche. Reduire en la tournant sur le feu et la passer à Tetamine comme une puree avec deux cuillers de bois. Au moment de servir, faire chauffer la sauce et y incorporer une liaison de deux jaunes d’œufs, du sel, du poivre, et un peu de moutarde anglaise prealablement delayee avec du vinaigre. – Cette sauce se sert generalement avec le filet de bœuf braise.

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32-2 LA CUISINE ANGLAISE

Sauce raifort froide. – Cold horse radish sauce.

Râper dans une petite terrine vernie deux ou trois racines de raifort, y ajouter son même volume de mie de pain fraîche, une pincee de sucre, du sel, de la crème double, un peu de moutarde anglaise, et une cuilleree à cafe de vinaigre. Cette sauce doit être tenue assez consistante. Elle se sert avec le bœuf rôti.

Le raifort, simplement gratte, se sert aussi au lieu de sauce dans les repas ordinaires pour accompagner le roast-beef. Dans ce cas, on le place sur la viande ou dans un ravier.

Sauce au beurre. – Melted butter sauce.

Cette sauce est la sauce fondamentale de la cuisine bourgeoise anglaise. Autrefois, dans les hôtels et les restaurants, on preparait le matin une marmite pleine de sauce au beurre qu’on divisait dans deux bains-marie. Une moitie conservait sa couleur primitive et devait servir à confectionner toutes les sauces derivant de la sauce blanche. L’autre moitie etait coloree avec du caramel et servait de base à toutes les sauces brunes.

Recette : Faire fondre 123 grammes de beurre dans une casserolle, et lui incorporer la même quantite de farine tamisee, en la travaillant avec une cuiller de bois. On^btient ainsi un roux qu’on delaye avec la valeur de deux verres d’eau. Saler, et, en dernier lieu, incorporer un bon morceau de beurre et quelques gouttes de citron.

LA CUISINE ANGLAISE 323

Sauce crevettes. – Shrlmp sauce.

Preparer une sauce au beurre telle qu’elle vient d’être decrite, et, en dernier lieu, ajouter une pincee de poivre de Cayenne, une poignee de queues de crevettes epluchees et lavees et un peu d’essence d’anchois. Cette sauce se sert avec les poissons cuits à l’eau.

Sauce homard. – Lobster sauce.

Faire fondre dans une casserole 12o grammes de beurre, auquel on, incorpore 123 grammes de farine. Delayer avec du lait ou de la crème. Assaisonner de sel, de poivre de Cayenne, et de quelques gouttes d’essence d’anchois. D’autre part, briser la coquille d’un petit homard cuit et en enlever la chair, qu’on decoupe en morceaux d’un demi- centimètre carre, et qu’on melange à la sauce au moment de Tenvoyer sur table.

Cette sauce se sert communement avec le turbot et le saumon. Dans les grands dîners on envoie generalement deux saucières avec ces poissons. Dans l’une on met une hollandaise et dans l’autre une sauce homard.

Sauce aux huîtres blanche. – Oyster sauce TVhite.

En Angleterre on ne mange jamais de cabillaud s’il n’est accompagne d’une sauce aux huîtres. On en sert aussi avec la merluche, mais avec cette dernière elle n’est pas indispensable. On emploie generalement l’huître dite pied de cheval, qui est

324 Lk CUISINE ANGLAISE

abondante chez nos voisins, et qui a une saveur exquise.

Prendre deux douzaines d’huîtres, qu’on appelle huîtres à sauce (sauce oysters). Les mettre à blanchir dans leur propre liqueur, et lorsqu’elles ont donne un ou deux bouillons, les egoutter en reservant la liqueur. On les ebarbe ensuite, en ne conservant que les noix qu’on divise en deux ou trois morceaux, selon qu’elles sont plus ou moins grosses. Le tendon de l’huître doit être aussi elimine car il est coriace et n’a aucun goût.

Faire une sauce au beurre avec 60 grammes de beurre et autant de farine, qu’on delaye avec la cuisson des huîtres, et assez de crème pour former une sauce epaisse. Assaisonner de sel et de poivre de Cayenne, et d’un soupçon d’essence d’anchois. Faire bouillir quelques minutes, et, en dernier lieu, passer la sauce à la passoire fine, et ajouter les huîtres.

Sauce aux huîtres brune. – Bro^wn oyster sauce.

Cette sauce se prepare comme la precedente; seulement on remplace la crfeme par du bon jus, afin de lui donner une couleur brune. On la sert communement avec des beefsteaks, des pâtes et des puddings de viande, ainsi qu’avec des tranches de cabillaud grillees.

Sauce aux moules. – Mussel sauce.

Éplucher et laver à plusieurs eaux, quatre douzaines de moules, et les placer dans une casserole avec deux oignons eminces, quelques branches de persil, un verre de vin blanc, du sel et du poivre. Couvrir la casserole, et la placer sur un feu vif en sautant les moules de temps en temps. Lorsque celles-ci commencent à s’ouvrir, les egoutter en reservant leur cuisson. On procède alors à l’extraction des moules de leurs coquilles, et on les place dans un bain-marie.

On fait ensuite un roux leger qu’on delaye avec le jus des

LA CUISINE ANGLAISE 325

moules et de la crème, pour en faire une sauce epaisse à laquelle on adjoint une liaison de trois ou quatre jaunes d’œufs et, lorsqu’elle est bouillante, on y adjoint les moules, et en dernier lieu, une pincee de poivre de Cayenne et un peu de persil hache et blanchi. Cette sauce se sert generalement avec les merlans grilles, les dorades, et avec le cabillaud, lorsqu’on ne peut se procurer d’huîtres.

Sauce aux queues d’ecrevisses. – Grayflsh sauce.

Cette sauce se prepare comme la sauce homard; la seule difference consiste en ce que l’on emploie des queues d’ecrevisses au lieu de homard.

Sauce persil. – Parsley sauce.

Cette sauce est très employee dans la cuisine anglaise. Elle consiste simplement en une sauce au beurre, à laquelle on ajoute en dernier lieu du persil hache et blanchi, et un jus de citron. On s’en sert surtout pour la tète et les pieds de veau, le lapin et le poulet bouillis, le veau braise, le maquereau et le saumon.

Sauce aux câpres. – Capers sauce.

Se compose d’une sauce au beurre, dans laquelle on melange deux ou trois cuillerees de câpres. Lorsque cette sauce est destinee au poisson, on y ajoute un peu d’essence d’anchois; mais le plus souvent on la sert avec le lapin ou avec le mouton

326 LA CUISINE AiVGLAISE

bouilli. Dans ce cas, on ometTessence d’anchois, et, on se sert de la cuissonMu mouton pour faire la sauce au lieu d*eau. On assaisonne d’un peu de muscade râpee, et de poivre de mignonnette. L’addition d’un peu de crème est facultative.

Sauce fenouil. – Fennel sauce.

Sauce au beurre à laquelle on ajoute du fenouil hache et blanchi. Se sert generalement avec le maquereau bouilli.

Sauce groseilles à maquereaux. – Gooseberry sauce.

Mettre dans un poêlon un litre de groseilles à maquereaux epluchees, avec deux poignees de sucre en poudre et un peu d’eau. Faire cuire à grand feu, et faire du fruit une puree, qu’on passe au tamis de crin. On sert celte sauce rarement aujourd’hui, mais c’est une vieille sauce du repertoire de la cuisine anglaise. On la servait avec le maquereau bouilli et avec l’oie rôtie.

Sauce au pain frit. – Fried bread sauce.

Emincer dans une casserole de petite dimension 30 grammes de jambon et une echalote hachee, un peu de muscade râpee, une pincee de poivre, une de sel, et un verre de bon bouillon. Laisser bouillir jusqu’àreduction de moitie, etpasser par pression à travers une fine passoire dans une autre casserole, contenant cinq ou six cuillerees de mie de pain frite d’une couleur doree, du persil hache et le jus d’un demi-citron. Remuer

LA CUISINE ANGLAISE 327

cette sauce sur le feu jusqu’à ebuliition, et servir dans une saucière.

On sert cette sauce avec les petits oiseaux tels que mauviettes, grives, ortolans. Avec le faisan et la grouse, on envoie, outre labread sauce ordinaire de la mie depaînsecheeet brunie au four.

Jus colore, – Brcwn gravy.

Avec le veau rôti, il est d’usage d’envoyer une sauce assez primitive. On fait une sauce au beurre, à laquelle on mêle du jus de viande très colore recolte dans la lèchefrite. L’assaisonner de sel et de poivre, et y ajouter un peu de « ketchup » et de « Harvey sauce ». A defaut de jus, on colore la sauce avec du a Soy Indien ».

Sauce à la crème. – Cream sauce.

Lorsqu’on sert un carre de veau rôti, on raccompagne quelquefois d’une sauce blanche qui se fait ainsi : Faire un roux leger compose de 100 grammes de beurre et de 60 grammes de farine. Mouiller avec du consomme blanc, de la crème et de l’essence de champignons. Assaisonner de sel, poivre et muscade râpee. Garnir d’un bouquet de persil, d’un oignon, et laisser -bouillir la sauce pendant un quart d’heure. Au bout de ce temps, retirer l’oignon et le bouquet, et servir la sauce sur le veau.

328 LA CUISINE ANGLAISE

Sauce aux oignons (Onlon sauce).

La sauce aux oignons à Tanglaise est une soubise simplifiee. Moins raffinee, moins corsee que celle-ci, elle possède cependant des qualites fort appreciables.

Cette sauce se sert generalement avec le lapin bouilli, le poulet, le gibier braise, le mouton bouilli et les tripes. Émincez les oignons, et faites-les bouillir dans du lait jusqu’à complète cuisson. Le lait doit avoir ete prealablement assaisonne de sel, poivre et muscade râpee. Egouttez alors les oignons sur un tamis, et servez-vous de la cuisson, epaissie avec un peu de roux, pour en faire une sauce très epaisse, à laquelle on ajoute les oignons, qu’on hache sommairement sur la table, avant d’operer le melange. Les mets servis avec cette sauce doivent en être entièrement recouverts.

Oignons frits. – Frled onlons.

Emincer de gros oignons en rouelles minces, et les faire frire dans une poêle avec de la bonne graisse. Les remuer continuellement afin qu’ils cuisent regulièrement, et lorsqu’ils ont acquis une belle couleur doree, egoutter la graisse, que Ton remplace par un peu de bon jus de viande, additionne d’une cuilleree de Harvey ou de Worcestershire sauce.

Les oignons prepares de cette façon se servent avec les « rumpsteaks » grilles.

LA CUISINE ANGLAISE 329

Oignons braises. – Ste^w^ed onions.

Lorsque les oignons sont destines à être, servis avec un beafsteack braise, on les coupe en rouelles epaisses, et on les fait cuire en même temps que la viande. Lorsque le beafsteak est cuit et dresse sur son plat, on le recouvre entièrement avec les oignons, qu’on etale soigneusement pour ne pas les mettre en puree. La cuisson se fait alors reduire, et après y avoir ajoute un peu de ketchup et de ‘Harvey sauce, on la verse sur le rumpsteak.

Sauce au Curry. – Curry sauce.

Le curry est une poudre importee de l’Inde, où elle est d’un constant usage pour les preparations culinaires.

Mettre dans une casserole 60 grammes de beurre, une branche de thym, un morceau de macis, deux oignons eminces, quelques racines de persil, un peu de celeri et quelques parures de champignons. Faire frire ces legumes et, lorsque Toignon commence à jaunir, ajouter 30 grammes de farine et autant de poudre de curry. Lorsque la farine et le curry sont bien melanges au beurre, ajouter graduellement un demi-litre de consomme. Remuer jusqu’à TebuUition, et laisser mijoter pendant à peu près vingt minutes; passer à l’etamine comme s’il s’agissait d’une puree, et remettre à mijoter sur le coin du fourneau pour que la sauce ecume. Après l’avoir bien degraissee, on la met au bainmarie en attendant qu’on l’emploie. Lorsqu’il s’agit d’un poulet au curry, on se sert comme de juste de la cuisson du poulet pour faire la sauce. Ne jamais omettre d’envoyer du riz cuit à l’eau, avec les mets prepares au curry.

330 LA CUISINE ANGLAISE

Sauce aux œufs. – Egg sauce.

Faire cuire trois œufs pendant dix minutes. Les rafraîchir et les ecaler, puis les couper en morceaux aussi egaux que possible d’un demi-centimètre cube à peu près.

D’autre part, faire une sauce ainsi composee : Mettre dans une casserole 60 grammes de beurre et 30 grammes de farine, etlorsque la farine et le beurre ont forme un roux, delayer avec du lait, et assaisonner de sel, poivre et muscade râpee. Donner un bouillon, et melanger les œufs à la sauce qui doit être tenue’ un peu epaisse. Cette sauce se sert invariablement avec la morue, qu’elle soit fraîche ou salee.

Sauce aux œufs à l’Ecossaise.

Cette sauce se fait aussi d’une autre façon. Après avoir rafraîchi et ecale les œufs, on les ouvre en deux et on retire les jaunes. La partie blanche de l’œuf est alors coupee en petites bandes et mise dans la sauce. Quant aux jaunes, on les passe par pression à travers un tamis de laiton place au-dessus d’une assiette. Au moment de servir on enlève delicatement le jaune d’œuf qui a forme de vermicelle et on le melange legèrement à la sauce.

Sauce A?Vastreflsh. – A?Vastreflsh sauce.

Couper en julienne : la partie rouge d’une carotte, un peu d’ecorce d’orange dont on a retire le blanc, et de la racine de

LA CUISINE ANGLAISE 331

persiL Faire boaillir ces ingredients dans un peu de vin blanc, et lorsqu’ils sont cuits, les ajouter avec leur cuisson à une sauce hollandaise. Ajouter en outre quelques feuilles de persil epluchees et blanchies, et un peu d’essence de poisson. Cette sauce se sert avec le poisson d’eau douce, tel que la perche, la carpe, le gardon.

Sauce moutarde. – Mustard sauce.

Après avoir fait une sauce au beurre bien assaisonnee, on y delaye un peu de moutarde anglaise melangee de vinaigre. Il faut avoir soin de ne pas laisser bouillir la sauce après le melange de la moutarde, car elle prendrait un goût d’âcrete desagreable. Cette sauce ne se sert qu’avec les harengs grilles.

Sauce Cambridge. — Cambridge sauce.

{Sauce froide.)

Mettre dans un mortier six jaunes d’œufs durs, les filets de quatre anchois, une cuilleree à bouche de câpres, une branche d’estragon, autant de cerfeuil, un peu de ciboulette, une cuilleree à cafe de moutarde anglaise, la même quantite de moutarde française, du sel, du poivre de Cayenne, puis delayer le tout avec un peu d’huile d’olive et de vinaigre à l’estragon.

Lorsque tout est bien pile, retirer la puree du mortier avec un couteau à palette et la passer par pression à l’etamine au moyen de deux cuillers de bois. Lorsque la sauce est entièrement passee, on la melange bien dans une petite terrine qu’on tient au frais jusqu’au moment de l’envoyer sur table.

Avant de la servir, on y ajoute un peu de persil hache. On

332 LA CUISINE ANGLAISE

doit saler avec moderation à cause de la presence des anchois dans la sauce.

On sert cette sauce avec la viande froide et surtout avec la tête de cochon.

Sauce Cumberland.

Hacher bien menu 2 echalotes, que Ton place dans une casserole avec le zeste d’une orange et d’un citron coupe en julienne. Faire bouillir dans de Teau pendant 20 minutes et egoutter.

On place alors le zeste et les echalotes dans un bol avec 6 cuillerees de gelee de groseilles, 3 de porto, une pincee de gingembre, une de cayenne, le jus d’un citron et celui d’une orange. Cette sauce se sert froide, avec le sanglier ou le gibier froid.

Sauce Victoria. – Victoria Sauce.

Cette sauce se sert egalement avec la venaison : Mettre dans une casserole de moyenne grandeur, trois cuillerees de gelee de groseilles avec six clous de girofle, une vingtaine de grains de gros poivre, un morceau de cannelle, le zeste d’une orange, deux decilitres de sauce espagnole et un verre de porto.

Reduire sur un feu ardent pendant quelques minutes et passer à Tetamine. En dernier lieu, ajouter une pincee de poivre de Gayenne et le jus d’une orange.

LA CUISINE ANGLAISE 333

Sauce & la Diable. – Devil Sauce.

Hacher trois echâloles, el les mettre dans une petite casserole avec deux cuillerees de vinaigre et une bonne pincee de poivre de Cayenne.

Lorsque le vinaigre est reduit, ajouter deux decilitres de sauce espagnole, une cuilleree de sauce Harvey (Harvey sauce), une de Worcestershire sauce, et deux depuree de tomate. Assaisonner de sel et passer à Tetamine.

Cette sauce convient aux viandes grillees à la Diable.

Sauce Reforme. – Reform Sauce.

Celte sauce se sert seulement avec les côtelettes dites « à la Reforme ».

On emince en julienne des cornichorjs, des truffes, de la langue de bœuf salee, et du blanc d’œuf. (Pour plus de facilite à emincer le blanc d’œuf, on le fait pocher dans un petit moule à charlotte). Ces ingredients sont ensuite incorpores avec de la sauce poivrade, et on en masque les côtelettes lorsqu’elles son dressees.

Sauce tortue. – Turtle Sauce.

Mettre dans une casserole de moyenne grandeur, une cuilleree à bouche de puree de tomate, un verre de madère, une pincee de poivre de Cayenne, quelques parures de truffes et de cham

334 LA CUISINE ANGLAISE

pignons, et un peu de thym, de laurier, de basilique et de marjolaine.

Laisser reduire eu remuant avec une spatule pendant quelques minutes et ajouter de la sauce espagnole en quantite suffisante. Laisser mijoter sur le coin du feu jusqu’à ce que la sauce ait rejete sa graisse, qu’on ecume soigneusement lorsqu’elle se produit à la surface, puis en dernier lieu, passer la sauce à travers une forte mousseline ou une etamine. Garder la sauce au bain-marie, et au moment de s’en servir, ajouter un beurre d’anchois ou un peu de « anchovy sauce » et quelques gouttes de jus de citron.

Cette sauce s’emploie pour la tête de veau et pour les entrees de tortue telles que les nageoires, le « calipash i et le « calipee » (viande du dos et du ventre de la tortue).

Sauce au pauvre homme. – Poor man’s sauce.

Hacher très fin deux oignons qu’on passe au beurre jusqu’à ce qu’ils soient d’une couleur doree; verser alors dans la casserole une cuilleree de vinaigre et une pincee de poivre mignonnette. Laisser bouillir quelques minutes, et mouiller avec du consomme. Après une legère reduction, lier la sauce avec un peu de roux, assaisonner de sel et d’un peu de cayenne, puis au dernier moment, ajouter un peu de persil hache et blanchi, et une cuilleree à cafe de câpres egalement hachees.

Sauce au pain. – Bread sauce.

Faire bouillir un demi-litre de lait. Lorsqu’il est arrive au point d*ebullition, y jeter de la mie de pain fraîche en quantite suffisante pour former une sauce epaisse dans laquelle on ajoute

LA CUISINE ANGLAISE 335

du sel, du poivre, un oignon pique de deux clous de girofle, et 30 grammes de beurre frais. Laisser mijoter un quart d’heure et envoyer dans une saucière.

On ne doit jamais omettre d’envoyer cette sauce avec le poulet et le gibier à plume rôti, excepte cependant les oiseaux aquatiques.

Sauce au porto. – Port ^w^ine sauce.

Faire bouillir un decilitre de vin de Porto avec une echalote hachee, y ajouter le jusde deux oranges et d’un citron, ainsi que le zeste râpe d’une orange et une branche de thym. Assaisonner de sel et de poivre de Cayenne. Lier celte sauce avec de l’espagnole et passer à Tetamine.

On sert cette sauce avec le canard sauvage.

Sauce chevreuil. – Roe buck sauce.

Mettre dans une casserole un oignon emince, ainsi que 60 grammes de maigre de jambon cru, un peu de thym et de laurier, quelques grains de gros poivre, un peu de persil et une petite carotte emincee.

Frire le tout dans du beurre, et mouiller avec un verre à vin de vinaigre. Lorsque le vinaigre est reduit, verser sur les legumes de la sauce espagnole et un verre de vin de Porto. Après avoir degraisse et reduit la sauce à la consistance desiree, ajouter en dernier lieu une cuilleree de gelee de groseilles.

On sert cettc’sauce avec la venaison.

336 LA CUISINE ANGLAISE

Sauce celeri. – Celery sauce.

Nettoyez et lavez six pieds de celeri, que vous coupez en morceaux de dix centimètres de long, et dont vous enlevez Tes feuilles vertes. Mettez le celeri à braiser dans une casserole, avec deux oignons piques de deux clous de girofle, et un bouquet garni. Mouillez avec du consomme blanc, et lorsque le legume est cuit, retirez le bouquet et les oignons, et passez le celeri par pression à travers une’etamine au moyen de deux cuillers de bois. Faites une sauce à la crème très ferree que vous allongez avec le bouillon dans lequel on a braise le celeri, et ajoutez en dernier lieu la puree.

Cette sauce se sert avec la dinde bouillie ou braisee ainsi qu’avec le poulet poêle.

Sauce aux pommes. – Apple sauce.

On sert invariablement avec le porc rôti, ou avec l’oie, une sauce aux pommes. C’est simplement une puree de pommes legèrement sucree qu’on envoie à part dans une saucière.

Sauce Yorksliire. – YorksMre sauce.

Coupez en julienne très fine Tecorce de deux oranges en ayant soin de retrancher la partie blanche. Faites bouillir cette ecorce dans du vin de Porto. Lorsque l’orange est cuite, on

LA CUISINE ANGLAISE 337

Tegoutte sur un tamis eu reservant la cuisson, qu’ion melange avec une cuilleree de gelee de groseilles fondue, de la sauce espagnole, une pincee de poivre de Gayenne et une de cannelle en poudre. Faites bouillir cette sauce quelques minutes, passez à la passoire fine, et terminez en y incorporant le jus d’une orange ainsi que Tecorce. On sert cette sauce quelquefois avec le jeunbon ou les canards sauvages.

Sauce à l’arro’wroot. – Arro-wroot sauce.

Cette sauce s’emploie pour beaucoup de puddings d’entremets sucres. Delayer une cuilleree à bouche de farine d’arrowroot dans une petite casserole avec un peu d’eau froide, et remplir la casserole avec de l’eau bouillante. Remuer sur le feu jusqu’à ce que la sauce prenne de la consistance, puis l’aromatiser avec une saveur quelconque, soit vanille, citron, orange, fleur d’orange, etc., ou avec de la liqueur fine.

PiccalUli.

On nomme piccalilli les macedoines de legumes confits amalgames aVec une sauce jaune fortement epicee, qui a pour base la moutarde anglaise. Après avoir prepare et roule dans le sel les legumed, tels que choux-fleurs, haricots verts, petits oignons, concombres, etc., on les met dans un grand vase de terre muni d’un couvercle. On fait alors chauffer le vinaigre qu’on verse bouillant sur les legumes. Ou recommence l’opera^ tion deux jours de suite, et, le troisième jour, oh met les pickles en flacon. On melange ensuite le vinaigre avec de la mou 22

338 LA CUISINE ANGLAISE

tarde anglaise, un peu de gingembre en poudre el une pointe de cayenne, puis Ton verse cette saumuredans les flacons qu’on bouche hermetiquement.

Sauce menthe. – Mint sauce.

L’agneau rôti ne se sert jamais en Angleterre sans être accompagne d’une saucière de sauce à la menthe. D’après les A nglais, l’acidite» qui fait le fond de cette sauce ainsi que la menthe qui l’aromatise, facilite l’assimilation de la viande d’agneau qu’ils considèrent comme etant très indigeste.

Laver et egoutter des feuilles de menthe fraîches, et les hacher très fin. Les mettre ensuite dans un bol avec une cuilleree à cafe de cassonnade blanche, et les delayer avec du vinaigre rouge. Ajouter sel et poivre. Servir dans une saucière avec l’agneau rôti, qu’il soit chaud ou froid. – Lorsqu’on no peut se procurer des feuilles de menthe fraîches, on emploie de la menthe sechee, que l’on garde toujours en reserve dans les cuisines anglaises, ainsi que le thym, le basilic, la sauge et la marjolaine.

Sauce & la sauge. – Sage and onions sauce.

Faire bouillir à l’eau salee quatre gros oignons. Les hacher avec une poignee de sauge prealablement blanchie, et mettre le tout dans une casserole avec une poignee de mie de pain, du sel, du poivre et un bon morceau de beurre. Faire frire cinq minutes, et servir dans une saucière avec le porc rôti ou avec l’oie.

LA CUISINE ANGLAISE

339

Poudre de Curry. – Curry poivder.

Le curry est uq condiment exotique devenu populaire après la conquête des Indes. Il forme la base des preparations culinaires indoustanes, et est fort apprecie parles gourmets anglais. Il en est de plusieurs sortes; mais les curry les plus estimes sont ceux qui sont expedies de Madras, de Geyian et du Bengale. Tel que nous l’employons, c*est un melange de gingembre, graine de coriandre, graine de cumin, poivre .noir, piment rouge, turmeric et noix de coco. Tous ces ingredients, piles ensemble, forment une pâte que Ton fait secher, puis qu’on reduit en poudre, et c’est dans cet etat qu*il est importe en Europe, dans des boites et des bouteilles hermetiquement bouchees. Le riz cuit à l’eau est un accompagnement oblige de tout mets dans la composition duquel il entre du curry.

Cannelle. – Cinnamon.

La cannelle est Tecorce d’un arbre de la famille des lauriers, qui croît en Chine, à Ceylan et à Cayenne. Elle contient du

340 LA CUISINE ANGLAISE

tannin, de Tamidon, et une huile volatile qui lui communique son odeur et son arôme. Cette ecorce, qui sert & aromatiser des liqueurs et certaines’ preparations culinaires, possède des proprietes excitantes et toniques. On l’emploie beaucoup dans la cuisine anglaise pour aromatiser les gelees, les compotes et les puddings. La cannelle de Ceylan est la plus estimee.

Ladies’ deUght.

Ce condiment que par ironie on appelle Ladies’delight (delice de dame) est d’une nature un peu vulgaire et d’une force peu commune. Il se prepare ainsi :

Hacher très fm une demi-livre de pommes, autant d’oignons crus, et 60 grammes de piment rouge. Assaisonner de sel et mettre la preparation dans un pot de gre. Verser dessus du vinaigre bouillant. On peut employer le condiment deux ou trois jours après, on mange ce condiment avee la viande froide.

Sauoe aux anchois. – Anchovy sauce.

Cette sauce est d’une grande importance dans la cuisine anglaise. C’est une puree d’anchois savamment preparee qui se conserve presque indefiniment. On s’en sert journellement pour les sauces de poisson au lieu de beurre d’anchois, si long à preparer. Avec le poisson frit ou bouilli, il est d’usage de servir une sauce au beurre à laquelle on ajoute un peu de crème et quelques gouttes de sauce anchois, relevee d’une legère pincee de poivre de Cayenne.

LA CUISINE iVNGLAISE 341

P&te; d’anchois. – Anchovy paste.

C’est un condiment qui s’achète chez les epiciers, et qui n’est autre qu’une puree d’anchois melangee de beurre. Cette pâte d^anchois est conservee dans des pots et recouverte de beurre clarifie. On l’emploie beaucoup pour les toasts aux anchois qui se servent avec le the. On fait griller des tranches de pain sur lesquelles on etend, lorsqu’elles sont froides, cette pâte additionnee de beurre frais.

Moutarde anglaise. – English mustard.

Ce n’est que depuis Tannee 1729, que l’on emploie la moutarde en Angleterre comme condiment. Dans Torigine, le nom anglais pour designer cette graine etait Sinapis, d’où derive le mot sinapisme. On l’employait à l’etat naturel, en la faisant infuser dans du vinaigre bouillant.

L’invention de la farine de moutarde, telle qu’on l’emploie aujourd’hui en Angleterre, est due à une vieille femme, mistress Clement, qui habitait la ville de Durham. Elle eut l’idee de moudre la graine, ce à quoi on n’avait jamais pense, et se garda de divulguer le secret de sa simple decouverte. Grâce au patronage qu’elle obtint du roi George P’,elle amassa une joli e fortune, et pendant de longues annees la moutarde de Durham jouit d’une reputation universelle. Pour preparer la moutarde anglaise, il suffit simplement de delayer un peu de la farine avec du vinaigre, ou même de l’eau jusqu’à ce qu’on ait obtenu la consistance desiree.

342 LA CUISINE ANGLAISE

Hareng saur au wbisky & l’Irlandaise.

Lavez bien un hareng saur, essuyez-le avec un linge sec, et après en avoir detache la tele, fendez-le en deux dans sa longueur, et placez-le ouvert, dans un plat à tarte; puis couvrez-le de whisky auquel on niet le feu. Lorsque Tesprit est entièrement consume et la flamme eteinte, le hareng est cuit et prêt à servir.

Caviar et Vesiga.

Le caviar est un produit russe. II se compose d’œufs de sterlet et d*esturgeon, ces deux poissons monstrueux des mers de la Russie orientale. Le commerce du caviar est d’une importance considerable, et c’est par milliers do livres que se chiffre la quantite de ces œufs exportes de Russie dans tous les pays du monde, principalement en Turquie, en Grèce et en Allemagne. On en expedie comparativement peu en Angleterre, et moins encore en France, où on commence seulement à en faire usage. La preparation du caviar se pratique sur une grande echelle dans d’importants etablissements etablis à Tembouchure des grands fleuves, où viennent aborder les bateaux pecheurs charges du precieux comestible. La pèche de Testurgeon se fait •au printemps, en automne et en hiver; mais la pèche d’automne est la plus productive parce qu’à cette epoque les femelles ont plus d’œufs qu’à toute autre epoque. En hiver, on brise la glace sur le Volga, et l’on capture le poisson au moyen de harpons; mais dans toute autre saison, on emploie de solides filets et d’enormes hameçons attaches à des câbles puissants de cent mètres de longueur. Ces câbles sont fixes à des ancres retenues au fond du fleuve par de fortes poutres. Cette façon de

LA CUISINE ANGLAISE 343

pecher Testurgeoii est des plus productives. Aussitôt capture, le poisson amene sur le pont du vaisseau est roule dans le sel. On lui fend la tete à coups de hache, et on lui ouvre le ventre, d’où l’on extrait immediatement les œufs, la vessie, les entrailles, et la partie nerveuse qui adhère à Tepine dorsale et qu*on nomme Vesiga,

Il y a deux espèces de caviar : le grenu et le compact.

Le grenu est le plus eslime; mais le compact a sur lui Tavantago de pouvoir se conserver plus longtemps. La preparation du caviar grenu est des plus simples : on commence par bien laver les œufs à grande eau, pour les degager des fibres et de la peau qui les enveloppe; puis on les melange avec du sel dans de larges recipients, oh on les laisse macerer pendant une heure. On les retire alors et on les etend sur des claies à plan incline, de façon à ce que tout le liquide sale puisse s’ecouler. On laisse ainsi egoutter les œufs pendant quelques heures, et le caviar est prêt à mettre en pots.

La methode, pour preparer le caviar compact, diffère de celle qui vient d’être decrite, en ce que les œufs d’esturgeon, au lieu d’être mis à egoutter sur des claies, après la salaison, sont petris avec le sel, puis, au bout d’une heure, on les met sous un pressoir pour en extraire toute l’humidite. On le met ensuite dans do petits barils en bois, danslesquels ils sont livres au commerce.

On tire de l’esturgeon d’autres produits utiles à l’alimentation et à l’industrie. Ainsi, avec la peau des vieux poissons on fabrique du cuir; tandis qu’avec celle des jeunes, rendue transparente au moyen d’une certaine operation, on l’emploie pour les fenêtres en guise de vitres. C’est aussi de l’esturgeon qu’on tire la substance gelatineuse connue sous le nom de colle de poisson.

Le vesiga est la partie nerveuse qui se trouve adherente à l’epine dorsale du poisson. Cette substance, lorsqu’elle est dessechee, se conserve indefiniment. On l’emploie beaucoup en Russie où elle est fort estimee. On en fait des potages, on en garnit des timbales^ et on s’en sert pour confectionner des rissoles et des kromeskis.

344 LA CUISINE ANGLAISE

Eq Russie, on sert le caviar au commencement du dîner, mais en Angleterre on le sert après le fromage. On l’envoie sur table dans le petit baril qui le contient et qu’on place sur une assiette couverte d’une serviette; ou bien on en garnit des petites croûtes de pain frit. On en fait aussi des sandwiches.

Petits oisons au vinaigre.

Choisir des petits oignons blancs, qui soient autant que possible tous de la même grosseur. Les eplucher avec precaution, les laver et les blanchir à l’eau bouillante et salee pendant cinq minutes. Les egoutter, les rafraîchir et les eponger sur un linge pour en enlever toute l’humidite. Les mettre ensuite dans un vase en terre. Les couvrir de vinaigre blanc et froid, et les laisser ainsi pendant dix-huit heures. On les retire alors de leur saumure, pour les placer dans des bocaux en verre, avec un peu de sel, quelques piments rouges, une feuille de laurier et un peu de macis. Faire bouillir le vinaigre dans lequel les oignons ont sejourne, le laisser refroidir, et lorsqu’il est froid, le verser sur les oignons. Boucher hermetiquement les bocaux.

Choux rouges au vinaigre.

Emincer les choux rouges un peu moins fin que pour la choucroute. Les saupoudrer de sel, et les laisser ainsi pendant quarante-huit heures, en ayant soin de les remuer de temps en temps. Jeter l’eau que les choux ont rendue, puis les mettre dans des bocaux, après les avoir assaisonnes de quelques grains de poivre, d’un peu de cayenne, de quelques feuilles de laurier et de macis. Couvrir les choux de vinaigre. Boucher hermetiquement.

LA CUISINE ANGLAISE 345

Farce commune. – Veal stulling.

Celte farce s’emploie pour farcir le veau rôti ou braise, ainsi

v*

que pour la dinde et le lièvre rôti.

Recetle : Hacher très fin une livre de graissa de rognon de bœuf, que l’on melange avec la même quantite de mie de pain fraîche passee au tamis à quenelle. On ajoute à la farce deux œufs entiers, du sel, du poivre, une pincee^d’epices et du persil hache.

Veronique. – Laver.

La veronique aquatique, qu’on appelle laver en anglais^ est une herbe marine qui no croit que sur certains, rochers. C’est une substance huileuse et peu appetissante à Tceil, mais ^ont les gourmets anglais sont très friands. Celgi se mange avec le mouton rôti. Pour le preparer, on le fait “simplement chauffer dans une casserole avec un peu de demi-glace, une pincee de poivre de Cayenne, et du jus de citron.

Saumure. – Pickling ârine.

La culotte, la poitrine et la partie du bœuf qu’on appelle les plates côtes se font generalement bouillirai braiser. Ces mêmes morceaux ainsi que l’epaule, la joue et la partie de l’animal qui s’etend depuis la pointe de la culotte jusque près du jarret, sont ceux que l’on emploie pour la salaison*

346 LA CUISINE ANGLAISE

Oa sale egalement la poitrine, Tepaule et le gigot de porc.

Les Anglais excellent dans Tart d’apprêter le bœuf sale. Ils preparent à cet effet une saumure speciale qui se fait ainsi :

Dissoudre 6 kilogrammes de sel gris dans un demi-hectolitre d*eau bouillante. Faire infuser dans ce liquide 6 feuilles de laurier, un fort bouquet de thym, 24 clous de girofles, une poignee de poivre en grain, 1^0 grammes de salpêtre et 200 grammes de cassonade.

Avant de mettre le bœuf dans cette marinade, on doit le frotter fortement sur toutes ses faces avec du sel gris, et le laisser sur un plat pendant 12 heures afin que le sel penètre bien dans les pores de la viande, qu’on plonge ensuite dans la saumure, lorsqu’elle est tout k fait refroidie, et qu’on laisse mariner pendant une quinzaine de jours avant de l’employer.

Cornichons confits. – Pickled gerkins.

Il se fait en Angleterre une enorme consommation de legumes confits au vinaigre. Il faut admettre que les Anglais savent les preparer d’une façon toute speciale. Le mot pickled est le participe du verbe « to pickle » qui veut dire mariner, et s’applique à tout ce qui a ete conserve dans le vinaigre. Les plus estimes sont les mixed pickles et les piccalilli qui se composent d’un assortiment de legumes melanges, tels que petits oignons, chouxfleurs, haricots verts, cornichons, etc. La saumure de ces pickles est composee de vinaigre, gingembre, moutarde, curry, et fortement rehaussee en assaisonnement par le genièvre et le piment. Il est à presumer que la raison qui fait que l’on mange tant de pickles en Angleterre, est que l’on consomme enormement de viandes froides.

La meilleure manière et la plus simple de preparer les cornichons consiste à les frotter de sel et à les laisser ainsi pendant 48 heures, en les remuant de temps en temps. On les lave

LA CUISINE ANGLAISE

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ensuite, et on les met dans un pot de terre avec quelques feuilles de laurier, du poivre en grains et du piment. Les couvrir de vinaigre, les boucher et les garder dans un endroit froid. On peut, si on le prefère, jeter le vinaigre bouillant sur les cornichons au lieu de le mettre froid.

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CHAPITRE XIV

BOISSONS FRANÇAISES ET AMÉRICAINES (EN6LISH AND AMERICAN DRINKS).

Sommaire

Absinthe cocktail.

Aie.

Apricot drink. (Barley iraterf)

Badminton cup.

Barley Water.

Bosom caresser.

Bière.

Bombay cocktail.

Brandy flip.

Claret cup.

Claret sangaree.

Champagne cup.

Champagne cobbler.

Chest protector.

Coffee cocktail.

Cofiee punch.

Egg flip.

Egg nogg.

Egg nogg simple.

Egg nogg chaud.

Gin.

Gin iizz.

Gin toddy.

Gin daisy.

Gin sling.

Ginger beer.

Ice crusher.

Lager beer.

Leave it to me.

Locomotive.

Lemon squash.

Maiden’s blush.

Milk punch {froid).

350 LA CUISINE ANGLAISE

Milk puQch (chaud).

Mulled claret.

Mint julep.

Mothers’ milk.

Pick me up.

Porter.

Pme apple julep.

Prince Âlberts* bishoff.

Punch à la romaine.

Punch au the à Panglaise.

Port wine negus.

Raspberry drink.

Rhum and honey.

Shandygaff.

Slout.

Shaker.

Stone fence.

Sherry cobbler.

Thunder.

Uthe.

Tom and j’erry .

Toast and aie. (The loving cup,)

Whisky.

Whisky daisy.

and^MEf^ICJlhf

CHAPITRE XIV

BOISSONS ANGLAISES

et

AMÉRICAINES

L’excentricite des Americains se rencontre jusque dans leurs boissons; et c’est surtout dans les denominations de ces breuvages que celte excentricite se fait sentir, ainsi qu’on pourra en juger dans l’enumeration qui va suivre. La liste en est considerable, aussi ne donnerai-je les recettes que des principales, tant anglaises qu’americaines. Ces boissons, qui ont presque toutes Falcool comme base, sont composees pour la plupart de melanges de liqueurs des plus diverses, assaisonnes et aromatises avec des produits de toute nature. Les bars americains eurent une grande vogue à leur apparition en Angleterre il y a quelques annees; mais ce fut seulement une vogue de curiosite, et l’enthousiasme fit bientôt place à l’indifference, lorsque les secrets de la composition de ces melanges furent devoiles. Quelques-unes de ces boissons ont cependant obtenu droit de cite chez nos voisins et se debitent dans tous les bars anglais. Il en est même certaines qui ont franchi le detroit, et dont on trouve les noms inscrits sur la listedes consommations des cafes et des bars de notre capitale.

La bière est la boisson nationale. Il en est de deux sortes : la

352 LA CUISINE ANGLAISE

blonde et la noire. La blonde s’obtient par la fermentation du houblon et de l’orge, et comprend deux espèces, lal)ière de table (small beer) et Taie.

L’aie s’obtient par une feràientation rapide, et acquiert de la force en vieillissant, tandis que la petite bière fermente lentement, et n’a pas la propriete de se con3erver longtemps. Le stout et le porter se brassent avec du grain colore. Le porter est au stout, ce que la petite bière est à Taie.

D’après une antique coutume, il est d’usage dans les familles riches, lorsqu’il naît un fils,* d’emplir un ou plusieurs enormes tonneaux d’ale brassee expressement à celte occasion. Ces tonneaux sont hermetiquement bouches, et ne sont mis en perce que le jour où l’heritier presomptif atteint sa majorite. Ce jour memorable, qu’on appelle le coming of âge, est celebre avec grande pompe, et tous les tenants, amis et serviteurs, sont convies à un banquet pantagruelique, où après le repas, la fameuse bière qui compte vingt et un ans d’âge est degustee à la ronde. Pendant ce long laps de temps, l’aie a acquis une telle force, qu’on est oblige par prudence, et pour eviter que la fête ne degenère en orgie, de rationner les convives.

I On boit encore en Angleterre une bière excellente qu’on appelle la « lager beer x et qui tient le milieu entre l’aie et la emaM beer. On appelle half and half » un melange par moitie d’aleet de stout.

• Le porto (port wine) et le xerès (sherry) sont les principaux vins qui se boivent, et si l’Anglais adore le Champagne, il n’a qu’un goût modere pour les vins de Bordeaux et de Bourgogne.

Egg Flip.

Melangez dans une casserole moyenne, en vous servant d’un fouet à blancs d’œufs, deux œufs entiers, une cuilleree à bouche de sucre en poudre ou de cassonnade, et moitie de cette quantite

LA CUISINE ANGLAISE 353

de gingembre en poudre ainsi qu’un peu de muscade r&pee.; Incorporez au melange la valeur d’un demi-litre de vieille aie et remuez sur le feu jusqu’au point d’ebullition, sans cependant laisser bouillir, afin de ne pas cuire les œufs. Ce breuvage doit être bu très chaud. On le recommande comme un remède contre le rhume.

Toast and aie.

CVstune boisson d’hiver qui se sertaprès dîner en même temps que le fromage, et qui se prepare ainsi : faire chauiïer en l’amenant au point d’ebullition un litre de vieille aie dans laquelle on a fait dissoudre une cuilleree à cafe de gingembre, et la verser presque bouillante dans une cruche anglaise, munie d’un couvercle en metal, et dans laquelle on a prealablement depose une epaisse tranche de pain bien grille de chaque côte. On laisse un peu tiedir l’aie avant de la servir.

The loving cup.

Dans certains repas de corps, et même dans des reunions aristocratiques, le toast and aie est servi dans une immense coupe d’or ou d’argent massif, qu’en anglais on nomme tankard. Ce vase est presente k chaque convive qui boit à même, et le passe à son voisin. La coupe fait ainsi le tour de la table, et ce serait faire une injure au maître delà maison, que de refuser d’y tremper les lèvres.

C’est une antique coutume qu’on remet en usage en certaines occasions, comme par exemple au jour de Noël et dans les fêtes

de famille.

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354 LA CUISINE ANGLAISE

Ginger beer.

Le ginger beer est une espèce de limonade effervescente à base de gingembre qui se vend dans de petites bouteilles de grès contenant la valeur d’un verre à boire. Cette boisson, très rafraîchissante, malgre le goût epice que lui communique le gingembre, est consommee surtout par la classe ouvrière à cause de son prix modique.

Pour faire le ginger beer, on procède ainsi :

Faire bouillir, pendant un quart d’heure, quatre litres d’eau avec deux livres de sucre et 80 grammes de gingembre ecrase. Écumer le liquide et le verser tandis qu’il est chaud, dans un vase contenant un citron coupe en tranches, et dix grammes de crème de tartre. Lorsque le liquide est entièrement refroidi, on y ajoute un peu de levure de bière. Laisser fermenter pendant trois ou quatre jours, puis decanter et mettre en bouteille. Il faut avoir soin de ficeler les bouchons, et d’employer des bouteilles très resistantes.

Shandygaff.

On nomme ainsi le melange par moitie, de bière ou d’ale, et de gingerbeer. Cette boisson est très rafraîchissante.

Shaker.

Dans les bars americains, on se sert, pour operer les melanges de la glace avec les autres ingredients, d’un appareil appele « Shaker (du verbe « to shake » qui veut dire secouer).

LA CUISINE ANGLAISE 355

C’est un gobelet en argent ou en nickel sur lequel on retourne un autre gobelet plus petit, dont les bords embolle^nU^ermetiquement ceux du plus grand. Après avoir opere le melange dlins le shaker, on le recouvre, et on le secoue avec force de haut eu bas pendant quelques secondes, puis on decouvre le shaker, et l’on verse le contenu dans le verre destine à le recevoir. Il y a des shakers de differentes grandeurs.

Les petits, qui sont destines à servir à melanger les short drmA^ sont simplement munis d’un couvercle en metal, s’adaptant hermetiquement aux bords du gobelet.

Moulin à glace. – Ice crusher.

Cet appareil, construit en fer, ressemble par sa forme à l’instrument dont on se sert pour faire le cidre. C’est un moulin à broyer les pommes, en miniature. La glace est mise en morceaux dans Tentonnoir, et le shaker, qui doit la contenir lorsqu’elle est moulue, est place sous Tappareil.Deuxou trois tours imprimes à la manivelle suffisent pour ecraser la glace, qui tombe en miettes dans le recipient charge de la recueillir.

Sherry cobbler.

Les Americains divisent leurs boissons en deux categories, sous la denomination de « long drinks » eti( short drinks », selon qu’on les boit dans de grands ou dans de petits verres : ainsi par exemple, le sherry cobbler, depuis longtemps naturalise chez nous, est un loug drink tandis que le cocktail est un short drink.

Le sherry cobbler se prepare ainsi. Mettez dans un grand verre deux cuillerees à bouche de glace pilee, une cuilleree de

356 LA CUISINE ANGLAISE

sucre en poudre, un peu de curaçao et un verre de xerès. Ajoutez une tranche de citron ou d’orange sans pepins. Servez accompagne d’un chalumeau de paille.

Champagne cobbler.

Cette boisson se prepare comme le sherry cobbler; seulement le Champagne remplace le xerès, et on met un verre de cognac au lieu de curaçao. Quelques fraises mises en dernier lieu remplacent la tranche d’orange ou de citron.

Claret sangaree.

Le claret sangaree se compose de glace pilee, à laquelle on ajoute une cuilleree à bouche de sucre en poudre, un verre de bqrdeaux, un de bourgogne ou de porto, et une tranche de citron. Bien melanger le tout, ajouter quelques gouttes de cognac, et en dernier lieu cinq ou six fraises. Servir dans un grand verre avec un chalumeau.

Claret cup.

On emploie le mot claret pour designer le vin de Bourgogne ou de Bordeaux.

Le claret cup se boit beaucoup dans les reunions de courses et degarden party. On le prepare ainsi:

Mettez dans une cruche anglaise (jug), pouvant contenir deux litres de liquide, une bouteille de vin de Bordeaux, un

LA CUISINE ANGLAISE 357

verre de porto, un verre de curaçao, trois cuillerees de sucre en poudre, la valeur d’un grand verre d’eau de Seltz (soda water) et le jus d’un citron.

Ajoutez un peu de muscade râpee. Tenir la cruche à la glace jusqu’au moment de servir.

Telle est la recette du claret cup comme le preparent les Anglais. Les Americains y ajoutent des fraises entières.

Badminton claret cup.

C’est une variete de claret cup. Il se compose des mêmes ingredients que le precedent, dont il diffère par l’infusion qu’on y fait de bourrache et de pelures de concombres.

Avant de le servir, on retire naturellement la bourrache et Je concombre, au moyen d’une passoire ou d’un filtre.

Mulled claret.

Lo mulled claret se compose de vin de Bourgogne ou de vin de Bordeaux, qu’on fait chauffer dans une casserole avec du sucre, et dans lequel on fait infuser de la cannelle, quelques clous de girofle et du macis. C’est une boisson d’hiver recommandee contre le rhume, et qui n’a de vertu que servie très chaude.

Port Avine negus.

Le port wine negus se prepare de la même manière que le mulled claret. La seule difference est qu’on emploie du vin de Porto au lieu de vin français.

358 LA CUISINK ANGLAISE

Champagne cup.

Le Champagne cup se prepare ainsi : Mettez dans un jug (cruche anglaise) une bouteille de Champagne et un grand verre d’eau de Seltz, un verre à bordeaux de marasquin, un de cognac, le jus d’un citron et sucrez moderement. Faire infuser, dans la preparation, la pelure d’un concombre pendant une heure environ. Servir dans de grands verres. On frappe le Champagne cup à la glace non salee.

Sauterne cup.

Operer comme dans la recette precedente en substituant du sauterne au Champagne.

Coffee cocktaU.

Dans cette boisson, il est une particularite remarquable, c’est qu’il n’entre nullement de cafe dans sa composition. On lui donne ce nom à cause de sa couleur qui ressemble à celle du cafe.

Melanger, dans un shaker, deux jaunes d œufs avec une legère cuilleree de sucre en poudre, qu’on amalgame avec un grand verre de porto et un petit verre de cognac. Ajouter deux cuillerees de glace pilee, agiter vigoureusement le shaker et servir dans un grand verre. Saupoudrer la Burface d’un peu de muscade npee et envoyer avec un chalumeau de paille.

LA CUISINE ANGLAISE 359

Coffee punch.

De la glace pilee, une tasse de cafe noir, uq verre de cognac, une cuilleree de sucre en poudre. Melanger dans le shaker et servir dans un verre accompagne d’un chalumeau de paille.

Egg nogg (pour soiree).

En Amerique on sert le egg nogg dans les bals et les soirees. Cela remplace Torgeat qu’on considère comme un breuvage insipide. Le egg nogg se prepare ainsi, lorsqu’on veut en faire une grande quantite :

Cassez dans une terrine dix jaunes d’œufs dont vous reservez les blancs. Travaillez ces jaunes d’œufs avec une demi-livre de sucre en poudre, en vous servant d’un fouet à blanc d’œufs, et lorsque l’appareil est devenu mousseux, ajouter graduellement le quart d’un litre de rhum, et un litre de bon cognac. Aromatisez avec un peu de zeste do citron frotte sur un morceau de sucre qu’on fait dissoudre ensuite dans le liquide, auquel on ajoute en dernier lieu deux litres de lait. Bien melanger la preparation en se servant du fouet à blanc d’œufs, et la mettre à la glace dans une sorbetière. Au moment de servir le egg nogg. melangez au breuvage les blancs d’œufs pris en neige.

Egg nogg simple au rhum.

Pour preparer un simple verre d’egg nogg, on met une cuilleree de glace pilee dans un gobelet (shaker) avec un œuf battu,

360 LA CUISINE ANGLAISE

une cuilleree à cafe de sucre en poudre, un verre à liqueur de rhum, autant de lait non ecreme, et la même quantite de cognac. Bien secouer le tout dans le shaker, et verser dans un verre. Rftper un peu de muscade sur la surface.

Egg nogg chaud.

Cassez trois jaunes d’oeufs dans une terrine; melangez-les avec une cuilleree à bouche de sucre en poudre. Incorporez aux jaunes d’œufs un verre de rhum, et graduellement, afin de ne pas cuire les œufs, un grand verre de lait bouillant et un peu de muscade râpee. – C’est simplement un lait de poule dans lequel le rhum prend la place de la fleur d’oranger. Ce breuvage est efficace pour guerir le rhume et la toux. Il doit être bu très chaud.

Tom and jerry.

Cette boisson diabolique est très en faveur dans la basse classe en Amerique.

Melanger, dans un bol à punch, six jaunes d’œufs avec une demi-livre de sucre en poudre, une bonne pincee de cannelle en poudre, une de clous de girofle piles, une de gingembre et

r autant de muscade râpee. Travailler cette preparation avec un

[ fouet à blancs d’œufs pendant quelques minutes, et la delayer

[ avec une demi-bouteille de cognac, et autant de rhum, qu’on a

[ fait chauffer prealablement. En dernier lieu ajouter les six

blancs d’œufs fouettes. Faire chauffer en fouettant constamment jusqu’à ce que le liquide soit bien chaud; mais il fautavoir grand soin de ne pas le laisser bouillir, car les œufs qui entrent dans la preparation cuiraient, et le breuvage perdrait tous ses avantages et se decomposerait.

LA CUISINE ANGLAISE 361

Punch au the à l’anglaise. – Tea punch.

Mettre dans une cassei:ole une demi-bouteille de rhum, autant de cognac, 60 ou 80 grammes de sucre ainsi que recorce pelee d’un citron dont on retire la partie blanche interieure, un morceau de cannelle, et quatre clous de girofle. Lorsque le liquide est bien chaud, le retirer du feu, et y ajouter quelques tranches d’orauge dont on a retire les pepins. En dernier lieu, on melange au punch un demi-litre d’une forte infusion de the. Servir très chaud.

Brandy flip.

Le mot anglais brandy signifie cognac. Ce qu’on appelle brandy flip n’est autre chose qu’un grog au cognac bien chaud, à la surface duquel on place un petit biscuit sec, saupoudre de muscade râpee.

Punch au lait chaud. – Hot milk punch.

Sucrer moderement un lilre de lait bouillant, dans lequel on a fait infuser un petit morceau de cannelle ou de zesle de citron. Melanger au lait une demi-bouteille de cognac et autant de rhum. Servir bien chaud.

362 LA CUISINE ANGLAISE

Whisky.

Le whisky est une liqueur alcoolique extraite du grain, et surtout de Torge. Il y en a deux espèces : l’irlandais (irish whisky) et Tecossais (scotch whisky). Ce qui les distingue, c’est que le whisky ecossais possède un goût de fumee assez prononce. Le whisky est considere par certains docteurs comme antitode contre la goutte et les rhumatismes, à condition pourtant de ne pas en faire un abus.

Gin.

^ Le gin est une espèce de genièvre obtenu par la distillation du seigle et de l’orge, et aromatise avec des baies de genièvre. D’immenses quantites de cette boisson alcoolique sont produites en Hollande et surtout à Amsterdam et à Scheidam. Le veritable gin anglais qu’on appelle « old tom » provient la plupart du temps des residus de la distillation du whisky, rectifiee et aromatisee avec diverses substances, telles que Thuile de terebenthine, de genièvre, de coriandre. C’est la liqueur preferee de la classe pauvre à cause de son bas prix.

Gin toddy.

Le toddy est un grog chaud dans lequel on met une tranche de citron. Le whisky toddy est prepare avec du whisky.

LA CUISINE ANGLAISE 363

Gin fizz.

Mettez deux cuillerees de glace pilee dans un grand verre, (lumbler), sucrezmoderemeut avec du sucre en poudre, et ajoutez le jus d’un demi-citron, un verre de « oldtomgin », et remplir avec de Teau de Seltz (Sellzer waler). Servir avec un chalumeau de paille.

Gin daisy.

Mettez de la glace pilee dans un shaher avec une cuilleree d’orgeat et de sirop de gomme, le jus d’un demi-citron, un verre à liqueur de marasquin et un verre de gin. Secouez le shaker pour bien melanger tous ces ingredients, et versez dans un grand verre que vous remplissez avec de Teau de Seltz.

Gin sling.

De la glace pilee, le jus d’un demi-citron, un peu de siropde gomme, un verre de gin et de Teau de Seltz. Au moment de servir, poser une tranche de citron ou d’orange sur la surface du liquide. Se boit avec un chalumeau.

Cocktail. – Short drink.

Le cocktail (traduction queue de coq) se fait au whisky, au gin ou au cognac. On met l’esprit dans un grand verre conte.

364 LA CUISINE ANGLAISE

nant deux cuillerees de glace finement pilee, trois ou quatre gouttes d’angostura biUers, un peu de sirop de gomme et un peu de zeste de citron. Remuer vivement avec une cuiller, et servir dans un verre à bordeaux, après avoir filtre à travers une passoire.

Mint julep.

Mettez dans un grand verre (soda water glass) une cuilleree de sucre en poudre que vous faites dissoudre dans un peu d*eau. Mettez egalement dans le verre trois ou quatre feuilles de menthe fraîche, qu’on presse avec la cuiller pour en extraire toule la saveur. Ajoutez un verre à vin d’eau-de-vie, un verre à liqueur de rhum et la même quantite de chartreuse. Remuer bien le melange et le passer à travers une passoire dans un autre verre contenant de la glace pilee. Decorez le dessus du julep avec une tranche de citron sur lequel vous placez un petit bouquet de menthe et que vous entourez de quelques fraises et framboises.

Boston flip.

Melanger dans un shaker, de la glace pilee, un peu de sucre en poudre, et un œuf frais battu. Ajouter un verre de scotch whisky et un peu de muscade râpee. Bien secouer et verser à travers une passoire dans un verre a bordeaux.

LA CUISINE ANGLAISE 365

Rhum au mieL – Rum and honey.

Mettez dans un verre une cuiller à cafe de miel, que vous delayez avec un verre de rhum de la Jamaïque, en remuant avec une cuiller. Ajoutez un morceau de glace et une tranche de citron.

‘* Leave it to me. “

De la glace pilee, melangee dans un moyen shaker avec une cuilleree à cafe de sucre en poudre, une de sirop de framboises et une de gin, le jus d’un demi-citron, et un verre à liqueur de marasquin, fiien remuer le tout et servir dans un verre à vin.

Locomotive.

Melanger dans un gobelet un œuf battu avec une cuilleree à the de miel, trois gouttes d’essence de clous de girofle et un verre à liqueur de curaçao. Ajouter à cette preparation le quart d’une bouteille de bourgogne presque bouillant. Servir dans des verres à xerès.

Tounerre. – Thuuder.

Remplir à demi un grand verre de glace pilee; y adjoindre une cuilleree à the de sucre en poudre, un demi-verre à bor

366 LA GUISLNE ANGLAISE

deaux de cognac, une pincee de gingembre et une de poivre de Cayenne. Agiter et passer à travers une passoire. Servir dans un verre à vin.

Julep à rananas. – Fine apple julep.

Mettre dans un bol à punch le jus d’une orange, la valeur d’un petit verre de sirop de framboises, autant de marasquin, la même quantite de gin, une demi-bouteille de Champagne ou de sauterne, et un demi-ananas epluche et coupe en tranches. Ajouter une d^mi-livre de glace pilee, et melanger bien le tout. Servir dans de grands verres, et garnir la surface avec quelques framboises. Se boit avec des chalumeaux.

Le lait de ma mère. – Mother’s milk.

Deux cuillerees à bouche de glace pilee, un peu de sirop de framboises, et un verre de cognac. Melanger le tout dans un shaker avec du lait non ecreme. Servir dans un grand verre avec un chalumeau.

Absinthe cocktail.

Mettez dans un shaker de grandeur moyenne une cuilleree de glace pilee avec un petit verre d’absinthe, quelques gouttes d’anisette et une goutte d’angostura-bitters. Melangez avec un

LA CUISINE ANGLAISE 367

peu d’eau, et, après avoir recouvert le shaker, secouez vigoureusement» et servez dans un verre à bordeaux.

Bombay cocktail.

De la glace pilee, deux ou trois gouttes d’angostura-bitters, un verre à liqueur de curaçao, une legère cuilleree à cafe de sirop, un verre de cognac et unzeste de citron. Bien melanger et servir dans un verre à bordeaux.

Bosom caresser.

Melanger dans un shaker de la glace pilee, une cuilleree à bouche de sirop de framboises, un petit verre de cognac, autant de lait et un œuf battu. Secouer bien pour operer le melange, qu’on filtre à travers une passoire, et qu’on sert dans un verre à bordeaux.

Ghest protector.

De la glace pilee, un petit verre de cognac, un de rhum, une cuilleree à cafe de sucre, queh]ues gouttes de jus de citron, un œuf entier et un peu de muscade râpee. Mettre tous ces ingredients dans un shaker, secouer vigoureusement et passer à Iravers une passoire. Servir dans un verre à sherry.

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368 LA CUISINE ANGLAISE

^Whisky daisy.

Le whisky daisy se compose d’un verre de whisky ecossais melange avec une cuilleree à cafe de sirop de gomme, autant de sirop d’orgeat, le jus d’un demi-citron, et de la glace pîlee. On opère le melange dans un shaker, puis on passe le liquide dans un grand verre qu’on remplit avec de Teau de Sellz ou du soda-water.

Pick me up.

Dans un grand verre à limonade, mettre trois cuillerees de glace pilee avec le jus d’un citron passe à travers un tamis. Ajouter une demi-cuilleree à cafe d’angostura-bitters et un verre à liqueur de curaçao. Remplir le verre d’eau de Seltz. Bien melanger le tout, et servir avec un chalumeau de paille.

Stone fence.

Mettre dans un shaker de la glace pilee, un peu de sucre en poudre, du sirop de groseilles, le jus d’un demi-citron, quelques gouttes d’absinthe el un verre de gin. Secouer le melange, et, après l’avoir passe à travers une passoire, le servir dans un verre à bordeaux, avec une tranche de citron sur la surface du liquide.

LA CUISINE ANGLAISE 369

Milk punch.

Le milk punch se sert après le potage tortue et se fait ainsi : Zestez deux citrons et deux oranges, que vous faites infuser dans un sirop leger, auquel on ajoute une demi-bouteille de rhum, un verre de kirschwasser, et le jus de quatre oranges et de quatre citrons. Lorsque le tout est bien melange, versez dans ce sirop un verre de lait. Laisser reposer pendant quatre heures et filtrez au papier. Le punch doit être limpide et se sert très froid, sans toutefois être frappe.

Punch à la romaine.

Ce punch se sert dans les grands dîners, après le rôti. Râpez le zeste d’un citron et d’une orange que vous faites infuser dans un demi-litre de sirop à 20 degres. Ajoutez à ce sirop, lorsqu’il est froid, une bouteille de Champagne, un verre de rhum, et le jus de trois citrons et de trois oranges. Faire glacer le punch à la sorbetière, et, lorsqu’il commence à prendre de la consistance, melanger la valeur de trois blancs d’œufs de meringue italienne. Ce punch doit avoir la consistance de la

Prince Albert bishoff.

Melanger, dans un bol à punch, une bouteille de porto avec une demi-livre de sucre en poudre, un quart de litre d’eau, le

U

;nO LA CUISINE ANGLAISE

zeste de deux oranges et le jus de quatre. Ajouter six clous de girofle. Laisser infuser pendant une demi-heure et passer le breuvage h travers une mousseline. Tenir à la glace jusqu’au moment de servir.

Boisson aux framboises. – Raspberry drink.

Melanger un litre de sirop de framboise^ pas trop sucre, avec une bouteille de bourgogne ou de bordeaux. Frapper legèrement à la glace en remuant de temps en temps avec la spatule. Servir dans des verres à punch.

Apricot drink.

Se prepare comme le raspberry drink. On remplace seulement le sirop de framboise par un sirop d’abricot et le vin rouge par une bouteille de madère.

Eau d’orge. – Barley ‘water.

Le barley water est une boisson rafraîchissante très en usage chez nos voisins.

Laver à plusieurs eaux deux poignees d’orge perle, qu’on fait bouillir pendant deux heures avec un litre d’eau. Au bout de ce temps, passer le liquide à travers une mousseline audessus d’un vase contenant un peu d’ecorce de citron et 400 grammes de sucre. Ajouter le jus de quatre citrons et laisser refroidir dans un endroit frais.

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LA CUISINE .NGLAISE Î{71

Orange brandy.

Mettre dans un vase de terre deux litres de cognac. Ajouter une livre et demie de sucre en poudre, le zeste de six oranges et le jus de douze. Mêler alors un demi-litre de lait bouillant, bien remuer le liquide, couvrir le vase hermetiquement et le laisser ainsi pendant six jours, en ayant soin de le remuer chaque jour. Passer ensuite la liqueur à travers une jelly bag et mettre en bouteille.

Aie posset.

Mettre chauffer dans un vase un litre d’ale, assaisonnee d*un peu de sucre, d’une pincee de gingembre en poudre, et autant de muscade râpee. Faire bouillir un lilre de lait non ecreme, et le melanger tout bouillant avec Taie.

Prince of Wales’ punch.

Mettre dans un vase :

Une demi-bouteille de Champagne, une demi-bouteille de hock, un verre de cognac, un verre de curaçao, un demi-verre de rhum, une bouteille de Seltzer waler, une de soda water, un verre à liqueur de sirop de framboises, la moitie d’un jus de citron et autant de jus d’orange. Mettre le punch à la glace et le servir très froid, mais non frappe.

372 LA CUISINE ANGLAISE

^Washington punch.

Ingredients : un demî-verre à bordeaux de whisky, un verre à liqueur de crème de noyau, de 1^ glace pilee, une cuilleree à cafe de sucre en poudre, et un verre à vin de lait non ecreme. Bien melanger le tout et servir avec un chalumeau de paille.

Lemon squash.

Remplir à moitie un verre à soda loater de glace pilee. Ajouter à la glace une cuilleree à bouche de sucre en poudre et le jus d’un citron entier. Remplir le verre de soda water ou d’eau de Seltz; bien remuer avec une cuiller, semer à la surface quelques fraises ou framboises et servir avec un chalumeau.

Maiden’s blush.

Un verre à liqueur de sirop de groseille, un de kirsch, un de marasquin et un grand verre de Champagne. Melanger ces liqueurs avec de la glace pilee dans un shaker, et servir dans un grand verre avec un chalumeau de paille.

Pick-me-up.

Melanger dans un shaker, avec deux cuillerees de glace pilee, le jus d’un citron entier, un verre de cognac, un peu de sucre, une demi-cuilleree à cafe d’Angostura bitters, et une bouteille de soda water ou d’eau de Seltz.

Le the. – The tea.

Le the est originaire de Chine, et, quoiqu’on le cultive egalement dans rinde et au Japon, celui que Ton recolte dans le Celeste-Empire jouit d’une reputation universelle; reputation •justifiee, du reste, par l’enorme importation de ce produit dans tous les pays du monde.

374 LA CUISINE ANGLAISE

La recolte du the se fait à trois epoques de Tannee : au mois de mai, au milieu de juin et à la fin de Tete; mais la troisième recolte est inferieure aux deux autres. La preparation du the, avant de le livrer au commerce, n’est pas aussi simple qu’on pourrait le croire : Après avoir separe les espèces, les feuilles de the sont d’abord plongees dans une large chaudière d’eau bouillante, pendant vingt ou trente secondes, puis vivement retirees du liquide, et, après avoir ete bien egouttees, elles sont etendues sur de larges plaques de tôle placees sur un foyer ardent. Le the est alors remue constamment jusqu’à ce qu’il ait atteint un certain degre de chaleur, puis on l’enlève des plaques pour l’etendre sur d’immenses tables recouvertes de nattes finement tressees, où des ouvriers les roulent vivement entre leurs mains, tandis que d’autres sont occupes à agiter d’immenses eventails, dans le but de faciliter l’evaporation. Cette operation est continuee jusqu’à ce que les feuilles de the soient complètement refroidies entre les mains des ouvriers charges de les rouler.

Les feuilles de the de première qualite sont roulees separement; quant aux qualiles inferieures, elles sont traitees avec moins de soin.

Plus l’operation du refroidissement aura ete prompte, et plus les feuilles se rouleront facilement. En dernier lieu, le the est mis à secher à l’air, et lorsque toute trace d’humidite a disparu, on le met en boîte.

Il n’y a en realite que deux espèces de the : le noir et le vert; niais chaque espèce est subdivisee en une infinite de varietes denommees selon leur provenance. Le meilleur ihe noir est le (( Liang-Sin » et se vend en Chine douze francs la livre. La première qualite de the vert est le « Koo-Lang-fyni », qui vaut jusqu’à trente francs.

En France, on consomme relativement très peu de the. Dans la classe ouvrière, on en ignore absolument l’emploi, et bien des gens n’en ont jamais goûte et seraient fort embarrasses d’avoir à le preparer. C’est celte ignorance qui inspira jadis II. Monnier, l’auteur de cette pièce desopilante du Palais-Royal, Le The de 3/'”® Gibou, Cette brave femme, preposee à la

LA CUISINE ANGLAISE 375

garde d’un immeuble, invite une autre concierge, sa voisine, jj^me Pochet, à venir passer la soiree dans sa loge, où elle se propose de lui offrir une lasse de the. Ni Tune ni l’autre n’ont jamais goûte au breuvage exotique; mais, comme M^^ Gibou se pique d’avoir de l’imagination et quelques talents culinaires, elle espère se tirer d’affaire. Après avoir fait bouillir le the pendant une demi-heure, on le goûte, et les deux commères sont d’accord pour trouver que la decoction a un goût acre et insipide. C’est alors qu’elles s’evertuent à y ajouter divers ingredients, a&n; de lui donner de la saveur et du montant. On y met du sel et du poivre, puis de la cannelle, un jaune d’œuf, du vinaigre, etc.. Elles finissent alors par tomber d’accord en declarant, comme conclusion, que le the est un breuvage execrable !…

Pour preparer le the d’une manière parfaite, il est certaines règles auxquelles les menagères se conforment avec un soin des plus minutieux : On doit, en premier lien, echauder la theière qu’on rince avec un peu d’eau bouillante et qu’on egoutte ensuite avant d’y placer le the, dont la quantite se mesure d’après le nombre de tasses à remplir, et qui doit être d’une cuilleree à cafe par personne. On ajoute même une cuilleree supplementaire que l’on appelle la part de la theière. On emploie du the noir de diverses provenances, melange avec quelques feuilles de the vert dont l’arôme est très puissant.

Pour operer l’infusion, on verse d’abord une legère quantite d’eau bouillante, puis on attend deux ou trois minutes avant de remplir la theière. On laisse infuser cinq minutes encore, et le the est prêt à servir.

Le succès de l’operation depend surtout de la manière d’employer l’eau bouillante. Non seulement il est de la première importance que l’eau soit à l’etat d’ebullition lorsqu’on opère l’infusion, mais encore faut-il ne pas laisser bouillir l’eau plus de deux ou trois minutes avant de s’en servir. L’eau qui bout longtemps perd ses qualites nutritives et dissolvantes qui s’echappent avec la vapeur, et le the fait avec cette eau prend un goût d’âcrete desagreable. Il ne faut pas non plus que l’infusion dure plus de cinq minutes, parce qu’alors le tanin que contient la

376 LA CUISINE ANGLAISE

i feuille de the se delaye, et commuaique au breuvage une amertume et une couleur noirâtre que ne doit pas avoir le the convenablement prepare.

Une question importante qui n’a pas encore ete parfaitement resolue, consiste à savoir si le lait doit être verse dans la tasse avant le the, ou bien si c’est le contraire qui doit avoir lieu. D’après les amateurs de the, la façon de melanger le lait ou la crème, exercerait une influence flagrante sur la qualite du breuvage. En attendant la solution de cet important problème, chaque menagère agit à sa guise, et adopte celui des deux systènies qui lui semble être le meilleur.

CHAPITRE XV L’ALIMENTATION EN ANGLETERRE.

LES CUISINIERS FRANÇAIS A LONDRES.

FANTAISIES CULINAIRES^ LITTÉRAIRES, ANECDOTIQUES ET DESCRIPTIVES.

Sommaire

City bars.

(Cuisine modèle au gaz.

Cuisines en general.

Grill room.

La cuisine française en Angleterre.

Le cafe Royal.

Les cuisiniers français û Londres.

Le club culinaire de Londres.

Les dîners de poisson.

Le garçon de restaurant.

Le gourmet anglais.

Le jour de Noël en Angleterre.

Les mets nationaux.

Les restaurants du pauvre.

Les restaurants du West-End

Les restaurants de Londres.

Le the.

Les toasts et leur origine.

Plats du jour.

Ship and lurtle tavern.

Spiers and Pond .

Une maison seigneuriale.

Une cuisine londonienne.

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^Whisky daisy.

Le whisky daisy se compose d’un verre de whisky ecossais melange avec une cuilleree à cafe de sirop de gomme, autant de sirop d’orgeat, le jus d’un demi-citron, et de la glace pilee. On opère le melange dans un shaker, puis on passe le liquide dans un grand verre qu’on remplit avec de l’eau de Seltz ou du soda-water.

Pick me up.

Dans un grand verre à limonade, mettre trois cuillerees de glace pilee avec le jus d’un citron passe à travers un tamis. Ajouter une demi-cuilleree à cafe d’angostura-bitlers et un verre à liqueur de curaçao. Remplir le verre d’eau de Seltz. Bien melanger le tout, et servir avec un chalumeau de paille.

Stône fence.

Mettre dans un shaker de la glace pilee, un peu de sucre en poudre, du sirop de groseilles, le jus d’un demi-citron, quelques gouttes d’absinthe et un verre de gin. Secouer le melange, et, après l’avoir passe à travers une passoire, le servir dans un verre à bordeaux, avec une tranche de citron sur la surface du liquide.

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Milk punch.

Le milk punch se sert après le potage tortue et se fait ainsi : Zestez deux citrons et deux oranges, que vous faites infuser dans un sirop leger, auquel on ajoute une demi-bouteille de rhum^ un verre de kirschwasser, et le jus de quatre oranges et de quatre citrons. Lorsque le tout est bien melange, versez dans ce sirop un verre de lait. Laisser reposer pendant quatre heures et filtrez au papier. Le punch doit être limpide et se sert très froid, sans toutefois être frappe.

Punch à la romaine.

Ce punch se sert dans les grands dîners, après le rôti. Râpez le zeste d’un citron et d’une orange que vous faites infuser dans un demi-litre de sirop à 20 degres. Ajoutez à ce sirop, lorsqu’il est froid, une bouteille de Champagne, un verre de rhum, et le jus de trois citrons et de trois oranges. Faire glacer le punch à la sorbetière, et, lorsqu’il commence à prendre de la consistance, melanger la valeur de trois blancs d’œufs de meringue italienne. Ce punch doit avoir la consistance de la neige.

Prince Albert bishoff.

Melanger, dans un bol à punch, une bouteille de porto avec une demi-livre de sucre en poudre, un quart de litre d’eau, le

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LA CUISINE ANGLAISE

cuillères d^etain, etait disposee autour de la cuisine, au milieu de laquelle huit marmites enormes, contenant huit espèces de potages, mijotaient, chaufTees par la vapeur en exhalant un delicieux arôme qui se repandait dans les rues environnantes. Un large ecriteau suspendu au-dessus de chaque marmite indiquait

la nature de la soupe qu’elle contenait. On pouvait lire sur les pancartes les noms suivants : soupe aux choux – puree de pois – mutton broth – joue de bœuf – soupe à l’oignon – soupe aux haricots – puree de lentilles – panade.

Tous les assistants furent invites à goûter les soupes, qui furent trouvees parfaites. Le lendemain et les jours suivants, les malheureux affames, munis de cartes distribuees par les soins de la municipalite, vinrent en foule se restaurer à la cuisine de Soyer. C’etait une procession sans fin de miserables à la mine hâve et souffreteuse, vêtus de guenilles comme seuls les Irlandais

LA CUISINE ANGLAISE 381

savent s’en vêtir. Tous defilaient en ordre, et se rangeaient autour des tables où la soupe leur etait servie.

Une parlicularite à noter, c’est que le soir du premier jour, on constata la disparition de la moitie de^ ecuelles et des cuillères, emportees par les consommateurs peu scrupuleux, qui pensaient peut-être que leur ticket leur donnait droit au contenant aussi bien qu’au contenu. Afin d’eviter le retour de semblables erreurs, ont fut oblige de fixer les ecuelles à la table et d’attacher les cuillères avec de petites chaînes.

Pendant un mois environ, Soyer fut le lion du jour; on lui donna des banquets, et lord Besborough, qui etait alors vice-roi d’Irlande, Tinvita même à sa table. Les pauvres le benissaient, le regardant comme un messie envoye pour les sauver de la famine. La question d’etablir des cuisines municipales dans les comtes les plus ravages par le fleau allait être decidee par le Parlement, lorsque tout à coup Soyer, quoique comble d’honneurs et amplement retribue par le gouvernement, eut la malencontreuse idee de publier une brochure à bon marche sous le titre de la Cuisine du pauvre. Ce livre traitait de la cuisine economique au point de vue general et s’etendait particulièrement sur les soupes distribuees aux indigents. Dans les receltes qu’il donnait pour la confection de ces soupes, il expliquait qu’il n’entrait que très peu et même dans certains cas pas du tout de viande.

Aussitôt mise en vente, la brochure fut en butte aux critiques des docteurs irlandais, qui, par esprit d’opposition au gouvernement, plutôt que par conviction, engagèrent dans les journaux une polemique acharnee. Les uns pretendaient que de la soupe faite dans de telles conditions, loin d’être nutritive, ne pouvait que produire des desordres dans l’organisation, et engendrer des maladies serieuses, voire mortelles. D’autres esprits plus grincheux allèrent jusqu’à pretendre que l’Angleterre avait imagine cette nourriture meurtrière pour pacifier l’Irlande, en se debarrassant d’une manière honnête des milliers de miserables turbulents, dont l’existence etait sans cesse une cause d’anxiete pour sa politique, et un fardeau pour son budget.

382 LA CUISINE ANGLAISE

Ce fut un toile general. Celui qui la veille etait Tidole du peuple, devint le lendemain son mauvais genie, et le complice des agissements criminels d’un gouvernement oppresseur; si bien qu*un soir, Soyej fut oblige de s’embarquer clandestinement pour echapper à la fureur de forcenes qui ne parlaient rien moins que de le lyncher sur place.

Triste relour, helas I des choses d’ici-bas!!

Lors de Texposition internationale de Londres en 1851, Alexis Soyer imagina de bâtir un restaurant colossal à quelques pas du Palais de Cristal.

Ce caravanserail culinaire, que l’audace seul d’un Soyer pouvait concevoir, fut construit sur remplacement d’une maison seigneuriale, Gore House, propriete de lord Blessingtou. Soyer donna à son etablissement le nom de Symposium. On ne saurait se faire une idee du luxe deploye dans cet extravagant palais de la gastronomie.

Les murs du vestibule, peints à fresque, representaient les principaux monuments de toutes les nations du globe, depuis Saint-Pierre de Rome jusqu’à la grande pagode de Pekin. On y voyait une salle turque, une salle japonaise, une salle mauresque et une russe. On arrivait ensuite au salon du Soleil, constelle de rayons d’or, et dans lequel le jour filtrait à travers des vitraux couleur d’ambre, projetant une lumière eblouissante. Puis on passait dans le salon de la Lune, frange de lames d’argent, où le jour, tamise par des verres azures, refletait une lueur blafarde semblable à celle d’un clair de lune. On se trouvait ensuite transporte, par le seul fait d’ouvrir une porte, dans le salon de Mercure, de Jupiter, de Neptune, etc. 11 n’etait pas une planète celèbre dans le firmament qui n’eût donne son nom à un salon.

Dans le jardin, une grotte factice, tapissee de mousse et de fougère, etait disposee pour recevoir les amateurs de glaces et de boissons frappees. Des stalactites artificielles pendaient à la voûte de toutes parts, et produisaient un effet des plus pittoresques. Soyer avait fait, en outre, elever dans le jardin une tente pouvant contenir deux mille couverts, laquelle tente abrita

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plusieurs banquets monstres, entre autres le banquet offert à la presse de toutes les nations.

Enfin, pour completer la description de ce gigantesque restaurant, j’ajouterai que les architectes avaient deploye le même luxe et la même extravagance dans Tinstallation des cuisines.

Malheureusement, cet etablissement feerique et monumental fut un immense fiasco, qui ruina complètement Soyer et tous ceux qui s’etaient associes à Tentreprise du barnum culinaire.

Malgre ses excentricites, Soyer etait doue de qualites emerites, et le plus grand service qu’il ait rendu à la profession culinaire, est d’avoir, le premier, preconise l’usage du gaz applique à la cuisson des aliments. Outre les fourneaux à gaz qu’il avait installes dans les cuisines, il avait fait coi^struire dans le jardin un four immense, chauffe ^u gaz, et qui etait une des principales attractions du Symposium.

Dans ce four, on faisait rôtir un bœuf entier une fois par semaine sous les yeux du public. Lorsque ce gigantesque rôti etait cuit à point, on le sortait du four au moyen d’un ingenieux mecanisme, puis on le transportait en triomphe à travers le jardin jusqu’à la salle où s’operait le decoupage, au son de la musique qui jouait l’air national, et aux applaudissements delà foule dont l’enthousiasme eclatait à la vue de ce roast-beef cyclopeen.

Lors de la guerre de Crimee, Soyer fut charge, par le gouvernement de la reine Victoria, d’aller faire l’application de son système de cuisine de campagne à l’armee anglaise, qui manquait de vivres par suite de l’incurie de son intendance militaire; puis il revint à Londres après avoir brillamment accompli son mandat.

Malgre les faveurs dont il fut comble, et en depit de toutes ses grandioses entreprises, Soyer ne fit pas fortune, et il mourut relativement pauvre, le o août 1858, à Tâge de quarante-neuf ans.

Il publia plusieurs ouvrages, entre autres un petit volume de cuisine populaire à bon marche ecrit dans un style original, et qui fut tire à 60,000 exemplaires. Il publia egalement un livre remarquable sur la cuisine des anciens, The Pantropheon^ ainsi

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que le Gastronomie regenerator, dont 2,000 exemplaires furent vendus dans l’espace d’un an, au prix d’une guinee le volume. Aujourd’hui, Soyer est presque oublie. Il n’est guère connu de la generation presente, que par une boisson de son invention qui porte son nom (Soyer’s nectar), et une sauce de sa composition dont on trouve encore quelques bouteilles parmi les rossignols des vieux magasins d’epiceries. Sur ces bouteilles, on voit le portrait de l’inventeur, coiffe d’une toque en velours ecarlate d’une forme particulièrement originale, qu’il avait l’habitude de porter dans sa cuisine.

Alexis Soyer.

Louis Eustache Ude est le premier de nos compatriotes qui initia les Anglais aux preceptes de la veritable cuisine française.

Dans un livre très interessant publie recemment à Londres par un de nos confrères, Herman Senn, The practical gaslronomy^ je trouve la biographie et le portrait d’Eustache Ude, avec des details très interessants sur les vicissitudes de la carrière aventureuse de celui qui devait se couvrir de gloire un jour, en apportant un element nouveau dans la manière de vivre des amateurs de bonne chère, dans un pays où l’ignorance des premières notions culinaires etait proverbiale.

Ude, après avoir ete cuisinier à la cour de Louis XVI, etait

LA CUISINE ANGLAISE 385

entre au service de Lœlitia Bonaparte, qu’il avait quittee après deux ans, pour entrer comme chef chez lord Sefton, aux appointements fabuleux pour l’epoque de 7,500 francs

Ce richissime seigneur, qui passait pour le roi des epicuriens anglais, sut si bien apprecier les talents de son cuisinier, pendant les vingt annees qu’il fut à son service, qu’il lui laissa à sa mort une pension de cent livres sterling;-. – Dde, après la mort de lord Sefton, devint le gerant du Crockfords club, le cercle le plus aristocratique de Londres. C’est alors qu’il publia son fameux livre en langue anglaise, qui eut un si fabuleux succès. C’etait la première fois qu’un ouvrage traitant de la cuisine française faisait son apparition en Angleterre; aussi fut-il tire à un grand nombre d’editions, et rapporta, dit-on, une petite fortune à son auteur.

The French Cook^ tel etait le titre de cet ouvrage rare aujourd’hui, mais dont la vogue fut inouïe lors de sa publication. Cet ouvrage ecrit dans un style brillant, mais quelque peu pretentieux, avait le merite de la nouveaute; et l’audace avec laquelle Ude proclamait la superiorite de l’art qu’il professait, sur tous les autres arls, causa un etonnement mêle d’admiration naïve parmi les Anglais. L’ancien chef de Louis XVI et de la mère de Napoleon fut dès lors considere comme le Messie culinaire qui devait regenerer la cuisine en Angleterre. D’après ce qu’affirme M. Senn, le père de Ude etait un chef subalterne dans les cuisines de Louis XVI, et sa mère exerçait l’etat de modiste. – L’enfant debuta d’abord comme apprenti avec son père; mais, ne se sentant pas les aptitudes necessaires pour la profession que ses parents lui imposaient, il quitta la maison paternelle et mena pendant plusieurs annees une existence assez accidentee. On le voit successivement apprenti chez un bijoutier, puis chez un graveur et chez un imprimeur. Plus tard, on le retrouve dans la boutique d’un mercier, et enfin il devient commis-voyageur pour une maison de soieries de Lyon. Comprenant qu’il n’avait pas de vocation pour la vie mercantile, il abandonna le commerce, et c’est ainsi qu’après avoir ete commis chez un agent de change, il en vient à occuper une place

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386 LA CUISINE ANGLAISE

d’inspecteur d’une des maisons de jeu autorisees à celte epoque. – Mais là encore, la fortune se montra rebelle, et Eustache Ude, fatigue de tant de deceptions» mais non decourage, resolut de continuer la « struggle for life v en embrassant la profession qu’il avait autrefois dedaignee.

Grâce à des protections puissantes, il parvint à entrer comme maître d’hôtel chez la princesse Lœtitia Bonaparte, qu’il quitta au bout de deux ans, pour aller en Angleterre prendre la direction des cuisines de lord Sefton.

L’existence aventureuse de cet homme extraordinaire lui valut le surnom de Gil-Blas culinaire, que lui decerna un ecrivain humoristique de l’epoque.

Gharles-Elme Francatelli ^1805-1876).

Francatelli contribua dans une grande mesure à «acclimater» la cuisine française en Angleterre. Il naquit à Londres de parents italiens, et fut envoye en apprentissage à Paris, où il eut la bonne fortune de travailler sous les auspices de Carême, à l’epoque où celui-ci etait au pinacle de sa gloire.

Ce fut Francatelli qui introduisit à Londres le système des dîners à la russe, à propos desquels il a dit fort judicieusement dans son livre :

« Le plaisir qu’on eprouve à voir devant soi, pendant plusieurs minutes, des plats appetissants artistiquement dresses, et desquels emane un arôme delectable, est loin de compenser l’impression desagreable quejcause la vue de ces mêmes plats, lorsqu’après les avoir degustes à satiete, on se trouve condamne à en contempler piteusement les debiîs informes, etàen respirer l’arôme affadi. »

Faisant allusion à la cuisine anglaise proprement dite, Francatelli dit encore :

« La simplicite en matière de decoration ei) cuisine est Aussi

LA CUISINE ANGLAISE 387

essentielle qu’en matière d’art, quel que soit cet art. Gardezvous donc de tomber dans l’errement des Anglais, qui abusent du decor au detriment du bon goût, comme ils abusent des epices et des condiments dans leurs assaisonnements. i)

– Francatelli etait d’un caractère emporte et peu sociable; aussi fut-il souvent oblige, malgre son talent incontestable, de resigner ses foutions en maintes occasions, dans plusieurs . maisons seigneuriales importantes.

Il occupa pendant plusieurs annees Temploi de mailre d’hôtel au palais de la reine Victoria. Plus tard, nomme gerant du fameux restaurant de la cite connu sous le nom de « Freemason’s lavern», il contribua puissamment à la vogue dont a joui longtemps ce celèbre etablissement.

Francatelli publia plusieurs ouvrages, parmi lesquels il faut citer le Modem cook qui fut tire à plus de quarante mille exemplaires. Il ecrivit aussi un livre dedie à la classe ouvrière, The ivorking mans cookery book. Il mourut à Tâge de soixante et onze ans.

Les cuisiniers français en Angleterre.

Durant la plus grande partie de son règne, la reine Victoria eut toujours des Français comme cuisiniers : Francatelli, Aberlin, et Thjou, eurent Thonneut d’occuper ce poste à tour de rôle. Aujourd’hui, c’est un Allemand qui dirige la cuisine de Sa Majeste. Mais le chef pâtissier, M. Delorme, est Français. La maison du prince de Galles est sous le contrôle de Teminent Menager, qui commande à trois autres cuisiniers, egalement Français. Le duc d’York, fils du prince de Galles, a pour chef Binet, qui accompagna le jeune prince lorsqu’il fit son tour du monde. Le second fils de la reine Victoria, le ducdeConnaught, a’ chez lui Henri Cedard qui fit avec lui le voyage aux GrandesIndea.

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388 LA CUISINE ANGLAISE

Les gros bonnets de la finance qui, ici comme ailleurs, sont tous des connaisseurs et des gourmets, ne derogent point à la coutume, et n’admettent dans leurs cuisines que des artistes de nationalite française. Les quatre maisons Rolschild ont chacune le leur :

Lord Rotschild a pour chef Cochelin; le baron Ferdinand. Bonnard; le baron Alfred, Lamotte; le baron Leopold, Bladier; M.BisschofsbeimyCorblet; M. Goldsmith/fhoumire; M. Sassoun, Champi, etc.

Presque tous les cuisiniers des ambassades à Londres sont Français :

A Tambassade de France, c’est Juteau; à la Russie, c’est Augustin; à l’Autriche, c’est Jacqueau, etc.

Parmi ceux de nos compatriotes qui occupent encore des postes importants, citons Gabuzet, qui, depuis une vingtaine d’annees, dirige la cuisine de lord Sefton, surnomme à bon droit le Lucullus anglais; Jamet, le chef de lord Cadogan, un des plus riches pairs d’Angleterre; Deschamps, chez lord Cartbope; Pouard, le « Mess Master » des gardes de la reine, promoteur des dernières expositions culinaires, qui eurent tant de succès à Londres; Emile Dubois, qui a herite du talent de son père Urbain Dubois; Boizot, Debrelagne, Garnier, l’eminent administrateur du restaurant Nicol, et les chefs des immenses hôtels du West End, parmi lesquels je citerai Savoy Hôtel, dont le chef est A. Escoffier; Azema, au Berkeley Hôtel; Crelien, au Metropole, etc.

Mentionnons encore, parnii les maisons seigneuriales, celle de lord Shrewsbury, ce gentilhomme excentrique qui a dote Paris de ces agreables et commodes vehicules que les Parisiens n’ont pas encore su apprecier. Son chef, Victor Cordebas, est un de ces cusiniers de la bonne et vieille ecole que recherchent les connaisseurs. Lord Brougham, le fils de celui qui a fonde la ville de Cannes, possède Andre; lord Salisbury a pour chef Chaumette; le duc de Rutland, Thevenol lîls; le duc de Westminster, Arnaud; le duc de Portland, Carre; le duc de Norfolk, Carpentier; lord Wimbourne, Duval; la comtesse de Wilton,

LA CUISINE ANGLAISE 389

Louis GuilloL; lord Burlon, Cubât; lord Lancaster, Francis Besson; lord Ivcagh, E. Beguinot; lord Ashburton, Demoncey; lord Headford, A. Blanc; M. Mackay, Verger; MM. Langtry, Roche; lord llchesler, ProfiL

Les chefs des principaux clubs sont aussi presque tous Français. Ainsi

Au Naval and Mililary Club, c’est Gudefin;

Au New Unîvorsity Club, – Boizot;

Au Reform Club, ‘ – Nicpleau;

Au Army and Navy, – Gonnard;

Au Constilutional, – Burlet;

Au Conservative, – Bertrand;

Au Carîton Club, – Lenevester;

A TAlheneum, – Parizot;

Au WelHngton Club, – Bazot;

Au Devonshire Club, – Bocart;

Au Travellers Club, – Favelier;

Au Brook’s Club, – Grisot.

Etc., etc.

Enfin, je citerai pour finir Pournin, chez sir Charles Dilke, le gastronome diplomate bien connu; les frères Vallet.

Puis, parmi les representants de la vieille ecole :

Langlois, Chiboust, un descendant du fondateur de la fameuse pâtisserie bien connue; Debisschop, Isoard, Thevenot père, qui dirigea pendant une vingtaine d’annees les cuisines de lord Clarendon, le descendant direct du celèbre duc de Buckingham; Destraz, Boher, Dupuis, Gaillard, Devien, elc.

Le club culinaire de Londres.

Le club culinaire français fut fonde le 13 mars 1845. Dans l’origine, ce cercle, malgre son titre, n’etait pas exclusivement culinaire, car en consultant les archives de la Societe,

3ÎK) LA CUISINE ANGLAISE

j’y ai trouve parmi les fondateurs non seulement des cuisiniers, mais des coiffeurs, des maîtres d’hôtel et des representants de divers autres corps d’etat.

En 1888, le club fut refondu entièrement et de nouveaux statuts remplacèrent les anciens.

Sous la presidence de M. Filhon et avec le concours de MM. Cunat, Boizot, Pouard et Bohers, un comite de douze membres fut choisi, et un local en rapport avec l’importance de la nouvelle societe fui loue au centre môme du West End, et à proximite de Piccadilly. Ce local comprend, au premier etage, une grande salle où Ton trouve une bibliothèque et les principauxiournaux français et anglais. Dans une autre pièce, est installe un bar, où les membres peuvent se procurer à des prix moderes des rafraîchissements de loutes sortes.

Au second etage il y a deux salles distinctes, et dans chacune d’elles un billard pour Tusage des societaires et des visiteurs.

D’après les statuts, pour être membre actif, ilfaut être Français et exercer la profession de cuisinier. Neanmoins, quiconque, faisant partie d’un etat se rattachant à l’alimentation, peut être admis comme membre honoraire :

u L’admission est fixee à d livre 11 scbellings et six pence, (40 francs) et la cotisation à une guinee (26 fr. 50).

« L’administration se compose d’un president, d’un vicepresident, de deux curateurs et d’un comite de quinze membres.

fi Au 1″ fevrier de chaque annee, les membres qui n’ont pas paye leur cotisation sont affiches dans les deux principales salles du club, et tel membre, qui n’aura pas regle au i«’ mars, est raye du contrôle de la Societe.

« Chaque membre peut amener ses amis occasionnellement, en inscrivant son nom et celui de ses amis sur un livre affecte à cet usage. Nul membre ne pourra amener le même visiteur plus de deux fois par semaine.

u Toutmembre amenant un visiteur devra ordonner et payer lui-même les consommations, sous peine d’expulsion, et le visiteur devra quitter le club en même temps que le membre expulse.

LA CUISINE ANGLAISE 391

a Le club est ouvert depuis 11 heures du matin jusqu’à une heure après minuit.

« Le comite se reunit une fois par mois. Un sous-comite de sept membres se reunit une fois par semaine pour verifier les comptes, recevoir les plaintes et faire un rapport qui est ensuite presente au comite general.

a Une assemblee generale a lieu le premier mercredi du mois de juillet et de janvier; au commencement de chaque annee on distribue à tous les membres un compte detaille imprime de Telat financier de la Societe.

a Sur une demande adressee au president et signee par vingt membres, motivant une proposition, le comite convoque une assemblee extraordinaire à ce sujet. »

Telle est en substance la teneur des statuts de la Societe culinaire française de Londres, qui, quoique n’ayant pas un but philantrophique determine, et sans être une societe de secours mutuels, n’en est pas moins une societe anonyme de bienfaisance; car chaque annee elle prelève sur son budget une certaine somme pour venir en aide à nos compatriotes indigents à Londres. Deplus,4es benefices realises dans les expositions culinaires annuelles sont repartis entre les institutions charitables françaises et anglaises.

Aujourd’hui le comite du club est ainsi compose :

President : A. (io.vdolo. Vice-president : C. Corblet. Tresorier; S. Deniau. Secretaire: G. Molliex.

l POUARD.

Curateurs : ] Boh^r.

j Lamarre.

Membres du comite : Boizot, Bertrand, Cassignol, Debretagne, FiLHON, Parizot, Nicolle, Vallet, Parade, Mathe, Menager, Gaillard, Favelier, Verger, Laroche.

LES METS NATIONAUX

Chaque peuple a ses coutumes, ses mœurs, ses lois et sa religion. Chaque pays a son chant, son costume et son mets national.

La Russie a comme mets national, le caviar; l’Allemagne, la choucroute; TEspagne, ToUa podrida; l’Italie, le macaroni, la Turquie, lepilau; la Chine, les nids d’hirondelles, – et la France, le pot-au-feu.

L’adoption d’un mets populaire s’identifie dans Tespècë avec le climat du pays, ainsi qu’avec la nature et la production du sol, et les aptitudes des habitants. C’est ainsi que les peuples du nord reclament une nourriture plus riche et plus substantielle que les peuples meridionaux. La sobriete de ceux-ci ne s’accommoderait nullement avec le temperament de ceux-là, de même que rintemperance des uns ne conviendrait pas à la nature des autres.

En France, il y a des mets speciaux originaires de certaines villes ou de certains departements, tels que les pâtes de Pithiviers et d’Amiens, les poulardes du Mans, les saucissons de Lyon, les rillettes de Tours, etc.

Il en est de même on Angleterre, où chaque comte a une specialite à son actif. C’est ainsi que le comte de Willshîre est renomme pour son lard fume; le Yorkshire pour ses jambons; le Leicestershire pour ses pâtes de porc. Le mouton le plus

I.A CLISLNE ANGLAISE 393

estime vient du pays de Galles; le meilleur bœuf vient d’Écossc et les volailles grasses sont elevees dans le Surry. Chester produit un fromage renomme; Bristol un chocolat très estime; Yarmouth des. harengs fumes; Cambridge des saucisses; Norwich des oies, Dublin du a stout », et le Devonshire du cidre excellent.

Quant aux plats nationaux, je citerai d’abord pour memoire, le plat patriotique par excellence auquel le roi Henry VIII, dans un elan d’enthousiasme gourmand, decerna solennellement le titre de baron. J’ai nomme le a sir loin of beef » (baron de bœuf).

Les potages nationaux anglais comportent la soupe à la tortue,-le cocky leeky (potage aux poireaux), le Mulligatawny soup (potage indien), le scotch brolh et le potage à la queue de bœuf.

Puis le mutton chop, le rumpsteak, le pâte de porc» le pudding de beefsteak, le curry de poulet, le gigot de mouton bouilli sauce aux câpres, et le rond de bœuf sale.

Parmi les entremets, mentionnons en première ligne le legendaire plum pudding qui commence à s’acclimater en France, le plum cake, les tartes aux fruits de toutes sortes, surtout les tartes de pommes, de rhubarbe, de groseilles à maquereaux et d’abricots verts. Enfin les puddings de toute nature, aux fruits, aux pâtes et à la graisse de bœuf, etc.

Telle est la nomenclature des mets nationaux dont les Anglais s’enorgueillissent et je m’empresse de constater qu’ils ont raison d’en être fiers!…

Le gourmet anglais.

Dans l’echelle des merites gastronomiques, je ne sais à quel degre la plupart des grands auteurs classiques de la Table auraient place le gourmet anglais.

Malgre mes lectures nombreuses, je n’ai pu decouvrir ce que

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pensaient à ce sujet Grimod de la Reynièrc, Brillât-Savarin, ou même Monselet.

En revanche, Carême se loue fort, dans ses Memoires, de l’accueil qu’il reçut du roi Georges IV, dont il avait dirige les services, et qu’il considerait comme un « connaisseur des plus delicats ». Il distribue egalement à lord Stewart et lord Stairs des a cerliQcats » de virtuosite gourmande qui, à la verite, ne sont pas pour deparer la memoire de ces grands seigneurs.

Ces indications doivent-elles suffire pour nous permettre de porter sur le gourmet anglais un jugement favorable ?

Je dis : oui, tout net.

C’est que, à l’exemple de Carême, elles sont legion les voix de ceux qui viennent declarer la parfaite intelligence gastronomique des mangeurs d’outre-Manche.

Le gourmet anglais, malgre ses epices diaboliques, sait deviner et choisir le bon morceau. Il sait aussi l’apprecier.

D’ailleurs, un detail indiscutable vient prouver la verite de cette affirmation.

N’est-ce pas l’Angleterre qui, avant Carême même, et depuis cet illustre maître, fait la plus grande consommation de… cuisiniers français?

UNE MAISON SEIGNEURIALE

Le personnel de la cuisine. – Le chef. – Les aides en jupons. – Los extras. – Le sous-sol. – La hierarchie domestique. – L’aristocratie des gens de maison. – Le dejeuner. – Le lunch. – Le dîner. – Le service à la russe. – Les repas des serviteurs.

Les hôtels seigneuriaux diiïèrent essenliellement des nôtres et si les riches Anglais possèdent des châteaux splendidcs et des parcs immenses, leurs maisons, à quelques exceptions près, sont d’apparence des plus modestes. Dans certains squares tels que Saint-James, Berkeley, Cavendish, etc., les maisons, bâties en briques, noircies par le temps et la fumee, sont empreintes d’un cachet lugubre et d’une tristesse navrante. Les jours de brouillard surtout, ces squares, avec leur longue file de maisons entourees de grilles noires à Tair sepulcral, ressemblent à une necropole. Detail curieux : on voit encore à la grille de beaucoup de ces hôtels les eteignoirs de fonte qui servaient autrefois à eteindre les torches que portaient les coureurs precedant les carrosses et les chajses à porteurs.

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Le premier dejeuner a lieu à dix heures du malin et se compose de the, de cafe et de cacao, accompagne de plusieurs plats chauds tels que poissons, rognons, saucisses, œuïs et lard friL En outre, la lable est garnie de fruits, et sur le buffet, sont alignes plusieurs plats de viande froide tels que jambon, galantine, langue et pâte.

Le lunch est servi à 2 heures, et le dîner à 7 heures i/2. Le lunch correspond à notre dejeuner à la fourchette, et le dîner est servi à la russe; mais la manière de presenter les plats diffère de la nôtre, en ce sens que le poisson se sert toujours immediatement après le potage, et les releves de boucherie après les entrees. Dans aucun cas, on ne sert d’entree de poisson. Au second service seulement on risque parfois une salade de homard, unemayonnaise de saumon, ou des coquilles d’huitres au gratin.

Il est d’usage, dans les grands dîners, de servir après les entremets, un releve de fromage et un hors-d’œuvre quelconque fortement epice, ayant pour but de stimuler laction digestive, et de preparer le palais à la degustation des vins de dessert.

La plupart des cuisines sont situees dans le sous-sol, où sont aussi installes les communs. A Londres, les cuisines sont très sombres et pèchent par la ventilation. En revanche, eWes sont amplement garnies de batterie et, comme entretien et proprete, elles sont irreprochables.

Les appointements fixes J’un chef de cuisine de grande maison varient depuis trois jusqu’à cinq mille francs par an.

Les rôles d’aide, de garçon de cuisine, d’enlremetier, sont tenus par des jeunes filles importees du domaine seigneurial, où où elles sont recrutees parmi les familles de paysans tenanciers. Elles sont classees dans leur emploi selon leurs capacites. La première, en Tabsence du chef, prend la direction du travail. La seconde s’occupe des repas des domestiques; la troisième prepare les legumes, ella quatrième, qui est une femme de journee, remplit l’office du a plongeur : .

Ces filles, il faut le dire à leur louange, sont très traN’uiJleuses et d’une proprete exemplaire. Elles sont generalement dociles, honnêtes, intelligentes et devouees. Après un stage de deux ou

LA CUISINE ANGLAISE

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trois ans îwec un Français, elles trouvent facilement à occuper, comme cuisinières, des places de premier ordre. Seulement, ces cuisinières ne restent pas longtemps en condition. Elles sont vite recherchees en mariage par les valets de chambre et maîtres d’hôtel, qui trouvent en elles des menagères experimentees qui pourront leur être utiles plus tard, lorsqu’ils seront à la tête d’un public house ou d’une auberge de province, but de l’ambition de tous les domestiques anglais.

Dans les jours de grands dîners et de receptions, le chef s’adjoint un ou plusieurs extras, qui sont payes à raison d’une guinee par jour (26 fr. 50). Il y a des cuisiniers à Londres dont la specialite est de faire des extras, et qui ont une clientèle qui leur procure un travail très remunerateur.

L’aristocratie existe à un degre imperieux et grotesque, jusque dans la domesticite des maisons.

Le nombre des domestiques depasse de beaucoup celui des maîtres. Il y a d’abord dans une maison bien montee : le a steward » , maître d’hôtel, et la « house keeper, » femme de charge. Puis le a bullcr », sommelier, le valet de chambre, auquel est reste l’appellation française, et le « groom of chambers j ou officier

398 LA CUISINE ANGLAISE

d’annonce, qui a la charge des salons, et ses entrees dans les appartements ei les boudoirs.

Parmi le personnel feminin, il y a les femmes de chambre. Ces gens ne portent pas lalxvrie^font table à part, et tiennent le reste de la domesticite à une distance respectueuse, egale au moins à celle qui les separe de leurs maîtres.

Vient ensuite la livree qui comporte le «c under butler v ou argentier, qui a la charge et le soin de largenterie; le portier, les (n footmen » ou valets de pied, hommes choisis qui montent derrière l’equipage armes de longues cannes à pomme d’or; le cocher, toujours gros et gras, à figure imberbe, qui porte la perruque à marteau poudree et le tricorne galonne. Enfin les palefreniers, les pages, les filles de chambre, les bonnes d’enfant et le menu fretin du service.

Celle seconde classe de domestiques ne fraye pas avec la première et prend ses repas dans une salle à part.

J’ai omis de parler de la gouvernante lorsqu’il y a desenfantia. Elle dejeune et prend le the avec les parents, mais son dîner lui est servi dans sa chambre.

Quant au chef , il est maître absolu de sa cuisine et jouit d’une consideration exceptionnelle. Une chambre situee près de la cuisine lui est allouee, et cette chambre lui sert de cabinet de toilette, de bureau et de salle à manger. Chaque matin, il moiiLe au salon, passe sou menu et reçoit ses ordres pour la journee.

L’accès de la cuisine est interdit à tous les domestiques, exeepte lorsqu’ils y sont appeles par l’exigence du service. Les serviteurs d’une maison anglaise bien ordonnee ne doivent avoir aucun rapport avec le personnel prepose à la preparation des aliments.

Les serviteurs font, comme leurs maîtres, quatre repas par jour. De plus, il leur est alloue une pinte de bière et un morceau de fromage à onze heures du malin et à sept heures du soir Avec un pareil regime, on ne doit pas s’etonner de la bonni^ mine et de la sante florissante des serviteurs anglais.

La perspective d’être bien nourri, bien loge et bien habille, sans la crainte d’être surmene, est un attrait seduisant pour les

LA CUISINE ANGLAISE 399

hommes peu soucieux de leur position sociale; aussi la domesticite est-elle elevee à la hauteur d’une institution, par ces gens qui se font une gloire de porter une riche livree, et de parader derrière un carrosse armorie.

Des cuisines en general.

Je parle plus loin des grands restaurants dont les cuisines sont situees à Tetage le plus eleve.

Ce système, mis en pratique par tous les grands hôtels do fuondres, a le double avantage do ne pas incommoder le public par Todeur emanant des fourneaux, et de rendre la cuisine plus supportable aux cuisiniers, qui ont, de cette façon, de l’air et de la lumière h profusion.

Quand donc verrons-nous s’introniser en France ce système americain et anglais, que Thumanite reclame et que l’hygiène exige? Quand donc le conseil municipal se decidera-t-il à agir serieusement, et ordonnera-t-il la suppression de ces ignobles cuisines qui sont la honte de certains hôtels et restaurants de la capitale?

Quand donc obligera-t-on les architectes à rompre avec la routine, et les forcera-t-on à construire des cuisines plus modernes, reunissant les conditions essentielles au bien-être d’ouvriers, dont la profession, d’après le dire des medecins et des hommes competents, est une des plus penibles, et, d’après la statistique, la classe chez laquelle la mortalite fait le plus de ravages ?

Dernièrement encore on a bâti à Paris un hôtel qui, paraît-il, est un modèle de confort et de luxe. On pensera peut-être (fuo l’installation des cuisines est en rapport avec l’importance de l’hôtel. Il n’en est rien. On croirait, au contraire, qu’on ait voulu rencherir encore sur les nombreux inconvenients, mille fois signales, qui existent dans les autres etablissements de ce genre. Dans une cave privee d’air et de lumière, 30 ou 40 mal

400 LA CUISINE AIVCiLAISE

heureux ouvriers sont enfermes pendant dix ou douze heures. Un immense fourneau, chauffe à blanc, les emanations de la braise, la tlamme du gaz, le calorique des fours et la vapeur des marmites transforment le local en une veritable etuve, aeree seulement par quelques soupiraux, qui deversent une couche d’air glace sur la tête des travailleurs. Telle est la cuisine de cet hôtel que Ton cite comme un des etablissements modèles de la ville lumière !

LES EXPOSITIONS CULINAIRES A LONDRES

Stimules par l’exemple des Cuisiniers de Paris, qui^ en 1884, inaugurèrent en France la première exposition gastronomique, le Club culinaire de Londres organisa à son tour un concours artistique decuisine. Un comite seforma àccteffetsous la direction de M. Pouard, Tintelligent et capable « Mess Master » des gardes delà reine au palais de Saint-James, et avec le patronage du prince de Galles et des principales notabilites de Taristocratie anglaise.

Le succès de l’exposition depassa les esperances des organisateurs, et le produit des entrees et des dons, qui s’eleva à la somme d’environ 10,000 francs, fut consacre à des œuvres de charite.

Deux prix d’honneur, consistant en deux medailles d’or de la valeur de 500 francs chacune furent decernees à M. Debretagne et à M. Lecomte pour des ensembles de pièces remarquables à tous les points de vue.

L’annee suivante, une seconde exposition internationale eut lieu et fut non moins brillante que la première. Ce fut M. Cyril Corblet, l’eminent chef de M. BischoITsheim, qui decrocha la limbale. Le grand prix d’honneur, d’une valeur de vingt livres sterling, lui fut decerne.

Depuis 1886, plusieurs autres concours culinaires ont eu lieu à Londres dans des conditions plus ou moins favorables; mais aucune de ces expositions n’obtint le même succès que les deux premières.

UNE CUISINE LONDONIENNE

La description d’une cuisine à Londres n’apprendra rien de nouveau à ceux qui ont habite l’Angleterre, mais pourra paraître interessante à ceux qui n’ont pas traverse le detroit, et que le hasard ou leur bonne fortune obligera quelque jour à entreprendre le voyage.

Les difficultes à surmonter, en arrivant dans un pays dont on ne sait pas la langue, sont un peu attenuees, lorsqu’on connaît les habitudes de ce pays, et la manière de vivre de ses habitants.

Que ceux-là donc que la chose interesse veuillent bien me suivre, et je les conduirai dans la maison d’un noble lord quelconque, et leur ferai la description complète de l’interieur de la cuisine.

Point de ces portes cochères monumentales, telles que celles qui ouvrent les demeures de l’aristocratie parisienne. Point de ces grandes cours, au fond desquelles s’elève un majestueux perron, surmonte d’une elegante veranda. Au lieu de cela, des maisons sans style architectural bien defini, toutes bâties sur le même modèle, et alignees symetriquement autour d’un grand square; un portique, flanque de deux colonnes, donne accès dans la maison qui est entouree d’une grille. Cette grille s’ouvre . sur un escalier d’une vingtaine de marches, conduisant au sous-sol où sont installes les communs. Au bas de l’escalier, un long couloir mène aux cuisines, qui sont generalement un peu sombres, mais toujours remarquables par l’eclat brillant de la batterie et la blancheur des nappes qui couvrent les tables. Les fourneaux occupent tout un côte, et se composent d’une plaque (hot plate) de bouches à charbon de bois, et d’appareils à gaz dont la lumière est isolee des yeux par des barres d’acier disposees en forme de jalousies. Du côte oppose aux fourneaux, une

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402 LA CUISINE ANGLAISE

etuve à vapeur et un dressoir, au-dessus duquel a ete pratiquee une fenêtre à guillotine, par laquelle on envoie le dîner.

Ce système a pour but d’empêcher les serviteurs d’entrer dans la cuisine^ tout en leur permettant de faire leur service.

Les garde-manger sont generalement bien compris, et sont pourvus d’un timbre à glace de grande dimension, dans lequel on peut tenir au frais tout un souper de bal.

Ces timbres sont indispensables; car la saison des receptions et des grands dîners ayant lieu pendant Tete, ce n’est que grâce à une surabondance de glace que Ton parvient à conserver les provisions et les victuailles.

Mais retournons à la cuisine. Le tournebroche ofTre cette particularite, qu’il est mis eu mouvement par un volant à helice place dans l’interieur de la cheminee. C’est le courant de fumee, qui, en agissant surce volant, lui fait operer son mouvement de rotation. II est bon d’ajouter que l’on ne brûle que du charbon de terre. Le feu, retenu par une forte grille placee perpendiculairement, chauffe en même temps un reservoir d’eau construit derrière l’àtre, et devant la cheminee, est placee une immense armoire doublee de zinc, qui sert à la fois d*etuve et à repercuter la chaleur. On l’appelle screen.

Les grillades faites sur la braise ne sont appreciees que par quelques rares connaisseurs; aussi n’en fait-on qu’un usage fort restreint. On se sert de grils doubles à fermoirs, qui se suspendent devant le feu de la cheminee. Ce système a l’inconvenient de presser la viande ei d’en extraire le meilleur de son jus. Cependant, dans les grands hôtels et restaurants, on fait les grillades sur un gril horizontal place sur un feu de coke; mais on n’obtient pas ce goût particulier inherent à la grillade faite sur un feu de braise.

Une cuisine mQdèle au gaz.

Le prix relativement peu eleve du gaz à Londres est la principale cause de son adoption dans toutes les cuisines. Âujour

LA CUISINE ANGLAISE 403

d’hui, grâce aux perfeclionnements apportes aux appareils, on est parvenu à en appliquer Tusage à toutes les exigences culinaires, si bien que la vapeur et le gaz ont totalement detrône le coke et le charbon, en attendant que ces deux agents soient à leur tour supplantes par Telectricite. Dans plusieurs des grands hôlels construits recemment, tout se fait au gaz et à la vapeur, et plusieurs grands seigneurs ont suivi l’exemple donne par les hôlels, et transforme leurs cuisines. Chez le duc de Westminster, un des plus riches pairs d’Angleterre, on a entièrement supprime le charbon de terre et de bois dans la cuisine, qu’on cite comme une des plus belles de la metropole. Le four, le griL, le fourneau et la broche, sont alimentes par le gaz. M. Arnaud, soit dit en passant, oulre ses qualites incontestables, est un chercheur, et est rinveuteur de plusieurs appareils ingenieux, applicables aux usages de la cuisine, et qu’il a fait breveter.

Citons, entre autres, sa machine à passer les purees, adoptee dans les grands hôtels et restaurants; sa lardoire hygienique, et surtout sa dernière invention, qui consiste en un appareil pour faire la farce à quenelle, sans l’emploi du mortier ni du tamis.

Mais revenons au gaz et à son application aux usages culinaires. Dans la cuisine du duc, les fourneaux agences d’après les derniers perfectionnements occupent tout un des côtes de la cuisine, et sont etablis d’après le système automatique. Au centre de chaque fourneau se trouve un piston qui s’enfonce sous la pression de la casserole et, par ce fait, projette la flamme contre les parois exterieures de l’ustensile, et lorsqu’on veut ralentir Tebullition et diminuer la chaleur, il suffit de faire glisser la marmite sur le coin du fourneau; alors, le piston reprenant son mouvement ascendant, ferme le gaz qui se modère de lui-même, sans qu’il soit besoin de le regler au moyeu de la clef. Le système du gril est non moins ingenieux; la flamme du gaz, projetee vers la voûte de l’appareil, rougit en quelques minutes une epaisse plaque de tôle. Le beefrsteakou l’objet à griller, quel qu’il soit, est alors place sur le gril, que l’on peut à volonte eloigner ou rapprocher du foyer, au moyen d’un levier place à la base de l’appareil. Une lèchefrite à tiroir reçoit la graisse qui s’echappe de la viande.

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Î.A CUISINE ANGLAISE

Un four à gaz, mesurant un mètre de hauteur sur quatre-vingts centimètres de largeur, est destine à la cuisson des viandes; tandis qu’un autre, de mêmes dimensions, est exclusivement reserve pour la pâlisserie. Ces fours, qui sont en briques et doubles de fer, sont chauffes par un simple cordon de gaz, et construits de telle sorte, qu’ils conservent leur chaleur deux heures après Textinction du gaz.

Une etuve, qui sert en même temps do table à dresser, complète l’installation de cette cuisine modèle.

Il est surprenant que la France, la nation culinaire par excellence, se soit laisse distancer par l’Angleterre dans la construction des appareils de cuisiuo à gaz; car il est incontestable que l’emploi du gaz dans la cuisine offre de grands avantages au point de vue de l’economie d’abord, puis sous le rapport de la proprete, de l’uniformite de la cuisson et de la celerite dans le travail.

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LES RESTAURANTS DE LONDRES

Le Cafe Royal.- Galli. – Spiers et Pond. – The Ship and turtle Tavern. Cify bars. – Grill rooins. – The Criterium. – Painter. – Simpson. – Bcnoist. – Bellis.

A Londres, les restaurants proprement dits n’existent que depuis une trentaine d’annees. Avant celle epoque, on ne connaissait en fait d’etablissements de ce genre que les tables d’hôte à prix fixe des « public houses »; les « bars », où Ton mangeait debout, le plat du jour garni de legumes cuits à Teau; les u chophouses » où Ton ne servait au client que des chops et des beafsteacks; et les «cook shops s ou boutiques de charcutiers, où Ton ne pouvait se procurer que de la viande rôtie ou bouillie.

La boutique du cook shop servait de salle à manger; pour siège on avait des bancs denues de coussins, et les tables, separees entre elles par de hautes cloisons, vous cachaient à la vue de vos voisins. Non seulement on mangeait horriblement mal dans ces etablissements, mais le service y etait deplorable et laissait beaucoup à desirer sous le rapport de la proprete.

L’origine des restaurants à la française est curieuse, et assez près de nous pour qu’on s’en souvienne. En 1853. un Italien nomme Carlo Gatti s’installa dans une petite boutique à l’entree

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du pont Hungerfortet imagina de debiter des glaces à un penny le verre. Jusqu’alors, une glace etait consideree comme chose de luxe, et se payait un sliilling. Or, comme celles que confectionnait Galti etaient excellentes, et que la boutique du marchand se trouvait dans un endroit très passager, la renommee de ritalien s’accrut rapidement, et il realisa en peu de temps une assez jolie fortune. L’engouement pour les glaces de Gatti etait tel, qu’on se bousculait pour arriver à se faire servir, et qu’on avait souvent recours à l’intervention de la police, pour faire circuler la foule.

LçL petite boutique du fortune glacier ayant ete expropriee pour la construction delà station de Charing Cross, Gatti s’etablit un peu plus loin, dans le strand, et adjoignit à son commerce de glaces, un cafe-restaurant. Il continua à prosperer, et aujourd’hui ses fils sont proprietaires de plusieurs hôtels et restaurants importants. L’exemple de Gatti fut bientôt suivi par bon nombre de ses compatriotes, qui ouvrirent des etablissements à l’instar du sien, dans tous les quartiers de la capitale.

Le Cafe Royal

A celte epoque, un de nos compatriotes, M. Nicol, entreprit de fonder dans Regent Street un restaurant essentiellement français. Nicol eut à surmonter des obstacles sans nombre, à combattre des difficultes inimaginables; mais grâce à son energie, à sa perseverance et, j’ajouterai même, grâce à son genie, il sortit victorieux de la lutte, et aujourd’hui, le Cafe Royal est cite comme le premier et le plus somptueux restaurant de Londres; quant à sa cave, elle peut rivaliser avec celle des meilleures maisons de Paris.

Le personnel de la maison comprend deux cents personnes environ, dont une trentaine de cuisiniers sous la direction de M. Garnier, dont les talents administratifs, aussi bien que les

LA CUISINE ANGLAISE 407

merites culinaires, n’ont pas peu contribue à la bonne renommee de la maison. M. Garnier dirige la cuisine du Cafe Royal depuis une quinzaine d’annees.

M. Nicol est devenu millionnaire et, outre son splendide etablissement de Regent Street, il est aussi le possesseur d’un des principaux theâtres de Londres : a the Empire theâtre »•

Spiers et Pond.

Quoique Nicol ait beaucoup aide par son initiative à popula riser le système de restaurant à la française, on est force d’admettre que MM. Spiers et Pond ont contribue plus puissamment encore à propager ce système en Angleterre.

Stimules par le succès de M. Nicol, ces deux hardis innova teurs ouvrirent des restaurants aux terminus des grandes lignes de chemins de fer, et obtinrent le monopolo des buffets de toutes les stations de la Grande-Bretagne. Lors de l’exposition internationale, on a ete à même de juger de l’importance de la maison Spiers et Pond par leur splendide installation au Champ-de. Mars. Bref, grâce à la liberale et opulente association de ces deux hommes intelligents et audacieux, Londres possède maintenant des restaurants qui peuvent rivaliser avec ceux de Paris pour la richesse, le confort et la bonne cuisine.

Recemment, Spiers and Pond ont ouvert à Paris un restaurant à rinstar de ceux qu’ils ont à Londres. Ils se sont installes au premier etage de l’immeuble occupe par TOlympia dans le quartier de la Madeleine, où reside un grand nombre de negociants anglais. – Ce restaurant etabli à Tanglaise, avec grill room et une cuisine nationale, ne peut manquer d’avoir une nombreuse clientèle.

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The Ship and turtle Tavem.

Parmi les etablissements de restauration de la Cite, un des plus curieux est sans contredît « the Ship and turtle Tavern », fonde il y a une soixantaine d’annees par George Painter, dont le petit-fils a recueilli la succession. Cette taverne est devenue un restaurant; mais autrefois on n’y consommait que du potage tortue. Aujourd’hui c’est encore une specialite de la maison, qui en expedie journellement en ville, en province et à Tetranger, des quantites enormes au prix de uneguinee le litre.

City bars.

On trouve encore, dans la Cite, d’immenses « bars » consistant en un comptoir circulaire où les clients viennent s’attabler sans s’asseoir. Là, il se font servir à leur gre des tranches de viande rôtie ou bouillie, des portions de volaille ou de gibier; de la viande froide, des sandwiches, du fromage, ou même un simple biscuit, accompagne d’un verre de porto ou de xerès ou d’une pinte d’ale ou de stout.

Entre midi et une heure,. heure du lunch, tous les employes des maisons de commerce, des banques et des bureaux de toutes sortes, font irruption dans la rue, et se precipitent vers les etablissements où ils ont coutume de prendre leurs repas.

Rien de curieux comme l’aspect de ces bars à ce moment. Les places sont litteralement prises d’assaut; car les premiers arrives sont les premiers servis. Là, point de privilège, le plus petit employe est servi avant le chef de bureau s’il l’a distance; la hierarchie perd ses droits devant la tranche de roast beef et la pomme de terre en robe de chambre. L’habitude du bar est

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tellement passee dans les mœurs des gens de la Cite, que j’ai vu de gros negociants et de riches banquiers s’attabler sans scrupule à côte de leurs plus infimes subalternes.

Grill Booms.

11 existe dans la Cite des restaurants d’un ordre tout à fait typique, nommes yrill rooms (salle du gril); dans ces etablissements, on consomme presque exclusivement des beefsteaks et des mutton chops, que Ton fait cuire sous les yeux des consommateurs. A cetefTet, un large fourneau rempli decoke, chauffe à blanc, est etabli à Tune des extremites de la salle. Au-dessus de cette fournaise est suspendu un immense gril d’acier poli devant lequel, uu chef, muni d’une paire de pincettes en nickel, tourne et retourne les chops et les steaks, lesquels sont servis immediatement aux clients au fur et à mesure qu ils ont atteint le degre de cuisson desire.

Dans certaines maisons le gril est en argent massif, particularite que le restaurateur a soin de specifier sur son enseigne, pour allecher les naïfs, qui s’imaginent que la viande sera meilleure ou plus tendre, parce qu’elle aura ete cuite avec un ustensile aussi luxueux.

Il est d’usage de deposer, en sortant, un penny dans une sebille placee près du fourneau. Ce sont les profits du cuisinier.

La dexterite de ces cuisiniers à se servir de lapiucette, et leur habilete pour griller à point un « steak » ou un « chop », est remarquable et fort appreciee des clients. 11 est vrai que c’est chez ces hommes une specialite, et que là se borne leur savoirfaire; car ils sont ignorants des plus simples notions culinaires, ce sont des grilleurs et non des cuisiniers. J’ai connu un de ces virtuoses du gril, auquel les habitues de l’endroit firent present, par souscription, d’une pincette en argent portant une inscription des plus mirifiques.

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Les Restaurants du “West End.

QuitloDs la Cite et revenons dans le West End^ en passant par Tottenham Court Road, où se trouve un restaurant en renom : le Horse shœ (le fer à cheval). Là, on dîne à prix fixe ou à la carte. Le dîner à prix fixe se compose de viandes rôties ou bouillies dont on peut manger à discretion.

Les pièces de resistance sont dressees sur des labies à rechaud et à roulettes; et, lorsque le consommateur a fait son choix, un chef en costume traditionnel arrive auprès de lui, en roulant la table contenant le rôti qu’il decoupe devant le client.

Dans le strand , se trouve le restaurant de la Gffiety, attenant au theâtre du même nom et appartenant à MM. Spiers et Pond. Ce restaurant est surtout remarquable parla situation de sa cuisine, qui est installee tout en haut de la maison.

Dans le strand, nous trouvons d’abord le Tivoli où, comme chez Gatti, Ton dejeune et Ton dîne en musique. Un peu plus loin, apparat tS/m;76’o/i, une desplusanciennesmaisonsdeLondres, dont la principale clientèle consiste en preneur de the, de cafe et de chocolat; en mangeurs de sandwiches, de gâteaux et de fruits. C’est la maison par excellence du lunch et du five o’clock.

Au Regent Circus, où viennent converger cinq grandes voies, s’elèvent le Criterium, le London Pavillon et le Trocadero, trois grands theâtres doubles chacun d’un restaurant et d’un bar. Enfin un peu plus loin on voit le Saint-James et le fameux cafe Monico. Puis, dans Covenlry Street, la maison typique de Scotl, exclusivement consacree aux mangeurs d’huitres et auxamateurs de homards. A la sortie du theâtre, il est de bon ton d’aller souper chez Scott.

Ce souper se compose ordinairement d’huîtres fraîches ou accommodees de façons diverses, de mayonnaises de homard, de saumon marine, ou de crabe assaisonne et servi dans sa carapace.

L. CUISINE ANGLAISE AU

Le Chevet de Londres.

C’est ainsi qu’on designe l’important etablissement de notre compatriote Benoist, dont la maison, situee au centre d’un des plus aristocratiques quartiers de Londres, ne le cëdc en rien aux plus grands marchands de comestibles et pourvoyeurs parisiens.

Benoist debuta il y a une vingtaine d’annees dans Wigmore Slreet, où il tenait une modeste boutique de charcutier, qu’il quitta pour agrandir son commerce, et vint s’etablir dans Wardour Street; mais là encore, grâce à l’affluence des affaires, et à l’extension de sa renommee, il se sentait trop à Tetioit, et comprenant qu’une lacune existait à Londres dans le système d’alimentation d’ordre superieur, il n’hesita pas à fonder le splendide etablissement qu’on admire aujourd’hui dans Piccadilly.

Benoist, en exposant dans sa vitrine un assortiment de pièces froides artistiquement dressees, de primeurs de premier choix et d’affriolante pâtisserie, a inaugure à Londres un genre encore inconnu; aussi a-t-il vite conquis une nombreuse clientèle parmi l’aristocratie, et obtenu le patronage du prince de Galles et de la famille royale.

Ce qui n’a pas peu contribue à donner à la maison le renom qu’elle possède, c’est la creation d’une specialite de bœuf sale et presse {pressed beef) dont elle fait un debit colossal. On en jugera lorsqu’on saura que la maison emploie, pour la preparation de ce mets, jusqu’à six tonnes de bœuf par semaine.

Il s’en expedie, non seulement dans tout le Royaume-Uni, mais encore en Amerique et jusqu’en Australie.

J’ai visite en detail l’etablissement luxueux de Piccadilly, et j*ai ete emerveille de l’ordre qui règne dans le travail et de la promptitude avec laquelle les commandes sont executees.

Soixante ou quatre-vingts ouvriers et commis, militairement

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LA CUISINE AINGLAISE

enregimentes, agissent sous les ordres de deuK chefs intelligents et capables, MM. E. Frances et A. Vaugon.

Les cuisines, situees dans le sous-sol, sont spacieuses, et reunissent les conditions d’eclairage et d’hygiène qu’on serait heureux de rencontrer dans toutes les cuisines de restaurants, qui laissent tant à desirer sous ce rapport.

La manutention s’opère avec le concours des trois puissants agents que la science moderne a mis au service de l’industrie : le gaz, la vapeur et l’electricite. Enfin, une chambre frigorifique, permettant de conserver les viandes et les comestibles, vient completer Teiisemble de cette cuisine modèle.

Les Marchands de tortue de la Cite.

Il existe, dans la cite, des marchands speciaux qui vendent des tortues vivantes. Mais la maison la plus importante est celle de T. K. Bellis qui en fait un prodigieux commerce.

Autrefois, avant l’application de la vapeur à la navigation, les seules tortues qu’on pouvait se procurer en Angleterre etaient importees par les capitaines de navires à voiles, à leurs risques et perils. Or, comme chaque navire n’en transportait que de vingt à trente, il s’ensuivait qu’elles etaient très rares sur le marche. Il est vrai que la consommation etait cent fois moins grande qu’à present. Aujourd’hui, etant donnee la facilite des transports, les tortues abondent, et la maison BcUis en est toujoui*s amplement pourvue, grâce au contrat qu’elle a passe avec les pêcheurs de la côte indienne. Chaque quinzaine, il en arrive cent vingt à cent cinquante qui sont immediatement transbordees des docks dans d’immenses reservoirs attenant à retablissement; mais elles n’y demeurent jamais longtemps, car la maison Bellis fournit les principaux hôtels et les grands debitants des trois Royaumes-Unis.

LA CUISINE ANGLAISE 413

LES DINERS DE POISSON

Greenwich. – l’Hôtel Trafalgar. – Les dîners de poisson. – Politique et gastronomie. – Les white bait. – Diables noirs et diables rouges. – Les restaurants de Billingsgate à Londres.

C’est avec un profoud sentiment de regret que les aristocratiques gastronomes anglais ont appris que le celèbre etablissement, connu sous le nom de Trafalgar Tavern, avait succombe sous les coups de la mauvaise fortune, et que la maison, ainsi que le mobilier, le materiel et la cave, avaient ete adjuges par le commissaire-priseur, au plus offrant et dernier encherisseur.

Le «Trafalgar» est un splendide hôtel, auquel on a conserve Tancienne denomination de taverne, par respect pour la tradition. Construit sur le bord de la Tamise à Greenwich, non loin du majestueux hôpital de la marine, cet etablissement fut, pendant un temps immemorial, le rendez-vous habituel de la fine fleur de la societe britannique; mais depuis quelques annees, le public avait delaisse Greenwich, et la vogue, inconstante et capricieuse, avait emigre dans des endroits plus modernes, plus accessibles et moins dispendieux; en un mot, j^lus en rapport avec les goûts et les idees du jour.

Cet etablissement avait acquis une reputation universelle, pour Tanciennete de sa cave et l’excellence de sa cuisine.

Mais ce qui avait contribue à faire la fortune de ses proprietaires, c’etait la specialite originale d’un genre de dîner que l’hôtel avait inaugure lors de sa fondation, et dont il a conserve longtemps le monopole. Ces dîners etaient presque exclusivement composes de poissons d’espèces differentes, accommodes de toutes façons, depuis le maj^^stueux saumon jusqu’à l’infime ivhite bait. Pour complement, on servait ensuite une pièce de resistance, quelques entrees, et plusieurs entremets.

Un dîner dont le Trafalgar se faisait surtout gloire etait le

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grand banquet annuel, offert la veille de l’ouverture du Parlement anglais par le president du conseil, à tous les ministres et hauts fonctionnaires du gouvernement.

Cette coutume, qui remonte à une epoque indeterminee, existe encore aujourd’hui, et c’est dans la grande salle du Trafalgar iavern, qu’entre la poire et le fromage, entre le Champagne et le chambertin, on elabore le programme des travaux parlementaires, et les lois que le premier ministre se propose de presenter à la Chambre, pendant le cours de la session qui doit s’ouvrir le lendemain.

Ce diner, designe sous le nom de « white bait dinner 9, est considere comme un evenement politique très important, et l’annonce en est faite officiellement dans les journaux. Quant au menu, il ne varie guère, car la coutume exige que certains mets nationaux figurent dans le dîner. C’est d’abord Tinevitable soupe tortue, potage obligatoire de tout grand diner anglais. Après quoi, on sert un «Water souchey» qui n’est autre qu’un consomme de poisson dans lequel nagent quelques limandes et des legumes coupes en julienne. Ensuite, on place devant les convives des croquettes de homard et des filets de merlans frits; puis une malelotte d’anguille, du saumon grille à la tarlare, du turbot bouilli sauce crevettes, une salade de crabes et des filets de soles en curry à l’indienne. Enfin, pour clore la serie, on apporte eu grande pompe les «white bait», ces incomparables petits poissons qui ne se pèchent que dans les parages de Greenwich. Des pyramides de pain bis beurre, coupe mince comme des crêpes, les accompagnent.

Les white bait sont d’abord servis au naturel, c’est-à-dire simplement frits et saupoudres de sel; puis un second plat contient les white bait dits diables noirs {blacii devils), c’est-à-dire assaisonnes de poivre ordinaire; et enfin les diables rouges (red devils) qui sont litteralement couverts de poivre de Cayenne.

Après ce defile de poissons, on sert du roast beef ou de l’agneau, de la volaille rôtie, des entrees diverses et des entremets varies.

D’après la teneur de menu, on comprend qu’un tel dîner ne

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pouvait convenir qu’aux gens fortunes, aussi le Trafalgar u’etait-il frequente que par le haut commerce et par la classe essentiellement aristocratique.

Il existe à Londres des etablissements plus modestes où Ton fait aussi des dîners de poisson à Tinstar de ceux de Greenwich. Là, pour la somme modique de dix-huit pence (1 fr. 80), on peut se donner la satisfaction de manger à discretion huit ou dix sortes de poisson, y compris les tvhite bait, plus une tranche de roast beef et un plat de pommes de terre.

Ces restaurants typiques ne se trouvent qu’aux abords du fameux marche aux poissons de Billingsgate.

Les restaurateurs avoisinânts sont à même de s’approvisionner à bon compte, grâce à la faculte qu’ils ont d’acheter le poisson aux pêcheurs, qui viennent decharger leur butin jusqu’au pont de Londres et tout près du marche. C’est ce qui explique le prix relativement modique des dîners de poisson de Billingsgate.

Le garçon de restaurant. – The “Waiter.

La celerite dans le service est une chose qui laisse beaucoup à desirer dans les restaurants de Londres, et il en sera ainsi tant que ce service sera fait par des garçons anglais, auxquels il manque le je ne sais quoi, qui est le propre du garçon de salle français.

Un chef d’etablissement ne saurait se montrer trop difficile dans le choix des gens de service preposes à la salle à manger. L’allure, la prevenance, le tact et même le physique du garçon ont une grande influence sur l’esprit du client, qui trouvera souvent son dîner mauvais, parce qu’il lui aura ete servi par un homme dont la competence n’est pas à hauteur de sa fonction.

On trouve dans les restaurants et les hôtels, des garçons de

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toutes natioualiles. L^ Allemand est recherche parce qu’il est polyglotte, mais à part cet avantage, il a le defaut d’être brusque et souvent impoli. L’Italien est très obsequieux, trop bavard et trop flâneur. Le Français seul reunit les qualites desirables, il est actif, empresse, obligeant, propre etpoli. Quant à l’Anglais, il n’a pas le genie de l’emploi. C’est un type à part; il est d’une politesse excessive, mais d’un aspect flegmatique, raide et guinde, et d’une lenteur sans pareille. Pour rien au monde on ne lui ferait changer son allure, et quelles que soient les epithètes dont on le gratifie, sa figure conserve la même serenite, le même calme, le même contentement; comme costume il porte la cravate blanche, l’habit à queue de morue graisseux et râpe, et un pantalon de drap noir dont on aperçoit la trame. Il se distingue surtout par la structure de ses pieds. A force de monter et de descendre l’escalier, les ligaments du talon se sont relâches, la courbure en a disparu, et la plante du pied est complètement devenue plate : c’est ce qui fait qu’il marche en se dandinant à la façon des palmipèdes. Pourtant, pour rendre justice au Waiter on doit reconnaître qu’il est incontestablement superieur à ses collègues etrangers, lorsqu’il fait son service dans les grill rooms, les bars et les chop-house^ de la Cite. Là, il est dans son element. 11 porte le même costume que les maîtres d’hôtel du West Ënd, seulement la cravate et le plastron sont d’un blanc douteux, et l’habit et le pantalon plus graisseux et plus râpes.

Il ne porte jamais de tablier, et c’est ce qui explique l’aspect luisant de son habit, et les taches innombrables dont son gilet et son pantalon sont emailles. ‘

Dans les restaurants de premier ordre, un garçon habile doit avoir une certaine erudition culinaire. Il doit connaître non seulement le nom et la nature des plats qu’il est charge de placer sur la table; mais encore il doit être initie aux mystères de la cave. En un mot, un garçon qui connaît son metier doit être à la fois degustateur et gourmet. Ces qualites ne sont pas requises pour un maître de grill room; car ici le menu ne varie pas, et il suffit que le garçon sache faire la diff’erence entre un

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multon chop, un rognon et un beefsteack pour satisfaire et le public et le patron.

La principale etude du waiter consiste à chercher et bien connaître ses clients, qui sont pour la plupart des habitues. Il sait que celui-ci desire sa viande saignante et cet autre au contraire Taime bien cuite, il epie la cuisson derrière le chef, et veille à ce que chacun soit satisfait et soit servi selon son goût. Aussi, est-ce avec un sentiment d’orgueilleuse fatuite qu’il place Tassielte fumante devant le client, qui le remercie d’un coup d’oeil et d’un sourire, en attendant le pourboire de rigueur.

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LES RESTAURANTS DU PAUVRE A LONDRES

Londres est peut-èlre la ville du inonde où la loi des contrastes se fait le plus sentir. Plus que partout ailleurs, le vice y coudoie la verlu, et le luxe la misère. C’est ainsi que dans les quartiers aristocratiques, près des vastes squares, dessplendides avenues et des rues spacieuses, on voit aboutir des ruelles etroites et immondes. A proximite des maisons seigneuriales, on trouve des masures sordides. Ici, la richesse et l’elegance; là, la pauvrete et les haillons. Et non loin des somptueux hôtels et des cabarets à la mode, le modeste restaurant non moins typique, du desherite de la fortune.

Ces etablissements, ce sont les restaurants du pauvre. II y en a de plusieurs sortes : les uns sont en plein vent; les autres sont en boutique. L’installation des premiers est peu coùteuse. Elle consiste en une charrette à bras sans ridelles, sur laquelle trois ou quatre recipients en zinc laissent echapper à travers leurs couvercles une vapeur suspecte, qui choque un peu le sens olfactif des delicats; mais qui allèche et seduit les affames qui, pour un penny, se passent la fantaisie de manger à leur choix un tronçon d’anguille etuvee, une portion de tripes, ou une tranche de porc sale.

Pour un autre penny, on a droit à une ou deux pommes de terre bouillies, de sorte que, pour la petite somme de vingt centimes, on peut faire un repas qui, s’il n’est pas luxueux, est du moins substantiel.

Ces etablissements ambulants s’installent ordinairement à proximite d’une fontaine publique, de sorte que le client peut se desalterera discretion, et à peu de frais. Inutile d’ajouter qu’on ne met à la disposition du consommateur, ni tables, ni sièges, et que les fourchettes et les couteaux brillent par leur absence. Une ecuelle de terre est le seul ustensile confie aux clients.

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Les autres restaurants de bas etage se divisent en deux categories les « fish shops » et les « sausage houses » .

Dans les fish shops, on ne mange que du poisson frit et des pommes de terre egalement frites. Aux heures des repas, les boutiques sont litteralement assiegees par la populace, que quatre ou cinq c fritteurs ont peine à servir. j

Le poisson qu’on debite ainsi, quoique de qualite inferieure, a l’avantage d*ètre excessivement frais. Decoupe en morceaux egaux, il est farine, frit, et distribue en sortant de la friture aux nombreux clients, qui l’emportent ou le mangent sur place, assis sur des bancs ranges dans la boutique.

Il existe dans Shafsbury Avenue, un des quartiers les plus populeux de Londres, un etablissement de ce genre, agence et exploite par un piemontais du nom de Moneco, qui fait annuellement pour plus de trente mille francs d’affaires.

Dans les « sausage houses 9, on mange debout, devant un comptoir crasseux et reluisant de graisse, des saucisses problematiques et des tranches de bœuf à mine suspecte, qu’on decore du nom pompeux de beefsteaks aux oignons.

On peut voir dans la montre de ces restaurants de larges plats carres en fonte, dans lesquels mijotent continuellement des saucisses et des oignons nageant dans la graisse. Pour quatre pence, on a droit à deux saucisses et à une enorme platee de puree de pommes de terre.

Quant au liquide^ ces etablissements n’ont pas le droit d’en debiter, il faut que le client, pour etancher sa soif, aille à la fontaine voisine ou au public house du coin.

LE JOUR DE NOËL EN ANGLETERRE

lï est un jour de l’annee où la cuisine anglaise deploie toutes ses bannières, et se montre essentiellement nationale. Ce jour, si impatiemment desire par les gros mangeurs comme par les petits, c’est le jour de Noël. Pour ceux-ci comme pour ceux-là, cet anniversaire n’est memorable, que parce qu’il evoque pour eux des hecatombes de dindes, d’oies et de gibier de toutes espèces, des massacres de bœufs gras, de porcs et de moutons; ils entrevoient des guirlandes de boudins, de saucisses et de cervelas, des montagnes de plum puddings et des fournees de mince pm.

Un spectacle, unique dans le monde entier, est celui que presentent les boutiques et les etaux de bouchers et [de marchands de volaille, l’avant-veille de Noël. Chacun cherche à eclipser son concurrent par la quantite et la qualite de la marchandise exposee aux regards avides et curieux de la foule, qui se presse et encombre les rues comme un soir d’illuminations, et qui vient admirer les innombrables victimes immolees sur l’autel de la goinfrerie. Des hourras enthousiastes saluent les boutiques les mieux garnies de victuailles et les plus somptueusement ornees. Il n’est pas rare de voir chez certains bouchers du west end, une douzaine de bœufs entiers accroches symetriquement autour de la boutique, et escortes de cinquante à soixante moutons. Chez les marchands de volailles, le spectacle n’est pas moins curieux. Le plafond de la boutique semble tapisse de plumes, tellement est entasse le gibier qu’on y a suspendu. – A l’etalage, trois ou quatre cents oies et dindes, toutes plumees, resplendissantes de graisse et de blancheur, excitent la convoitise des affames et charment les regards des gourmands. Puis des poulets, des lièvres, des lapins en profusion, tapissent la devanture de la maison depuis le deuxième etage jusqu’à la base. Le tout entremêle de fleurs, de rubans et de branches de houx dont les

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feuilles vertes et les fruits rouges forment un cadre charmant à ce seduisant tableau.

Noël arrive enfin. Personne en Angleterre ne doit jeûner ce jour-là; chacun est tenu de faire bombance, selon ses moyens, bien entendu. Les philanthropes et les âmes charitables se cotisent, pour oiïrir le repas de Noël aux desherites de la fortune et aux miserables interessants. On alloue même, m’a-t-on dit, une legère amelioration à la pitance des condamnes dans certaines prisons.

Chez le petit bourgeois, comme chez le lord richissime, on se reunit en famille et, sur chaque table, le même menu regit le repas. Un roastbeef, une dinde ou une oie figurent generalement comme pièce de resistance, qu’accompagnent un jambon, des saucisses et du gibier; puis l’inevitable plum-pudding et les fameux mince pies^ dont j’ai donne la recelte au chapitre X.

Dans les grandes familles, tous les employes et serviteurs sont convies à prendre ^place au banquet du jour de Noël. Le personnel, outre les familiers de la maison, comprend les jardiniers, gens d’ecurie,’ gardes-chasse, etc., et forme un total de cent à cent cinquante personnes. – La quantite de victuailles et de liquides absorbes dans ces agapes pantagrueliques, oh le punch et la bière coulent à profusion, est quelque chose de monstrueux; aussi, lorsqu’à minuit le majordome commande la retraite, tous les festoyeurs quittent le château en titubant, et bon nombre d’entre eux, incapables de regagner leurs demeures sont retrouves le matin parsemes dans le parc, où ils ont passe le reste de la nuit à la belle etoile.

LES TOASTS ET LEUR ORIGINE

Les Grecs et les Romains professaient, pour l’art de boire, un enthousiasme sans limites, et dans leurs agapes qui degeneraient en orgies, on se portait des defis jusqu’à ce que l’ivresse bestiale vînt mettre un terme à ce tournoi bachique. C’est de cette epoque que date la coutume de porter des santes. On buvait à la religion, àTamitie, à la patrie, aux dieux deTOlympe, aux hommes celèbres, et aux evenements glorieux. Quand on portait la sante d’une maîtresse, il etait de bon goût de vider autant de coupes qu’il y avait de lettres en son nom. Plus tard, les premiers chretiens burent à la sainte divinite, puis aux saints du Paradis. C’est ce qu’on appelait boire aux anges. Cette coutume ^onna naissance à tant d’ivrognerie dans l’armee, que Charlemagne, pour y mettre un frein, defendit à ses soldats de boire à la sante les uns des autres. C’est surtout en Perse que l’usage du vin etait en honneur, et d’après* Aristote, les Scythes elisaient pour chef celui qui buvait le mieux. On raconte que Darius P”” avait ordonne en mourant qu’on gravât ces mots sur sa tombe : « J’ai su, et j’ai pu bien boire ». En Pologne, plus d’un roi electif a dû sa couronne au courage qu’il montra en tenant tête aux Palatins qui etaient d’intrepides buveurs. De là le dicton « ivre comme un Polonais ».

Il est une chose digne de remarque, c’est que les habitants des pays qui produisent les meilleurs vins sont en general d’une sobriete exemplaire; temoins les Espagnols, les Italiens et tous les Orientaux.

Aujourd’hui, nous buvons avec plus de moderation et de discernement que les anciens; mais malgre la propagande de l’armee du Salut et»des societes de temperance, jamais on n’arrivera à introduire dans un pays civilise, l’habitude de trinquer avec de la limonade, ou à se porter des a toasts ^ avec de Teau claire.

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Le mot (.( loast » employe communement a ete emprunte aux Anglais qui ont une manière particulière de porter une sante : Après avoir vide leurs verres, tous les assistants entonnent en chœur le traditionnel couplet, qui se chante sur un air ressemblant à s’y meprendre à celui de Malborough :

He is a joli y good fellow (ter) And so say ail of us *.

Après quoi, la compagnie se lève comme un seul homme, et, le verre en main, pousse à trois reprises differentes un formidable hip ! hip ! hip ! Hurrah t…

Autrefois, il etait de bon ton chez nos voisins de continuer les libations, lorsque les dames avaient quitte la table, jusqu’à ce que Tivresse s’en suive. On requerait alors Taido des laquais pour transporter les buveurs endormis, dans leurs chambres respectives. Cette coutume s’est modifiee depuis quelques annees, et si certains gentilshommes se grisent encore, ils le font d’une manière plus digne et plus circonspecte, et savent conserver assez de raison pour eviter de se montrer ridicules, aux yeux de leurs valets. D’après certains philosophes, le degre de civilisation d’un peuple serait proportionnel à la quantite et à la qualite du vin qu’il consomme. Pour refuter leurs arguments, il suffit de regarder l’Angleterre et l’Allemagne, où l’on ne boit que de la bière, et qui, cependant, ne sont pas plus en retard comme nations civilisatrices, que les pays essentiellement vinicoles. La decadence et l’affaiblissement d*un peuple sont cause» par l’abus des boissons, quelle que soit leur nature; et l’homme qui se grise avec du vin n’est pas plus interessant que celui qui se grise de bière ou d’alcool.

1. C’est un parfait bon vivant,

Nous sommes tous d’accord pour le proclamer.

upart des restaurants de Paris, et surloul les maisons de second ordre, ont adopte la coutume, pour allecher le passant en que te d’un dejeuner ou d’un dîner, d’afficher à leur porte ou sur les carreaux de leur etablissement, un menu en tête duquel figureiitun ou plusieurs plats du jour, recommandes comme ayant ete prepares d’une façon speciale» Cette tactique ne manque jamais son effet, et il est bien rare que te client ne se fasse pas servir le plat designe.

Le plat du jour rappelle le truc de prestidigitation qu’on nomme fa aivle (ovak. On connaît ce tour qui consiste à faire choisir à une personne de la societe une carte dans un jeu etale en forme d’eventaîL Celui qui presente le jeu a eu soin prealablement de placer une carte connue, de façon à ce qu elle depasse un peu l’alignement des autres. Or, il arrive, presque toujours, que c’est sur cette carte que se portera le choix de celui ou de celle à qui le jeu est presente.

Le plat du jour consiste souvent en un mets populaire apprecie des gens qui se contentent d’un seul plat pour leur repas. Ici ce sera un bœuf à la mode ou un haricot de mouton;

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là, figurera, en evidence sur le menu, un macaroni au gratin un civet de lièvre ou une sole au vin blanc.

Quelques etablissements des boulevards ont imagine d’afûcher, comme plats du jour, des mets etrangers, pour tenter la curiosite des gourmets non inities à ces preparations exotiques. C’est ainsi qu’ils annoncent, chaque jour de la semaine, un ragoût different, tel qu’un cassoulet, une bouillabaisse, une brandade de morue, un curry à Tludienne, un potage tortue, etc. Cette innovation a beaucoup de succès auprès des etrangers qui ont la nostalgie de la cuisine du pays natal, et aux yeux des Parisiens, qui, pour la plupart, ne connaissent ces mets delicieux que par les recils des voyageurs.

Chaque pâtissier à la mode, chaque confiseur en renom, chaque restaurant bien cote, a un plat du jour qui ne varie jamais. C’est une specialite de la maison; et ce mets unique et consacre par la vogue a fait souvent la fortune du proprietaire de l’etablissement. Je citerai pour memoire :

Les filets de soles de Marguery; les pommes de terre Maire; l’entrecôte Bonnefoi; les pieds de mouton d’une maison des Halles; latimbaleBontou;lestripes àlamodede CaendeJouanne; les pâtes de Lesage; la croustade de foie gras de Charvin; les babas de Sthorer; le homard à l’americaine de Peters; le moka de la maison Quillet; le cussy de chez Bourbonneux; le SaintHonore de Chiboust; les timbales de crevettes de chez Boot; les bûches de Noël d’Ozanne; la choucroute des brasseries, la soupe à l’oignon des tavernes, etc.

Si, des grands boulevards, nous dirigeons nos pas vers les quartiers excentriques, nous trouvons encore, dans les guinguettes de barrières, le plat du jour immemorial qui ne varie jamais non plus. C’est la mysterieuse gibelotte, d’où s’echappe un parfum d’ail, d’echalote et de vin suret, si cher aux gourmets populaires; ragoût suspect dans lequel le consommateur cherche avec angoisse à decouvrir la tête revelatrice, qui doit le renseigner sur la nature du gibier qui le compose.

Les restaurants des bords de la Seine et des rives de la Marne ont egalement leurs plats du jour : C’est l’appetis

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sante friture de goujons et la traditionnelle matelote d’anguille, que les canotiers parisiens, les pecheurs à la ligne et les touristes, viennent savourer en chœur les dimanches et fêtes.

La renommee de cette matelote des restaurants riverains est, il faut le dire, amplement justifiee; car, outre qu’elle est generalement preparee par des mains habiles et experimentees, Tanguille pêchee du jour et de la veille est conservee dans Teau courante, et n’a pas le temps de pâtir et de deperir comme celles que Ton conserve dans les viviers d’eau dormante. Elle est vivace et saine lorsqu’on la tue, et fremissante encore lorsqu’on la plonge dans lamirepoix bouillante.

L’entrecôte Bercy, avec son beurre aux echalotes et ses pommes de terre soufflees, est le plat du jour de l’entrepôt et de la halle aux vins.

Les escargots sont la specialite des marchands de vins, où on les voit constamment exposes tout farcis et prêts à mettre au four. C’est le plat du jour de l’ouvrier qui peut se payer le luxe d’un supplement. Quant à l’ouvrier pauvre, son plat du jour consiste en une miche degrospain, sur lequel il etend une couche de fromage ou de charcuterie de seconde categorie.

Le marchand de marrons, de son côte, est la providence du troLtiu qui va faire sa course, et de l’ecolier sortant de la classe. « Marrons chauds et bons », voilà leur plat du jour.

Celui du miserable, c’est cette platee de victuailles innommables qui se debite dans un coin des halles, et si bien definie par le nom d’ « arlequin » que lui a decerne quelque gouailleur I)hilosophe en haillons, à cause de la diversite des mets qui le composent. Et, puisque nous sommes aux halles, n’oublions pas la soupe des malheureux qui se debite, tous les matins, autour du grand caravanserail de l’alimentation. N’oublions pas surtout le lard frit, la saucisse et l’andouillette, qui rissolent dans de grands poêles sous des auvents, dans les petites rues adjacentes des halles. Ce sont les plats du jour des marchandes, des porteurs, des forts, des gardeuses, etc.

Toutes les fêtes carillonnees ont aussi leurs plats du jour. Ainsi le premier de l’an, ce sont les dragees, les fondants et les

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marrons glaces. Le jour de TÉpiphanie, c*est le legendaire gâteau des rois, avec la fève de rigueur cachee dans les plis de sa pâte feuilletee. Le mardi gras, ce sont les crêpes et les beignets souffles; et, le vendredi saint, le plat du jour n’est-il pas la morue salee ? tandis qu’à Pâques, ce sont les œufs rouges de legendaire memoire. Noël arrive à son tour, accompagne de son cortège de dindes truiïees et d’oies aux marrons, mais precede de la nuit dû Reveillon, que notre confrère et ami Achille Ozanne a si spirituellement decrit dans son livre de poesies gourmandes.

Cette nuit’là, c’est le Cher Ange de Monselel qui est le plat au jour. ‘

Pour fêler les grands saints du Paradis, n’a-t-on pas adopte, comme plat du jour, Tantique nougat d*amandes orne de son pompon en sucre file, et le classique biscuit de Savoie, surmonte de Teternel petit amour en pastillage emergeant du seia d*une rose en papier de soie. Et dans les repas de noce, n’est-il pas d’usage de servir invariablement un potage à la bisque; et la pièce du milieu n’est-elle pas toujours une double corne d’abondance d’où s’echappent deux avalanches de fruits glaces, de bonbons et de petits fours? Le choix de ce motif de pièce montee semble bizarre et fait la joie des loustics de la noce qui trouvent un sujet de plaisanterie de mauvais goût dans l’accouplement de ces deux cornes; tandis qu’en realite on ne doit voir, dans ces attributs de Cerès, qu’une allegorie à l’adresse des heros de la fête, et que cette profusion de gâteaux, de fleurs et de fruits, symbolise les bonheurs et les felicites sans nombre, qui doivent embellir et charmer l’existence des deux epoux.

Mais quel est ce bruyant clic-clac qui se fait entendre du côte du jardin public, et pourquoi ces bebes quittent-ils subitement leurs jeux pour courir à la rencontre d’une bonne femme chargee d’une boite en forme de tambour, et que surmonte un cadran sur lequel se meut une aiguille mobile?

C’est que c’est l’heure du goûter des enfants, et que le clicclac qui accompagne le refrain connu de la marchande d’oublies; Voilà le plaisir^ mesdames, voilà le plaisir! annonce aux joyeux bebes l’arrivee de leur plat du jour.

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LA CUISLNE ANGLAISE

L’enfant qui vient de nattre, ainsi que le vieillard qui touche à la fin de sa carrière, ont aussi leur plat du jour. Pour ce dernier, ce sont les panades, les purees, les cervelles, les œufs, enfin, tous les aliments d’assimilation facile et de[maslication peu

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laborieuse. Quant au nouveau-ne, c’est le lait maternel qui est son plat du jour, nourriture sublime et mysterieuse, qu’un pourvoyeur celeste a preparee, et que la nature, selon ses lois impenetrables, a prescrit comme l’aliment divin qui reunit les qualites nutritives necessaires à l’existence de l’enfant, à qui ce regime unique convient et profite, et que nul autre aliment ne saurait remplacer.

LE COUVRE-CHBF

La denomination de « toque», qu’il eût ete plus logique d’appeler couvre-chef, s’applique à la coiiïure du cuisinier.

Non seulement il existe plusieurs espèces de toques, mais la manière de s’en coiffer varie à Tinfini, selon le caprice, la fantaisie ou les aptitudes de celui qui la porte.

Dans toutes les cuisines de l’Europe, le costume du chef est partout le même : c’est la veste blanche traditionnelle. Seule, la coiffure subit des transformations.

L’Anglais s’affuble du bonnet ecossais, fortement empese comme toute sa personne.

L’Espagnol se coiffe du beret de laine blanche ou de coutil, qui tend à devenir la mode à Paris depuis l’invasion des toreadors. La forme en est gracieuse et, comme le Scotch cap, ne manque pas d’elegance.

Je n’en dirai pas autant de Tespèce de bonnet de police dont se parent les cuisiniers allemands, et qui, malgre le gland dont il est orne, est laid et incommode.

La toque, la plus eu usage eu France, se compose d’une bande de toile ou de coutil , qui s’adapte au contour de la tète, et de laquelle emerge une calotte de même etoffe, plissee sur les bords. La nature malleable de l’etoffe la rend susceptible d’une foule de transformations plus ou moins gracieuses, plus ou moins excen. triques.

On peut generalement juger du caractère d’un chef par la manière dont il se coiffe. Celuici, par exemple, qui se plaît à porter la toque legèrement ballonnee et penchee en arrière, en coup de vent, est presque toujours un homme autoritaire, violent et emporte. Celui-là qui la pose crânement, inclinee sur le coin de l’oreille, en flambard, est un peu poseur.

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LA CUISINE ANGLAISE

C’est Je loustic du fourneau, et Ton reconnaît à son accent qu’il est originaire des rives de la Garonne.

Cet autre^ qui la met neglig^noment et simplement aplatie sur le sommet, denote un insouciant ou un philosophe, tandis qu’il est notoire que la toque, placee eu avant et rabattue sur les yeux, ahrite le crâne d’un penseur, à moins que ce ne soit celui d’un paresseux, d’un sournois ou d’un boudeur.

Latoquedite « tourËiffel », allongee perpendi. culairemenl, est la coiffure favorite des gens de petite taille, qui cherchent à se grandir aux yeux de leurs subalternes. Cette coiffure a un aspect vulgaire et fait songer à la legendaire casquette à trois plates-formes. Il n’y manque que la visière. La loque de l’apprenti a son cachet particulier : fripee et rendue molasse au contact de la manne que Tenfant a porte sur sa tête, on devine qu’elle n’a pas passe par les mains de la blanchisseuse, et qu’elle a ete simplement lavee par l’apprenti econome sous la pompe de la cour, et secliee à la bouche du four, au mepris de l’amidon et du fer à repasser.

La loque a subi, à diverses epoques, les caprices de la mode. Sous Louis-Philippe, elle etait d’une grande ampleur. Fortement empesee et tendue au moyen d’une baleine circulaire introduite dans la doublure, elle produisait Tellet d’un nimbe tel que les peintres en mettent autour de la tète des saints. Sous le second empire, le bonnet grec orne d’un gland etait en vogue. Les gens chauves le portaient en velours ou en drap; les chevelus, en toile ou en filet.

N’oublions pas, pour completer celte etude, de mentionner l’antique casque à mèche, qui /. ^^^^/ etait l’unique coiffure adoptee par nos anciens. Ce n’est que depuis 1840 que la toque,

LA CUISINE ANGLAISE 431

telle qu’on la porle aujourd’hui, a remplace le classique bonnet de coton. Ce bonnet, aussi ridicule qu’incommode, ne se rencontre plus que sur la tête de quelques vieux cuisiniers d’hôtel de province.

Le bonnet de colon se portait aussi de dilferentes manières, et je me souviens qu’etant apprenti, nons savions pronostiquer avec certilude des dispositions d’esprit de notre chef, d’après la façon dont il se coiffait; et selon qu’il avait essuye des reproches ou reçu des eloges; ou bien quand il avait un peu trop pactise avec Bacchus, il mettait son bonnet en avant, en arrière ou de côte, le rabattait sur les yeux ou l’enfonçait sur ses oreilles. Dans ce dernier cas, on n’avait qu’à bien se tenir, car il y avait de l’orage dans l’air.

Pour des raisons d’hygiène et de confort, plus encore que pour satisfaire aux exigences de la mode, on a tout à fait abandonne le bonnet de coton, et tel cuisinier qui s’en affublerait aujourd’hui paraîtrait ridicule et s’exposerait à la risee de tout le monde, et particulièrement de ses confrères.

Cependant, je ne puis m’empêcher de penser que cette coiffure, qui nous semble grotesque, a ete portee par Carême, Laguipièro et tant d’autres celebrites culinaires, dont nous honorons la memoire. Aussi, rien qu’à ce titre, nous devons, sinon admirer, du moins venerer le bonnet de coton.







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